Le cerveau des adolescents (Tronche en Live 85)

Invité : Grégoire BORST, professeur de psychologie du développement et de neurosciences cognitives de l’éducation à l’université Paris Descartes

Enregistré au Muséum Aquarium de Nancy le 12 février 2020

Editorial

L’humain arrive novice à chaque âge de sa vie (on doit cet aphorisme à Chamfort). En effet, personne ne nous apprend à être un enfant, un ado ou un adulte. Et on sait bien que le temps fait plus de vieillards que de sages.

L’adolescence ne nous laisse pas que de bons souvenirs. Transformations physiques et acné, premiers émois, chagrins d’amour, heure des choix professionnels, émancipation, questionnement sur l’identité… Le suicide est la deuxième cause de mortalité chez les jeunes de 15 à 25 ans.

Par conséquent beaucoup d’humains passent des années modérément exquises, et une fois adultes ils osent parfois trouver intelligent de se moquer de ceux qui traversent les mêmes épreuves en les appelant boutonneux, puceaux, en les traitant comme des enfants, en leur accolant tous les stéréotypes que la société produit avec délectation sur leur état passager, mais quand même un peu durable, d’adolescent. Et cela parce que l’âge bête est hélas la destination finale de bien des adultes.

Mais tout de même, on voit bien que les adolescents ont le chic pour les comportements excessifs, déraisonnables, qu’ils se rebiffent soudainement contre l’autorité tout en se conformant en silence à des codes sociaux très autoritaires : vêtements ou accessoire de marque, musique à la mode et j’en passe. En plus ils nous donnent l’impression de prendre leurs ainés pour des bouffons, de croire qu’ils ont inventé l’eau chaude ou le binge drinking (en français on appelle ça une beuverie !

Il y a comme une fracture entre les générations, et peut-être est-ce en raison de phénomènes que nous ne comprenons pas encore. Pouvons-nous caresser l’espoir de mieux comprendre ce qui se passe à ce stade de la vie pour éviter de répéter en boucle les mêmes erreurs, les mêmes incriminations ? Souvenez-vous de ce propos souvent prêté de manière abusive à Socrate :

« Notre jeunesse aime le luxe ; elle est mal élevée ; elle se moque de l’autorité et n’a aucune espèce de respect pour les anciens… Ils ne se lèvent pas quand un vieillard entre dans la pièce. Ils répondent à leurs parents et bavardent au lieu de travailler. »

C’est toujours à ceux qui sont en situation de pouvoir qu’on doit demander les premiers efforts. Être adulte ce n’est pas rose tous les jours, mais on s’y habitue. Et c’est peut-être une clef du problème. Avant de s’y habituer, on a maintes occasions de trouver insupportable la manière dont la vie nous traite, la manière dont la société cache les problèmes sous le tapis, la manière dont nous organisons nos priorités entre notre confort personnel et les conséquences sur la planète, le climat, les enfants qui travaillent dans des usines à l’autre bout du monde. La sensibilité ardente des jeunes à ces questions d’injustice a quelque chose d’irritant mais c’est peut-être leur forme de sagesse. Ils hériteront des conséquences de nos choix et de nos erreurs comme nous avons hérité du monde mal foutu que nos aînés ont, bon an mal an, réussi à nous transmettre. Cela fait une bonne raison de les écouter et de se demander si ce n’est pas le cerveau des adultes qui n’est pas à la hauteur des enjeux.

Nous serons bientôt plus éclairés sur ces questions grâce à Grégoire BORST, professeur de psychologie du développement et de neurosciences cognitives de l’éducation à l’université Paris Descartes.

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