RETRACTED : Chloroquine, covid19 et mauvaise science
C’est l’étude avec laquelle on a fait exploser la controverse : la première publication scientifique visant à montrer que l’on tient un traitement efficace contre le void19 : l’hydroxycholoroquine. La justification scientifique du protocole Raoult était de la mauvaise science. C’est officiel. C’est rétracté. Adieu « Gautret et al. 2020 — Hydroxychloroquine and azithromycin as a treatment of COVID-19: results of an open-label non-randomized clinical trial ».
Et il faudra qu’on en parle, parce que cela soulève bien des questions !
Rappel des graves problèmes de cet article de 2020 tels qu’ils sont exposés dans cet autre article : Barraud D, Besançon L, Bik EM, Billy E, Clarot F, Frank F, Guihur A, Hajage D, Lacombe K, Maisonneuve H, Molimard M, Mulot M, Samuel A. (2023) Why the article that led to the widespread use of hydroxychloroquine in COVID-19 should be retracted. Therapie. 78(4):437-440. doi: 10.1016/j.therap.2023.06.001. Epub 2023 Jun 2. PMID: 37321944; PMCID: PMC10236894.
Les critiques
L’étude est non randomisée avec un échantillon très réduit, ce qui limite la fiabilité des résultats. Le groupe contrôle était inapproprié, car il provenait de différents hôpitaux, ce qui complique la comparaison des données. On a également relevé des incohérences entre les résultats publiés en 2020 et une ré-analyse effectuée en 2021.
En ce qui concerne les aspects cliniques et statistiques, on doit signaler les seuils de positivité PCR différents entre les groupes, ainsi que des erreurs de transcription des résultats PCR pour six patients du groupe contrôle. L’analyse statistique est inadéquate, et laisse suspecter un p-hacking, c’est-à-dire une manipulation des données pour obtenir des résultats significatifs. Autrement dit l’honnêteté des données présentées est hautement discutable.
Les questions éthiques sont également sérieuses. L’étude a débuté avant que l’autorisation officielle ne soit accordée, et deux enfants de 10 ans ont été inclus malgré les critères d’exclusion. De plus, le processus de révision par les pairs est très douteux, avec une soumission, une révision et une acceptation ayant eu lieu en seulement un jour.
Les conséquences de cette étude sont préoccupantes. Elle a conduit à la promotion prématurée de l’hydroxychloroquine comme traitement du COVID-19, entraînant une pénurie de ce médicament pour les patients atteints de lupus et d’arthrite inflammatoire. De plus, elle a conduit à un gaspillage considérable de ressources de recherche, avec plus de 250 études menées dans le monde entier sur ce sujet. Enfin, il existe une inquiétude quant à une possible augmentation de la mortalité liée à l’utilisation inappropriée de l’hydroxychloroquine (Voir les travaux de Pradelle et al. rétractés sous la pression de la complosphère mais en cours de re-soumission)
Le Gautret et al. Doit être rétracté tout simplement parce qu’il n’est pas possible d’avoir confiance dans l’honnêteté de la démarche des auteurs. La littérature scientifique est un édifice entièrement constitué de confiance qui ne peut pas s’accommoder de contributions à ce point entachées.
Il aura fallu plus de quatre ans, mais c’est chose faite. Adieu Gautret et al. 2020
Je vous explique en vidéo le communiqué officiel du journal qui a pris la décision de cette rétractation longtemps attendue.
La note de rétractation avec les explications du journal est disponible à cette adresse.
Bonjour,
nous avons eu, il y a quelque temps, des échanges animés sur ce blog à propos de l’approche personnelle de la science par Didier Raoult. Certains d’entre nous, à la lumière de ses écrits avant la pandémie COVID19, mettaient en doute sa conception personnelle de la science, de sa pratique et de l’épistémologie.
https://menace-theoriste.fr/la-science-et-sa-bonne-pratique/
https://menace-theoriste.fr/de-lepistemologie-tres-personnelle-de-didier-raoult-a-la-bonne-pratique-de-la-science/
La décision, rapportée par Acermendax, de retirer l’article de Raoult va dans le même sens. C’est à la fois rassurant et inquiétant. Rassurant parce qu’une mauvaise étude ne sera plus reconnue par la postérité, mais inquiétant parce que le grand public va retenir que la science n’est pas fiable ou encore que, peut- être, il y aurait là-dessous quelques conspirations à l’œuvre. Et pourtant, les détails fournis par Acermendax sont sans appel. Nous pourrions rêver que les laudateurs inconditionnels du professeur puissent admettre qu’ils se sont trompés : il n’est pas honteux de se tromper, et il est sain et courageux de le reconnaître. Rêvons donc !
François