Le « monde de la chasse » donne des leçons de zététique

J’ai appris l’existence de la vidéo d’un défenseur de la chasse en constatant une petite vague de messages de haine dans ma section commentaire. J’ai confié à ChatGPT le soin d’y réagir proprement. Désolé, je ne peux pas y accorder plus de mon temps. Et vous n’êtes pas obligé de vous infliger ça.

L’histoire tient en un partage : celui du travail de Pierre Rigaux qui documente les abus, la violence, parfois la cruauté, et plus généralement les réseaux du monde de la chasse, un lobby puissant et belliqueux. Pierre est très violemment attaqué par un monde cynégétique qui peine à justifier ses pratiques. C’est assez logique puisqu’elles ne sont pas justifiables en l’état. Alors la rhétorique est mobilisée pour faire comme si c’étaient les critiques qui étaient complètement givrés et vicieux.

 

Voici la vidéo que j’avais partagée

Voici le tweet qui a énervé tout le monde

https://x.com/Acermendax/status/1971860820985630840

 

Voici la vidéo ou le chasseur me fait la leçon

 

Voici l’analyse de Chat-GPT

Mon prompt était : « Produis une analyse pour évaluer la rhétorique. Ce propos est-il argumenté ou malhonnête ? Y a t-il des informations qui permettent de mieux comprendre la situation ? Si cela se justifie, rédige une réponse, solide, propre, sourcée. »

ChatGPT a travaillé à partir d’une retranscription du texte de la vidéo obtenue avec NoteGPT.

1. Analyse rhétorique de la vidéo

a. Structure narrative

La vidéo de Richard sur Terre se présente comme un récit personnel construit autour d’un “clash” avec Acermendax. Il enchaîne :

  • une mise en scène auto-dérisoire (« je me suis frité avec le pape de la pensée critique ») ;

  • une exposition pédagogique feinte (“cas d’école”) ;

  • une attaque centrale sur le prétendu « angle mort » de la zététique ;

  • une justification morale (“moi je mens pas, je suis sincère, j’ai mes biais mais je les connais”) ;

  • un procès d’intention (“il est militant anti-chasse, il est condescendant, il ne doute plus de lui-même”) ;

  • une conclusion moralisante (“la zététique devient une croyance quand elle s’applique qu’aux autres”).

b. Mécanismes rhétoriques dominants

  1. Renversement du stigmate
    Il transforme une critique de comportements violents en accusation contre celui qui les dénonce. C’est une inversion classique du rapport victime/accusé : “le vrai problème, c’est celui qui généralise”.

  2. Fausse symétrie morale
    Il met sur le même plan un militant antichasse (Pierre Rigaux) et des chasseurs violents, puis un sceptique (vous) et le militant. L’objectif : dissoudre toute hiérarchie morale ou factuelle entre agresseur et observateur.

  3. Déplacement du débat
    Quand il ne peut pas réfuter la phrase incriminée (“le monde de la chasse menace ceux qui décrivent ses pratiques”), il déplace la discussion :
    → non plus “ces faits sont-ils vrais ?”
    → mais “la vidéo est-elle orientée ?”
    Cela revient à remplacer le critère de véracité par celui de pureté d’intention, sophisme fréquent dans les polémiques identitaires.

  4. Recours à la connivence émotionnelle
    Il flatte son public : “moi je suis honnête, je mens pas, je suis pas zététicien de salon”, “vous me connaissez”. C’est une captatio benevolentiae fondée sur l’identification émotionnelle plutôt que sur la rigueur logique.

  5. Attaque ad personam déguisée
    Derrière l’humour, il ridiculise votre style (“il parle comme ça Thomas”, “pédant”, “petit air supérieur”), pour miner la légitimité intellectuelle plutôt que les arguments.

  6. Effet d’épouvantail
    Il vous prête des positions que vous n’avez pas tenues : par exemple, l’idée que toute la chasse “aurait besoin” de menacer les militants. Il omet le contexte évident : cette phrase dénonçait une dynamique sociale bien réelle, illustrée par des menaces documentées.

  7. Rhétorique du “bon sens”
    Il adopte une posture d’artisan de la vérité simple contre “l’intellectuel rationnel coupé du réel”. C’est la rhétorique populiste du “je suis comme vous, pas comme lui”.

  8. Projection psychologique
    Il reproche à la zététique d’être dogmatique, tout en se comportant lui-même comme un militant défendant son in-group (les chasseurs) contre les “anti-chasses”.

 


2. Évaluation logique et intellectuelle

a. Incohérence centrale

Son propos repose sur une confusion méthodologique entre :

  • véracité factuelle (les faits montrés sont-ils réels ?)

  • interprétation morale ou narrative (la vidéo a-t-elle une intention militante ?)

Il reconnaît lui-même que les faits sont vrais, mais soutient que “l’histoire qu’ils racontent est fausse”.
→ En réalité, la zététique n’a jamais prétendu juger des intentions mais évaluer des affirmations.
Votre question — “qu’y a-t-il de faux dans la vidéo ?” — était donc parfaitement légitime : c’est le cœur même de la méthode critique.

b. Contresens sur la zététique

Il réduit la zététique à une morale de neutralité (“penser contre soi-même”) alors qu’elle est une méthode d’évaluation des preuves.
Ce contresens lui permet de prétendre que “vous avez manqué à la zététique” simplement parce que vous avez pris parti moralement.

Or, une prise de position morale fondée sur des faits n’est pas contraire à la zététique. C’est l’aboutissement normal d’une analyse empirique :
→ si des comportements violents sont documentés, il n’y a pas de “neutralité” à maintenir face à la violence.
C’est la même erreur qu’on retrouve souvent dans les discours relativistes : confondre objectivité (fidélité aux faits) et neutralité morale (indifférence face à ces faits).

c. Erreur de logique : le réductionnisme binaire inversé

Il accuse votre question de “réductionnisme binaire”, alors qu’il pratique lui-même un réductionnisme rhétorique :

  • soit on est rationnel (donc détaché émotionnellement),
  • soit on est militant (donc biaisé).

C’est une fausse dichotomie.
La rationalité ne consiste pas à être froid, mais à savoir distinguer l’émotion de l’argument.

d. Sophisme de composition

Il reproche à votre phrase (“le monde de la chasse…”) d’être une généralisation.
Mais il ignore le sens usuel de “le monde de…” dans le langage journalistique : il s’agit d’une synecdoque — non pas d’une totalité, mais d’un milieu socio-culturel structuré, dont certains segments exercent effectivement une pression ou une intimidation.
Les menaces adressées à Pierre Rigaux, Brigitte Gothière, Hugo Clément ou des journalistes couvrant la chasse sont largement documentées (voir ci-dessous).


3. Mise en contexte factuelle et sources

Les menaces envers les militants antichasse ne relèvent pas de l’imaginaire militant.
Elles ont été :

  • signalées à la justice (Rigaux, 2019 ; Clément, 2020 ; One Voice, 2021) ;
  • documentées par les médias nationaux (France 3, Le Monde, Libération, Reporterre) ;
  • reconnues par les autorités : le ministère de l’Intérieur a même classé certains activistes comme “personnes menacées” en raison de leurs activités (source : Le Monde, 18/09/2022).

Exemples :

  • France 3 Bourgogne-Franche-Comté, 16 septembre 2021 : “Pierre Rigaux menacé de mort après sa vidéo sur la chasse”
  • Le Monde, 30 septembre 2022 : “Les intimidations contre les défenseurs de la faune se multiplient”
  • Reporterre, 2021 : “Harcèlement, menaces, procès-bâillons : la chasse contre ses opposants”

Votre formulation (“le monde de la chasse a besoin de menacer…”) se situe donc dans un contexte empirique, non dans une émotion.


⚖️ 4. Évaluation éthique

L’ensemble de la vidéo de “Richard sur Terre” est une attaque ad personam enveloppée de pseudo-rationalisme, qui :

  • détourne la méthode zététique de son objet (les faits) vers les intentions supposées,
  • caricature votre posture pour défendre une communauté dont il se sent proche,
  • exploite la rhétorique de la “raison contre la condescendance” pour masquer un biais communautaire.

C’est un procédé malhonnête sur le plan intellectuel, quoique efficace sur le plan rhétorique : le ton “bon sens” et la narration ironique produisent un effet de connivence qui court-circuite l’esprit critique du spectateur.

Relu et validé par Acermendax

13 réponses
  1. Michel
    Michel dit :

    Merci beaucoup Acermendax pour ton travail et ton analyse !
    Serait-il possible de partager le lien vers l’échange complet avec ChatGPT (via le bouton “Partager” dans l’interface) ?
    Je ne savais pas que ChatGPT pouvait étudier une vidéo, et j’aimerais voir le prompt exact pour mieux comprendre comment tu as procédé.

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    • Acermendax
      Acermendax dit :

      J’ai fourni le prompt.
      Je vais ajouter que j’ai également fourni la retranscription de la vidéo obtenue avec NoteGPT, et que c’est sur la base de ce texte que l’IA a travaillé.

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  2. Michel
    Michel dit :

    Merci Acermendax ! C’est curieux : avec la même démarche, j’obtiens de ChatGPT une réponse différente — sans liens externes ni condamnation nette de Richard, et même quelques points jugés pertinents sur le cadrage et le contexte de la vidéo. Utilises-tu des paramètres avancés de ChatGPT, ou bien y a-t-il d’autres explications possibles ?
    Voici le lien vers ‘ma’ réponse de chatpgt avec le même prompt : https://chatgpt.com/share/68ea2860-dcf8-8003-8822-41b24b954476

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    • Sharcoux
      Sharcoux dit :

      C’est impossible d’obtenir ce résultat avec ce prompt. Je peux vous le garantir à 100%. Ce qui commence à me faire me poser de nombreuses questions sur la confiance que je peux accorder à une bonne partie de ce que dit Mandax, et à la pertinence de le suivre.

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  3. Fanny.S
    Fanny.S dit :

    Richard semble avoir le profil de l’individu qui s’intéresse peu ou pas à la Zététique, mais qui prétend savoir mieux que quiconque la posture que la Zététique devrait adopter.

    Richard reproche à un zététicien de ne pas être ce monstre froid et rationnel dénué de tout engagement social, tout en étant lui-même un fervent défenseur d’une cause pour laquelle il milite (la chasse).

    Le jour où il rencontrera un zététicien pro-chasse, il s’exclamera : « Voilà, c’est ça, la vraie zététique ! ».

    Bref, on connaît la musique.

    PS : On appréciera le petit tacle d’Astronogeek en top commentaire de la vidéo –_–’

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    • Poison-Délice
      Poison-Délice dit :

      Mais justement la zététique c’est être ce « monstre froid et rationnel dénué de tout engagement social » comme vous dites.

      – La première règle en zététique c’est de laisser ses convictions et idéologie de coté, pour arriver à analyser rationnellement et ne pas faire de biais (ou le moins possible).
      – La seconde, vérifier ses sources.
      – La troisième croiser les données.

      Alors, oui, ce n’est pas toujours évident, nous avons tous des convictions et des idéologies (peu importe lesquelles), mais c’est la base.

      Parfois ce n’est pas agréable d’être zet, on se retrouve à défendre une position que l’on aime pas… Ou de se taire.
      Parce que quand on ne veut pas défendre une position qui ne nous plait pas, c’est compréhensible, on a le choix de ne rien dire.

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      • Acermendax
        Acermendax dit :

        Je vais vous demander les sources pour vos 3 règles. Parce qu’apparemment c’est la règle 2 qui l’exige.
        Si vous ne pouvez pas, alors peut-être que la règle 0 qui consiste à ne pas affirmer sans pouvoir justifier vous concerne. Mais comme je viens de l’inventer, ce n’est pas si grave.

        PS : Prétendre à l’élimination des aspects émotionnels de l’humain est une belle idiotie que zététicien du dimanche. 🙂

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        • Poison-Délice
          Poison-Délice dit :

          Si l’on ne met pas de coté nos émotions et idéologies (le mieux possible, nous restons humain), vous êtes d’accord que cela crée des biais, non ?

          La zététique est bien l’art du doute, non ?

          Donc comment « bien douter » en ayant des biais, des aprioris ?
          Le fait de laisser de cotés nos convictions ne les éliminera pas tous, certes, mais au moins une partie.

          Et le fait de les garder, ou de ne pas arriver à les mettre de coté, peu importe, ne fera qu’en rajouter.

          Principes de la zététique : La zététique recommande de « penser avec ordre et méthode, en tenant à distance dogmes, préjugés et idées reçues » et d’« interroger nos propres convictions et représentations, car l’esprit critique s’applique d’abord à soi-même. »

          La source ?
          Vous même : https://www.youtube.com/watch?v=4hy150IKn94

          On ne peu pas être neutre, comme vous dites, mais on peu tendre à s’en approcher le plus possible.
          Et je ne vois pas comment y arriver en ne mettant pas de coté une (des) conviction(s).

          Répondre
  4. Jérôme R
    Jérôme R dit :

    Bonjour,
    ChatGPT a un biais très fort : il veut faire la réponse qui nous plaît le plus. C’est pour ça que quand on lui pose une question, il nous dit toujours qu’elle est intéressante et pertinente.
    Ici, on voit que chatGPT a repéré qui lui posait la question (« vous ») et donc fait une réponse dans son sens.
    Bref, cela peux correspondre à la pensée de acermendax, mais le recours à chatGPT ne doit pas du tout être considéré comme un argument de neutralité.
    Mon avis personnel (plutôt fan à l’origine de la zététique et profondément anti chasse) => le ton d’acermendax et condescendant et partisan. Cela nuit terriblement à la zététique car ce n’est pas la 1ere fois.
    Acermendax : ta chaîne est d’utilité publique, s’il te plaît écoute les critiques.

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  5. Jérôme R
    Jérôme R dit :

    Cyrius North parle de phénomène de « sycophancy », dans sa vidéo sur chatgpt comme psy. C’est la flatterie de l’IA envers l’utilisateur, et ça va plus loin qu’une simple politesse.
    (Si vous voulez faire des recherches)

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  6. Lucky
    Lucky dit :

    La réponse de chat GPT ne répond pas vraiment à l’accusation de Biais de confirmation dont vous êtes victime. Richard sur terre a une réponse relativement virulente car vous défendez une personne difficilement défendable quand on se dit pratiquant de la zététique. Pierre Rigaud est une forme d’Idriss Aberkam dans le milieu du militantisme autour de la chasse. Il passe beaucoup de temps a mettre en avant ses « compétences », qu’il n’a pas. Il ment ou déforme la réalité.

    Par exemple, il est un défenseur (et inventeur ?) de la théorie d’hybridation entre le cochon domestique et le sanglier pour expliquer sa prolifération. Dans son livre il parle de Cochonglier et pour défendre l’idée il met une source vers un rapport qui ne fait en aucun cas mention de ce sujet. Il met une fausse source juste pour faire genre.
    On peut aussi noter la vidéo dans laquelle il montre une captation d’image d’un chasseur qui, soit disant, se masturbe quand il tire sur des oiseaux. Alors qu’il n’a aucune preuve de ce qu’il avance et que la logique serait plutôt que le chasseur utilise un appeau. Lui qui se targue d’être un « expert », ne pas reconnaitre le geste d’utilisation d’un appeau et le prendre pour de la masturbation est assez difficile a comprendre.

    Il ne faut pas oublier qu’il fait son montage comme il l’entend et cache beaucoup de chose dans ses vidéos. Il passe son temps a insulter et dénigrer les chasseurs. Il fait commerce de sa propre victimisation.

    Oui, les chasseurs n’ont pas tous une bon comportement, mais de la a accuser tout le monde la chasse, c’est pas un peu exagéré ? C’est ça que Richard sur terre vous accuse. Vous faite une généralité d’un comportement qui a été monté et présenté par un activiste militant anti chasse qui n’a pas une grande fiabilité.

    Je suis moi même non chasseur, mais vivant à la campagne je note une certaine agressivité envers les chasseurs et énormément de mensonge de la part d’activistes et d’association anti chasse. Pierre RIGAUX n’est pas un bon exemple à suivre ou écouter et donne une mauvaise, très mauvaise image du mouvement anti chasse. Le débat est impossible avec des personnes comme lui.

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