Le dossier CHLOROQUINE (Tenl#91)

Enregistré le 24 juin 2020.
Invités : Damien BARRAUD (FakeMed) & Hervé SEITZ (CNRS)

Editorial

 « La plupart du temps les informations sont de meilleure qualité sur Youtube que sur les médias traditionnels. » Déclaration de Didier Raoult, le 16 mai 2020.

Bienvenue sur YouTube ! Sur notre chaîne dédiée à l’esprit critique, nous essayons depuis 5 ans de prendre du recul vis-à-vis des discours et des croyances, et de mettre en avant les maigres moyens que l’humain peut mobiliser pour essayer de comprendre un peu le monde qui l’entoure. Notre monde est devenu bien compliqué à suivre à cause d’un coronavirus jadis occupé à infecter les chauves-souris, qui a trouvé le moyen de contaminer notre espèce avant de se répandre et de semer assez de chaos pour nous murer des mois durant.

Dans ce contexte explosif de menace sanitaire, de tension sociale, de résistance à l’autorité, d’impréparation du pouvoir, de maltraitance chronique des services hospitaliers, d’incertitudes scientifiques, les angoisses se sont accrochées aux promesses les plus réconfortantes. Celui qui a promis le mieux, le premier, le plus fort, avec le plus d’aplomb, c’est Didier Raoult avec la chloroquine, puis l’hydroxychloroquine, puis l’hydroxychloroquine associée à l’azithromycine.

Et d’emblée se sont cristallisées des postures hargneuses entre ceux que d’aucuns appelaient les pro- tandis qu’eux-mêmes qualifiaient les autres d’anti-. Nous avons assisté au top départ d’un marathon effréné de l’étripage, de la baston et du grabuge. Dans la fureur de l’esclandre personne ne s’écoute, on se radicalise, on se range dans un camps, souvent pour ne pas se sentir seul, abandonné en rase campagne par un troupeau querelleur galopant au vent des rumeurs comme si prendre soin de regarder où l’on met les pieds était une tocade de gentillet romantique, une simagrée d’intello au corps de lâche.

Dans un tel climat, on a vu des gens complètement ignares (ce qui n’est pas une tare) défendre mordicus leur compréhension de la situation dans le plus beau florilège d’amphigouris sophistiques qu’on ait jamais vu hors campagne présidentielle. Tout y est passé.

L’analogie douteuse qui consiste à nous dire que nous sommes en guerre, et qu’à la guerre, il faut agir comme Foch plutôt que comme Pétain. L’appel à la popularité est revenu plusieurs fois. Par exemple, citation : « Vous voulez faire un sondage entre Véran et moi pour voir qui ils croient ? Vous voulez voir ce que c’est que la crédibilité ? Faites les sondages, moi je les ai ! » (source). Ou encore à travers des pétitions censées démontrer la plus grande pertinence d’un traitement médical par rapport aux autres.

Il y a eu un double standard omniprésent où chaque camps a exigé beaucoup plus d’arguments de la part des gens d’en face qu’eux-mêmes n’en avaient pour justifier leur position. Nous avons lu et entendu des ad hominem et des ad personam toutes les 2 minutes de la part de quasiment tout le monde. Un certain nombre se déversent actuellement dans le chat, la section commentaire en est remplie. CQFD, merci aux participants.

Et puis il y a eu ce faux dilemme insultant qui consiste à dire : c’est la chloroquine ou rien. C’est le remède que moi je veux, sans quoi je vous accuse de laisser crever mon beau-frère.

Cette longue séquence d’empoignade démesurée restera comme un triste exemple de ce qu’on fait de pire en termes de débat public et d’information scientifique de la population. En ce qui nous concerne, nous avons appelé à la prudence, à la mesure, et aux doute face à des déclarations qui faisaient frétiller nos détecteurs de billevesées. Nous avons nous-mêmes fait confiance à des études plutôt qu’à d’autres, et en une occasion au moins nous avons eu bien tort (nous reviendrons sur l’étude de Merha et al. publiée dans The Lancet puis rétractée). Notre posture sceptique a été un avantage dans cette crise, elle nous a permis de rester ouverts aux informations de bonne qualité qui plaidaient dans un sens comme dans l’autre. Cette posture toutefois n’oblige pas à renoncer à toute opinion. Nous ne prétendons donc pas être neutres. Personne ne l’est. Didier Raoult n’est pas neutre, ça se voit, et on fait avec.

Nos deux invités ne sont pas neutres, mais l’avis qu’ils vont partager avec nous sera argumenté, contextualisé, sourcé, et exprimé avec une honnêteté à laquelle nous sommes censés veiller. Nous allons réouvrir le dossier Chloroquine pour comprendre comment nous en sommes arrivés là, faire le point sur l’état des connaissances et des doutes et nous demander comment nous allons bien pouvoir faire à l’avenir pour reconnaître une information scientifique fiable.  Le challenge est de belle taille.

Nous recevons Damien Barraud et Hervé Seitz.

3 réponses
  1. Goepepper
    Goepepper dit :

    Bonjour Acermendax et toute l’équipe de LTeB,

    Vous êtes peu à peu montés dans mon estime sur Youtube, au point de faire partie de mes 3 chaines Youtube préférées.

    Simplement merci pour cette vidéo ; j’essaye de l’utiliser actuellement pour faire évoluer la position d’un ami qui est complètement pro Raoult, ca ne marche pas très bien malheureusement (biais en tout genre).

    Malgré le solide argumentaire que vous fournissez ici (et dans vos précédentes vidéos), je me heurte à l’écueil de « bouh fakemed = fake news », et aussi l’apparente suffisance d’Acermendax (désolé pour cela, apparemment ca revient chez quelques personnes à qui je présente vos vidéos). C’est plutot bien, ca me force à consulter les sources, donc merci encore, à lui comme à vous!

    Tout mes encouragements pour la suite, ainsi qu’à Christophe Michel d’Hygiène Mentale, vous nous manquez!

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    • Romain
      Romain dit :

      c’est vrai que l’attitude de Thomas peut apparaître comme hautaine, ce qui peut desservir son intention d’informer. Mais en même temps, quand on n’aime pas le propos de quelqu’un, on trouve toujours un moyen de le trouver agressif:
      * dans un cas, il est hautain ou dédaigneux
      * mais s’il fait un effort dans l’autre sens, on le dira timide et en manque de confiance, ce qui fera dire à certains qu’il ne croit pas ce qu’il dit…
      * s’il prend un air sérieux, on dira de lui qu’il nous prend pour des idiots
      * s’il prend l’air décontracté, voire familier, certains diront quoi? Qu’il est négligent?
      * etc.
      Par conséquent, soit il joue à un subtil équilibre de tout, dans une vaine tentative de ne froisser personne (parce que, de toute façon, il froissera beaucoup de monde, non par son air, mais par son propos qui déplaira à certains), soit il reste naturel. Dans un cas, il peut se concentrer sur son écoute de l’autre, la pertinence de ses arguments, et préparer sa future intervention, et dans l’autre cas, il doit se concentrer sur le paraître… Dans la même situation, mon choix serait vite fait.

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  2. Ydrox
    Ydrox dit :

    Vous pourriez au moins vérifier la base de ce qu’on vous raconte.

    Désolé mais ça fait pas très sérieux même si ça en à l’air.

    Ici on peut télécharger une étude chinoise du 15 mai 2020… 550 patients !!!

    Donc du coup le reste c’est aussi des mensonges ? bah c’est du propre

    Moi qui croyait gagner du temps en passant par là…

    https://link.springer.com/article/10.1007/s11427-020-1732-2?fbclid=IwAR1etx5xLeq8nTd2IC7jAjjhMOKaj3wOaMCK9ohCrjHrrzQSiYAUiUgxZDA#change-history

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