Comment se débarrasser des biais cognitifs ? [TenL 152]

Émission enregistrée le 7 octobre 2025

Invité : Wim De Neys, chercheur CNRS en psychologie du raisonnement.

 

Éditorial

Depuis un demi-siècle, les psychologues et les économistes comportementaux traquent les petites failles du raisonnement humain. Ils leur ont donné des noms à la fois précis et poétiques : biais d’ancrage, effet de cadrage, biais de confirmation, illusion de contrôle, effet Dunning-Kruger, erreur de conjonction… Une ménagerie mentale qui dessine un portrait assez peu flatteur de l’esprit humain : un animal sûr de lui, mais prompt à se tromper, même quand il croit réfléchir.

Ces découvertes ont joué un rôle majeur. Elles ont contribué à faire tomber le mythe de l’homo œconomicus,

une idée qui, en estimant que les individus agissent conformément à leurs intérêts et désirs profonds, conduit à leur prêter des intentions ou des croyances qui ne sont pas les leurs et à les traiter injustement, mais la longue liste des biais cognitifs est aussi devenue un gadget pour s’amuser des idées fausses dans la tête des autres, voire même un moyen de disqualifier la rationalité de ceux qui ne pensent pas comme nous, en établissant que c’est forcément une erreur d’attribution, un effet d’ancrage ou une erreur de conjonction qui explique leur position.

Bref : s’ils ont tort, c’est que leur cerveau est mal foutu.

Seulement voilà, les biais cognitifs ne sont pas que des erreurs. Ce sont d’abord des stratégies rapides et adaptatives, forgées par l’évolution, qui nous permettent de penser efficacement dans un monde complexe. Mais il ne faudrait pas leur mettre sur le dos toutes les divergences d’opinion et les mauvais choix des uns ou des autres. Ce serait tomber dans un biais qu’on appelle loi de l’instrument — celle qui dit que lorsque l’on ne possède qu’un marteau, tout finit par ressembler à un clou. En d’autres termes, si l’on ne connaît que les biais cognitifs, on risque de voir des biais partout. Et vous voyez : si mon argument à base de biais cognitif vous convainc, alors j’ai raison, et s’il ne vous convainc pas… alors j’ai raison aussi, et je vous en remercie.

Ce soir, nous allons revenir aux fondamentaux : qu’est-ce qu’un biais cognitif, d’où viennent-ils, à quoi servent-ils, et surtout : peut-on s’en débarrasser ? Peut-on vraiment espérer devenir plus rationnels, moins prévisibles, plus lucides ?

Pour en parler, nous avons la chance d’accueillir Wim De Neys, chercheur au CNRS, spécialiste de la psychologie du raisonnement. Ses travaux portent sur les conflits cognitifs — ces moments où notre intuition nous souffle une réponse rapide, tandis qu’une petite voix intérieure murmure qu’il y a un truc qui cloche.

Avec lui, nous explorerons ce que les sciences cognitives savent aujourd’hui du raisonnement humain, du rôle des intuitions, du fameux duo Système 1 / Système 2, de l’inhibition cognitive, mais aussi des efforts pour entraîner notre pensée critique et résister, autant que possible, à nos propres biais.

Les biais cognitifs : ça suffit ! Abonnez-vous et vous pensez mieux… Un slogan qui suscite probablement votre scepticisme.  Tant mieux. Bienvenue sur La Tronche en Biais !

 

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