L’homéopathie est mauvaise pour les pharmaciens (témoignage)

Petit drame pharmaceutique banal.

Une officine affiche une publicité avec des recommandations homéopathiques pour soigner divers maux. C’est banal, mais c’est de la charlatanerie : l’homéopathie est une pseudo-médecine sans efficacité et coupable d’inciter les consommateurs à s’éloigner des parcours de soin qui peuvent sauver ou prolonger leur vie.

Un client bienveillant réagit avec un commentaire courtois et mesuré sur Google. La pharmacie répond sur un mode bullshitesque : elle défend son business ou sa croyance, mais certainement pas le respect de la santé publique. Le client contacte l’Ordre des Pharmaciens qui considère qu’il n’y a pas d’affaire puisque les produits homéopathiques sont considérés comme des médicaments. « Circulez, y a rien à voir ! ». Et la DGCCRF semble impuissante. Fin de l’affaire ?

En fac de pharmacie ou en Institut de formation des infirmiers, le discours est le même : on s’autorise à enseigner une croyance quasi-religieuse en l’homéopathie parce que légalement ces produits sont des médicaments qui doivent être présentés aux étudiants. [Je suis parfaitement d’accord pour que l’homéopathie soit enseignée, car c’est un excellent moyen d’acquérir des notions d’esprit critique très utiles pour des professionnels qui vont être confrontés à un public accompagné de croyances pseudo-scientifiques].

Ma conclusion, forgée au fil des années, est que nous avons besoin que le législateur mette enfin la loi en conformité avec la science et l’éthique de la santé en ne délivrant pas un sauf conduit pour une pratique périmée, trompeuse, coûteuse et de nature à altérer la relation de confiance entre le malade et le monde des professionnels de santé. L’homéopathie est dangereuse, non pas à cause des effets de ses produits (ils n’en ont pas), mais pour ses effets dévastateurs sur la compréhension des sciences et le lien de confiance primordial qu’il faut tisser entre le public et le monde de la santé.

 

Mon travail sur le sujet

Livre : Connaissez-vous l’homéopathie ?

Série de vidéos :

 

 

Acermendax

Le témoignage

Voici le témoignage qui m’a été envoyé par mail

« Je souhaite vous apporter mon témoignage comme vous devez en recevoir de nombreux je suppose. Cela concerne une anecdote illustrant bien les dérives pseudo-scientifiques de l’homéopathie en pharmacies, avec la forte emprise et complaisance qu’il y a autour et ce à plusieurs niveaux. Ayant contacté la pharmacie en question (dans le déni) puis la DGCCRF (impuissante semble-t-il) ainsi que le CROP, Conseil Régional de l’Ordre des Pharmaciens (complaisant avec ces pratiques), je décide donc à ce stade de vous contacter pour vous faire part de ce dont j’ai été témoin.

Il y a quelques semaines je me suis rendu à la pharmacie de xxxx située à Nantes (44300), en arrivant au comptoir j’ai été surpris de constater la présence d’une petite affiche scotchée, manuscrite, présentant des recommandations homéopathiques pour toute une floppée de symptômes plus ou moins importants (sans autres précisions par ailleurs). L’affiche était scotchée sur le comptoir, bien orientée côté clientèle. A ce stade, n’ayant pas le temps d’argumenter ni de savoir si cela est légal et n’étant pas à l’aise avec la situation, je n’ai pas fait de commentaire à la pharmacienne à ce sujet.

Plus tard, en me renseignant sur le code de déontologie des pharmaciens (trouvable sur le site du CNOP) je me conforte dans le fait que cette pratique y est contraire et j’ai donc décidé de laisser un avis sur la page Google de la pharmacie, leur donnant l’occasion de s’expliquer et d’agir en conséquence notamment en retirant l’affiche. J’ai bien veillé à ce que mon avis soit factuel et respectueux, et clair pour le grand public sans m’embarquer dans des détails techniques.

 

Leur réponse me paraissant un mélange de déni et désinformation (faisant moi-même de longues études en biologie/santé il ne m’a pas été bien difficile d’y reconnaitre de nombreux arguments fallacieux), c’est à ce moment que j’ai décidé de contacter l’Ordre des Pharmaciens et la DGCCRF en leur résumant les mêmes éléments (avec l’ajout de commentaires reprenant point par point ce qui n’allait pas dans la réponse de la pharmacie sous mon avis Google, je vous épargne ces détails).

 

Je vous fournis également la réponse de la pharmacie suite au signalement à la DGCCRF, qui encore une fois n’est pas du tout à la hauteur pour des professionnels de santé. Je pense qu’il est important de préciser :la chose suivante : dans ce mail de réponse, il est mentionné « Nous vous joignons la réponse (que vous avez aussi reçu) de Monsieur COUTABLE, Président du CROP ». En réalité je n’ai jamais reçu cette réponse du CROP, je n’en ai connaissance que parce que la pharmacie me l’a remise en copie. (Pour résumer : après mon signalement à la DGCCRF, la DGCCRF a transmis mon signalement à la pharmacie, laquelle est tenue d’y répondre, c’est donc un mail de la DGCCRF que j’ai reçu, contenant la réponse de la pharmacie, dans lequel la pharmacie me copie la réponse du CROP. Ayant à la base contacté en parallèle le CROP, celui-ci ne m’a jamais répondu, du moins à ce jour, mais a bien contacté la pharmacie).

 

Dans la foulée de cette histoire, j’ai également constaté que la pharmacie a mobilisé de nombreux clients fidèles pour laisser des avis positifs sur leur page Google et donc invisibiliser ou discréditer le mien.

J’avoue que la situation me sidère un peu, qu’autant de personnes diplômées en santé affichent toujours cette ferme complaisance vis-à-vis de l’homéopathie, mettant de côté leur éthique et la science. La situation peut sembler anodine mais à mon sens elle est révélatrice de l’emprise des dérives pseudo-scientifiques. Montrer une complaisance, une tolérance à l’égard de ces pratiques c’est tourner le dos à la science, alors que justement les pharmaciens (et par-dessus-tout leur Ordre) doivent en être les garants auprès du grand public.

J’ai à cœur de faire évoluer les choses à mon niveau, recadrer le médical autour de la science, la confiance et non autour d’idéologies ou du profit. D’ailleurs étant moi-même un individu « client » puisque je dois bien me rendre en pharmacie pour des médicaments, je suis tout autant légitime à exiger de ces professionnels de santé une relation de confiance professionnel-client. Un pharmacien qui fait la promotion de l’homéopathie, je n’ai pas confiance.

Je vous remercie d’avance pour le temps que vous accorderez à cette lecture. Bonne continuation dans la réalisation de vos contenus, ce sont des gens tels que vous qui font bouger les choses et qui motivent des gens lambda tels que moi à ne pas rester silencieux ou passifs face à la promotion de pseudo-sciences et pseudo-médecines.

Bien cordialement,

Un abonné anonyme. »

2 réponses
  1. Patricia Dechamps
    Patricia Dechamps dit :

    Ce client a parfaitement raison.
    Il n’est pas un chimiste digne de ce nom et au fait des principes de fabrication des, soi-disant, « médicaments » homéopathiques qui puisse croire à cette pratique ! Malheureusement, les pharmaciens d’officine sont aussi des boutiquiers : ils soignent leur chiffre d’affaires et redoutent par-dessus tout de perdre un client et de l’envoyer à un concurrent moins scrupuleux ! On donne aux clients ce qu’ils demandent et l’argent ainsi gagné n’a pas d’odeur. « Effet placebo oblige, ça ne peut que lui faire du bien ! ».
    Dans nos pays qui se prétendent civilisés, une telle tolérance pour de la pseudo-médecine est malhonnête et profondément choquante !

    Répondre
  2. TS
    TS dit :

    J’ai vécu à peu près la même expérience, avec un pharmacien d’Andorre qui proposait de l’homéopathie à des cancéreux… en substitution de leur traitement! Andorre est hélas encore plus hors de portée des contrôles de Santé publique. Il s’y pratique n’importe quoi, et les charlatans dangereux y ont beau jeu!

    Répondre

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