L’Erreur en Question — Tronche en Live #9 (Pierre Kerner)
Editorial
Ainsi que l’a écrit Daniel Dennett, faire de la science, c’est faire des erreurs en public.
L’erreur est féconde. C’est en corrigeant nos erreurs que l’on accède à des connaissances nouvelles, et il faut parfois se tromper pour constater qu’on ignore une chose qu’il reste à découvrir. L’acquisition d‘un savoir-faire passe également par un processus heuristique qui consiste à répéter les essais, à commettre des erreurs jusqu’à trouver le moyen de ne plus en faire.
L’erreur est féconde car elle nous signale que quelque-chose cloche, que nous avons négligé un détail, mal posé une question, mal modélisé le monde autour de nous. Modéliser le monde, c’est justement le rôle de la science, qu’elle réalise en mettant au point des théories. Une théorie est un ensemble de concepts capables de rendre compte du fonctionnement du monde. Comme il ne faut jamais confondre la carte et le territoire, les scientifiques savent que leurs représentations sont toujours un tout petit peu différentes du monde réel, leurs théories sont donc toujours au moins un petit peu fausses : il reste toujours un plus à découvrir, un plus de nuances à expliquer. Par conséquent les scientifiques ont toujours un peu tort, mais certains plus que d’autres, et souvent beaucoup moins que s’ils n’employaient pas la méthode scientifique.
Car c’est tout l’intérêt de la science, sa spécificité, son super-pouvoir : la recherche systématique de l’erreur qui en fait une activité laborieuse, exigente, difficile, mais en définitive compréhensible par tout le monde.
Cela étant dit, nous avons tous un problème : nous n’aimons pas avoir tort. Il nous est souvent désagréable de reconnaître que nous nous sommes trompés, ou que nous avons été trompés. Et si dans un débat d’idée il s’avère que vous êtes celui des deux qui a tort, il y a un risque que vous ne l’envisagiez pas sereinement, que vous n’acceptiez pas les arguments de votre interlocuteur, que vous vous sentiez agressé et donc que vous deveniez agressif ; et ce risque est d’autant plus grand que le sujet en question vous est cher, qu’il est déterminant pour votre vision du monde.
Et ainsi vous risquez d’avoir tort et de vous entêter dans l’erreur sans le savoir, peut-etre parce que vous n’aurez pas saisi l’importance de l’erreur, peut-être que vous pensez que changer d’avis est une marque de faiblesse, peut-etre parce que vous ignorez que les grands savants, avant de faire leurs découvertes, étaient eux aussi ignorants ou dans l’erreur.
Pour tenter de vous éviter cela, ou encore pour aider ceux d’entre vous qui ont raison à le faire comprendre à leurs interlocuteurs sans les braquer, nous allons parler de la gestion de l’erreur, de son rôle, de la manière de la chercher, de la reconnaître, de la faire accepter. Et pour cela nous accueillons Pierre Kerner, Biologiste en génétique évolutive du développement, Maître de Conférence à l’Université Paris VII. Pierre est aussi connu sous le pseudo de Taupo qu’il a pris en démarrant son Blog de Vulgarisation Scientifique en 2009, Strange Stuff and Funky Things (SSAFT pour les intimes). Il a ensuite rejoint la communauté et association de blogueurs scientifiques francophones du Café des Sciences dont il est aujourd’hui le Vice Président. Il est aussi le fondateur de deux plateformes d’agrégations de contenu scientifique: l’une d’illustration qui s’appelle Strip Science, et l’autre de vidéos qui s’appelle… Vidéosciences.
Pour aller plus loin, reportez-vous au dossier écrit par Pierre Kerner, avec tout plein de références et de liens. Ca se passe ici.
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