La zététique consiste à questionner les raisons pour lesquelles nous pensons que quelque chose est vrai.

Le doute raisonnable.

En bons sceptiques que nous sommes, nous ne tenons rien pour vrai de manière absolue, et tout ce que nous pensons connaître doit constamment être accessible au questionnement et au test. Quand arrive un documentaire qui entend chambouler ce qui est connu de l’histoire de l’humanité, ou à tout le moins qui veut mettre à mal l’égyptologie dite ‘officielle’, il convient donc de ne pas décider d’emblée qu’il s’agit de divagations infondées. Seulement, les divagations, ça existe, et il ne faut donc pas faire semblant d’être sceptique si c’est pour vouer un culte à une thèse au simple prétexte qu’elle est minoritaire, donc subversive, donc dérangeante, donc vraie. Un peu de méthode.

La Révélation des Pyramides est la face visible du travail de Jacques Grimault et surtout de ses prédécesseurs, et compte tenu de son succès populaire, il faut lui accorder assez d’attention pour déterminer s’il s’agit d’un travail sérieux, appuyé sur des données fiables, au travers d’une méthode transparente, rigoureuse et scientifique qui atteste de la vraisemblance de ses conclusions. Ce travail d’analyse peut aussi aboutir au constat qu’il s’agit d’élucubrations séduisantes sans guère de cohérence et d’originalité. Il faut rester ouvert à ces possibilités. Et pour cela, il faut réaliser une analyse de ce travail, ou, au minimum, consulter les analyses faites par d’autres.

Après cela, vous pourrez sereinement visionner notre interview de Jacques Grimault, le théoricien derrière ce film.

Quelques ressources.

Pour bien vous documenter au sujet du documentaire La Révélation des Pyramides, nous vous proposons les lectures suivantes :

  • Un court article qui présente la pyramidologie sur Charlatan.info.
  • Le Blog d’Irna regorge d’analyses très fouillées sur les thèses du documentaire, sur ses sources et références (ou leur absence), sur le pyramidion ou les multiples pseudonymes derrière lesquels l’internaute Grimault défend le théoricien Grimault.
  • Le blog du prof de maths, Chez Web, un temps encensé par Grimault himself… jusqu’à ce que ses analyses mettent en évidence que le théoricien était au minimum dans l’erreur, voire dans la manipulation. Vous y trouverez des réflexions méthodiques sur la géométrie de la pyramide, où il montre qu’on peut proposer des hypothèses simples pour expliquer la présence de Pi et Phi dans la pyramide et surtout son dernier article où Web démontre que toutes les coïncidences de Pi, Phi et compagnie dans la pyramide sont un recyclage et un maquillage de trois malheureuses approximations. En d’autres termes : de la poudre aux yeux. Web a d’ailleurs publié une conclusion en dressant une liste synthétique de ce qui cloche chez nos pyramidologues.
  • Le Blog desillusions.fr  a également amorcé une analyse critique du documentaire, à ce jour inachevée, mais qui vaut le détour.
  • La page de « Gollum » fait une brillante démonstration sur la manière dont vous pouvez trouver n‘importe quelle nombre dans la grande pyramide.

Dans une veine plus sarcastique, où l’humour est employé pour souligner les incohérences du propos, vous pouvez également consulter :

Sous le format vidéo, vous trouverez une critique de la forme prise par le documentaire, proche de la manipulation chez Mr Sam et son émission Fake ?, ainsi qu’un équarrissage en règle chez Le Nettoyeur de Mythes auquel Pooyard et Grimault ont répondu avec une vidéo interminable et hallucinante de puérilité. En audio, le podcast Scepticisme Scientifique a reçu Eric Lowen (association Alderan) pour évoquer « La Révélation de la Foutaise » après quoi J. Grimault a réclamé un débat puis s’est débrouillé pour qu’il n’ait pas lieu.

Les anglophones pourront apprécier cette publication du Smithsonian, le grand musée de Washington, qui règle son compte à l’idée d’un code caché dans les pyramides ou encore cette vidéo « The Pyramids – AA Debunked  » qui démonte complètement l’usine à gaz qu’est la série de faux documentaires « Ancient Alien », laquelle brasse les mêmes concepts de LRDP, mais d’une manière un peu plus franche et frontale.

Ceux qui veulent des démonstrations sur le terrain en réponse aux thèses pseudo-archéologiques, trouveront ici la preuve qu’un homme seul, un peu ingénieux peut déplacer des blocs de plusieurs tonnes avec des outils en bois, ou comment couper du granit avec une lame de cuivre et du sable.  Pour en discuter, vous avez à votre disposition l’excellent Forum des Sceptiques du Québec et le non moins excellent Forum de l’Observatoire Zététique.

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Ressources favorables aux thèses de LRDP

— Mathieu Laveau « Le message des pyramides« .

Extraits

Vous pouvez aussi vous faire une opinion avec des extraits de conférence de jacques Grimault agrémentés d’un minimum de commentaires :

Grimault & la Lune

Mais aussi :

  • Grimault & Mars :
  • Grimault & la linguistique :
  • Grimault & la biologie :
  • Grimault en scientifique de combat :

 

skeptical dog

Neutralité ?

Vous aurez sans doute noté l’absence de source défendant la thèse du documentaire, ce qui est peut-être regrettable, ou bien révélateur du fait qu’aucun article valable n’a été écrit dans cette optique. Vous pouvez proposer les vôtres.

Nous avons publié la réponse de J Grimault à notre article, vous n’y trouverez malheureusement pas grand chose en terme de faits et de méthode.

Si vous voulez proposer d’autres ressources utiles pour se faire un avis éclairé sur ces histoires, n’hésitez pas à les poster en commentaire.

La numérologie est un ensemble de croyances et de pratiques fondées sur l’attribution de propriétés aux nombres. Liée à la gématrie, à l’arithmancie, et à la kabbale, elle appartient à la constellation des pseudosciences de l’hermétisme dont se réclame Jacques Grimault, qui l’appelle la « Science des Anciens ».  La manière d’accorder un sens à des dimensions géométriques dans les pyramides, l’idée d’un message crypté dans un édifice relève de cette nébuleuse de croyances qui n’est ni nouvelle ni millénaire, mais a fleuri en Europe vers le 16ème siècle (bien loin du temps des Pyramides).

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◊ La thèse du mètre caché.

Résumons la thèse pyramidologique de Funck Hellet (reprise par Grimault) : les bâtisseurs des pyramides connaissent le mètre moderne, et ils l’ont caché dans la Pyramide.

La thèse est pour le moins audacieuse, elle suppose que les bâtisseurs aient brillamment réussi à passer sous le radar des scientifiques et des historiens, exactement comme si, en fait, ils n’avaient jamais existé. Cette thèse permet donc d’interpréter toute absence de preuve comme une preuve en soi. D’un point de vue naïf, on veut bien accepter la conjecture à condition qu’elle apporte des éléments solides. Par exemple, on pourrait admettre comme début de preuve la présence dans la pyramide de nombreuses dimensions en mètre. Est-ce le cas ?

Réponse : Non.

Mais admettons malgré tout un instant qu’existèrent ces Anciens Bâtisseurs qui connaissaient le mètre des milliers d’années avant qu’il soit défini comme la dix-millionième partie du quart du  méridien de Paris (et qu’ils aient anticipé on ne sait comment l’erreur de 0,22 mm qui va avec la mesure par Delambre et Méchain !). Admettons qu’ils aient caché cette grandeur étalon dans la Grande Pyramide. Ne doit-on pas s’étonner dès lors que cet édifice ait pour mensurations 146,608 m de hauteur et 230,384 m de largeur selon le pyramidologue Jacques Grimault qui semble croire que donner trois chiffres après la virgule rend sa mesure plus précise, quand en réalité cela démontre qu’elle n’a pas été pensée en mètres. Ces décimales n’ont pour seul but que de lui permettre de justifier que la coudée égyptienne mesurerait exactement 0,5236 m. Je répète, cette valeur de la coudée n’est justifiée que par la « précision » de la mesure de la pyramide qui est elle-même calculée à partir de la valeur présumée de la coudée (puisque personne n’a mesuré la pyramide à un dixième de millimètre près).

Grâce à un raisonnement aussi circulaire, on n’a pas à s’étonner que le théoricien trouve Pi partout où il le souhaite.

Une fois posée cette pétition de principe auto-justifiée, Grimault nous invite à nous extasier devant la grande proximité entre 0,5236 et  Pi/6 (=0,523599…). Cependant, arrêtons-nous juste un instant pour donner la parole à un mathématicien avec lequel nous avons évoqué cette affaire :

« Quand j’entends qu’une coudée vaut 0,5236 m, je ne me dis pas que c’est très précis, je me dis que ça tombe pas juste. »

Car la proximité évoquée ci-dessus n’est pas une égalité. Et c’est bien là ce que le théoricien tente de nous faire oublier. Il n’existe pas dans la pyramide de dimension significative : arête, hauteur, coté, largeur ou longueur des couloirs, hauteur des murs, largeur des chambres, du sarcophage, épaisseur des pierres, etc. qui tombe sur une valeur métrique (1 m pile ; 1,50 m, 2 m par exemple). On a toujours de petites ou de grosses poussières derrière la virgule. Les bâtisseurs secrets de Grimault font constamment dans l’à-peu-près, dans le brouillon (alternative : ils n’existent pas, auquel cas aucun reproche n’est à leur faire).

Si tant de théories pseudo-archéologiques ont la Pyramide de Khéops pour point de départ, c’est avec le présupposé qu’elle contient dans ses proportions même la clef d’un mystère. Peut-on y lire la connaissance du mètre actuel, y trouver Pi, Phi et d’autres constantes mathématiques ? Apparemment oui (et tout un tas d’autres choses si on n’a pas peur des approximations). Mais cela en fait-il une pyramide spéciale ?

Numérologie-et-destin

◊ Une pyramide remarquable ?

Sur son blog, Jim Loy réalise une expérience pour voir s’il peut retrouver des nombres particuliers dans une pyramide quelconque. Il dresse un tableau avec 29 exemples rangés selon le rapport hauteur/largeur, par incrément arbitraire de 0,025 entre 0,300 et 0,975 (Khéops est à 0.636). Pour chaque pyramide ainsi définie, on réalise des opérations simples entre 4 dimensions : la hauteur de la pyramide, le coté de la base carrée (=largeur), son arête et son apothème (droite entre l’apex et le centre du côté de la base).

On voit dans le tableau ci-dessous que toutes les pyramides permettent de faire apparaître des nombres spéciaux, et ce avec une « précision » de 0,01 ou moins. En particulier 13 pyramides « contiennent » Pi, 10 contiennent Phi, 3 contiennent e (le nombre à la base des logarithmes =2.71828…), la constante d’euler (relation entre les logarithmes et la série harmonique 0,57722…) se retrouve dans 2 pyramides. Enfin, 4 des pyramides, dont Khéops, font apparaître 2 de ces nombres.

Rapport hauteur / largeurCoïncidences
0.300apothème/largeur = Constante d’Euler
0.325hauteur/largeur = 1/pi
0.350apothème/largeur = 1/phi
0.375apothème/largeur = 1/phi
0.400hauteur/largeur = phi/4 ; diagonale de la base/hauteur = pi/11
0.425hauteur/diagonale de la base = 1/Racine de 11 [Très précis]
0.450diagonale de la base/hauteur = pi
0.475diagonale de la base/hauteur = pi [très précis]
0.500apothème/hauteur = Racine de 2 [exacte]
0.525hauteur/largeur = pi/6
0.550apothème/hauteur = e/2
0.575hauteur/diagonale de la base = phi/4
0.600hauteur/diagonale de la base = phi/4 ; apothème/base = pi/4
0.625hauteur/largeur = 1/phi
Kheops (0.636)largeur/hauteur = pi/2 ; apothème/largeur = phi/2
0.650apothème/hauteur = Racine de phi
0.675Arête/largeur = pi/2
0.700Arête /largeur = pi/2
0.725apothème/largeur = 8/9*
0.750apothème/largeur = e/3
0.775Arête /largeur = phi
0.800Arête/largeur = phi ; apothème/hauteur = Racine de Pi
0.825hauteur/diagonale de la base = Constante d’Euler
0.850Arête/largeur = Racine de e
0.875Arête/hauteur = phi
0.900diagonale de la base/hauteur = pi/2
0.925apothème/largeur = pi/3
0.950largeur/hauteur = pi/3
0.975apothème/hauteur = Racine de phi

NB : 8/9 est considéré comme un nombre spécial, car on a des raisons de penser que les Égyptiens réalisaient l’estimation de la surface d’un cercle en utilisant un carré dont le coté est égal à 8/9 de son diamètre (cela permet d’obtenir une valeur de Pi de 3,16049…)

Qu’en conclure ?

Que ce n’est pas un exploit de trouver tous ces chiffres dans n’importe quelle pyramide. Il suffit de mouliner suffisamment de mensurations dans suffisamment de petites opérations. Calculez, calculez, il en sortira toujours quelque chose !

 numero

◊ Les distances entre les sites (équateur penché).

Selon La Révélation des Pyramides, les plus grands sites archéologiques de la planète sont alignés et les distances qui les séparent font apparaître des relations  en lien avec le nombre d’or…
L’internaute ontologiae a réalisé une belle démonstration sur le forum de La Révélation des Pyramides en posant la question : les occurrences de Pi, Phi et autres nombres considérés comme particuliers sont-elles plus nombreuses dans les relations des distances entre les sites de l’équateur penché 30° que dans un échantillon de sites pris au hasard à la surface de la Terre ?

Il pose alpha=distance(a,b)/distance(c,d). Selon Grimault, ce nombre alpha est souvent égal (ou proche) de Pi, Phi, Phi² etc. La thèse repose intégralement sur l’idée que cela arrive trop souvent pour être dû au hasard. Encore faut-il le tester, ce que ne fait pas le film. Ontologiae va le faire en réalisant une expérience avec un échantillon de 1800 sites répartis au hasard sur Terre.

« Soit N un nombre Phi, π, e ou un de ces multiples, je cherche (N – N*0,005) < alpha < (N + N*0,005). En moyenne, j’observe que les nombres basés sur Phi, π et e et leurs multiples constituent 1,49% de la totalité des rapports de distance possibles sur l’ensemble des échantillons « hasard ».  »

Avec les sites de l’équateur penché, le calcul donne 1,52%, c’est-à-dire un nombre qui n’est pas significativement différent de que donnerait le hasard.

Et de conclure : « Donc pour moi, cette affirmation de LRDP ne prouve rien, vu que statistiquement, en prenant n’importe quel point sur Terre, on trouvera forcément certains rapports de distance égaux à Phi. »

Pour vérifier ou refaire des calculs de ce genre, vous pouvez utiliser le code qui est ici avec la base PostgreSQL, et l’extension PostGis.

Une image étant souvent plus édifiante, voici ci-dessous 137 points disposés au hasard, parmi lesquels on a tracé des alignements de 4 points… On a pu en faire 80 ! Imaginer le nombre d’alignements potentiels entre les milliers de sites archéologiques à la surface du globe !

400px-Ley_lines.svg

Tiré de l’article Wikipédia « Ley Line »

◊ Enumération n’est pas démonstration.

Gare à l’intimidation par les maths ! Dans la grande pyramide, admettons qu’il y ait une valeur remarquable, la pente de 14/11, proche de racine de Phi. C’est remarquable ce ratio, mais on peut lui trouver une cause historique simple et cohérente en regardant chronologiquement la pente des pyramides qui se succèdent en Egypte, c’est ce que montre ce billet du blog Chez Web. En raison de la pente des pyramides qui l’ont précédée et du système d’unité de l’époque, ce ratio 14/11 ne sort pas de nulle part, et il n’a pas besoin d’être expliqué par sa proximité (et non égalité) avec le nombre d’or.

Les autres nombres relevés par les pyramidologues sont des conséquences purement mathématiques de cette pente de 14/11. Une fois donnée la pente, il suffit d’ajouter UNE dimension : la hauteur ou le coté de la base ou bien l’arête, et toutes les autres valeurs sont immédiatement fixées. Cela veut dire que les bâtisseurs, aussi sages et puissants qu’ils furent, ne pouvaient pas choisir plus d’une relation particulière (parce que c’est comme ça les maths). Autour de cette relation s’installe automatiquement tout un cortège d’autres relations, particulières ou non, à partir desquelles un numérologue zélé parviendra toujours à isoler un chiffre auquel donner une interprétation en adéquation avec une idée préconçue. La preuve, nous pouvons choisir de conclure avec l’éminent astronome royal écossais Piazzi Smyth qui dit que ce n’est pas le mètre qui est caché dans l’édifice, mais le pouce anglo-saxon (Smyth détestait le système métrique). Quand une méthode donne deux résultats différents et incompatibles, c’est qu’il y a comme un souci.

Sur la difficulté de juger ce qui est banal ou ne l’est pas, consultez cet excellent article de Eljj, qui vous montre qu’un triangle quelconque, ce n’est pas si courant que ça, et partant… que ce n’est pas si quelconque au sens usuel du terme.

gematrie-tablehtml

◊ Illusion statistique & apophénie.

Si des discours se construisent autour de trames narratives aussi intrigantes et mystérieuses, c’est – paradoxalement peut-être – à cause du besoin de cohérence, de sens, de causalité qui anime l’esprit humain. Notre cerveau déteste le hasard, ce traître dans lequel se cachent parfois des phénomènes complexes, élusifs, que  nous ne savons pas voir, mais que nous ne voulons pas louper. Le truc c’est que le hasard existe. Mais surtout, certaines propriétés du monde réel impliquent qu’un ensemble de facteurs X va entrainer des conséquences sans que nous percevions le lien qui existe entre eux. Ce déterminisme caché peut faire apparaître d’étranges coïncidences, comme expliqué dans ce billet. Et nous devons faire attention à notre propension à voir du signal là où il n’y a que du bruit. Quand nous voyons un visage dans les nuages ou sur un toast, quand nous entendons un message secret dans une chanson passée à l’envers, quand nous sommes frappés par la synchronicité d’événements indépendants, nous sommes dans le domaine de l’apophénie, un phénomène fascinant sur lequel j’ai écrit cet article sur le blog Cygnification.

La numérologie appliquée aux pyramides et aux sites archéologiques, pour prétendre produire des connaissances, doit d’abord faire la démonstration que les « faits » qu’elle manipule ne sont pas complètement explicables par ce phénomène d’apophénie, tellement simple, courant, banal, qu’il demeure la meilleure explication jusqu’à preuve du contraire.

La charge de la preuve revient aux pyramidologues, et ils le savent… Et pourtant Jacques Grimault persiste à demander à ce que les autres fassent le travail (voir l’interview qu’il nous a donnée).

Jacques Grimault a exercé un droit de réponse à cet article. Trouvez ses commentaires ainsi que nos réponses à certains d’entre eux sur cette page.

***

« La Révélation des Pyramides »

Le film La Révélation des Pyramides est l’opus principal de l’oeuvre de Jacques Grimault et Patrice Pooyard. La thèse de Grimault serait rédigée dans le livre qui porte le même nom que le film mais que personne qui ne soit pas dans l’entourage de son auteur ne semble avoir jamais eu entre les mains. Il est difficile de critiquer le contenu d’une thèse qui ne se présente publiquement qu’au travers d’un documentaire qui ne serait qu’une « introduction ». On peut néanmoins en avoir des aperçus dans d’autres vidéos disponibles sur Internet, notamment des conférences.

L’origine de ces découvertes

Quand Jacques Grimault présente « ses découvertes », à l’en croire, il est le premier à déchiffrer ce que les anciens bâtisseurs ont codé dans les sites archéologiques. Mais doit-on prendre cela pour argent comptant ? En fouillant un peu l’histoire, on se rend compte que le scénario défendu par JG est le résultat des conjectures et pseudo-théories de quelques personnages publics au cours des 5 derniers siècles. Ne citons ici que les principaux théoriciens qui ont eu sur les pyramides et l’histoire du monde des idées assez similaires à ce que raconte JG.

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Les théoriciens du passé.

En 1646, John Greaves (1602-1652), qui fut le premier occidental à étudier avec minutie les pyramides de Gizeh, écrivait Pyramidographia, puis « The Origin and Antiquity of Our English Weights and Measures Discover’d By Their Near Agreement with Such Standards that are Now Found in One of the Egyptian Pyramids ». Autrement dit : De l’origine et de l’antiquité de nos poids et mesures anglais découvertes par leur similitude avec des standards équivalents retrouvés dans l’une des pyramides d’Égypte. Ça nous rappelle quelque chose…

Godfrey Higgins (1772-1833) historien et antiquaire anglais. Il estime que les traits communs aux grandes religions et grands mythes du monde doivent avoir pour origine une ancienne civilisation, celle de l’Atlantide. Ses écrits seront exploités par Blavatsky…

Edward King Kingsborough (1795-1837), un écossais, se convainc que les peuples précolombiens sont l’une des tribus perdues d’Israël. L’une de ses preuves est la pratique par ces peuples du sacrifice rituel, similaire à celui d’Isaac par Abraham.

John Taylor (1781–1864), un autre anglais, écrit deux siècles plus tard « La Grande Pyramide ; pourquoi fut-elle bâtie et qui l’a bâtie ? » Dans ce livre de 1859, il explique que la pyramide a été construite par Noé sur les instructions de Dieu. La coudée biblique mesurait précisément 25 pouces, et les britanniques étaient l’une des tribus perdues d’Israël. Si on résume : les Pyramides ont été bâties par les premiers britanniques, qui étaient juifs.

200px-PiazzismythCharles Piazzi Smyth (1819-1900), astronome royal d’Ecosse, prolonge le travail de Taylor. Il établit que le pouce pyramidal vaut 1,001 pouce anglais. Quand, en Egypte, il trouve incrusté dans une pierre le patron d’un maçon et déclare qu’il s’agit de l’étalon divin qu’il recherchait, il estime sa théorie prouvée. Il milite pour la supériorité du système des poids et mesures anglais sur le satané système métrique français (celui-là même qui est au cœur du scénario de Grimault) dans son livre « Notre héritage dans la Grande Pyramide : avec les plus importantes découverte à ce jour » (1874). On estime qu’il a eu un rôle non négligeable dans le rejet du système métrique par les anglo-saxons.

Dans ce livre de 600 pages rempli de calculs à partir des dimensions de la pyramide, il obtient la densité de la Terre, sa population, les détails de son histoire (débutée en -4004) et notamment la date de la fin du monde, qu’il actualisa quatre fois, et un tas d’autres choses qui le rendirent très heureux. Et puis un jour l’un de ses jeunes admirateurs fit le voyage avec du matériel de précision pour confirmer les travaux de Smyth… et mit en évidence bien malgré lui que les chiffres étaient largement faux. Le jeune homme, William Matthew Flinders Petrie, resta sur place et devint l’un des fondateurs de l’égyptologie scientifique.

Jean-Frédéric Maximilien de Waldeck

Jean-Frédéric Maximilien de Waldeck (1766-1875), est un antiquaire français qui voyait des éléphants dans les hiéroglyphes mayas, et pour qui ces animaux avaient servi à construire les « pyramides » mexicaines — qu’on a longtemps appelée des temples avant d’opter pour le mot pyramides. Détail amusant : Waldeck vendra des pages de codex à Eugène Boban, connu pour avoir participé à la vente des Crânes de Cristal.

 

Charles Etienne Brasseur de Bourbourg (1814-1874), pionnier de l’archéologie précolombienne, réussit la première traduction d’un codex maya, le codex Troano (plus tard assemblé à une seconde partie pour former le Tro-Cortesianus). Malheureusement c’est une traduction totalement erronée, mais elle permet quand même à Brasseur de faire apparaître le nom du continent Mu dans ce codex, ce qui fera l’affaire des quêteurs d’Atlantide. Dans les références de ses ouvrages, on retrouve John Taylor.

• Charles Etienne Brasseur de Bourbourg

Charles Etienne Brasseur de Bourbourg

Augustus Le Plongeon

Augustus Le Plongeon

Augustus Le Plongeon (1825-1908) Photographe et antiquaire britannique, il critiqua beaucoup les « archéologues de bureau » qui estimaient la civilisation Maya plus récente que la civilisation Egyptienne. Le Plongeon n’est pas de cet avis, car pour lui le Yucatan est le berceau de la civilisation humaine, et la Franc-Maçonnerie trouve ses origines dans la culture maya ancienne, par l’intermédiaire de l’Atlantide. Il réalise lui aussi une traduction du codex Troano, jugée très imaginative, où il trouve une description de la destruction de l’Atlantide. Ses travaux vont inspirer Ignatius Donnelly.

William Henry Black (1808–1872), donne une conférence en 1870 où il suppose qu’entre « les monuments existe un marquage fait de lignes géométriques qui couvrent l’ensemble de l’Europe occidentale ».

Ignatius L. Donnelly (1831-1901) est un homme politique américain versé dans les pseudosciences. En 1882 il publie « Le monde antédiluvien » qui inaugure toute une littérature sur l’idée que le déluge coïncide avec la destruction de l’Atlantide, et le mayanisme qui fait le lien entre le continent perdu et les civilisations précolombiennes qui seraient à la source de la civilisation égyptienne (l’erreur chronologique est dramatique, mais à l’époque on s’en offusquait peu en dehors des cercles scientifiques). Parmi ses sources, on retrouve Brasseur de Bourbourg et Le Plongeon. Il publie un autre livre qui explique que le déluge fut causé par une comète frôlant la Terre.

Ignatius L. Donnelly

Ignatius L. Donnelly

220px-Blavatsky.010Héléna Blavatsky (1831-1891) est une occultiste d’origine russe et aristocratique. Parmi ses nombreuses déclarations sur le cosmos, elle annonce que du continent perdu de Lémurie ne subsiste actuellement que l’Australie et l’Ile de Rapa Nui (île de Pâques) — qui ne sont pas sur la même plaque tectonique, mais enfin bon—, les Lémures étaient purs esprits, mais plus tard sont arrivés les Atlantes, dont certains avaient des pouvoirs psychiques tandis que d’autres étaient des géants (qui ont bâti Stonehenge). En couchant avec des animaux, ils ont donné naissance aux chimpanzés et aux gorilles. Après la perte de l’Atlantide sont arrivés les Aryens. Idolâtrée par certains, Blavatsky est à l’origine d’une religion New Age, la théosophie. Toutes les critiques des sceptiques sur ses impostures et nombreux plagiats étaient balayées par ses admirateurs à l’aide d’une formule toute faite « toute atteinte à sa réputation est un signe de grâce, les stigmates que portent tous les grands martyrs. »

Rudolf Steiner (1861-1925) est un écrivain et philosophe allemand. Il est théosophe avant de s’écarter de cette mouvance ésotérique pour inventer la sienne : l’anthroposophie qui parle de réincarnation et de karma. En 1904 il publie une histoire du cosmos qui mentionne les continents perdus de Lémurie et Atlantide[1].

 

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Rudolf Steiner

 

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Alfred Watkins

Alfred Watkins (1855-1935) est un photographe, inventeur et essayiste britannique. Dans son livre Early British Trackways de 1922, il théorise le phénomène d’alignement de sites, qu’il nomme des Ley lines sans aucune connotation ésotérique, énergétique ou magique.

En 1923, l’abbé Théophile Moreux (1867-1954), directeur de l’observatoire de Bourges, publie « La science mystérieuse des Pharaons » où il note, entre autres choses, que le méridien passant par la grande pyramide sépare les terres émergées de la planète en deux surfaces égales, faisant de Gizeh le « point central » de la Terre. Cela n’a pas beaucoup de sens, comme expliqué ici. Il tire cette idée des écrits de Piazzi Smyth.

James Churchward

James Churchward

James Churchward (1851-1936) est un occultiste britannique qui a écrit sur le continent Mu au sujet duquel il s’entretient avec Augustus Le Plongeon dans les années 1890. Il estime prouver son existence dans un livre publié en 1926. Si on le croit, il a acquis cette connaissance en voyageant en Inde où il a appris une langue morte parlée par seulement trois personnes. Il eut ainsi accès à des tablettes écrites dans cette langue et gardées secrètes. Dans ses ouvrages, il décrit l’histoire de Mu, le véritable berceau de l’humanité où se trouvait le jardin d’Eden, et ses soixante-quatre millions d’habitants, les Naacals (« les exaltés » un nom qui vient directement de… Le Plongeon). Cette civilisation vécut 50.000 ans avant de s’éteindre.

En 1936, l’occultiste Dion Fortune publie The Goat-Foot God, roman dans lequel les ley lines d’Alfred Watkins deviennent des lignes de force reliant des sites préhistoriques.

 

Arthur Posnansky

Arthur Posnansky

Arthur Posnansky (1873-1946) Ingénieur, explorateur, directeur de musée et archéologue amateur. Il a longuement étudié en Bolivie et a conclu que Tiwanaku est le berceau des civilisations américaines, et qu’elle fut construite il y a plus de 12.000 ans. L’argument principal est astro-archéologique : l’orientation des portes et piliers est alignée avec la position des équinoxes qui se produisaient à cette période, ce qui n’est valable qu’à la condition de penser que c’était bien là leur rôle (argument circulaire)… sans compter que les ruines de Tiwanaku ont été ravagées par les espagnols, on ignore si des pierres se trouvent encore à leur emplacement original. On voit que ces idées ne reposent pas sur rien, mais que ces arguments laissent une vaste place à l’interprétation et au biais de confirmation. Ces conclusions n’ont jamais été soutenues par la communauté scientifique.

Edgar Cayce (1877-1945) est un mystique américain qui pouvait entrer en transe et disait avoir accès aux annales akashiques. Il a révélé grâce à cette science infuse que l’Atlantide a existé pendant quarante mille ans avant d’être détruite, et que ce sont les descendants des Atlantes qui ont construit les pyramides de Gizeh et d’Amérique. Il a prédit de profonds changements sur Terre suite à l’inversion des pôles magnétiques censée survenir dans les années 1930, puis 1960 ou 1990… Dans une vie antérieure il fut un prêtre égyptien, de là peut-être tirait-il la certitude que les Atlantes avaient caché des enregistrements dans une salle secrète sous le Sphinx de Gizeh.

Edgar Cayce

Edgar Cayce

Immanuel Velikovsky

Immanuel Velikovsky

Immanuel Velikovsky (1895-1979) est un pseudo-historien et psychanalyste russe. Il défend l’idée que le passé de la Terre est rempli de catastrophes astronomiques. Vénus aurait émergé de Jupiter sous forme de comète (oui, comme dans la mythologie) et son passage près de la Terre aurait fait basculer son axe de rotation 1450 ans avant notre ère, causant l’ouverture de la mer rouge. Un peu plus tard la planète a retrouvé son axe, mais Mars a également fait des siennes ensuite. Par de semblables phénomènes Velikovsky pense ainsi pouvoir expliquer le déluge, la Tour de Babel, Sodome et Gomorrhe, etc. Devant les démentis formels des modèles astronomiques à ce scénario, Velikovsky a inventé l’idée que des forces électromagnétiques pouvaient affecter les orbites planétaires.

Charles Funck Hellet, médecin, dans son livre « La Bible et la grande pyramide », paru en 1956 soutient l’idée que la coudée royale vaut 0,5236 m. Dès lors le mètre serait égal au diamètre d’un cercle de circonférence 6 coudées avec une erreur relative inférieure à 2,5.10– 6… à condition que la coudée ait bien cette valeur, ce qui est une hypothèse non prouvée. Il est le premier à relier ainsi Pi, la coudée et le mètre, dès un article de 1952[2].

René Schwaller de Lubicz (1887-1961) Chimiste français, également métaphysicien, hermétiste et alchimiste, il publie en 1957 « Le Temple de l’Homme » où il démontre avec des calculs faisant intervenir le nombre d’or que la culture égyptienne antique est fondée sur une géométrie sacrée.

Charles Hapgood[3] (1904 – 1982) universitaire américain, il enseigne l’histoire. Il est un grand défenseur de la théorie du changement des pôles. En 1955 il publie un ouvrage préfacé par Albert Einstein (!) « The Earth’s Shifting Crust » où il dit que la croûte terrestre a glissé à de nombreuses reprises sur le magma au cours de l’histoire, une hypothèse qui n’a guère de défenseurs dans le monde académique et qui n’est plus du tout cohérente avec les connaissances en géologie. Partisan de l’authenticité de la carte de Piri Reis, il estime qu’une partie de l’Antarctique était libre des glaces il y a 9600 ans à cause d’un basculement de 15° des pôles, thèse qui sera reprise par Graham Hancock.

Charles Hapgood

Charles Hapgood

1960 : Sortie du « Matin des Magiciens« , de Pauwels et Bergier, livre qui repose sur l’idée qu’il existe des connaissances gardées secrètes, probablement héritées d’anciennes civilisations extraterrestres. L’ouvrage dénonce le « scientisme » et défend l’occultisme et l’alchimie, et l’idée que l’humain est amené à développer des facultés psychiques paranormales. Le livre qui évoque notamment les lignes de Nazca mêle allègrement fiction et réalité de l’aveu même des auteurs.

Hugh Auchincloss Brown (1879 1975) est un ingénieur. Dans son livre « Cataclysm of the Earth » (1967) il défend une théorie similaire à celle de Hapgood. Pour lui le basculement des pôles a une régularité de 4000 à 7500 ans. Pour empêcher un basculement qu’il pense imminent (et dangereux), le monsieur propose l’utilisation de l’arme nucléaire pour briser les calottes glaciaires afin d’empêcher que leur poids ne fasse glisser la croûte sur le manteau terrestre…

Hugh Auchincloss Brown

Hugh Auchincloss Brown

Robert Charroux (1909-1978). Journaliste français et aventurier, qui publie en 1963 « Histoire inconnue des hommes depuis cent mille ans « , où il compile des idées préalables et donne corps à la « Théorie des Anciens Astronautes », ou néo-évhémérisme. Au cours de ses voyages sur les sites archéologiques du monde entier, il se convainc qu’il est le premier à déchiffrer une « vérité historique fantastique, cachée à l’humanité par la science officielle ». Il théorise l’existence des Hyperboréens puis des Atlantes, qui seraient leurs descendants.

Charroux soutient l’authenticité des pierres d’Ica et il est volontiers conspirationniste : « L’histoire authentique des civilisations est interdite. Des conjurations puissantes veillent sur la stricte observance d’une version altérée qui seule a le droit d’être exprimée. (…) Notre histoire sociale et religieuse est trafiquée depuis des millénaires… depuis que les Égyptiens, oubliant ou voulant oublier les vérités transmises par leurs ancêtres, s’octroyèrent le titre d’Initiateurs premiers et de premiers hommes de notre planète » (p. 19). » (Le Livre des Maîtres du Monde)

Robert Charroux

Robert Charroux

« Les vrais initiateurs ce sont les anges de la Bible, des extraterrestres en fait, venus s’installer sur terre bien avant le déluge, formant une petite communauté d’Hyperboréens qui allaient donner naissance aux Atlantes et aux habitants de la Terre de Mu. Le déluge (ou la guerre atomique entre Mu et l’Atlantide) devait détruire toutes ces civilisations, ne laissant sur les hauts plateaux qu’un petit nombre de rescapés. C’est il y a cinq mille ans qu’un second groupe d’extraterrestres originaires de Vénus venait civiliser les humains qui, du Pérou au Tibet, avaient tant bien que mal réussi à survivre. »

François Dupuy-Pacherand (1905-1998), urbaniste, entre dans l’association Atlantis en 1958 et publie dans la revue de l’association 54 articles dans lesquels il met en évidence Pi, Phi, Phi² etc. Reprenant les thèses de Funck Hellet, il approfondit les liens entre la coudée et le mètre, et met en évidence, par exemple  la présence de la durée de la précession des équinoxes partout sur le plateau de Gizeh. Les personnes d’Atlantis qui l’ont bien connu affirment que Jacques Grimault s’est inspiré des travaux de François Dupuy-Pacherand et non le contraire comme il l’affirme.

Francis Mazière (1924-1994) ethnologue et archéologue français, spécialiste de l’Amazonie. En 1965 il est l’auteur d’un livre dans la veine du réalisme fantastique du Matin des Magiciens : « Fantastique île de Pâques. »

En 1968, dans l’émission télévisée suisse Cap sur l’aventure, il donne une conférence[4] où il dit que la civilisation de l’ile de Pâques « a certainement été détruite en quelques heures à une certaine époque de la vie terrestre. » Puis il dit que les sept statues sacrées de l’île sont situées sur un point géodésique très précis « où passait autrefois l’équateur magnétique, l’ancien axe de rotation de la terre en réalité. Vous remarquerez que toutes les fusées spatiales (…) ne passent jamais sur l’équateur mais sur l’équateur magnétique. Elles suivent un champ magnétique terrestre extraordinaire (…) Certaines choses importantes sur toute cette ligne du magnétisme terrestre ont été construites dans le monde. Je pensais pas vous le dire, pis c’est parti. »

Francis Mazière

Francis Mazière

Il ne précise pas d’où lui vient cette idée, mais il considère que les dolmens ont été réalisés par la même civilisation, « dix millénaires avant le Christ ». Il dit sans cesse que tout cela est « grave », voire « très très grave » car « On vit dans un monde dans lequel certaines choses ne doivent pas être dites », et il évoque le lien entre les civilisations anciennes et des « hommes qui volent dans l’espace » tout en refusant d’en dire plus. Pour lui « les statues ont été levées en utilisant les courants telluriques qui sont très importants sur l’île de Pâques » et elles regardent vers des points précis du globe : des « haut lieux ». « Quand vous voyez qu’un monument regarde dans la direction disons des Pyramides ou de Lhassa au Tibet ou d’autres endroits très graves comme Stonehenge, il y a quelque chose d’intéressant, voyez. » Et il dit faire des recherches sur la « civilisation mégalithique dans le monde, l’une des premières avant le déluge. »

 

Les contemporains

Joseph Davidovits

Joseph Davidovits

Joseph Davidovits (1935-) chimiste français. Il invente le concept de géopolymères, et il affirme que cette technique a été utilisée pour la construction des pyramides : les blocs de calcaire ne seraient pas taillés, mais… moulés. Hypothèse rejetée par la science. Il est par ailleurs féru d’archéomanie et tente de démontrer que « la Bible avait raison », titre de son ouvrage en deux tomes.

En 1966, les astronomes Carl Sagan et Iosif S. Shklovskii écrivent Intelligent Life in the Universe, où ils évoquent la possibilité d’un paléocontact, entre des extraterrestres et l’espèce humaine. Ils citent notamment la divinité sumérienne Oannes, sortie des eaux pour apprendre aux hommes l’agriculture, les mathématiques, et dont les légendes correspondent à ce qu’on pourrait attendre des répercussions d’un tel contact. Ils concluent néanmoins qu’une telle hypothèse est extrêmement spéculative et que le paléocontact est au mieux improbable. On estime parfois que cet ouvrage a été la source d’inspiration de von Däniken pour son livre de 1968.

Erich von Däniken (1935 – )[5] gérant en hôtellerie suisse, auteur du best-seller « Le chariot des dieux » en 1968. Il reprend la théorie des Anciens Astronautes et la rend populaire dans le monde entier. Selon lui les divinités de l’histoire humaine sont en fait des êtres extraterrestres qui ont profondément influencé nos ancêtres. Condamné pour fraude, von Däniken passe un an en prison en 1970 où il écrit son deuxième livre (Gods from outer space). Dans son travail exempt de rigueur et enclin aux inventions (visite d’une grotte remplie d’or qu’il a ensuite reconnu n’avoir pas visitée), il est le premier à mettre en avant les lignes de Nazca comme des pistes d’atterrissage.

Erich von Däniken

Erich von Däniken

Au sujet de la pyramide de Khéops, il dit que sa hauteur (146 mètres) est égale à un milliardième de la distance Terre-Soleil (149 597 870 km), une approximation assez grossière qu’il utilise pour dire que cette relation était intentionnelle dans la construction de l’édifice (quel dommage que les bâtisseurs n’aient pas ajouté 3 mètres à la pyramide pour affiner ce résultat…). Il a aussi soutenu l’idée que les pyramides de Gizeh venaient de nulle part, que rien de semblable ne les avait précédées, alors que de nombreuses pyramides plus anciennes sont connues en Egypte. Pour certains sceptiques, la théorie de von Däniken serait fortement inspirée par l’œuvre de Lovecraft[6]. Ses travaux ont donné lieu à la fameuse série « Ancient Aliens », connue pour son mépris total de la rigueur scientifique dans la manière de présenter des scénarios pseudo-historiques.

Guy-Claude Mouny

Guy-Claude Mouny

Guy-Claude Mouny, (1930-2007) colonel de réserve. Sur la fin de sa vie, il devient un écrivain ésotérique et traite de : la géométrie des pyramides de Guizeh, l’existence d’une haute-technologie en Égypte ancienne, le visage et les pyramides de la planète Mars, l’énigme de Rennes-le-Château, les carrés magiques… Son livre « Le grand Secret des pyramides de Guizeh » (1992) propose que les trois pyramides et le Sphinx ne sont pas agencés n’importe comment, mais forment un ensemble géométrique d’une grande sophistication. La Grande Pyramide serait donc la balise des archives de l’Atlantide cachée sous le Sphinx.

L’archéomane Didier Coilhac (qui sait que l’Arche d’Alliance est cachée en France, à Feigneux, c’est officiel depuis 2014, comme ça vous savez) témoigne sur les relations entre Grimault et Mouny, qui se connaissaient : « Je m’inscris cependant en faux contre l’affirmation réductrice de Mr Grimault selon laquelle il aurait « informé » ou « renseigné » Mr Mouny pendant des années. »[7]

Robert Bauval (1948-), ingénieur belge, est l’auteur en 1994 de la théorie selon laquelle l’alignement des trois pyramides de Gizeh reproduirait la ceinture d’Orion (la constellation), pas comme elle se présente actuellement mais telle qu’elle était il y a 10 500 ans. Problème : l’angle des deux plus grandes pyramides avec l’axe nord-sud fait 45°, celui des deux principales étoiles du baudrier est de 54°, la différence est considérable, et on sait que les Égyptiens étaient en mesure d’être beaucoup plus précis que cela s’ils l’avaient voulu. Bauval collabore avec Graham Hancock sur certains ouvrages

Graham Hancock (1950- )[8], journaliste et pseudo-archéologue britannique, grand défenseur de l’idée d’une Culture Mère à l’origine de toutes les civilisations actuelles : les Atlantes. Ses premiers écrits sur le sujet datent de 1992. Il reprend les déclarations des archéomanes qui l’ont précédé, notamment Posnansky. Sa thèse : l’Atlantide se trouve sur l’Antarctique qui était dans une région bien plus chaude il y a 12.000 ans (comme le ‘prouverait’ la carte de Piri Reis). Problème, le continent polaire a accumulé plus de 3 km de glace par endroits, et les glaciologues assurent qu’il se trouve sous les glaces depuis au moins 800.000 ans. Qu’à cela ne tienne, Hancock abandonne l’Antarctique car l’Atlantide est en fait sous l’eau, c’est évident. Et il choisit la structure sous-marine de Yonaguni[9] que les géologues, après une controverse de quelques années, considèrent comme une formation entièrement naturelle. Hancock n’est pas convaincu par ce consensus scientifique, pas plus qu’il ne l’est sur celui concernant l’âge du Sphinx de Gizeh, car pour lui il a plus de 10.000 ans.

Jim Alison, qui collabore régulièrement avec Hancock expose en 2001 la thèse de l’équateur penché avec une liste de 17 sites alignés, que l’on retrouve parmi les 20 sites de LRDP. Il va plus loin car avec chacun de ces sites, il peut construire un second équateur penché avec là encore un alignement de sites ; il s’amuse même à aligner entre eux des sites non présents sur l’équateur 30° comme Luxor et Palenque. Évidemment la chose est statistiquement aisée. Comme sources, il cite quelques ouvrages « Global Sacred Alignments » de Terry Walsh (1993), « When the sky fell » (1995) de Rand Flem-Ath , « The Atlantis blueprint » (2002) de ce dernier et Colin Wilson, et « The Gods, Gemini, and the Great Pyramid » (1998) de Jim Bowles. Autant d’ouvrages qui montrent que la thèse de l’équateur penchée est très largement partagée dans le petit monde de la pseudo-archéologie.

Graham Hancock

Graham Hancock

Robert Bauval

Robert Bauval

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Et puis enfin…

GJ.champagneJacques Grimault (1954-) arrive après tous ces gens qui n’ont jamais réussi à convaincre la communauté scientifique ni à publier des articles de recherche démontrant la validité de leurs scénarios. On observe bien comment le récit de l’Atlantide n’apparaît pas comme une ancienne tradition, mais comme une forgerie qui prend peu à peu forme au 19ème siècle, une légende en construction au fil des œuvres, des discours, des générations : une origine mystérieuse aux pyramides, un alignement de sites, un équateur penché à 30°, le codage du mètre dans la coudée égyptienne, une prophétie de fin du monde…

Grimault commence ses lectures publiques dans les années 1990. En 1998, il prend contact avec Patrice Pooyard pour réaliser LRDP, c’est-à-dire juste après la mort de son maître François Dupuy-Pacherand dont le nom n’est jamais cité dans ses travaux. Aucun de ses ouvrages n’est disponible en librairie. Il vend des livrets et des conférences, y compris dans des « repas ufologiques »**. Il ne semble rien apporter de neuf en termes de méthode, de résultat, ou de scénario. L’essentiel de ce dont il parle se retrouve dans les écrits des personnes listées ci-dessus.

Peut-être l’émission La Tronche en Live du 5 février où il sera l’invité sera-t-elle l’occasion pour lui de nous expliquer quelle partie de sa thèse constitue une réelle découverte de sa part. (Edit : durant l’émission, Jacques Grimault a échoué à répondre à nos questions et a illustré un étonnant manque de méthode et de connaissances).

 

** Edit : La conférence à laquelle nous faisons allusion (Rouen 2015)  n’était en fait pas organisée par l’association « Les Repas Ufologiques » mais par « Freedom UFO ».

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Références

[1] http://www.rsarchive.org/Books/GA011/

[2] C. Funck-Hellet, La Coudée royale égyptienne, essai de métrologie, Revue du Caire, février mars 1952 no 147/148 volume XXVII p. 1/17

[3] https://en.wikipedia.org/wiki/Charles_Hapgood

[4] http://www.rts.ch/archives/tv/jeunesse/cap-sur-l-aventure/5455272-francis-maziere.html

[5] Sa thèse est démontée par : The Nova documentary The Case of the Ancient Astronauts. https://www.youtube.com/watch?v=2DsOjqHm-VY

[6] Jason Colavito (2004). « An investigation into H.P. Lovecraft and the invention of ancient astronauts. As seen in Skeptic magazine »Skeptic(10.4).

[7] http://www.didier-coilhac.com/grimault-meta-tv.html, http://www.didier-coilhac.com/mouny-doc-quatre.html

[8] Sa thèse est réfutée dans le documentaire  » Horizon – Atlantis Reborn Again« : https://www.youtube.com/watch?v=gXe-lv7IYn8

[9] https://fr.wikipedia.org/wiki/Structure_sous-marine_de_Yonaguni

Un minuscule billet inspiré de l’excellent travail de Géraldine Fabre, disponible sur le site zetetique.fr.

Vingt et un grammes ?

Tout le monde ou presque a entendu l’idée que l’âme pèse 21 g. C’est frappant, incongru, et suffisamment répété pour qu’on se dise que ça peut être vrai, d’autant plus quand on apprend que le docteur McDougall l’a prouvé dans une publication scientifique de 1907.

maxresdefaultL’expérience de McDougall

Comment ce scientifique du siècle dernier s’y est-il donc pris ? Il a placé une balance sous le lit de malades sur le point de mourir et a mesure la différence de masse au moment de la mort. On ignore comment il a su déterminer avec précision ce passage de vie à trépas, vu que les travaux les plus récents montrent que mourir est un processus graduel, le corps prend du temps pour mourir, et il peut être réanimé et donc revenir à la vie jusqu’au moment où le processus devient irréversible et où le corps et en particulier le cerveau perd ses facultés…

Mais passons outre cette gigantesque difficulté et admettons que la mesure de la masse du patient a bien pu être réalisée à l’exact moment de la mort même si cela ne veut pas dire grand chose. À partir de là, posons-nous quelques questions :

1 — Combien de sujets McDougall a-t-il pesés ?

6

2— Combien de mesures a-t-il retenues ?

4

3 — Quelles étaient les différences de masse observées ?

21,26 g ; 45,76 g ; 70,87 g et 10,63 g (sachant que dans un cas la masse a été reprise ensuite, et que deux autres ont encore perdu de la masse peu après…)

4 — Pourquoi a-t-il retenu 21 g ?

Mystère !

5 — McDougall a-t-il travaillé sur des animaux pour comparer ?

Oui, il a sacrifié une quinzaine de chiens et mesuré leur variation de masse… Il en a conclu que les chiens n’ont pas d’âme.

6 A-t-on confirmé ces résultats ?

Non. L’expérience n’a jamais été renouvelée depuis cent neuf ans. On a bien fait une étude assez similaire pour voir si on observait un changement de masse lors des voyages astraux (quand l’âme est censée quitter le corps, mais de manière momentanée), mais apparemment on n’a rien trouvé [1].

Pese-de-lme

Moralité ?

À partir d’un échantillonnage de 4 valeurs présentant une variabilité du simple à l’heptuple (c’est-à-dire un échantillonnage « dégueulasse » en jargon scientifique) le Dr McDougall a retenu la valeur de 21g qui n’est même pas proche de la valeur moyenne de 37.13 g. C’est à n’y rien comprendre. Il n’a pas cherché ou pas réussi à confirmer ces résultats plus avant, et il a visiblement peu de considération pour la gent canine. L’âme serait l’apanage de l’être humain.

Preuve est faite que l’on peut faire de la très mauvaise science et passer à la postérité. Merci, Dr McDougall.

balance_justice

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Références

[2] Morris, R. L., S. B. Harary, J. Janis, J. Hartwell, and W. G. Roll. 1978. Studies of communication during out-of-body experiences. Journal of the Society for Psychical Research, 72:1-22.

Cet article invité nous a été proposé par l’une des personnes derrière l’excellent blog La Théière Cosmique suite à une intéressante discussion sur les réseaux sociaux. Les pages de la Menace Théoriste ont vocation à être utilisées par tous les sceptiques qui ont des choses à dire…

Mise au point sur des notions fondamentales pour la compréhension de la valeur des résultats scientifiques publiés. (~1700 mots / 8 minutes)

La vision populaire de la science est souvent fantasmée, et influencée par la place qu’elle occupe dans les produits culturels que nous consommons.


L’anecdote et l’observation ponctuelle n’étant pas des moyens satisfaisants de décrire la réalité, on emploie préférablement, à propos de tout thème, la méthode scientifique. Celles et ceux à qui on demande de l’appliquer sont les scientifiques de tous horizons, dont on attend des travaux nombreux et répondant au nombre croissant de questions que l’on se pose à propos de ce qui nous entoure, de ce que l’on respire et ce que l’on mange, ou encore de ce qu’il se trame sur de lointaines planètes.
Ces chercheurs dédient leur carrière à répondre aux questions qu’on leur soumet ; et à cet effet ils sont rémunérés, car il serait pénible de les voir atteints d’inanition. Mais alors, que peut-on dire de l’indépendance, attribut ô combien sacralisé aujourd’hui, de ces scientifiques, et qu’est-ce que cela implique vis-à-vis de la qualité de leurs productions ?


Qui paie et est-ce grave ?

La recherche scientifique est en partie publique, c’est-à-dire financée par les états. En France, ces financements concernent par exemple le CNRS, l’INSERM mais également de nombreux laboratoires plus modestes et dispersés à travers les universités et le pays entier ; en Europe le public connaît bien le CERN.
Cela dit, il est régulier qu’un intérêt privé finance un organisme de recherche publique pour réaliser des travaux sur un sujet quelconque. La plupart du temps c’est lorsque cet intérêt – entreprise, association ou autre – ne dispose pas des moyens techniques et des connaissances nécessaires à la réalisation de l’étude. Il est même assez courant qu’un chercheur soit directement employé par le département de R&D d’une entreprise afin de mener des recherches pour le compte de ladite entreprise.

Ces collaborations sont-elles la preuve que le chercheur est « soudoyé », « non indépendant » ou « à la solde de l’intérêt privé en question » ? Non, non et non. Et re-non. Je préfère être clair sur ce point.

Vous êtes – pour ceux d’entre vous qui êtes salariés – amenés à toucher un salaire de la part de votre employeur, plus ou moins à chaque fin de mois travaillé. Est-ce qu’en conséquence, vous vous sentez volontairement prêts, ou au contraire obligé, de braver la loi, les règlements, risquer vos diplômes et votre respectabilité / réputation pour les beaux yeux de votre employeur ?
Alors pourquoi diantre un chercheur serait-il différent, par quel insondable sorcellerie deviendrait-il automatiquement la marionnette des gens qui financent ponctuellement ses travaux ?


De même qu’un comptable n’a aucun intérêt à risquer sa place, sa liberté et sa respectabilité en falsifiant les comptes de son entreprise, sur demande de sa hiérarchie ou non, le chercheur a beaucoup à perdre en tentant de publier des travaux volontairement truqués.

Pourtant, des cas d’études falsifiés existent, donc certains essaient bien de tromper le public !

Il a existé, il existe et il existera au moins pendant un temps – je précise, parce que je ne suis pas médium – des chercheurs, extrêmement minoritaires jusqu’à maintenant, qui tenteront de tricher. Parfois parce qu’ils ont été payés pour le faire. On les condamne lorsqu’on a des preuves que c’est le cas.

Une accusation de trucage d’étude – et donc souvent, de mise en danger de la vie d’autrui, de manquement à l’éthique (toujours pour le coup) et de falsification – est une accusation grave ; on aurait pas idée de dénoncer son voisin pour un délit grave sans une quelconque trace de preuve, il doit en être de même avec ces accusations.

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C’est pourquoi on trouve des garde-fous dans l’organisation de la publication scientifique

Afin de parer à d’éventuelles erreurs involontaires, influences non souhaitées ou tricheries pures et simples, les modalités de la publication scientifique imposent plusieurs choses :

a/ annonce des conflits d’intérêt et financements : un conflit d’intérêt en sciences, c’est-à-dire le fait d’avoir un intérêt – financier, de renommée, de relations – dans le domaine précis concerné par les recherches effectuées, n’est pas un problème en soi. On le déclare en début d’article lorsqu’on publie, ainsi les lecteurs le savent, et cela leur permet de se concentrer sur la qualité du travail effectué plutôt que sur les finances de l’auteur. En cas de gros problèmes dans une publication – comme le cas Wakefield chez The Lancet – on est alors en mesure d’évaluer les raisons possibles des erreurs relevées. S’il s’avère que les conflits d’intérêts n’étaient pas déclarés, c’est alors d’autant plus suspicieux, et cela peut décrédibiliser durablement quelqu’un, jusqu’à stopper net sa carrière dans la recherche. Les chercheurs tiennent à ces annonces, et réclament qu’elles soient effectuées convenablement.

b/ relecture et vérification par les pairs de tout le contenu de l’étude, et mise à disposition gratuite des données brutes si demandées : comme déjà un petit peu abordé précédemment, les publications scientifiques sont relues par les spécialistes du domaine, et potentiellement par tous ceux qui le souhaitent, même non spécialistes. Les relecteurs peuvent critiquer librement le travail qu’ils vérifient, et amener à de multiples corrections le cas échéant.
Cette phase de la publication scientifique est primordiale, car elle est la protection principale contre les erreurs tant méthodologiques que mathématiques et statistiques, ou logiques, qu’elles soient volontaires ou non.

c/ Réplication de l’expérience par d’autres équipes afin de reproduire les résultats : il s’agit d’un complément du point précédent ; la réplication de l’étude permet de s’assurer qu’on a raté aucune erreur influençant les résultats obtenus. D’un point de vue purement statistique, c’est également l’occasion de diminuer les risques – déjà faibles si l’étude est bien construite – de faux-positif ou de faux-négatif.

d/ pleins d’autres choses qui ne nous intéressent pas ici.

Avec les trois premiers points, on a en théorie une influence nulle du commanditaire, et même des auteurs de l’étude, sur le résultats de celle-ci. S’ils trichent, on le voit.


Ces sécurités sont assez efficaces et sont constamment employées

Par exemple, personne dans la communauté scientifique n’accuse Gilles-Eric Séralini d’être corrompu et de truquer sciemment ses résultats ; c’est une possibilité, d’autant plus probable que ses erreurs sont rudimentaires, mais on a pas de preuve de sa culpabilité, donc on n’accuse pas.

Il a ses conflits d’intérêts, très bien, il a oublié de les annoncer pour sa dernière étude, moins bien mais c’est corrigé, il a fait plusieurs erreurs repérées et corrigées par le comité de lecture de la revue publiant ses travaux, très bien, il restait des erreurs que les reviewers ont repéré, parfait.

On constate plutôt que les accusations les plus véhémentes sont du fait des anti-sciences notoires ; ces derniers jouent sur la mauvaise représentation qu’a le public de ce qu’est un conflit d’intérêt, pour manipuler l’opinion publique. On a pu le constater par exemple lors de l’épisode du ClimateGate, visant à décrédibiliser les travaux liés au réchauffement climatique et à son origine anthropique.
Un autre cas intéressant est celui de Kevin Folta, dont le traitement médiatique n’est pas des plus pertinents, et qui est un excellent exemple d’attaque infondée sur un scientifique sérieux.

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La confusion entre travaux et personnes est entretenue par les individus qui s’opposent à la science, car il est plus simple d’attaquer ad hominem plutôt que d’invalider des recherches pertinentes formant un corpus cohérent.


Mais ce n’est pas parfait, des biais subsistent

Dans la réalité, des biais existent : principalement le biais de publication, qui consiste à ne pas publier les résultats négatifs, considérés à tort comme « moins utiles » – ou dans un cas extrême, ne pas publier pour cacher le résultat. Je me contenterai ici de citer le très bon billet de l’hôte de ce blog pour davantage d’informations à ce sujet.


Heureusement, la science n’est pas figée et s’adapte

La science évolue constamment, et de plus en plus de mesures sont mises en place pour éviter ce biais : déclaration préalable des études réalisées dans le futur, études d’indépendants, etc. Encore une fois, d’autres que moi en parlent de manière très pertinente, aussi citerai-je le travail du psychologue Bryan Nosek de l’Université de Virginie sur cette question.


Cela dit, tout n’est pas sujet de recherches, si ?

Il est évident que tout ne peut être étudié en même temps. Il est évident qu’une entreprise, dont la survie dépend des bénéfices qu’elle génère, étudie en priorité ce qui peut, à court, moyen ou long terme, lui rapporter de l’argent. Il est donc logique qu’une entreprise n’étudie pas ce qui ne l’intéresse pas.

La recherche publique doit être là pour travailler sur les sujets qui intéressent les chercheurs, qui peuvent être similaires à ceux des entreprises, ou bien tout à fait différents. Maintenant, comme je viens de le dire, on ne peut pas tout traiter en même temps.
A partir de quand peut-on considérer qu’un sujet mériterait d’être traité et ne l’est pas ?

Enfin, je suis passé sur le fait que publique comme privée, la recherche a un budget limité : on ne développe pas toutes les molécules susceptibles d’avoir un même effet positif sur la santé, on choisit les plus prometteuses. Même chose dans les domaines autres que la santé. Et c’est normal ! Personne n’aurait l’idée d’acheter 10 voitures différentes pour son seul usage personnel (sauf collection), on choisit la mieux adaptée à nos critères !

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Bref, pour conclure

Recevoir un financement n’est pas du tout la preuve de quoi que ce soit de répréhensible a priori. D’autant que ce financement peut être perçu ou non en salaire, en financement de recherche, ou en tout à fait autre chose, matériel, conférences, rénovations ou que sais-je. Être en lien avec des industriels, ou des organismes militants / politisés, n’est pas non plus une raison suffisante pour se voir refuser la publication de ses travaux.

En effet, il est dans la nature même de la recherche scientifique de traquer et d’éliminer, tant que possible et à tout instant, les sources de biais et d’erreurs. En autorisant les chercheurs en conflit d’intérêt à publier, on permet à bien plus de travaux d’être menés, en profitant des moyens considérables que peut apporter le secteur privé, ainsi que de l’expérience qu’un spécialiste peut engranger en travaillant de nombreuses années dans un secteur industriel précis ; et ce, tout en gardant à l’oeil les résultats qui pourraient être biaisés volontairement.

Il convient donc de se renseigner en profondeur sur ce dont on parle avant de lancer des accusations graves au sujet de personnes dont on met la carrière et la réputation, donc la vie professionnelle, en jeu.


Pour aller plus loin sur le sujet :
Pour les besoin de l’émission de la Tronche en Live, que vous pouvez visionner ici, notre invité a rédigé un petit dossier sur l’erreur, avec plein de références. C’est avec plaisir que nous le partageons avec vous.

Erreur et Sérendipité

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L’erreur, ça semble rarement cool… On dit pourtant souvent que l’erreur est humaine. Et en étendant quelque peu la définition de ce qu’est une erreur, on pourrait carrément dire que l’erreur est biologique. L’erreur, dans le vivant, c’est la source même de la variation, c’est ce qui permet l’introduction d’un caractère aléatoire lors de la reproduction (les mutations, les erreurs de copie). Si les premiers organismes vivants n’avaient réalisé que des copies totalement fidèles de leur matériel génétique, l’absence de variation de génération en génération n’aurait pu permettre leur évolution. Et il est fort probable que la moindre pression sélective sur ces proto-organismes tous identiques les auraient condamnés à l’extinction. Si vous avez donc envie de dépasser le stigmate de l’erreur, rassurez-vous en vous disant que l’erreur est la source de l’exquise diversité du vivant. Pour résumer, sans erreur, y’aurait pas de vie.

Mais saviez-vous que l’erreur est aussi essentiellement scientifique ? L’erreur est au cœur de la méthode scientifique et est souvent son objet : on cherche à l’identifier, la caractériser, la limiter, etc.

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Brillantes exploitations de l’erreur.

Parfois même, l’erreur peut être au cœur des découvertes scientifiques… Sans parfaitement correspondre à la définition, des découvertes par erreurs peuvent rentrer dans un phénomène plus général qu’on appelle la sérendipité, le fait de découvrir quelque chose qu’on ne cherchait pas directement. J’ai découvert l’origine de ce mot en écoutant une chronique d’Alan Vonlanthen de Podcast Science qui citait les aventures des trois princes de Serendip, un conte persan où les princes y font sans cesse la découverte de choses qu’ils ne cherchaient pas, par une subtile combinaison d’accidents et de sagacité. Le néologisme de sérendipité fut ensuite créé par le comte d’Oxford Horace Walpole en 1754 pour désigner ce moteur très important de découvertes scientifiques. Dans son sens général, cela évoque le fait qu’une observation, à priori aléatoire (le fait que des laitières du XVIIIème siècle, contractant souvent la variole bovine, semblaient immunisées contre la variole humaine) inspire un scientifique, Edward Jenner, pour l’analyser et permettre une découverte majeure (en l’occurrence le premier vaccin, contre la variole, en inoculant des enfants avec du pus des plaies des laitières malades de la variole bovine).

Mais dans cette histoire, il n’y a pas vraiment d’erreur (enfin il y a une grosse erreur d’éthique et de déontologie, mais passons) : c’est plutôt la providence qui est révélée ici, ou la grosse schkoumoune comme on dit dans le métier. La question qui nous intéresse maintenant, c’est s’il existe vraiment des découvertes dont l’origine est une bonne grosse gaffe de derrière les fagots ?

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Monsieur Fleming et sa paillasse mal rangée.

L’exemple le plus connu de conneries qui mène à une découverte, c’est celle d’Alexander Fleming, qui aurait pu finir comme un fort peu célèbre microbiologiste incapable de faire pousser correctement des bactéries dans des boites de Petri. Il avait une réputation de bordélique et, à plusieurs reprises, laissait ses sécrétions contaminer ses boites de cultures bactériennes. C’est comme ça qu’il a découvert, après avoir laissé tomber une larme dans une de ces boites, que les bactéries ne poussait plus là où la larme était tombé. Et bing, il mis en évidence une enzyme capable de bousiller des bactéries. Rebelotte 6 ans plus tard: il part en vacances en laissant sa paillasse en bordel, avec des piles de boites de cultures. En revenant, il découvre qu’un champignon y avait poussé, et encore une fois, il découvre que là où pousse le champignon, les bactéries trépassent: c’est la découverte de la pénicilline, premier antibiotique correspondant aux sécrétions du champignon.

Quelques pages où trouver plus d’info sur la sérendipité :
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Les trois princes de Serendip

Mais finalement les exemples où des erreurs et gaffes flagrantes sont à l’origine de découvertes ne pullulent pas. La question qu’on est en droit de se poser c’est : est-ce que ces exemples sont véritablement rares, ou est-ce qu’ils sont cachés, car leurs auteurs sont honteux d’avoir réalisés ces gaffes ?

Faut dire ce qui est vrai: faire des erreurs constitue toujours un fort stigmate. On sort rarement indemne d’admettre qu’on fait des erreurs, et c’est potentiellement la raison pour laquelle on a tendance à vouloir masquer qu’on en fait. En science, ça peut être un peu curieux puisque le système de la méthodologie scientifique, et notamment son processus de publication de résultats, s’attache à impliquer tous les chercheurs, tantôt du côté de la personne qui produit et présente des potentielles découvertes scientifiques, tantôt du côté de l’expert sollicité pour déterminer si ces potentielles découvertes ont été réalisées selon des protocoles rigoureux et si les résultats obtenus ne constituent pas des erreurs d’interprétations. De ces découvertes, souvent, les scientifiques bâtissent des théories qui, comme nous l’expliquait Mendax, sont des ensembles de concepts capables de rendre compte du fonctionnement du monde. Une fois formulées, ces théories ne sont pas pour autant à l’abri de critiques, bien au contraire. Kathryn Schulz, dans son livre ‘Being Wrong’, nous explique qu’en réalité, non seulement on peut réussir à prouver que certaines théories sont fausses, mais qu’à vrai dire, c’est le sort de la très grande majorité des théories. Et les scientifiques s’accordent à dire que ce type d’évènement, l’effondrement d’une théorie, marque de manière retentissante le succès de la science, et non son échec. Pourquoi? Et bien parce que quand des théories s’effondrent face à de nouvelles découvertes ou des réinterprétations de résultats, cela marque le progrès de nos connaissances générales ; nous nous écartons alors d’une position erronée pour nous rapprocher d’une compréhension véritable de la nature. Certaines anecdotes illustrent le comportement exemplaire de certains scientifiques qui ont pris à cœur cette perspective sur l’erreur. Dans son ‘The God Delusion’ (titre français « Pour en finir avec Dieu »), Richard Dawkins rapporte l’anecdote d’un biologiste d’Oxford ayant pendant 15 ans affirmé qu’une structure cellulaire, l’appareil de Golgi, n’existait pas. A la suite d’une présentation d’un de ses pairs qui venait présenter des résultats convaincants quant à l’existence de cet appareil de Golgi, notre biologiste est venu à sa rencontre pour lui serrer la main, le féliciter, et le remercier en déclarant ‘je vous remercie d’avoir prouvé que j’avais eu tort pendant 15 ans’.

Très personnellement, l’exemple le plus édifiant d’un tel comportement où un scientifique cherche d’abord à prouver que sa découverte est une erreur, avant de considérer qu’elle puisse être vraie, c’est une scène du film Contact adapté d’un livre de Carl Sagan. Ellie, le personnage interprété par Jodie Foster dans le film de Zemeckis, capte un signal d’origine potentiellement extraterrestre. En tant que spectateur, si on n’est pas un peu la tête dans le guidon, on se doute bien que la narration va nous mener à comprendre qu’il s’agit d’un signal extraterrestre. Pourtant le film passe près de 5 minutes à illustrer le comportement sceptique d’Ellie qui, en face de ses collègues, les incitent à prouver qu’elle a tort de penser qu’il s’agit d’un signal extraterrestre: Make me a liar, leur dit-elle.

Ca fait quoi d’avoir tort ?

Bizarrement, il semble qu’on remarque assez rarement l’utilité de l’erreur dans le processus d’apprentissage. Pourtant c’est très souvent le fait de faire des erreurs qui nous permet de corriger, de réviser nos idées et de changer pour le meilleur. Qui plus est, la vérité absolue, si elle existe pour certains aspects de l’univers, est totalement unique. Par contre, comme l’observait Benjamin Franklin, il semble exister une infinité de manières de se tromper, et on peut s’attarder à admirer la diversité de conneries, d’erreurs, d’absurdités dont est capable l’esprit humain, source parfois d’une poésie insoupçonnée. Dans la chanson Don Diego 2000 de Dionysos, on nous conte l’histoire d’un homme doué d’une dyslexie magique qui suture des mots à l’oreille d’une fille aux yeux en pâte d’amande. Pas mal comme gaffes linguistiques, non ?

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L’erreur c’est parfois une question de point de vue (mais pas toujours, et pas sur tous les sujets)

Du coup, y’a deux choses qu’il faudrait souvent garder en tête vis-à-vis de l’erreur. La première, c’est qu’avoir tort, en fait, c’est pas particulièrement désagréable. À vrai dire, comme le fait remarquer Kathryn Schulz, ça ressemble particulièrement à ce qu’on ressent quand on a raison. C’est parce qu’on confond souvent avoir tort avec la réalisation qu’on a tort. Avoir tort, c’est le plus souvent à nos dépens, sans qu’on en ait conscience. Du coup, présentement, sur pas mal de sujets, j’ai tort, vous avez tort et on s’en porte pas plus mal. Ce qui est plus difficile à digérer, c’est quand on s’aperçoit qu’on a tort. Parce que, généralement, on perd la face, et souvent c’est une réalisation catalysée par une personne qui nous démontre qu’on a tort, et qui en prend un malin plaisir.

Ça m’amène à la deuxième chose importante à garder en tête vis-à-vis de l’erreur : si on change d’avis et qu’on réalise que l’erreur est souvent positive, source d’enseignement, alors il faut savoir la tolérer, la gérer quand on s’aperçoit qu’elle est présente chez autrui. Et ça, ça demande des compétences en communication, en empathie, et c’est loin d’être facile.

Po3235148771_disagreement_xlargeur en revenir au premier point, si on sait qu’on est très certainement en train d’avoir tort, alors il faut prendre cette opportunité pour apprendre de ses erreurs : peaufiner les outils pour les détecter et les interpréter. Généralement, ça relève d’une hygiène mentale et d’un scepticisme rigoureux. Pour ça, il faut peaufiner des outils du scepticisme, sur soi-même. Jean-Michel Abrassart, fondateur du podcast Scepticisme Scientifique, observe, à juste titre, que de nombreux sceptiques utilisent les outils du scepticisme pour prouver aux autres qu’ils ont tort. A vrai dire, les outils du scepticisme sont d’autant plus efficaces et utiles lorsqu’ils sont avant tout utilisés sur nous-mêmes. Comme la plupart des outils, en soi, la méthode scientifique et le scepticisme n’a pas de valeur intrinsèque et c’est son utilisation qui va en déterminer l’impact (positif ou négatif) qu’ils peuvent avoir sur nous-mêmes et sur autrui. À l’instar du marteau qui peut être utilisé pour clouer ou pour assommer son voisin, le scepticisme peut, si uniquement employé pour prouver aux autres qu’ils ont tort, avoir des conséquences particulièrement négatives à une échelle individuelle mais parfois même à celle d’une communauté.

J’avoue que, personnellement, c’est une tendance qui m’assaille systématiquement. Quand je regarde une vidéo de la Tronche en Biais ou d’Hygiène Mentale, quand je lis des livres sur le scepticisme, je me surprends parfois à réfléchir pour essayer de trouver, dans mon entourage, sur qui utiliser tel ou tel outil sceptique pour prouver que cette personne à tort. C’est un peu normal en même temps: on peut très rapidement développer une envie de prouver à tous les autres qu’ils ont tort, c’est presque grisant. Mais ce qu’on fait au final, c’est souvent perpétuer le stigmate de l’erreur, et surtout, on perd des opportunités de vérifier si on en perpétue pas nous même, des erreurs.

C’est pourquoi pour optimiser le bénéfice des erreurs, il est particulièrement important qu’en tant que sceptique, on les popularise, qu’on les rende agréables, et surtout qu’on montre qu’on est capables d’en faire, et de les gérer sainement, en en bénéficiant nous-même.

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Admettre son erreur.

Comment aborder un débat d’idées ?

Mike Meraz a été l’hôte d’un fantastique Podcast, Actually Speaking, qui a employé le parti pris audacieux de mettre de côté l’aspect scientifique du scepticisme pour se concentrer sur son aspect humain, et essentiellement sur des problématiques de communication. Il s’est notamment penché sur l’efficacité de telle ou telle méthode de communication pour changer l’opinion de notre entourage. Son mot d’ordre : vivre de manière sceptique, mais savoir garder ses amis ! Cela signifie qu’il s’est surtout concentré sur des discussions et des communications qui peuvent avoir lieu entre personnes qui se connaissent, entre proches, et donc pas nécessairement des cas correspondant à deux figures publiques qui s’affrontent.

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Le débat n’est pas forcément public et médiatique.

Son premier constat, c’est que dans toutes discussions où deux personnes ne partagent pas la même opinion, il y a très peu de chances que l’une d’entre elle arrive à changer l’opinion de l’autre sur le moment, et qu’à la fin de la conversation on se retrouve en face d’une personne prompte à changer d’avis et admettre avoir eu tort. Et pourtant c’est souvent ce qu’on s’attend à obtenir en démarrant une conversation.

Ce qui est bizarre, c’est que nombre d’entre nous n’ont pas été convaincus du jour au lendemain sur tel ou tel controverse, et excessivement rarement après une conversation frustrante et houleuse. C’est très rare qu’on nous oblige à réfléchir et que ça marche. Généralement, les réalisations, les grands bouleversements de notre manière de penser ne sont pas obtenus sous la contrainte.

Ce qu’il faut réaliser c’est que de la communication, sans objectifs définis appropriés à la situation, mène à de la frustration. Dans le cas précédent l’objectif invraisemblable qui est visé mène à une conversation frustrante. Si on se définit un objectif à notre portée, alors on a plus de chances de réaliser une communication positive et fructueuse.

Pour être en mesure de savoir si un objectif est à notre portée, il faut se demander ce qui, selon nous, peut être formulé par notre interlocuteur pour nous signifier que l’objectif est accompli. Si cela vous semble invraisemblable, c’est que probablement votre but est irréaliste et va vous mener vers une conversation frustrante. Au final, ça vous oblige à réfléchir avant de prendre la parole, et c’est totalement en accord avec les principes du scepticisme. En plus ça limite les conversations frustrantes qui peuvent vous permettre de vous dissocier d’avec une image négative.

D’autre part, il y a une notion de contrôle importante et de qui le détient. Si l’objectif visé est de changer l’avis de la personne en face, on place l’interlocuteur en position de contrôle : lui seul peut décider du sort de la conversation. Vous lui donnez en cadeau votre perspective d’accomplissement. Dans une conversation conflictuelle, votre interlocuteur peut penser que tant qu’il ne partage pas votre point de vue, vous avez perdu. Et si votre objectif est de changer sa manière de penser ou son avis, vous allez probablement vers un échec car votre objectif est peu réaliste. Une autre manière de voir si votre objectif est réaliste, c’est de déterminer si vous êtes véritablement en contrôle de votre sens d’accomplissement. Votre but vous maintient-il en contrôle de votre niveau de frustration ?

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Faut-il sauter à la gorge de votre interlocuteur à la moindre erreur ?

Il ne faut pas non plus oublier d’admettre que nos proches, nos amis, peuvent commettre des erreurs. Leur tomber immédiatement dessus ne correspond pas véritablement à la reconnaissance de l’utilité de ce qu’est une erreur, ni à la réalisation que le meilleur moyen d’apprendre de ses erreurs, c’est souvent via une quête semi-individuelle, et favorisée par un contexte agréable et un sentiment de liberté. Le psychiatre George E. Vaillant utilisait une parabole avec des chenilles et des papillons: Il est très fréquent que les chenilles se transforment en papillon et soient alors persuadées qu’elles étaient de petits papillons dans leur jeunesse. La plupart d’entre nous sommes devenus sceptiques à travers un long et fastidieux voyage. S’attendre à ce que notre entourage le réalise le temps d’une discussion est totalement illusoire et injuste.

Votre rôle, en tant que sceptique, pourrait être d’une part de donner un bon exemple de la méthode sceptique, en partageant votre propre expérience, vos propres apprentissages de vos erreurs: donnez l’exemple de ce que vivre une vie sceptiquement peut apporter de bénéfique.

Vous pouvez aussi vous donner comme rôle de ne pas nécessairement pointer les moments où vos proches font des erreurs, mais plutôt les moments où ils en tirent un apprentissage précieux.

Le partage de connaissance, sans émettre de jugement sur les opinions de vos proches, peut éventuellement accomplir ce que vous recherchez: devenir une référence, un soutien pour leur éventuelle transformation.

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Cependant il y a un équilibre entre le soutien et la remise en question. Généralement, nous, les sceptiques, on est assez balaises pour remettre toute affirmation en question. Mais généralement, cela fait fuir notre entourage. On représente un perpétuel challenge, et parfois malgré nous : c’est ce qu’on réalise par exemple en présumant des connaissances de notre entourage, de leur intérêt pour nos propres centres d’intérêts, de leur capacité ou leur familiarité avec des concepts scientifiques ou philosophiques. La remise en question peut être excessive quand on bombarde notre entourage de faits scientifiques non digérés, quand on s’attend à ce qu’ils déploient une méthode académique ou épistémologique, quand on piétine leur croyance sans égard et surtout, quand on leur fait croire qu’il faut qu’ils changent pour pouvoir continuer à nous parler, voire d’être un bon être humain. Surtout s’il s’agit de vos proches, il peut être capital pour conserver de bonnes relations de ne pas systématiquement remettre tout ce qu’ils disent en question. C’est éreintant et non constructif. N’allez pas à toutes les batailles. De la même manière ne vous transformez pas en manuel scolaire à chacune de vos interventions. Si la plupart d’entre nous changent après avoir lu tel ou tel livre, d’autres effectuent ce changement en interagissant avec des personnes, grâce à une connexion. Et on n’est pas capable d’avoir une connexion avec un manuel scolaire.

À l’inverse, on peut apporter un soutien trop prononcé. C’est ce qui se passe si, par exemple, on laisse tout passer, on laisse dire des choses qui nous semblent fausses sans intervenir de peur de briser nos relations, quand on suggère qu’on est d’accord puisqu’on se tait, quand on est trop neutre voire qu’on suggère que le relativisme complet est tolérable.

Comme c’est human-errorsouvent le cas, il faut un peu des deux, et déterminer un équilibre adéquat. Il est cependant très important de comprendre que la remise en question d’une opinion peut être traumatisante. En sachant ça, il est utile d’essayer d’éviter ce traumatisme, car c’est très peu propice à l’apprentissage. On dit souvent qu’on ne fait pas d’omelettes sans casser des œufs, mais on n’est pas obligé de bousiller une barquette de 24 pour partager une omelette à deux…

Pour pouvoir atteindre un bon équilibre, y’a pas 30000 façons, faut s’entrainer, faut s’exercer, et vous inquiétez pas, vous allez faire des erreurs, mais avec un peu de chance et de bonne volonté, vous allez probablement apprendre de vos erreurs pour vous améliorer.

L’Entretien épistémique ?

Les gars de la Tronche en Biais ont évoqué l’entretien épistémique comme une bonne méthode pour qu’un interlocuteur soit confronté à ses propres erreurs : l’entretien épistémique, selon eux, correspond à une discussion sans débat permettant, à terme, d’amener votre interlocuteur devant ses propres contradictions, devant les limites de ses connaissances actuelles. En constatant lui-même les anomalies de sa méthode, il vous verra moins comme un adversaire que comme un partenaire dans l’examen des raisons pour lesquels il croit ce qu’il croit.

Personnellement je remarque qu’il y a éventuellement un problème d’objectif tel que je l’ai énoncé plus haut avec une perspective de changement d’opinion à la fin d’une discussion.

Mais plus important pour moi, il y a surtout une lacune quant à la méthode permettant d’écouter efficacement votre interlocuteur. Quoi? Bien écouter, c’est pas tout simple? Il suffit pas de croiser les bras et de laisser votre interlocuteur blablater, alors?

Ça c’est probablement une manière d’écouter très inefficace, car écouter est un art. Surtout si on veut maîtriser l’art de l’écoute active. De base, dans une conversation, on est des brêles pour écouter: on est distrait, on est dans nos propres pensées, on se concentre sur les arguments qu’on va sortir pour tacler notre interlocuteur, etc. Écouter de manière active, c’est véritablement porter toute son attention à l’interlocuteur. C’est montrer également à l’interlocuteur qu’on est engagé dans l’écoute, et investi dans la conversation. C’est choisir de montrer qu’on comprend, ou qu’on veut clarifier immédiatement une incompréhension.

Alors pourquoi choisir l’écoute active: et bien car elle aide à construire une relation de confiance avec votre interlocuteur, et elle vous permet de comprendre le contexte et le contenu de son propos. L’écoute active, c’est particulièrement efficace quand on couple cette technique à celle d’éviter d’utiliser la seconde personne. Dire ‘tu’ ou ‘vous’ à tout bout de champ, laisse transparaître un certain degré d’accusation et il peut être souvent utile de se concentrer sur la première personne: de partager son expérience, son ressenti.

Pour en revenir à l’écoute active, dans le cadre d’un entretien épistémique, elle peut permettre de réfléchir comme un miroir les croyances d’une personne, de renvoyer cette image. En ça vous devez jouer le rôle d’un miroir efficace : vous devenez l’outil d’autoréflexion permettant à votre interlocuteur d’appréhender pleinement ses propres croyances, ses décisions, positions, opinions avec une clarté et une perspective quasi impossible à obtenir soi-même.

En plus être écouté montre qu’on entre dans une communication où le flux d’information n’est pas unilatéral, ce qui permet de se sentir estimé et de construire un environnement de communication partagé. En plus, quand on fait un effort conscient sur soi-même pour écouter l’autre, cela a souvent l’effet d’une soupape de sécurité qui vide un peu la pression et la frustration qu’on peut accumuler.

Il faut aussi se rendre compte et transmettre le fait qu’écouter ne signifie pas nécessairement agréer, accepter, valider. Ce n’est pas en coupant la parole à une personne à tout bout de champ qu’on démontre au mieux qu’on n’est pas d’accord avec ce qu’elle dit. Couper la parole à quelqu’un laisse déjà la possibilité à cette personne d’estimer qu’elle ne s’est pas totalement exprimé, que son opinion n’a pas été entendue. Pour des spectateurs de ces échanges, ça peut en plus avoir l’effet pervers de jeter une aura de mystère sur le fameux sujet non exprimé par votre interlocuteur, ce qui peut alimenter un esprit de controverse. Et en plus, ça nous fait paraître menacés. Si vous êtes confiants sur la validité de vos opinions, laissez vos interlocuteurs parler pour que l’intégralité des deux opinions puissent être comparées. Si vous n’êtes pas confiants, vous aurez au moins de nombreuses informations obtenues auprès de votre interlocuteur et qui consisteront en autant de points de réflexions et recherches pour informer ou confirmer vos propres croyances.

Mais attention à ne pas confondre l’écoute pour obtenir des informations et l’écoute active. L’écoute active rajoute une couche à la simple collecte d’informations: elle permet de renforcer vos relations avec vos interlocuteurs, fournit les conditions propices à l’éveil personnel et au changement, augmente votre capacité à influencer et persuader et surtout permet de désamorcer des situations conflictuelles.

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L’écoute active.

Voici 5 points permettant de réaliser une écoute active efficace. Faut pas se le cacher, c’est compliqué, c’est dur, et la pratique de l’écoute active montre à quel point écouter peut être considéré comme un art. L’écoute active c’est:

1: Prêter attention.

Comment prêter attention – Des petites astuces. Regarder la personne dans les yeux, éviter les distractions (si vous sentez que vous êtes hyper en colère, ou distraits, c’est peut-être pas le moment d’avoir cette conversation), ne pas réfléchir à la manière dont on va formuler sa propre réponse mais se concentrer sur ce qui est dit, faire attention au langage corporel de son interlocuteur, ne pas se concentrer sur les tics de langages ou le maniérisme de l’interlocuteur qui peut nous agacer mais se concentrer sur le message qui nous est véhiculé.

2: Montrer qu’on écoute

Hochez la tête, agréez, souriez, ne vous braquez pas en croisant les bras en attendant la fin de l’intervention de votre interlocuteur, mais plutôt penchez-vous vers lui pour montrer que vous êtes absorbé par son propos.

3: Fournir un retour d’information, du feedback

C’est peut-être le plus compliqué… Là, vous allez devoir intervenir pour clarifier le message que vous venez d’acquérir. C’est bien la différence avec une écoute passive: l’écoute active implique que vous réfléchissiez immédiatement au message qu’on vous délivre. Pour cela, vous pouvez simplement répéter une phrase clé qu’on vient de vous communiquer, mais ça peut être vite lassant. Du coup il va falloir plutôt paraphraser votre interlocuteur en lui sortant des phrases du genre: ‘si je comprends bien, ce que tu me dis c’est pif et paf’. Il faut aussi, de temps à autres, résumer ce qui a été dit. C’est très important pour voir si vous avez suivi, si votre interlocuteur sait où il en est de son raisonnement, etc. Et puis n’hésitez surtout pas à poser des questions. En tant que prof, je peux très vite savoir si un étudiant suit mon cours ou non de cette manière: s’il me pose une question approprié, c’est que j’ai obtenu son attention (c’est très agréable). Dès que vous sentez que vous ne comprenez plus, c’est le moment d’intervenir. Il est tellement facile de faire semblant d’écouter en hochant la tête même si on ne pige rien. Poser une question pour être sûr qu’on a compris, c’est garantir à votre interlocuteur que sa voix est écoutée.

4: Différer son jugement, l’expression de son opinion.

 En très bref, ne coupez pas la parole de votre interlocuteur et ne vous précipitez pas avec un contre argument à la moindre pause dans son argumentaire. Si vous montrez que vous êtes patients, il est à peu près certain que vous bénéficierez du même type de patience en retour pendant votre réponse: est-ce que c’est pas une situation idéale pour communiquer et transmettre ce que vous voulez dire?

5: Répondre de manière appropriée:

Après avoir laissé parler votre interlocuteur dans le cadre d’une écoute active, vous détenez maintenant non seulement des informations sur son message, mais aussi probablement sur ses émotions. Vous avez une perspective, un contexte dans lequel votre interlocuteur pense ce qu’il pense, croit ce qu’il croit. Vous serez éventuellement surpris d’apprendre que votre interlocuteur, de prime abord véhément sur l’inexistence de l’évolution, tient cette opinion essentiellement pour des raisons totalement différentes d’une simple adhésion à une logique créationniste: ça peut être l’expression d’une méfiance envers le monde académique, une crainte envers la disparition dans la société de certaines valeurs chère à votre interlocuteur ou encore d’une pression interne d’adhérer aux opinions d’un tiers qui leur est cher pour éviter de fragiliser ses relations, un mariage tendu par exemple. Utilisez maintenant ces informations à bon escient dans votre réponse. Soyez franc, honnête, mais n’édulcorez pas votre propre opinion pour autant.

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Y a-t-il d’autres stratégies valables ?

Je vous ai exposé des techniques de communications à utiliser essentiellement avec des proches et non des stricts inconnus ou des figures publiques. Dans ce second cas, vu notre investissement émotionnel et affectif  minimal, on peut être tenté de privilégier un discours beaucoup plus conflictuel, confrontationnel, utilisant le ridicule pour véhiculer l’inanité des opinions de vos interlocuteurs. Alors je vais peut-être vous surprendre, mais en soi, je ne trouve pas ça une mauvaise stratégie. L’agression, le ridicule, qu’on oppose souvent à la patience, l’éducation, correspond à un outil particulièrement efficace dans certains contextes pour promouvoir le scepticisme et l’esprit critique. Ces deux approches constituent des outils pour combattre l’ignorance. Opposer ces deux approches en essayant de savoir laquelle est la meilleure peut revenir à se demander ce qui est le meilleur outil: le marteau ou le tournevis. Cette question est totalement creuse si on supprime le contexte de l’utilisation de ces outils. La question qu’on doit se poser c’est quand utiliser ces outils, et comment les utiliser de manière efficace. Pour cela, une bonne méthode, c’est de se demander quel peut être le préjudice généré par votre interlocuteur. Alors attention, dans ce cas précis, à ne pas faire une erreur courante dans le monde sceptique qui est de confondre l’interlocuteur d’avec le sujet exposé. J’entends souvent dire qu’il ne faut pas se concentrer sur l’interlocuteur mais sur son sujet: c’est hyper dangereux en fait. La plupart d’entre nous, sceptiques, sont familiers avec des sites comme ‘What’s the Harm’ (http://whatstheharm.net/ ) qui compile tous les préjudices (morts, blessures, gaspillage économiques) perpétrés par des pratiques paramédicales ou occultes. Se concentrer sur le message et retirer l’interlocuteur de l’équation, c’est risquer de communiquer le fait que votre interlocuteur est directement responsable de ces préjudices. Je sais pas si vous imaginez le poids de responsabilité qu’un sceptique peut larguer tranquillos sur les épaules d’une personne sans prévenir:

« Bonjour, tu crois en l’homéopathie? Tu es responsable de la mort de N gamins. Ciao ! »

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Ce qui se passe en fait c’est qu’on n’a pas réellement déterminé le préjudice véritablement généré par notre interlocuteur. Et si on détermine qu’une personne est plus ou moins heureuse, saine, et ne porte pas un gros préjudice à elle-même et à son entourage, il faut savoir que la promotion du scepticisme est probablement plus efficace lorsqu’elle se base sur de l’éducation, des exemples, de la coopération, plutôt que de la confrontation.

Cependant, on peut se trouver dans des situations où il est utile de savoir ajuster son niveau d’agressivité. Personnellement, c’est une des pratiques que j’ai le plus de difficulté à mettre en œuvre, mais un véritable équilibre dans la gestion de ce niveau relève d’un entrainement et d’une pratique régulière.

La première mission, on l’a vu, c’est de déterminer le préjudice généré par votre interlocuteur. N’hésitez pas à prendre le temps de réfléchir avant d’intervenir, ça vaut le coup.

Votre niveau d’affirmation de vous-même, de transmission des principes du scepticisme doivent être calibrés. Évitez d’être trop brutal lorsque vous estimez que votre interlocuteur ne sait rien ou peu de choses du scepticisme.

Votre niveau d’intervention doit également être calibré: faible si vous estimez que la personne est susceptible de se poser des questions, très fort si le niveau de préjudice généré est important et immédiat.

Le ridicule et le discrédit? Il peut être utilisé, mais privilégiez son utilisation vers un individu pour lequel vous avez déterminé qu’il est une figure très publique, qu’il porte préjudice à autrui, qu’il refuse de s’en tenir à toute forme de raisons et surtout qu’il est en mesure d’influencer les autres. S’il s’agit d’une personne peu écoutée et influente, ne tirez pas sur l’ambulance…

À l’inverse privilégier la communication patiente et ouverte quel que soit la situation peut être une erreur: cela peut laisser penser que vous préférez esquiver, être inactif, et du coup minimiser l’importance du sujet que vous voulez promouvoir… On ne peut pas être gentil en toute circonstance, il faut savoir s’adapter à son auditoire.

Je vous communique tout ça non pas en expert: au contraire je suis ceinture blanche niveau junior dans la communication du scepticisme. J’ai passé par contre pas mal de temps à me poser des questions sur l’efficacité des différentes formes de communication et j’ai la volonté de m’entrainer à promouvoir de la meilleure manière qui soit, le sujet qui nous intéresse tous ici: le scepticisme et l’esprit critique. Comme beaucoup de bonnes choses, ça nécessite énormément d’entrainement et de pratique et je pense qu’on va faire énormément de gaffes sur le chemin. Mais ne soyez pas rat: partagez vos échecs, vos erreurs, pour que notre communauté grandisse ensemble rapidement.

En conclusion, j’espère que ce live aura été truffé de nombreuses et belles erreurs.

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Regardez l’émission !

(suffit de cliquer) 

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Mike Meraz:

Kathryn Schulz Being Wrong:

Autres liens sur l’erreur :

https://associationslibres.wordpress.com/2015/06/15/accepter-lechec-les-neuroscience-du-foirage/

« Des affirmations extraordinaires réclament des preuves plus qu’ordinaires. »

Carl Sagan.
Carl-Sagan

Le statut de la preuve.

Cette citation est parfois mal comprise. D’aucuns pensent qu’elle est fausse, car ils estiment qu’il faut exactement le même niveau de « preuve » pour prouver… tout. Et a priori cela semble vrai : une preuve définitive et absolue peut être exigée tout autant pour l’existence du Yéti ou pour celle de l’Arc de Triomphe… Mais un rhéteur maniant le doute hyperbolique à la Pyrrhon sera capable de nier l’existence de l’un comme de l’autre, précisément parce qu’une preuve absolue, ça n’existe pas.

Il est en effet impossible de réfuter la croyance de celui qui prétend que l’univers tout entier n’est qu’une hallucination ou la projection de son propre esprit. Mais qui voudrait s’y aventurer ? Est-ce employer son temps de manière raisonnable ? Qui veut administrer la preuve absolue qu’il a raison ?

Ceux d’entre nous qui usent du doute méthodique savent que toute proposition irréfutable est étrangère à la pensée critique. Pour être dans le champ de l’analyse rationnelle, une proposition doit être réfutable, c’est pourquoi une preuve scientifique est toujours provisoire, soumise à la découverte éventuelle d’une preuve qui la contredirait ou apporterait des nuances à ce que nous tenons pour vrai aujourd’hui. Je le répète : une preuve absolue, en science, c’est une expression antinomique, une absurdité axiomatique.

Il n’est jamais question en science de prouver de manière absolue « X = Y », mais d’apporter les éléments qui permettent de dire avec une confiance suffisante qu’il est raisonnable de considérer que « X = Y » est exact jusqu’à preuve du contraire.

Et par conséquent la question que se pose un sceptique [et il convient toujours de l’être dans le cadre d’une démarche scientifique] est la suivante : Ai-je une bonne raison de penser que « x = y » est vrai, et au contraire y a-t-il des raisons de penser que c’est faux ? Enfin, une fois cela pris en considération, est-il raisonnable de ma part de considérer que « x = y » est vrai. Nulle part il n’est question de prétendre détenir la vérité mais de faire un choix raisonné entre l’acceptation ou le rejet d’une proposition.

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Le paranormal, quezako ?

La définition de paranormal est « Qui n’est pas explicable par la science. » C’est à la fois extrêmement simple et terriblement nébuleux. Les phénomènes paranormaux sont par définition des phénomènes que nos outils rationnels ne peuvent expliquer. Cela pose deux problèmes :

1- Qui serait assez prétentieux pour affirmer que jamais la science n’expliquera X ?

Dès lors comment affirmer que X est bel et bien paranormal ? Il faut ajouter à la définition que le phénomène n’est pas explicable par la science actuelle, et cela change déjà pas mal de choses.

2- L’existence de X peut-elle être constatée par la science ?

Cette deuxième question est plus pragmatique. Prenons comme exemple l’effet psi, c’est-à-dire la capacité ‘paranormale’ supposée de l’être humain à faire bouger des objets par la pensée, ou bien à communiquer à distance là aussi par le seul moyen de la pensée.

Dans un premier temps la science n’a pas besoin d’établir un modèle explicatif de l’effet psi, ni d’en comprendre les modalités ou n’importe quelle composante. Rien de cela n’est requis pour constater l’existence du phénomène. L’existence de la gravité était perceptible et démontrée bien avant que les physiciens ne commencent à nous expliquer de quoi il s’agit. J’ajoute qu’il est bien possible que nous n’ayons qu’une compréhension tout à fait parcellaire de que ce la gravitation est en réalité, voire que nous soyons condamnés à ne jamais réellement comprendre de quoi il s’agit… Si tel est le cas, la gravitation est, par définition, paranormale.

Notez comme cela n’empêche nullement les scientifiques d’utiliser des modèles théoriques qui donnent des résultats pratiques, ce qui ne laisse place à aucun doute sur l’existence de la gravité. Le paranormal, c’est donc potentiellement ce qui échappe à l’explication scientifique, mais ce n’est certainement pas ce qui échappe à l‘observation scientifique.

Tout phénomène dont un humain fait l’expérience se produit dans un contexte où il est scientifiquement possible de constater la réalité de cette expérience, soit par des observations directes, des mesures sur le terrain ou encore, dans l’hypothèse où l’expérience serait purement subjective, par l’examen de l’activité cérébrale de la personne qui vit ce phénomène. Tout phénomène qui affecte un être humain est ipso facto de nature à être constaté par un autre être humain. Le paranormal ne fait pas exception, et force est de constater qu’aucune expérience scientifique, jamais, n’a produit le constat de la réalité d’un phénomène qui corresponde à ce qu’on appelle le paranormal.

La conclusion rationnelle qui s’impose est donc que les phénomènes paranormaux n’existent pas[1].

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Le curseur vraisemblance.

Mais revenons à la phrase de Sagan : « Des affirmations extraordinaires réclament des preuves plus qu’ordinaires. » Et montrons qu’il s’agit d’un principe de bon sens que nous appliquons tous, sauf quand nous avons déjà décidé de croire quelque chose.

Pour ce faire, réalisons ensemble une petite expérience de pensée.

  1. Vous rencontrez une personne que vous connaissez un peu, mais pas trop… Elle vous dit qu’elle a déjeuné au restaurant la semaine passée. À moins de suspecter qu’elle ait des raisons de mentir (elle cherche un alibi par exemple), rien ne vous permet de penser qu’elle vous ment. Elle vous dit qu’elle a mangé des moules et cette affirmation tout à fait ordinaire vous semble crédible : je suppose que vous acceptez bien volontiers que cette proposition est vraie. Fin de la première étape.
  2. Cette personne que vous connaissez, mais très peu, vous dit que les moules l’ont rendue malade. Rien n’indique qu’elle soit de mauvaise foi, elle croit réellement ce qu’elle vous dit. Pourtant cette affirmation est un peu moins ordinaire que la précédente, en tout cas on peut l’espérer. Et vous pouvez imaginer bien d’autres scénarii où ce ne sont pas les moules qui ont rendu cette personne malade. Sans doute lui demandez-vous si elle est certaine du lien de causalité. Elle vous répond que sur six convives ce soir-là, les trois qui ont mangé des moules ont tous été malades, et l’une de ces personnes est justement présente pour vous confirmer que c’est exact. Je pense que ces informations supplémentaires peuvent vous convaincre qu’il est raisonnable de penser que les moules servies ce soir-là ont bien rendu malades au moins trois clients, c’est un évènement malheureux mais qui n’est pas inconcevable, ce genre de chose arrive parfois. Cette proposition moins ordinaire est assortie des éléments de preuve qui la rendent crédible.
  3. Un peu plus tard, elle vous confie que l’indigestion de moules lui a donné accès à des réminiscences sur ses vies antérieures. Elle fut autrefois un shaman dans les steppes asiatiques et vous donne quelques détails sur ses visions. Jusqu’à présent cette personne semblait tout à fait saine d’esprit, et si elle vous dit cela c’est à l’évidence qu’elle pense que c’est la vérité. D’ailleurs le convive qui a été rendu malade par les moules confirme l’histoire, car lui-même a eu accès à son passé de corsaire dans les mers chaudes des caraïbes. Notez que les preuves sont exactement de la même nature que dans l’étape 2 : deux récits concordants. Pourtant cette fois il vous semble que la proposition extraordinaire selon laquelle une indigestion de moules dans ce restaurant éveille une personne à ce qu’elle a connu dans une vie antérieure est loin d’être avérée, et vous jugez même qu’il est raisonnable de penser que c’est faux en l’état actuel des choses. La personne aura pu se laisser abuser, après tout vous ne la connaissez pas très bien et il se peut qu’elle soit sujette à une vision déformée du monde ou qu’elle soit facilement influencée par diverses modes de suggestion.

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Dans les trois cas ci-dessus présentés vous avez très certainement attribué un niveau de vraisemblance à chaque proposition avancée. Dans le premier cas ce niveau est assez élevé pour qu’elle soit acceptée comme telle. Dans le deuxième cas, la vraisemblance de la proposition est un peu plus faible, il est raisonnable de douter du lien de causalité avancé par le premier témoin, mais les informations supplémentaires suffisent pour convaincre un interlocuteur raisonnable que la version présentée est probablement vraie. Dans le dernier cas on se trouve avec une proposition sans aucun précédent avéré et qui viole ce que l’humain sait ou croit savoir sur la nature et le fonctionnement du monde. À tort ou à raison, vous estimez qu’il vous faut plus que deux témoignages pour attester qu’il est raisonnable de croire que cette indigestion donne accès à des souvenirs d’une vie antérieure.

Vous avez emDoubtFactorployé, peut-être sans le savoir, une logique bayésienne en attribuant a priori un niveau de crédibilité à ce qui vous est raconté. Vous avez placé un curseur de vraisemblance. Et ensuite vous avez comparé les éléments de preuve à ce curseur pour déterminer si oui ou non vous deviez la tenir pour vraie. Et vous avez par vous-même démontré qu’une affirmation extraordinaire réclame des preuves plus qu’ordinaires.

Extraordinary claims require extraordinary evidence. 

***

Sur le même sujet :

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[1] Jusqu’à preuve du contraire, évidemment.

Article proposé par L Pellegrin, cristallier, alarmé par le développement constant de la charlatanerie que représente la lithothérapie. Une véritable démonstration des dangers de ce marché de la superstition par un passionné de géologie et de belles pierres.

Le  mot lui-même est une composition récente, et émerge des alentours de la période « New age ».

Cependant l’usage des pierres à raison médicale est ancien chez certains peuples. En Asie tout d’abord où, selon l’endroit, on associait les pierres en fonction de leur couleur à des organes (en Chine ou au Japon). Elles étaient parfois réduites en poudre et consommées (Mongolie), et d’une manière générale les cristaux qui présentaient une esthétique particulière accompagnaient les croyances locales, elles-mêmes à la source de leur vision du monde et donc bien sûr de leur médecine.

Ensuite, bien plus tard, au Moyen-Âge en Europe on donne des vertus magiques aux minéraux et les alchimistes s’en emparent. De la réduction en poudre de certains minéraux ils obtiennent des substances auxquelles on prête des propriétés étranges en lien avec les préoccupations humaines de base: le sexe, le pouvoir, ou la mort. Le premier donne lieu à quelques tentatives cocasses vite abandonnées, le second enrichi son homme (ça brille, c’est rare…c’est cher). Quant au dernier point… on veut croire que l’on trouvera l’élixir de jeunesse, la pierre philosophale, la panacée, etc. et tout cela doit provenir d’une pierre.

Les pierres traînent dans certains ouvrages de pharmacie, et les résultats d’expériences spectaculaires à partir de poudres minérales de cette alchimie devenant peu à peu de la chimie encouragent à persister dans cette idée. Il se passe des choses avec les pierres, et plus elles paraissent cristallisées, plus elles offrent des substances « pures ». Il me semble sain de rappeler à ce stade que, jusqu’à une époque plutôt récente, la barrière entre science et occultisme était inexistante.

À la deuxième moitié du vingtième siècle, la vague New Age s’empare de ce qu’elle perçoit comme des arts exotiques, et récupère à son compte de nombreux principes venant d’Asie, créant au fil de traductions douteuses son propre vocabulaire et sa propre culture à partir de ces croyances étrangères. Le mot lithothérapie est en train de naître et des pratiques « médicales » émergent, notamment l’utilisation de minéraux, et surtout des cristaux.

On observe ces dix dernières années une recrudescence de la pratique de la lithothérapie, et les revendeurs de cristaux thérapeutiques fleurissent un peu partout, tant sur le net que sur les marchés.

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Qu’en disent les intéressés ?

            Je passe sur la déclaration courante dans le monde de la lithothérapie consistant à dire qu’il faut y croire pour que cela marche. Soit l’effet est purement psychologique et n’a donc aucun rapport avec les minéraux, soit il y a un effet réel indépendamment du fait d’y croire ou non. Le placebo est certes un effet réel, mais il est le contraire d’un effet spécifique lié, en ce qui nous concerne, aux pierres.

« Pour comprendre le fonctionnement de la lithothérapie il faut dans un premier temps reconnaître l’existence d’énergie non visible qui nous compose et qui compose tout ce qui est manifesté, une aura d’énergie qui est aussi réel (sic) que ce que vos yeux vous permettent de voir du plan physique. Ces énergie (sic) subtiles qui nous composes (sic) sont les manifestation (sic) de notre état d’être au niveau émotionnel, mental et spirituel. Si nous changeons d’émotion nous changeons la fréquence vibratoire de notre émotionnel. Les minéraux ont une énergie forte qui ont des caractéristiques très marqué (sic) en fonction de leur composition, une énergie subtile stable qui est utilisé (sic) en lithothérapie pour […] obtenir des amélioration (sic) de notre état d’être. »
http://www.pierres-lithotherapie.com/

[NDR : Il s’agit de l’un des sites les plus fréquentés et les mieux références sur Google. L’extrait n’a pas été choisi en raison de son orthographe défectueuse.]

 

 Malheureusement, aucune de ces phrases n’a de sens. « L’énergie » n’existe pas dans la réalité physique. Elle n’est pas une matière. Elle est la représentation abstraite de phénomènes physiques réels et variés. C’est un outil mathématique et conceptuel. Rien de plus.

On peut aussi trouver des choses comme : « N’oublions pas que toutes les Pierres possèdent une énorme puissance, une énergie originelle et naturelle et un rayonnement pur. » http://www.energesens.com/la-lithotherapie-energesens-132-1.html

Les mots « puissance », « énergie » et « rayonnement » ont des sens que l’auteur semble ne pas connaître réellement. Disons-le tout de suite : non les pierres n’émettent pas de « rayonnement », sauf radioactivité et/ou chaleur. Et oui, on a bien vérifié.

Sur www.pouvoirdespierres.com, on peut lire:

« Il semblerait que l’impact énergétique des pierres sur notre organisme et notre psychisme résulte d’une analogie structurelle. Chaque jour nous ingérons des éléments minéraux essentiels à notre équilibre. Une pierre au creux de votre paume, ou portée en bijou , enclenche un processus de résonance vibratoire, lequel stimulera les minéraux organiques, palliant à d’éventuels dysfonctionnements. Chaque pierre possède une vibration qui lui est propre et nous pénètre de son énergie en activant nos portes énergétiques, nos chakras. « 

Un cristal est un agencement spécifique d’éléments chimiques répété à l’identique toujours de la même manière, et qui forment une structure plus ou moins complexe à plus grande échelle. Il n’existe qu’un nombre limité d’agencements possible, ce qui limite le nombre de structures possibles à l’arrivée. On qualifie ces structures de minérales en raison de cet agencement régulier d’atomes. En géologie, n’importe quel atome peut former un minéral, dès lors qu’il cristallise. En biologie, on appelle minéraux une classe d’éléments chimiques qui entrent dans la composition des organismes. Les deux termes de « minéral » n’ont absolument pas le même sens. Le rapprochement provient d’une confusion sémantique.

Contrairement à ce qui est dit, un cristal (ou une pierre) ne vibre pas comme ça par lui-même.

Et quand bien même il y aurait analogie, pourquoi devrait-il y avoir une interaction? Quel peut-être le rapport entre la vibration d’un minéral et le fonctionnement d’un corps ? Par quel biais, par quel vecteur interagissent-ils ?

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Dans ce sens j’ai trouvé autre chose:

« La première molécule que construit la cellule humaine lorsqu’elle se duplique est une molécule de dioxyde de silicium (travaux du Professeur Monnot, Prix Nobel de Chimie en 1965). Elle sert de moyen de transmission à l’ADN pour transmettre ses codes au corps cellulaire. Le corps humain se compose d’environ 75000 milliards de cellules, donc d’autant de molécules de dioxyde de silicium qui est également la composition du Quartz ou Cristal de Roche. « 

En effet, il s’agit du même élément chimique. Il n’y en a pas tant que ça au final, des éléments chimiques. Pourquoi spécifiquement la silice, et pas le carbone par exemple?

« Le Quartz constitue 12% de la Lithosphère (croûte terrestre) et sert de mémoire et de conducteur à tous les micro-processeurs qui permettent aux moindres machines présentes autour de nous de fonctionner. Sur le plan énergétique et au niveau de la transmission des fréquences, il est donc évident qu’il existe un lien profond entre notre corps, la planète Terre, et les machines qui peuplent le moindre espace de nos lieux de vie. « 

Nous y sommes. Cet « argument » rencontré couramment fait une confusion entre la silice, élément chimique et le quartz, qui est un cristal composé exclusivement de silice et d’oxygène (il n’est pas le seul). Dans nos objets nous utilisons une structure artificielle de silice qui n’est pas du quartz (sauf pour les montres). Le verre aussi est fait de silice… En quoi le fait que l’on retrouve un même élément un peu partout implique-t-il un lien entre les structures qu’il compose ?

« Le corps humain est donc un gigantesque émetteur-récepteur, capable de capter des éléments et des fréquences qui vont bien au-delà de ce que nous pensons ordinairement. »

D’où sort ce « donc » ? Pourquoi penser que le fait d’avoir de la silice dans nos cellules permet de transmettre quoi que ce soit ? C’est ici que la magie opère.

cristal de quartz

Cristal de quartz

La silice est amagnétique. Le quartz ne transmet des charges que quand on le frappe ou le frotte suffisamment fort, et il vibre si on lui envoi du courant (ceci étant dû au fait qu’une contrainte mécanique implique une contrainte sur les atomes qui réarrangent en conséquence leurs électrons, et inversement). Ces deux effets sont les deux faces d’une même pièce appelée effet piézo-électrique. Cet effet sert souvent de justification à la lithothérapie, mais il n’implique rien d’autre qu’une très faible circulation d’électrons.

Il ne se passe absolument rien à distance. C’est comme dans la citation précédente : il n’y a rien qui justifie le genre d’interaction façon super-intrication-quantique décrit ci-dessus. C’est un phénomène éminemment local (comme tous les phénomènes compris à ce jour d’ailleurs électromagnétisme compris, mais c’est une autre histoire). Mais surtout, quid des minéraux sans silice utilisés en lithothérapie ? Parce qu’il y en a des tas : calcite, aragonite, malachite, cérusite, sidérite, la si fameuse magnétite, tout le groupe de la pyrite et d’innombrables autres… ?

Ce texte détruit la majeure partie de la lithothérapie tout seul en restreignant d’office son explication aux minéraux silicatés.

Et ce site propose des formations…

Il y a des années, le public a rencontré une vulgarisation scientifique de masse. Les notions d’onde et ses représentations mathématiques (comme la fréquence), la notion d’énergie, et l’utilisation dans la technologie de l’électromagnétisme ont peuplé notre culture sans que l’on sache très bien de quoi il s’agit. Nous nous sommes mis à utiliser ces technologies comme on userait de magie.

On appuie sur un bouton et une lumière apparaît. On voit des choses se produire à distance sans qu’il ne se soit rien passé de visible. Une bête antenne devient un objet mystérieux que l’on décrit avec des mots bizarres, et un petit rectangle en plastique fait naître d’une simple pression des images dans une boite avant même d’avoir eu le temps de dire « Abracadabra ».

Des bribes d’informations incomprises, des mots mal définis (« énergie » et « onde » en tête) sont parvenus au public. Il les a mélangés, et ces demi-connaissances associées aux mysticismes du passé ont peuplé notre monde de nouvelles créatures imaginaires. Ce ne sont plus des dragons ou des chimères, le soleil n’est plus tiré par un char dans les cieux, aujourd’hui on se soigne en faisant des passes au-dessus des gens, en suçant des cailloux ou en buvant sa pisse, le soleil s’est peuplé d’extraterrestres et l’univers « d’énergie », mystérieuse, invisible et porteuse de promesses.

Il est dommage de voir tant de gens fascinés par les pierres passer à côté de leur « véritable » magie. La même magie que celle d’un livre. Écoutez un géologue de terrain un jour, il fera raconter à ces pierres des milliards d’années d’histoire de la Terre. Étudiez la croissance d’un minéral, et vous en apprendrez de bonnes sur le vivant.

On peut apprendre à voir au-delà de la profondeur du temps, les grands schémas, ces notions compliquées deviennent des mouvements et des transformations simples. En regardant une falaise on peut voir les fluides s’insinuer, changer au fur et à mesure que leurs composant cristallisent pour donner peu à peu d’autres minéraux. Les montagnes s’élèvent, se tordent et se déchirent lentement, leurs entrailles à nues sous nos yeux exposent leur passé lointain, de la nébuleuse solaire jusqu’à l’arrivée de la vie, née des minéraux, et qui a tout transformé. Ce vivant a remodelé le monde minéral, de la moindre roche de surface jusqu’aux profondeurs telluriques. De nouvelles pierres, de nouvelles laves et de nouveaux cristaux sont apparus de telle sorte qu’aujourd’hui, c’est une autre planète que nous avons sous les yeux.

Le monde est plus vaste, passionnant, et bien plus lié au vivant que tout ce que ces croyances mystiques ou les énergies mystérieuses bienfaitrices n’osent l’imaginer.

Panoramic Rainbow Crystal Banner

Petit guide de bonne pratique

En lithothérapie on part du principe que les cristaux possèdent une énergie (?) qui fait vibrer le cristal qui ferait vibrer (par magie ?) les éléments chimiques en commun dans notre corps, qui feraient vibrer (encore par magie ?) notre corps, ou certaines parties, et le tout entrerait en résonance. Et cela nous serait bénéfique par le biais de notre « énergie vitale » ou « aura ». Ou quelque chose d’approchant.

À noter qu’en parcourant les différentes manières d’appréhender la chose, toutes s’accordent sur le fait qu’une pierre se « décharge » au contact du patient, et doit être « rechargée » en suivant divers protocoles. Ceci en raison d’une « perte d’énergie » du cristal, ou parce qu’il accumulerait de« l’énergie négative » durant son utilisation. Lorsque ce dernier vocabulaire est privilégié on parle volontiers de « purification » de la pierre. Ailleurs sur Lithotherapie.net on prétend même que les pierres sont vivantes, et que c’est l’énergie négative accumulée au cours de leur utilisation qui provoque leur dégradation.

Pyrite

Pyrite

On « recharge » la pierre en l’exposant au soleil, en l’enterrant, en la plaçant dans une eau courante, dans du sel (un grand classique qui a fait le tour du monde, le sel chasse les mauvais esprits, les fantômes , etc…), dans de la fumée d’encens…

Pour bénéficier des bienfaits des pierres, la lithothérapie préconise de tenir le cristal dans la main un certain temps, de le disposer dans sa maison, autour de soi, parfois sur les points d’acupunctures lors de séances, sous son oreiller, voire carrément dans son lit (vous vous souvenez de ce que j’ai dit au début sur les cristaux et le sexe ? On va finir par y arriver). On peut aussi les porter en bijoux. Certains prescrivent de laisser tremper un ou plusieurs cristaux dans de l’eau un certain temps, puis d’en boire un peu. Ils appellent cela un élixir.

Bien sûr, la couleur du cristal aurait une importance. Notons toutefois que les seules études montrant un quelconque effet des couleurs sur l’humain ont été réalisées en saturant les champs visuels des sujets, pas en leur montrant trois centimètres carré. L’effet des couleurs sur l’état mental du sujet étant bel est bien avéré, on peut éventuellement supposer qu’un mécanisme psychologique similaire pourrait intervenir en se concentrant sur une pierre d’une couleur donnée. Cependant, on parle bien ici d’une influence psychologique sur l’humeur liée à la lumière. Autrement dit, une fois encore, nous sommes bien loin d’un effet spécifiquement lié aux pierres.

Quelques tourmalines

Des forces inconnues ?

Les cristaux n’ont aucune propriété exceptionnelle qui sortirait du cadre scientifique classique. Cependant, ceci n’arrête pas les tenants qui voient les cristaux comme des concentrateurs de forces mystiques ou au moins mystérieuses. Elles seraient donc indétectables par nos moyens techniques et obéiraient à des lois différentes. De telles forces peuvent-elles exister ?

Les « lois » de la nature ne sont que l’expression mathématique du comportement de la matière. Ce ne sont pas des entités indépendantes qui imposeraient leur qualité, elles dérivent des propriétés de la matière elle-même. Pour que d’autres forces existent, il faudrait que la matière ait une structure très différente que celle que l’on observe.

Et justement, il nous serait impossible d’expliquer correctement cette structure. S’il y avait bien des forces inconnues nous observerions des agencement atomiques inexplicables avec les modèles actuels, or ce n’est pas le cas. Si les explications scientifiques se bornent à ne faire intervenir que trois forces (gravité, force électro-faible et force nucléaire forte) c’est parce que la matière elle-même impose a maxima ces trois forces seules.

S’il existe d’autres forces, elles n’interagissent pas avec la matière et n’ont donc aucun impact sur nous.

Ceux qui voudraient que l’esprit humain puisse intervenir sur ces forces,devraient se rappeler que l’esprit est le résultat de l’activité électrochimique du cerveau. Et comme les corps matériels ne peuvent faire émerger que des forces naturelles, on ne peut assimiler l’esprit humain à une entité surnaturelle, entité qui par conséquent ne pourrait pas interagir avec une quelconque force paranormale.

D’ailleurs enregistrer l’activité d’un cerveau nécessite des capteurs disposés directement sur le crâne tellement cette activité est faible en intensité. Ces capteurs doivent être complexes pour parvenir à ce résultat, ce qui contraste avec la simplicité extrême d’un cristal.

formation de lithothérapie

Une séance de lithothérapie

La lithothérapie : ça ne marche pas.

C’est partiellement vrai.

En fait, certains minéraux sont effectivement utilisés en pharmacie. La halite par exemple (cristal de sel, comme celui de la table), et les médicaments à base de carbonates (le bicarbonate de sodium pour soigner les brûlures d’estomac par exemple) qui sont souvent extraits des minéraux du groupe du même nom (la calcite en est le plus connu). Plusieurs minéraux argileux sont associés à des pommades.
On peut aussi citer le talc ou la pierre d’Alun.

D’une manière générale, une grande part des éléments chimiques qui entrent dans la composition de toute sortes de choses, et par extension des médicaments, proviennent soit de roches soit de cristaux. Mais dans tous ces cas l’action des minéraux dans ces préparations est d’ordre chimique, en parfaite cohérence avec ce qui est connu des processus chimiques. Il y a donc le cas des élixirs à étudier de plus près, car il s’agit bien là d’une mise en solution et d’une ingestion. On a ici, enfin, un mode d’interaction potentiel entre la pierre et le métabolisme du patient.

vaisseau de cristal de quartz thérapeutique

« Vaisseau de cristal de quartz thérapeutique »

Un élixir, vraiment ?

Je vous l’ai dit, un cristal est un assemblage d’éléments qui se répètent à l’identique dans l’espace. S’il n’y a pas de géométrie particulière, on appelle cela un verre. Une roche est un assemblage minéral. Elle peut contenir ou non des cristaux (et des cadavres d’organismes, des tas…). Cela peut paraître anodin mais c’est important. Parce qu’après il y a la réalité. La vraie, celle qui fait mal à la tête.

Un cristal n’a pas UNE composition chimique, mais une fourchette de compositions possibles et même des « sites variables » sur lesquels différents éléments peuvent ou non venir se fixer. Des substitutions imprévues d’éléments peuvent avoir lieu (silice et aluminium par exemple), et à l’intérieur de leur structure on trouve parfois des espaces dans lesquels d’autres choses peuvent venir se loger (eau, sulfates, oxydes métalliques, etc…).

On ne sait jamais vraiment ce qui se cache dedans. De plus les cristaux croissent dans l’espace qu’on leur laisse… en d’autres termes, ils n’ont pas toujours la bonne forme à tel point que c’est parfois un cauchemar de les identifier correctement. Quant aux roches, c’est bien pire.

Les cristaux sont fascinants, on les collectionne, on les échange, on les vend… et ce commerce s’accompagne de contrefaçons. Il existe toutes sortes de manières de contrefaire des cristaux : on peut les tailler, les teindre, couler du verre ou même en faire pousser soit même. Aujourd’hui, l’explosion de la demande a automatiquement décuplé ce genre de trafic.

Et comme identifier un minéral est souvent complexe, discerner certaines contrefaçon devient presque impossible… à moins d’y mettre des moyens dont seuls les labos peuvent disposer.

Et c’est sans doute pour cela qu’autant de minéraux polis circulent dans ce milieu : cela rend la mise en évidence de l’arnaque très difficile car en polissant un minéral on perd la majeure partie des informations nécessaires à son identification « à l’œil ». Plus de forme naturelle, plus de stries de croissance, de plan de clivage, plus de patine ou de macle, sa surface gagne en éclat et en transparence et parfois même sa couleur peut changer. Suivez ce lien, pour quelques exemples de contrefaçons avec photos comparatives.

Si vous pratiquez la lithothérapie et que vous avez acheté une « pierre roulée » d’améthyste, je vous engage à faire des recherches sur ce que l’on appelle les « améthystes zonées »… Les chinois les produisent en masse dans des usines, et la vôtre en sort probablement.

Amethyste zonée chinoises

Améthystes zonées chinoises

 

Un élixir est une soupe chimique de faible concentration qui peut contenir n’importe quoi en solution. Cependant, que la source de la solution soit une poudre achetée dans une boite de chimie ou un minéral ne change rien. Ce n’est pas le minéral qui entre en solution, mais seulement quelques ions qui se trouvent dans sa composition. On ne sait jamais lesquels, et certains d’entre eux n’entrent même pas dans la composition théorique du minéral. Ce serait donc une espèce d’homéopathie à chimie aléatoire.

 

Un danger véritable.

Ça craint.

Pour les personnes souffrant d’allergies d’abord. Même une légère allergie peut être déclenchée par une pierre, par exemple si elle a mariné dans de l’eau et que les minéraux sont un peu instables (ce qui n’est pas rare et souvent invisible à l’œil profane). En bijou à même la peau à longueur de journée certaines pierres subissent des altérations. J’ai déjà assisté à ce genre de choc allergique causé par une amphibole (que sa propriétaire appelait « œil du tigre », j’y reviendrai) portée en pendentif.

Quelques exemples parmi d’autres :

  • La pyrite n’est que rarement uniquement de la pyrite. Elle contient le plus souvent une certaine proportion d’un autre minéral : la marcassite qui se dégrade par l’action d’une bactérie, et dégage de l’acide sulfurique gazeux. Presque toutes les pyrites font ça. Le dégagement est faible, mais laissez la pierre quelque mois dans une vitrine avec d’autres minéraux et les effets de l’acide deviendront visible. La pyrite est sensée soigner les affections respiratoires. J’ai croisé des recommandations avec cette pierre dans le genre : à poser à coté, voire sur la poitrine, d’un nouveau-né.
  • Encore mieux, la pyrite peut se confondre facilement avec d’autres pierres de son groupe minéralogique, comme la relativement fréquente arsénopyrite, qui peut libérer… de l’arsenic.
  • Puisqu’on en est à l’arsenic, le réalgar, très beau cristal rouge, est recommandé pour, je cite : « renforcer le système immunitaire, purifier le sang, éliminer les toxines, compenser les déséquilibres sanguins, soutenir le muscle cardiaque ». Ce sulfure d’arsenic est très stable. À moins que l’échantillon ne se trouve trop souvent au soleil (et là je vous demande de faire le lien avec les techniques de « rechargement » de pierre) auquel cas il s’altère en une fine poudre : l’orpiment, lui aussi un sulfure d’arsenic. Mais sous forme de poudre cette fois. J’imagine que tout le monde a entendu parler de l’arsenic…
Realgar

Realgar

De même avec le plomb contenu dans le galène, recommandé aux gens souffrant de vertiges. On retrouve ce métal toxique dans beaucoup de minéraux.

Betafite

Betafite

Si vous portez un bout de bétafite (recommandé parfois en cas de pré-diabète et d’ulcères variqueux), la radioactivité assez forte de ce minéral vous assure d’un cancer en quelques années.

Le sulfate de fer est considéré sur le site : lithothérapie.com, comme un vermifuge en Inde. En France c’est un puissant « bryocide » (anti mousses) que l’on met sur le gazon pour tuer radicalement lesdites mousses. L’ingestion d’un quart de livre de sulfate de fer a été la cause d’une mort en 3 heures (American Journal of Clinical Pathology vol:18 N°12).

La crocoïte est un « Bon stimulant sexuel pour l’homme comme pour la femme (chakra du sexe). De ce point de vue, ses effets sont assez proches de ceux de la vanadinite. » (http://www.reynaldboschiero.com/). Eh bien voilà, nous y sommes au sexe, avec un chromate de plomb (cancérogène reconnu : http://www.inrs.fr/media.html?refINRS=FAS%2025). Accessoirement, la Vanadinite est aussi un composé de plomb.

crocoïte

Crocoïte

Les lithothérapeutes préviennent leurs lecteurs et leurs patients qu’il convient de ne pas faire n’importe quoi avec les minéraux potentiellement dangereux, quand ils sont au courant. Sauf que ces minéraux ne sont jamais parfaits, pas toujours identifiés correctement et pas toujours vrais. Je ne suis pas sûr que tout le monde mesure bien le risque à laisser une pierre, fût-elle un cristal, mariner dans de l’eau avant d’en boire le contenu. Ou de la garder à même la peau (la sueur induit une acidité qui altère beaucoup de minéraux).

On a déjà eu des cas d’empoisonnements dus à des minéraux artificiels vendus comme cristal naturel quelconque (des cristallisations de dichromate de potassium ont été assez fréquentes à une époque, et se trouvent encore aujourd’hui. Sous cette forme, c’est un poison mortel.

Dichromates de potassium

Cristaux de dichromate de potassium vendus comme étant de la Lopézite

Des cas de morts ont déjà été enregistré, notamment une petite fille en 1996 qui en a inhalé un fragment de cristal. (« Le règne minéral », No:11 octobre 1996, Jacques Galvier, Syndicat Professionnel des Négociants en Minéraux, Fossiles et Gemmes).

Je parle aussi d’expérience.

            Dans la très large majorité des cas les problèmes de santé liés aux pierres sont légers et bénins, et l’on en entend parler seulement dans le milieu des cristalliers. Ils ne sont pas, ou très peu, documentés et seuls les risques graves font l’objet d’études. Les minéraux et fossiles sont normalement stockés dans des vitrines et ne sont pas manipulés tous les jours, encore moins infusés dans de l’eau à boire.

Cependant, de nombreux troubles peuvent être en lien avec une manipulation récurrente de cailloux, ou la saturation d’un environnement restreint. Sans parler des quelques cas de cancer (et mort) chez les fournisseurs de minéraux uranifères (à base d’uranium), parmi les professionnels et les grands amateurs du milieu, nous avons déjà pu constater des démangeaisons, irritations (fréquentes, surtout avec les sulfates), toux, problèmes de peau, problèmes respiratoires légers, maux de tête chroniques (j’ai déjà été victime de ces derniers à cause d’une caisse d’ammonites pyrifères entassées dans une trop petite pièce : ma chambre).

Qu’arriverait il à une personne cherchant à soigner ce genre de trouble avec les cristaux l’ayant provoqué ?

 

Le cas de l’ambre

            L’ambre n’est pas un cristal, ce n’est même pas un minéral, elle est purement organique. Sa composition chimique et son absence de forme propre la rapproche bien plus d’un plastique (et ses contrefaçons sont d’ailleurs en matière plastique). Il s’agit de résine de conifère densifiée et partiellement polymérisé (on dit souvent « fossile », cependant contrairement aux véritables fossiles l’ambre n’a subi aucune minéralisation ou migration minérale). À ce titre, aucune des tentatives d’explication théorique sur le fonctionnement de la lithothérapie ne peut inclure ce genre d’objets (pas de minéraux, pas de structure, pas d’effet se rapprochant de l’électromagnétisme excepté une vague possibilité d’électricité statique du même acabit qu’avec nos vêtements et nos cheveux).

ambre de la baltiqueIl existe une explication qui sert à justifier son effet antidouleur supposé : la libération d’acide succinique, effectivement présent dans certaines ambres (et dans beaucoup de choses d’origine organique, on en rejette d’ailleurs dans nos urines). Sauf que cet acide n’a pas d’effet particulier sur le corps. On s’en sert d’ailleurs comme excipient en pharmacie (on en trouve dans l’Inofer chez nous) et comme additif alimentaire (E363)

Il n’empêche qu’avant même l’invention du mot lithothérapie, de nombreuses vertus lui étaient associées. Il est encore courant de croiser des personnes faisant sucer des morceaux d’ambres aux enfants en bas âge, ou de les leur mettre en collier, afin d’atténuer la douleur de la pousse des dents. Cette pratique, que condamne la Société Française de Pédiatrie en raison de sa dangerosité potentielle, n’a à ce jour montré aucun effet avéré sur l’enfant. En revanche une espèce d’effet placebo sur les parents a pu être constaté. Ces derniers se réveillent moins la nuit à cause des pleurs du bébé, et le fait de se rassurer sur l’état de leur enfant en attribuant aux dents certains pleurs de douleurs et en résolvant le problème par un collier d’ambre en a fait passer à côté de maladies infantiles. Ajoutons à cela le risque de strangulation avec le collier et d’étouffement si une ambre se détache et vient à être avalée et on comprend bien l’avertissement de la SFP.

Dans la mesure où aucun effet positif mesurable n’a pu être constaté à ce jour, que doit-on conclure du rapport risque/bénéfice à ce sujet ? (Sachant que la douleur de la pousse des dents chez l’enfant est certes pénible, mais bénigne).

Quant à la raison pour laquelle tant de parents jurent avoir constaté un effet sur leur enfant, les vidéos de TeB expliquent très bien le genre de biais d’analyse qui provoquent cette impression.

 it's a rock

La vulgarisation en géologie

            Je ne sais pas ce que vous pourriez penser d’un astrologue qui sortirait la nuit avec un groupe de personnes pour expliquer son travail et montrerait des constellations inexistantes, se tromperait sur les planètes et les noms des étoiles, apprenant ainsi involontairement des choses fausses à son public (indépendamment de son adhésion ou non à l’astrologie). Il n’y a pas mort d’homme, mais il n’est sans doute pas très sain d’apprendre au public des choses erronées, fussent-elles sans importance de prime abord.

what-you-see-what-a-geologist-seesLes lithothérapeutes NE SONT PAS des géologues (et encore moins des pétrologues). Or la géologie est une discipline vaste et complexe. En dehors même des prétentions de la lithothérapie, un nombre incalculable d’erreurs de conception, de classification et d’identification courent dans ce milieu dont la source est avant tout commerciale.

Par exemple, la calcédoine n’est pas une variété d’opale bleu comme on lit souvent (c’est exactement l’inverse) et l’héliotrope n’est pas un cristal en soi. Ces trois objets sont de la calcédoine, elle-même étant simplement du quartz cristallisé plus fin que d’habitude.

Le jade n’est pas un cristal, mais trois cristaux très différents aux apparences vaguement identiques que l’on n’a pas su distinguer les uns des autres avant une époque récente. En fait on faisait parfois la distinction entre jade impérial (kosmochlor) et jade (néphrite ou jadeite selon l’échantillon). Cependant, lorsque l’on se retrouve devant une pierre appelée « jade » sur son étiquette on a l’impression de savoir de quoi il s’agit, et l’on se trompe.

La serpentine n’existe pas vraiment, c’est une catégorie taxonomique abandonnée par les scientifiques car elle regroupe des choses trop différentes.

Le fameux œil du tigre est parfois une amphibole parfois un mélange de quartz et d’amiante (cette amiante aussi est toxique). Ce nom fait seulement référence à l’apparence de certains échantillons polis, il n’apprend rien.

Autre exemple frappant :

« Une orthose est recommandée lors des régimes alimentaires amaigrissants. Elle favorise l’élimination, la dissolution des graisses, le travail des reins et de la vessie.
Elle calme les douleurs dentaires sur les molaires, les dents de sagesse, les os de la mâchoire.
Elle agit sur les glandes salivaires et favorise la salivation.
« 

à comparer avec:

« La pierre de lune régule les cycles menstruels et aide le système digestif et reproducteur. Elle est excellente pour les femmes enceintes, de plus, après l’accouchement, elle favorise la lactation. Placée sur la chakra de la gorge, elle atténue également les maux liés à celle-ci. « 

La pierre de lune EST une orthose. Deux noms pour un même cristal (l’orthoclase en fait) distingués sur la base d’une altération, qui passé par le filtre de la lithothérapie deviennent deux choses distinctes.

Orthose adulaire

Orthose adulaire

C’est encore pire lorsque l’on croise des « pierre de lune de… » avec le nom d’un site et qui s’avère le plus souvent être une calcédoine bleue (rien à voir avec une orthose donc, qui appartient à la famille des feldspaths), que d’autres appelleront opale sans véritablement connaître sa teneur en eau (ce qui est important pour classifier correctement les calcédoines). « Pierre de lune » désigne aussi parfois des labradorites peu colorées. Autant dire qu’avec des noms pareils on peut désigner un peu n’importe quoi.

La tourmaline est souvent présentée comme un cristal unique, et on fera dépendre ses effets de sa couleur, alors qu’il s’agit d’une large gamme de plusieurs variétés.

Jusqu’à l’ambre gris, parfois classé dans les ambres (c’est de la sécrétion intestinale de cachalot).

Je remarque d’ailleurs qu’une incompréhension plutôt importante gagne du terrain dans le public : la dénomination de « cristal de roche », qui semble être de plus en plus interprétée comme « cristal translucide très pur ». Je rappelle au cas où qu’il s’agit en fait d’une très vieille façon d’appeler le quartz hyalin (le quartz auquel tout le monde pense : transparent en cristaux hexagonaux avec des pointes). Tout cela parce que « cristal de roche » sonne mieux que « quartz ».

Les exemples de ce type sont innombrables. Cristaux et roches ne sont pas bien connus du grand public, ce qui permet aux lithothérapeutes de les mélanger outrageusement, et même de déterrer des noms archaïques pour vendre des morceaux de roche comme s’ils étaient des cristaux rares.

Crystal healing

La « sagesse » des anciens

            Un des arguments forts qui soutiennent la lithothérapie, comme toute une gamme de machin-thérapie, est l’ancienneté des pratiques. Forcément, si l’on fait cela depuis des siècles c’est bien que cela doit marcher. N’est-ce pas ?

(NDR: en zététique, c’est ce qu’on appelle l’appel à la tradition Argumentum ad antiquitatem)

Les exemples de personnes que mille ans d’échecs systématiques ne découragent pas de leurs croyances foisonnent pourtant dans l’histoire humaine. Mais plutôt que d’expliquer en quoi cet argument ne tient pas la route, d’autres le feront bien mieux que moi, attardons nous sur de vieilles croyances dont nul ne peut ignorer le ridicule, mais dont des années de bouche à oreille ont masqué la teneur d’origine. Elles servent, discrètement, de fondation à la lithothérapie.

« l’améthyste dissipe les pensées maléfiques et active l’intelligence. »  écrivait Léonard de Vinci, cette pierre est devenue synonyme de spiritualité au point qu’elle orne les bagues des évêques encore aujourd’hui.

Alexandre Le Grand disait aussi « pour avoir un bon esprit et ne s’enivrer jamais, on prendra une pierre d’améthyste qui est de couleur violette ; elle est merveilleuse pour les ivrognes et rend l’esprit propre aux sciences. »

De façon plus prosaïque on peut penser qu’au vue de sa couleur, les romains l’utilisèrent pour réaliser des coupes en cristal de sorte à ce que l’on puisse couper le vin avec beaucoup d’eau sans que cela ne se voit, le nom améthyste proviens d’ailleurs d’une légende greco-romaine liée à cela. Même le nom « a-methos », qui signifie en gros « ne pas être ivre » provient du fait que dans une coupe en améthyste on peut discrètement boire du vin très dilué, et donc ne pas être ivre, et par extension avoir un esprit plus clair. Mille à deux mille ans de bouche à oreille plus tard, on tombe sur… : « les vertus de l’améthyste sont apaisantes et purifiantes. Elle évacue le stress, calme l’insomnie et favorise la concentration et la méditation. C’est une pierre très bénéfique pour le mental, qui permet de trouver l’équilibre et la sérénité. Léonard de Vinci écrivait d’ailleurs à son sujet qu’elle avait le pouvoir de « dissiper les mauvaise pensées et d’aiguiser l’intelligence ». (http://www.lithotherapie.net/articles/amethyste/). Remarquez que sur d’autres sources la référence à l’alcool est toujours présente.

L’améthyste n’est que du quartz avec quelques impuretés de fer.

Au sujet du quartz, au Moyen-âge, Albert le Grand, théologien et philosophe, écrit : « si on le boit avec du miel il donnera du lait aux nourrices », j’imagine qu’il parlait de le réduire en poudre. En Angleterre on prétendait que le quartz pulvérisé et mélangé à du vin permettrait de combattre la dysenterie, et chez nous (XVIè et XVIIè siècle) on faisait porter aux fiévreux une boule de cristal pour faire chuter la fièvre.

En tout cas une chose est sûre, la silicose des mineurs est bien due à la poussière de quartz. Le quartz est même plus toxique en particules micrométriques que la silice amorphe, quant à un quelconque effet sur la fièvre…

Presque toutes les cultures ont attribué un effet au quartz, et c’est donc naturellement que lorsque les lithothérapeutes modernes ont fait leurs recherches et sont tombés sur quantité d’informations contradictoires ils se sont contentés de dire que le quartz sert un peu à tout.

« Comme nous l’avons vu, le cristal de roche peut être utilisé comme amplificateur, et ce quel que soit l’objectif ou l’affection que vous visez.

Par lui-même, il est particulièrement recommandé pour traiter les douleurs du dos, notamment en combinaison avec l’ambre jaune, et les douleurs en général. Le cristal de roche fortifie le corps en général, que ce soit au niveau des yeux (douleurs oculaires), des oreilles (infections, troubles de l’ouïe, acouphènes), du cœur, des poumons, du système digestif, et du système nerveux en général. Pour les problèmes intestinaux et liés à la digestion, vous pouvez réaliser un élixir de quartz en plaçant le cristal de roche dans un bol d’eau, en association avec du jaspe rouge et une magnésite. Laissez-y tremper vos pierres pendant la nuit et buvez chaque matin cet élixir pendant 1 à 2 mois. Vous pouvez également l’utiliser en ce sens si vous avez pour objectif de perdre du poids. » (http://www.lithotherapie.net/articles/cristal-de-roche-quartz/). Et ce n’est qu’un extrait de la page sur le quartz.

Les Chinois broyaient et broient encore des « dents de dragons » ainsi que des « papillons de pierre » qui ne sont que, d’une part, des dents de dinosaures et d’autre part, des spirifers (brachiopodes fossiles du «paléozoïque) pour soigner plusieurs affections qui n’ont aucun lien entre elles. Broyées et cuites dans un pot d’argile elles seraient sensées soigner rhumatismes, cataracte, anémie, problèmes digestifs, etc…
Pour autant que je sache, la lithothérapie n’a pas osé s’attaquer aux fossiles. Aujourd’hui les fossiles ne sont plus mystifiés car on sait de quoi il s’agit… cependant, lorsque cela n’en a pas l’apparence on s’en donne à cœur joie. C’est le cas des « pierres d’orage » ou « doigts de fées », censées être tombés du ciel et soigner toutes sortes d’affections, et qui sont des rostres de bélemnites (les ancêtres des seiches, dont on trouve les rostres modernes sur les plages). Ou simplement de la shungite, qui une fois poli ressemble à un cristal noir mat mais n’est rien d’autre qu’une très ancienne agglomération de restes d’animaux marins ressemblant un peu à du charbon (et se trouve donc être une roche sédimentaire).
Dans les deux cas on trouve aussi des adeptes de la lithothérapie qui portent ces choses en connaissance de cause sans qu’aucune contradiction ne leur apparaisse sur le fonctionnement qu’est censé avoir cette « thérapie ». Pourtant selon ce que l’on a vu précédemment, il serait surprenant de la part d’une roche sédimentaire (composé de reste d’organismes, de roche broyées et d’éléments dissous ayant précipité) d’avoir un quelconque effet. A l’exception de certaines d’entre elles légèrement calcifiées, elles ne comportent aucun macro-cristaux et ne sont finalement que des tas de détritus rocheux informes.

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Staurotide

En Bretagne on donnait aux jeunes mariés la « croisette de Bretagne »: une staurotide maclée en croix qui est censée protéger de la noyade (des marins pêcheurs, forcément), des maladies des yeux, des morsures de chiens enragés (un classique), et même de la folie. N’y aurait-il pas un lien avec ce que l’on dit aujourd’hui de l’andalousite (appelée autrefois pierre de croix et qui en plus du nom prend des formes similaires) ?

« L’andalousite augmente la capacité respiratoire et sera utile en cas de manque d’oxygène .  Elle chasse les peurs et les angoisses irraisonnées et transmet au coeur enthousiasme et générosité.  C’est une pierre qui convient aux personnes qui veulent trouver le juste équilibre entre matérialisme et spiritualité, l’énergie et la paix. » (http://www.bio-sante.fr/lithotherapie/andalousite.html)

L’antimoine prescrit dans certains monastères au 18eme comme calmant fonctionnait bel et bien, et qui selon le dosage calmait définitivement bien.

Vous me direz que les lithothérapeutes n’auraient pas osé conseiller ce genre de choses dont on sait aujourd’hui qu’elles sont toxiques … Mais comme cela a été évoqué, ils ne sont pas pétrologues  :

« Dans la première édition (1992) de mon Dictionnaire des Pierres utilisées en lithothérapie, j’avais dit : « On aura soin de ne jamais pointer un cristal de stibine chargé vers un être de chair car on lui doit amour, assistance et protection ». Dans la deuxième édition (1999), j’avais ajouté : « Cependant, en cas de douleur localisée, on n’hésitera pas à le pointer sur la zone douloureuse car la stibine combat effectivement le mal et la douleur. Pas d’utilisation prolongée. Des séances courtes et répétées sont préférables. » (http://www.reynaldboschiero.com/proprietes-et-vertus-des-pierres/05-134-stibine-proprietes-et-vertus/)

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La stibine est un sulfure d’antimoine, d’ailleurs lorsque l’on parle du minéral antimoine (NDR : son symbole atomique est Sb), c’est à la stibine que l’on fait référence. Et effectivement il convient de s’en méfier.

Et puisque nous parlons de sagesses ancestrales je finirai en citant Pline l’ancien qui, il y a près de deux mille ans, disait sur l’améthyste : « les mages imposteurs assurent qu’elle empêche l’ivresse et que son nom vient de là. » et qui rapportait leurs propos de la sorte :

 « Si les noms de la lune et du soleil y sont gravés, et si elle est ainsi suspendue au cou avec des poils de cynocéphale et des plumes d’hirondelle, elle préserve des maléfices ; et aussi que portée de n’importe quelle façon elle facilite l’accès auprès des rois ; qu’elle écarte la grêle et les sauterelles, si l’on fait en même temps une prière qu’ils enseignent… Je crois bien qu’ils n’ont pas écrit cela sans mépriser et bafouer l’humanité. » 
Pas mieux.

 

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Bannière de site web de thérapie par les cristaux.


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 Sites internet intéressants :

http://www.geowiki.fr

http://www.geoforum.fr/

www.mindat.org/

Une page exceptionnelle pour l’identification des cristaux (en anglais) :

http://www.rockhounds.com/rockshop/mineral_id/#Key

Conseils de lecture :

« Histoire des cristaux » de Bernard MAITTE

« Chroniques de cristalliers » de Sebastien Khayati

Et si vraiment la discipline vous intéresse :
« Elements de géologie » de Charles Pomerol, Yves Abrielle et Maurice Renard

« Sciences de la terre et de l’univers » d’André Brahic et Yves Daniel

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Notes.

[1] Depuis 50 ans la force électromagnétique et la force nucléaire faible ont été unifié dans le cadre théorique.
Il y a quelques années certaines expériences avaient pu la valider, cependant un point essentiel était encore gênant : on ne pouvait l’expliquer complètement qu’en faisant appel au boson de Higgs. Du coup depuis tout ce temps, personne ne l’avait vraiment évoqué publiquement. Depuis que le Higgs a été observé expérimentalement, la théorie est officiellement validée. Le consensus actuel ne dénombre plus que trois forces. (Et la théorie pure a déjà unifié cette nouvelle force électrofaible avec la gravité, il y a quelques années si je me souviens bien, on attend toujours des observations de gravitation quantique pour la confirmer expérimentalement et l’annoncer). Bref, l’adoption officielle de la force électrofaible à la place de l’électromagnétique et de la nucléaire faible date de 2012-2013).

Suite à mon article sur l’histoire du scepticisme au Moyen Age écrit pendant la préparation d’une petite intervention publique sur le sujet au Donjon de Montbazon, des lecteurs du blog ont suggéré qu’il serait de bon ton de poursuivre l’analyse historique de ce courant de pensée. Et Stanislas a relevé le défi. Voici sa contribution.
Acermendax.

 

Une question de méthode : Les XVIIème et XVIIIème siècles

Les XVIe et XVIIe siècles marquent un véritable renouveau pour la pensée sceptique, longtemps restée marginalisée pendant le Moyen Age. Dès le XVIème siècle Michel de Montaigne (1533 – 1592) développe dans ses Essais un scepticisme qui se caractérise par une bienveillante ouverture d’esprit et une volonté nouvelle pour l’époque de se refuser à toute certitude. La pensée sceptique trouve un terrain fécond à cette époque marquée par une remise en cause des idées développées pendant le Moyen Age. Les grandes découvertes bouleversent la vision que l’homme européen a du monde et le confrontent pour la première fois à l’autre. Les découvertes scientifiques telles que l’héliocentrisme, développé par Nicolas Copernic (1473 – 1543), Galilée (1564 – 1642) et Johannes Kepler (1571 – 1630) poussent de plus en plus de penseurs à se méfier de leur sens et des idées préétablies. C’est de cette méfiance, cette défiance de l’apparence que se nourrit le scepticisme moderne.

Cette forme de doute est le mieux incarnée par René Descartes (1596 – 1650) dont le scepticisme est illustré par son exemple de la bougie. Si j’observe une bougie allumée, je sais que c’est une bougie. Si je la regarde quelques heures plus tard, je ne vois qu’un morceau de cire. Comment puis-je savoir que c’est toujours le même objet, mais ayant traversé un processus de changement ? Descartes considérait que ce qui ne change pas, c’est le sujet, celui qui doute et s’interroge. Ce sujet ne peux douter de lui-même ni de sa propre existence, et c’est de lui-même qu’il peut construire ce qu’il sait. Ainsi, à partir de Descartes, le problème fondamental de la philosophie est de trouver un moyen de passer au-delà des apparences et de trouver une méthode pour découvrir ce qui est vrai. Cela est accompli en deux temps, d’abord je doute, ensuite je cherche à établir une vérité de laquelle je ne puisse douter. Descartes doute pour ne plus avoir à douter, son scepticisme est méthodologique et systématique et n’est pas une fin en soi. Ce paradigme selon lequel tout problème est solvable et que tout peut être l’objet de connaissance à condition de trouver la bonne méthode est selon le philosophe Jean-François Lyotard (1924 – 1998) l’essence de la modernité. La modernité est ainsi fille du scepticisme. À la suite de Descartes, de nombreux philosophes ont cherché à comprendre et à expliquer comment l’esprit peut connaitre.

Descartes OKLM

René OKLM

Douter de la raison : David Hume et Emmanuel Kant

Au XVIIIème siècle le scepticisme commence à s’attaquer aux religions organisées, d’abord sous l’influence du déisme, et ensuite de l’athéisme qui fait son apparition en tant que concept. Les français sont les principaux représentants de ce courant, Julien Offray de la Métrie (1709 – 1751), le Marquis de Sade (1740 – 1840), Jean Meslier (1664 – 1729) et bien sûr Voltaire (1694 – 1778) sont les premiers à « écraser l’infâme » (selon les mots de ce dernier), c’est-à-dire l’obscurantisme et le fanatisme religieux. Leur scepticisme est cependant peu développé et peu systématique, et prend ses origines plus dans les doctrines philosophiques de leurs auteurs (athéisme pour De la Metrie, libertinage pour De Sade, matérialisme pour Meslier et déisme pour Voltaire) que dans une véritable démarche de doute. Ce scepticisme critique commence cependant à avoir des effets directs dans la société de l’époque. Ainsi, alors qu’il n’était encore qu’un jeune curé de campagne, l’Abbé Grégoire (1750 – 1831), l’un des futurs pères de la Révolution, poussa ses paroissiens à pratiquer une agriculture scientifique et rationnelle au lieu de se baser sur les superstitions dans lesquelles ils croyaient, augmentant ainsi les rendements et diminuant le temps de travail.

DavidHume

David Hume

Il faut attendre l’Ecossais David Hume (1711 – 1776) pour que le scepticisme redevienne une authentique démarche philosophique. Son scepticisme radical le pousse à nier la possibilité même de la connaissance, ou plus précisément, il considère qu’aucune de nos connaissances n’est fondée rationnellement. Ainsi, lorsque j’observe une partie de billard (Hume était un grand joueur de billard), je vois une bille blanche frappant une bille de couleur. Je suppose alors que la bille blanche est à l’origine du mouvement de la bille de couleur. Mais comment puis-je en être sûr ? Je pourrai certes mesurer la force en joules de la bille blanche et la lier à la vitesse de déplacement de la bille de couleur. Mais comment prouver que c’est bien cette force qui a mis la seconde bille en mouvement. Comment, en d’autres termes, puis-je démontrer un lien de causalité entre les mouvements consécutifs des deux billes ? Hume pensait que c’est parfaitement impossible. En réalité tout ce que j’ai vu, c’est un mouvement suivi d’un second mouvement, rien de plus. Je m’attends à ce que le premier soit suivi du second uniquement grâce à l’expérience et l’habitude : dans les parties de billard précédentes j’ai vu le mouvement de la bille blanche toujours suivi de celui de la bille de couleur, mais je n’ai aucun moyen rationnel de garantir que ce sera le cas à l’avenir. C’est ce que Hume appelle le problème de l’induction.

Ce scepticisme destructeur a eu une influence décisive sur le philosophe allemand Emmanuel Kant (1724-1804). Celui-ci n’est pas satisfait du scepticisme pessimiste de Hume. Kant fonde son œuvre sur trois questions :

  • « Que puis-je savoir ? », qui est une question sur ce que permet la raison, adressée dans Critique de la raison pure.
  • « Que dois-je faire ? », qui est une question de morale, adressée dans ses écrits politiques et sa Critique de la raison pratique.
  • « Que m’est-il permis d’espérer ? », une question métaphysique, adressée dans Critique de la faculté de juger.

Les réponses apportées par Kant à ces trois questions sont extrêmement complexes, et encore en débat de nos jours ; seule la première est d’intérêt ici. Kant croit au pouvoir de la raison, et considère que c’est le sujet pensant et rationnel qui est source de connaissance, et non le réel en lui-même. L’homme n’est donc pas passif face au réel, au contraire il le comprend selon les règles de sa propre raison, parmi lesquelles, la causalité. Mais cette confiance dans la raison pousse Kant à comprendre ses limites. Si nous ne sommes pas passifs face au réel, il nous est impossible de comprendre l’essence même des choses et la réalité en soi (ce que Kant appelle le monde « nouménal »), et que seul le monde des phénomènes nous est accessible. Afin de définir ce que peut la raison, Kant propose donc de limiter ses prétentions, reléguant ainsi l’étude des choses en soi hors de sa portée. En d’autres termes, la science moderne peut comprendre le réel non pas tel qu’il est mais dans les limites de sa propre rationalité. Là est l’originalité du scepticisme de Kant, là où d’autres doutaient du réel, de Dieu, ou simplement des vérités préétablies, Kant fut le premier à douter des capacités de la raison elle-même, ce qui lui permis de catalyser et définir son rôle et son utilisation. Il faut cependant noter que si Kant a apporté une réponse satisfaisante à Hume, sa pensée échouera à convaincre un sceptique qui considère que toute connaissance est impossible. Kant marque définitivement la séparation entre un scepticisme constructif – dont il est lui-même un excellent exemple – où le doute est un moyen pour atteindre la vérité, et un scepticisme plus radical – comme celui de Hume, qui considère que l’homme ne peut prétendre rien connaitre.

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Immanuel Kant

Le tournant de la science : le scepticisme au XIXème et XXème siècle

Le travail révolutionnaire de Kant, en plus d’avoir créé des générations de philosophes qui ne se définiront qu’en opposition ou en soutien à lui, a posé les bases de la science moderne. Les scientifiques ne se préoccupent plus d’alchimie ou d’astrologie comme ont pu le faire Newton ou Leibniz, mais cherchent à comprendre rigoureusement et méthodologiquement le réel. Cette démarche laisse de côté toute réponse métaphysique. Ainsi le kantisme est un refus de la pensée de Descartes qui ne pouvait se résoudre à douter de l’existence de Dieu. On explique les phénomènes réels avec des phénomènes réels, principe illustré par la phrase du scientifique Pierre-Simon de Laplace (1749-1827) : « Dieu ? Je n’ai pas eu besoin de cette hypothèse ». C’est donc après Kant que le scepticisme prend un tournant scientifique.

Le scepticisme s’est toujours méfié des apparences, et quoi de mieux pour aller au-delà des apparences que la science ? Le XIXème siècle est marqué par l’émergence d’une série de disciplines scientifiques dont le but est de refuser le témoignage de nos sens et de notre raison parfois défaillante afin de comprendre le réel tel qui l’est (toujours dans les limites définies par le kantisme).

Les sciences biologiques connaissent une avancée significative avec le développement de la théorie de l’évolution par Jean Baptiste de Lamarck (1744 – 1829) et Charles Darwin (1809 – 1882) – que l’on ne présente plus. Karl Marx (1818 – 1883), Auguste Comte (1798 – 1857) et aussi et surtout Max Weber (1864 – 1920) et Emile Durkheim (1858 – 1917) créèrent la science de l’étude des faits sociaux, la sociologie. Jean-Martin Charcot (1825 – 1893) quant à lui initia une approche scientifique de la psychologie.

Cette effervescence de la science eue de nombreux effets positifs : un recul de la superstition que Max Weber appela le « désenchantement du monde », une augmentation de l’espérance de vie et de la population de nombreux pays d’Europe. Sous l’influence d’Auguste Comte et des positivistes, nombreux sont ceux pensant que la science, fondée sur le doute, contribuera au progrès infini de l’humanité.

Sociologie

La sociologie a des liens importants avec la pensée sceptique

Mais cette époque ne va pas sans problèmes. Pour la première fois, scientifiques et philosophes sont confrontés aux phénomènes des pseudosciences. Théories racistes soutenant le colonialisme, arnaques médicales diverses, disciplines douteuses telles que la physiognomonie, la phrénologie et la psychanalyse, dévoiement des découvertes scientifiques telles que darwinisme social, toutes ces conneries théories fumeuses et souvent dangereuses connaissent alors un engouement que l’on ne peut nier. La question se pose alors, comment différencier la science du mensonge ? Afin de répondre à cette question, le philosophe Karl Popper (1902 – 1994) propose le principe de réfutabilité. Est considérée comme science toute discipline qui se soumet à ce principe, c’est-à-dire donnant elle-même et dans sa propre méthode la possibilité de réfuter et critiquer ce qu’elle avance. Ce critère est donc une méthode destinée à comprendre ce qui est scientifique, c’est-à-dire apte à expliquer et interagir avec le réel, de ce qui ne l’est pas. C’est un puissant outil encore essentiel de nos jours.

Popper

Karl Popper

Le scepticisme contemporain : la méthode contre elle-même ?

Ce ne sont cependant pas ces dérives qui mirent fin à cet âge héroïque de la science. Les deux guerres mondiales et l’utilisation massive de la technologie et de la science à des fins militaires mirent un coup d’arrêt brutal au mouvement positiviste. Ils donnèrent une génération de philosophes très divers se défiant du progrès. Certains comme Bruno Latour (1947 – ), Thomas Khun (1922 – 1996) ou Michel Foucault (1926 – 1984) adoptèrent une posture critique envers la science comme instituion. D’autres plus radicaux remirent en question sa capacité à produire des connaissances, comme Nancy Cartwright (1944 – ) ou Paul Feyerabend (1924 – 1994). Le peu d’influence que ces auteurs ont sur la pensée sceptique contemporaine devient de plus en plus problématique, alors que leurs œuvres pourraient réellement renouveler la pensée critique d’aujourd’hui.

Sapere aude !

keep-calm-and-sapere-aude-3La pensée critique est aujourd’hui inséparablement liée aux sciences naturelles et sociales mais elle ne doit pas devenir leur apanage. Chacun peut et doit penser par lui-même. Mais comme les penseurs mentionné dans cet article le montrent, penser par soi-même ce n’est pas penser n’importe comment, c’est penser avec méthode et rigueur. Fiabilité des sources, systématisation du doute, méfiance envers les réponses faciles et irrationnelles (surtout celles qui semblent nous donner raison !) ont toujours été et restent les caractéristiques du scepticisme. Comme le disait la maxime latine qu’Emmanuel Kant c’était donnée pour devise : Sapere aude ! Ose te servir de ta raison !

À lire :

Montaigne Les essais

Un des fondements de la pensée sceptique, également intéressant pour la sagesse intemporelle de son auteur et son humour acide. C’est aussi un bon exemple du scepticisme chrétien, courant que l’on a tendance à oublier.

René Descartes Discours de la méthode

Un manuel du doute dont la lecture devrait être obligatoire en ces temps de déraison, bien que plus intéressant dans sa démarche et la méthode qu’il propose que pour les conclusions qu’il en tire.

David Hume Enquête sur l’entendement humain

Longtemps lu comme une simple introduction à Kant, cette version simplifiée et grand public du magnus opus d’Hume Traité de la nature humaine n’est que depuis récemment appréciée à sa juste valeur. L’auteur y développe son empirisme et sa pensée y est condensée.

Emmanuel Kant Critique de la raison pure.

Pour les lecteurs confirmés. La compréhension de la pensée de Kant est très difficile et nécessite une connaissance poussée de l’histoire de la philosophie. Son style aride et souvent peu clair n’aident en rien. Lisez d’abord la préface, l’auteur y résume très bien le contenu de l’ouvrage puis passez au cœur du texte si vous le voulez. Sinon lisez Qu’est-ce que les Lumières ? du même auteur, un texte cours et jubilatoire qui est un véritable manifeste de la pensée critique.

Émile Durkheim Les règles de la méthode sociologique

La sociologie est sous-estimée par le courant sceptique alors qu’elle est souvent la clé pour déconstruire idées reçues et préjugés sur les problèmes sociaux et politiques de notre temps.

Karl Popper La logique de la découverte scientifique

L’auteur de cet article n’a pas lu l’ouvrage en question, mais c’est parait-il celui où Popper développe le mieux ses idées sur la méthode scientifique et sur la démarcation entre science et pseudoscience.

Vous avez dit Placebo ?

L’effet Placebo est auréolé de mystère. Ce mot latin bien énigmatique est employé dès que l’on observe un effet thérapeutique sans que cet effet soit directement imputable au médicament ou aux soins que le malade a reçus. Il est tentant d’attribuer à notre inconscient, notre psyché ou notre volonté le pouvoir de guérir le corps indépendamment de toute aide extérieure, et bien des gourous et auteurs New Age suggèrent à ceux qui leur accordent du crédit d’abandonner la médecine « classique », fondée sur des données scientifiques, pour se tourner vers une médecine plus « naturelle », plus en accord avec l’identité profonde des individus, plus respectueuse, plus douce, etc.

Il y a une tentation à la pensée magique en chacun de nous, notre égo est séduit par l’idée que l’on puisse aller mieux par soi-même, que la guérison soit un pur acte de volonté. Et le Placebo vibre à la fréquence de cette corde sensible.

Le mot Placebo, qu’on le veuille ou non, est désormais porteur de ce sens ésotérique en partie parce que c’est un mot complètement incompréhensible pour le commun des mortels qui ne savent pas qu’il s’agit d’une forme du verbe « plaire » en latin… donnée étymologique qui ne nous renseigne d’ailleurs aucunement sur la signification qui lui est donnée par les professionnels de la santé et de la recherche.

placeboeffectDans le monde de la science, l’effet Placebo n’a jamais eu le sens de « pouvoir de l’esprit sur le corps », c’est pourtant ainsi qu’il est souvent entendu aujourd’hui. Le Placebo, c’est d’abord le pouvoir de l’esprit sur l’esprit, et, par des mécanismes qu’il reste à expliquer en détail, c’est l‘influence des ressentis de l’individu sur certaines fonctions sécrétrices du corps (production d’antalgiques, par exemple) qui ont elles-mêmes in fine un impact sur les paramètres médicaux. L’incomplétude de notre compréhension des phénomènes impliqués ne doit pas laisser croire qu’il est raisonnable d’y discerner quoi que ce soit de paranormal. Si quelque chose de paranormal/énergétique/vibratoire est à l’origine de l’effet placebo, il deviendra raisonnable de le défendre après qu’une preuve aura été produite et dûment expertisée. En l’état actuel de nos connaissances, c’est une hypothèse coûteuse car aucun indice sérieux ne pointe dans cette direction de manière spécifique.

Changer les mots ?

C’est pourquoi il pourrait être profitable de mettre de côté ce vocable ambigu et d’employer une expression plus transparente pour faire comprendre la nature de cet effet. On propose donc de remplacer effet placebo par « effets contextuels » (au pluriel) afin de montrer que ce qui se passe autour du traitement, pendant, avant ou après, a son importance sur la manière dont le patient va réagir.

On explique aujourd’hui l’essentiel de ces effets contextuels ; on sait sous quelles conditions ils se manifestent, on sait même en maximiser les effets. En face du New Age et des pratiques alternatives irrationnelles et dangereuses, une erreur inverse doit absolument être évitée, c’est celle de croire qu’il y a une opposition entre effets contextuels et vraie médecine. Les effets contextuels sont une composante de tous les traitements, y compris ceux qui ont un effet intrinsèque, il ne faut donc pas les bannir, mais au contraire les utiliser au bénéfice du patient, dans le cadre d’une prise en charge qui tient compte de la dimension psychologique de l’acte thérapeutique.

NB. L’effet placebo englobe un autre type d’effet, que l’on pourrait oublier tant il est trivial : notre corps guérit tout seul comme un grand dans la plupart des situations. Nous avons un système immunitaire et tout un tas de mécanismes de réparations qui entrent en jeu dès que nous sommes victimes d’une maladie ou d’une blessure. Quand nous consultons un soignants ou que nous prenons un traitement, c’est généralement au moment le plus désagréable, au pic de la douleur et des symptômes. À l’effet du traitement va donc s’ajouter celui de la guérison ‘naturelle’ du corps. Ce n’est peut-être plus exactement un effet contextuel (encore qu’on soit toujours dans l’environnement de l’acte thérapeutique…) mais c’est à tous égards un effet non spécifique et sans lien avec le soin apporté au malade.

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Un vide dans la pratique médicale ?

Si les médecines alternatives/douces/énergétique/etc. pullulent, c’est peut-être aussi parce que la médecine classique donne l’impression d’avoir choisi de négliger la dimension empathique et psychologique, le lien entre soignants et soignés, central dans les affections psychologiques et psychiatriques, mais également présent dans tous les cas dans la transaction qui s’opère quand une personne demande à une autre de la soigner.

Il y a peut-être un vide empathique à combler de la part de nos praticiens de la santé qui doivent mettre les effets contextuels de leur côté. À l’inverse doit-on tolérer, souhaiter, encourager la pratique consistant à vendre des produits dénués de toute activité intrinsèque et donc employer 100% d’effets contextuels en faisant croire aux patients à l’existence d’effets spécifiques ? Nous nous étions déjà posé la question sur ce blog.

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Tout comprendre ou presque.

Pour tout savoir sur l’effet Placebo, voici trois vidéos.
Dans la première, l’équipe de la Tronche en Biais retrace l’histoire du concept et la manière dont on a traqué les causes de l’effet Placebo.

Dans la deuxième, Climen le pharmacien nous présente le principe de l’homéopathie qui n’est pas vraiment une médecine par les plantes comme on l’entend souvent dire.

Enfin, Le Psylab explique l’importance de la dimension psychologique dans l’acte thérapeutique.

 

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Ressources pour aller plus loin :

— Article de Jean Brissonnet : http://www.pseudo-sciences.org/spip.php?article1604

— Article de Jean Benoist http://classiques.uqac.ca/contemporains/benoist_jean/aspirine_ou_hostie/aspirine_ou_hostie_texte.html


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