La chaîne aborde sur un ton décalé dans la forme mais sérieux sur le fond les raisons qui font que notre lecture du monde est souvent bancale.

Alors que s’achève 2024, peut-être est-il temps d’une une mise à jour dûment sourcée sur le COVID-19 concernant son origine, l’efficacité des vaccins et leur sûreté.

 

  1. Origine du virus

La question de l’origine du SARS-CoV-2 reste un sujet de débat. Les deux principales hypothèses sont une transmission zoonotique (d’un animal à l’homme) et une fuite de laboratoire. Une étude récente soutient l’idée que le virus provient d’animaux infectés vendus sur le marché de Huanan à Wuhan, en Chine, et non d’une fuite de laboratoire, affirmant qu’il y a peu de chances que cette dernière hypothèse soit correcte[1]. Des agences de renseignement américaines continuent d’explorer la possibilité d’une fuite, bien que cette théorie soit considérée comme minoritaire au sein de la communauté scientifique.

 

  1. Efficacité des vaccins

Les vaccins contre la COVID-19 ont montré une efficacité significative dans la réduction des cas graves et des décès. Des études estiment que les vaccins ont sauvé des millions de vies à travers le monde en prévenant les hospitalisations et les complications graves. En termes de protection, les taux varient selon le type de vaccin et les variants du virus, mais globalement, ils offrent une protection robuste contre les formes sévères de la maladie[2].

 

  1. Sûreté des vaccins

Les vaccins COVID-19 ont été soumis à des essais cliniques rigoureux avant leur autorisation, et des millions de personnes ont été vaccinées sans effets indésirables graves généralisés. Bien que certains effets secondaires aient été rapportés, ils sont généralement bénins et temporaires. Les agences sanitaires continuent de surveiller la sécurité des vaccins pour détecter tout effet indésirable rare[3]. Les histoires de « turbo cancer » ou de jeunes qui meurent massivement de problèmes cardiaques ne reposent sur aucune donnée réelle[4].

 

Les dernières informations sur la vaccination contre la COVID-19 chez les femmes enceintes soulignent que les vaccins à ARNm, comme ceux de Pfizer et Moderna, sont sûrs et efficaces. Les données accumulées montrent qu’il n’y a pas d’augmentation des risques de complications telles que les malformations congénitales, les naissances prématurées ou les fausses couches. Les effets indésirables chez les femmes enceintes après vaccination sont similaires à ceux observés dans la population générale[5].

Les recommandations actuelles des autorités sanitaires, comme l’OMS et le CDC, encouragent la vaccination des femmes enceintes, en particulier celles présentant des comorbidités ou un risque accru de complications liées à la COVID-19.

 

Surveillance continue

Bien que le nombre de signalements d’effets indésirables puisse sembler élevé, il est important de le mettre en perspective par rapport au nombre total de vaccinations effectuées et à la nature majoritairement bénigne des effets rapportés. Les systèmes de pharmacovigilance enregistrent tous les décès survenus après la vaccination, qu’ils soient directement liés ou non au vaccin.

Les autorités sanitaires continuent de surveiller les effets indésirables et d’évaluer les données en temps réel. Les évaluations montrent que les bénéfices des vaccins en termes de prévention des maladies graves liées à la COVID-19 l’emportent largement sur les risques potentiels associés aux effets secondaires[6].

 

Addendum

« Et la transmission alors ! Le vaccin ne la réduit pas, sales menteur ! Même Pfizer le dit ! »

Plusieurs études de 2022 ont souligné que bien que les vaccins ARN contre le covid soient très efficaces pour prévenir les formes graves de la maladie, leur efficacité pour réduire la transmission a diminué avec l’émergence de variants comme Omicron. Les données indiquent que la vaccination réduit la transmission, mais pas autant que prévu initialement, surtout après quelques mois suivant la vaccination. Les voici :

  • Lachâtre M, Launay O. Vaccination COVID-19 : technologies vaccinales, efficacité en vie réelle et spécificités [COVID-19 vaccination : Vaccine technologies, effectiveness and specificities]. Médecine et Maladies Infectieuses Formation. 2022 Sep;1(3):129–35. French. doi: 10.1016/j.mmifmc.2022.07.001. Epub 2022 Jul 6. PMCID: PMC9257089.
  • Eyre DW, Taylor D, Purver M, Chapman D, Fowler T, Pouwels KB, Walker AS, Peto TEA. Effect of Covid-19 Vaccination on Transmission of Alpha and Delta Variants. N Engl J Med. 2022 Feb 24;386(8):744-756. doi: 10.1056/NEJMoa2116597. Epub 2022 Jan 5. PMID: 34986294; PMCID: PMC8757571.
  • Prunas O, Warren JL, Crawford FW, Gazit S, Patalon T, Weinberger DM, Pitzer VE. Vaccination with BNT162b2 reduces transmission of SARS-CoV-2 to household contacts in Israel. Science. 2022 Mar 11;375(6585):1151-1154. doi: 10.1126/science.abl4292. Epub 2022 Jan 27. PMID: 35084937; PMCID: PMC9261115.

 

 

Mea culpa ?

Du côté de la zététique, et en tout cas de mon travail, je ne connais pas de raison de retirer des propos anciens ou de ne pas assumer la prudence avec laquelle j’ai critiqué les propos déraisonnables qui affirmaient beaucoup, agressivement, désignaient des méchants et promettaient des procès Nuremberg 2.0. L’examen de conscience de mon travail sur le covid19 me laisse serein.

Charge à ceux qui assènent que la zététique a eu tout faux de travailler un peu à sortir de leurs vitupérations haineuses et à agir avec un peu de méthode, de raison et de science. Chiche ?

 

Bonne année !

Acermendax

 

[1]     https://www.cnrs.fr/fr/presse/covid-19-identification-des-especes-animales-lorigine-possible-de-la-pandemie

Alexander Crits-Christoph, Joshua I. Levy, Jonathan E. Pekar, Stephen A. Goldstein, Reema Singh, Zach Hensel, Karthik Gangavarapu, Matthew B. Rogers, Niema Moshiri, Robert F. Garry, Edward C. Holmes, Marion P. G. Koopmans, Philippe Lemey, Thomas P. Peacock, Saskia Popescu, Andrew Rambaut, David L. Robertson, Marc A. Suchard, Joel O. Wertheim, Angela L. Rasmussen, Kristian G. Andersen, Michael Worobey et Florence Débarre.(2024) Genetic tracing of market wildlife and viruses at the epicenter of the COVID-19 pandemic Author list and affiliations. Cell.

[2] Link-Gelles R, Levy ME, Natarajan K, et al. Estimation of COVID-19 mRNA Vaccine Effectiveness and COVID-19 Illness and Severity by Vaccination Status During Omicron BA.4 and BA.5 Sublineage Periods. JAMA Netw Open. 2023;6(3):e232598. doi:10.1001/jamanetworkopen.2023.2598

[3] https://ansm.sante.fr/actualites/pronostic-a-18-mois-des-cas-de-myocardite-attribuables-a-la-vaccination-arnm-contre-le-covid-19-le-jama-publie-les-resultats-dune-etude-de-pharmaco-epidemiologie-realisee-par-epi-phare

Hause, Anne & Baggs, James & Marquez, Paige & Myers, Tanya & Su, John & Blanc, Phillip & Baumblatt, Jane & Woo, Emily & Gee, Julianne & Shimabukuro, Tom & Shay, David. (2022). Safety Monitoring of COVID-19 Vaccine Booster Doses Among Adults — United States, September 22, 2021–February 6, 2022. MMWR. Morbidity and Mortality Weekly Report. 71. 10.15585/mmwr.mm7107e1.

Yasuhara J, Masuda K, Aikawa T, Shirasu T, Takagi H, Lee S, Kuno T. Myopericarditis After COVID-19 mRNA Vaccination Among Adolescents and Young Adults: A Systematic Review and Meta-analysis. JAMA Pediatr. 2023 Jan 1;177(1):42-52. doi: 10.1001/jamapediatrics.2022.4768. PMID: 36469338; PMCID: PMC9856920. Cette méta-analyse évalue les cas de myocardite et de péricardite après vaccination par ARNm, tout en soulignant que les bénéfices de la vaccination l’emportent sur les risques.

[4] K. Faksova, D. Walsh, Y. Jiang, J. Griffin, A. Phillips, A. Gentile, J.C. Kwong, K. Macartney, M. Naus, Z. Grange, S. Escolano, G. Sepulveda, A. Shetty, A. Pillsbury, C. Sullivan, Z. Naveed, N.Z. Janjua, N. Giglio, J. Perälä, S. Nasreen, H. Gidding, P. Hovi, T. Vo, F. Cui, L. Deng, L. Cullen, M. Artama, H. Lu, H.J. Clothier, K. Batty, J. Paynter, H. Petousis-Harris, J. Buttery, S. Black, A. Hviid. (2024) COVID-19 vaccines and adverse events of special interest: A multinational Global Vaccine Data Network (GVDN) cohort study of 99 million vaccinated individuals,

Vaccine, Volume 42, Issue 9. https://doi.org/10.1016/j.vaccine.2024.01.100.

[5] Ciapponi, A., Berrueta, M., Parker, E. P. K., Bardach, A., Mazzoni, A., Anderson, S. A., Argento, F. J., Ballivian, J., Bok, K., Comandé, D., Goucher, E., Kampmann, B., Munoz, F. M., Rodriguez Cairoli, F., Santa María, V., Stergachis, A. S., Voss, G., Xiong, X., Zamora, N., Zaraa, S., & Buekens, P. M. (2024). Safety and Effectiveness of COVID-19 Vaccines During Pregnancy: A Systematic Review and Meta-Analysis. BMJ.

[6] Effets indésirables des vaccins et dernières évolutions des connaissances scientifiques sur la covid-19 – Rapports d’office parlementaire – Rapport n° 651 (2023-2024), déposé le 30 mai 2024. https://www.senat.fr/rap/r23-651/r23-651_mono.html

Émission enregistrée le 17 décembre.
Invité : Jean-Loïc Le Quellec

Éditorial

La science se trompe, un peu tout le temps. Et c’est là toute sa force, puisqu’elle se corrige. Elle hésite, elle tâtonne, et parfois elle change de paradigme.

Vous connaissez la ville de Troie (non, pas Troyes dans l’aube mais Ilium en Turquie). Pendant des siècles, la cité décrite par Homère dans L’Iliade était considérée comme un pur mythe, une légende grecque sans fondement. Jusqu’à ce qu’Heinrich Schliemann, archéologue amateur mais obstiné, découvre en 1870 les ruines de ce qui pourrait bien être la véritable Troie. La science s’était trompée en rejetant trop vite un récit ancien, mais elle a fini par corriger son erreur. Pensons à la civilisation minoenne en Crète, révélée au début du XXe siècle par Arthur Evans alors qu’on ne connaissait d’elle que des récits mythologiques sur le roi Minos et son labyrinthe. Ou encore les Scythes, ces nomades longtemps jugés « primitifs » par Hérodote, mais dont les tombes gelées de Sibérie ont révélé une culture d’une richesse insoupçonnée : bijoux d’or finement travaillés, textiles somptueux et tatouages complexes. Même la préhistoire, ce temps lointain où l’Homme taillait la pierre, nous a surpris : les fresques rupestres de Chauvet ou Lascaux prouvent que nos ancêtres n’étaient pas seulement des survivants brutaux, mais aussi des artistes d’une sensibilité extraordinaire.

Ces exemples nous rappellent combien nous aimons découvrir ce que nous pensions perdu. Il y a une magie irrésistible dans l’idée qu’une civilisation avancée, oubliée depuis des millénaires, puisse ressurgir du sable ou des profondeurs de la mer. Qui n’a jamais rêvé de l’Atlantide, engloutie par les flots, ou des mystérieuses cités d’El Dorado, enfoncées dans la jungle ? Cet appétit est bien légitime puisque notre histoire est une aventure inachevée, et que des pans entiers du passés restent méconnus.

C’est sur ce désir profond de découverte que jouent des séries comme « Ancient Apocalypse » (traduit « À l’aube de notre histoire ». Dans sa première saison, Graham Hancock, journaliste et écrivain, a captivé des millions de spectateurs en suggérant qu’une civilisation perdue, d’une sophistication incroyable, aurait existé bien avant les premières sociétés humaines connues. Son argument ? Des structures anciennes comme les pyramides de Gizeh ou les mégalithes de Göbekli Tepe seraient les vestiges de peuples disparus, victimes d’un cataclysme oublié. La science, selon lui, refuse d’ouvrir les yeux, et l’archéologie académique lui voue une haine tenace car il faudrait préserver les théories actuelles coûte que coûte.

À travers des séries comme celle-là, nous assistons à la naissance d’une mythologie contemporaine, où des récits alternatifs du passé s’enracinent dans notre imaginaire collectif. Ces nouvelles « légendes » répondent à des besoins profondément humains : donner du sens à un monde complexe, combler les lacunes de nos connaissances et raviver la fascination pour l’inconnu. Ces récits alternatifs fonctionnent comme des systèmes interprétatifs autonomes, échappant délibérément aux validations scientifiques classiques. Ils opèrent selon une logique propre, où chaque réfutation devient une preuve supplémentaire du complot. Là où les mythes anciens étaient enracinés dans des croyances religieuses, les récits contemporains se parent d’un vernis pseudo-scientifique puisque c’est désormais le mode par lequel se fait le récit des origines du monde.

Pour nous dévoiler la structure de la mythologie contemporaine qui se construit sous nos yeux, je reçois Jean-Loïc Le Quellec, anthropologue, préhistorien et spécialiste des mythes, auteur de divers ouvrages dont le très mordant « Des Martiens au Sahara »

 

Emission enregistrée le 27 novembre 2024

Invités :

  • Charbel-Raphaël SEGERIE : Directeur exécutif du CeSIA  – Fondateur de ML4Good
  • Amaury LORIN : membre du CeSIA. Etudiant en Master Logic & Computation à TU Wien

CeSIA : Centre pour la Sécurité de l’IA, qui se présente comme « une organisation française à but non-lucratif dédiée à l’éducation, la recherche, et la diffusion d’informations sur les enjeux de l’intelligence artificielle. » https://www.securite-ia.fr/

 

EDITORIAL

Bonjour tout le monde.

Et si demain une intelligence artificielle dépassait ses créateurs ? Une entité superintelligente, non alignée avec nos intérêts, pourrait se mettre à agir contre nous, trop vite et trop puissamment pour qu’on puisse l’arrêter. Pas dans un scénario de science-fiction où des robots envahissent le monde, mais à travers des applications discrètes, confortables, qui gèrent peu à peu nos vies et nous rendent dépendants.

Imaginez : une IA, pensée pour optimiser nos besoins, qui finit par décider ce qui est bon pour nous sans que nous ayons notre mot à dire. La question n’est pas tant de savoir si cela pourrait arriver, mais quand cela deviendra une menace réelle.

Alors, de qui serait-ce la faute ?

Faudrait-il accuser les concepteurs, trop idéalistes pour prévoir les conséquences ? Les industriels, pressés d’innover pour conquérir les marchés ? Les actionnaires, uniquement guidés par la rentabilité ? Les politiques, souvent en retard d’une révolution numérique, sans vision stratégique ? Et nous, citoyens, utilisateurs, qui acceptons sans broncher de déléguer des pans entiers de notre vie à des algorithmes ?

Cela vous rappelle peut-être Oppenheimer et les dilemmes moraux qui ont suivi la création de la bombe atomique. Ce parallèle est souvent fait par les chercheurs en intelligence artificielle, y compris par certains leaders du domaine, comme Sam Altman ou Demis Hassabis, qui reconnaissent que l’IA comporte des risques existentiels. Mais combien parmi eux auront le courage de tirer la sonnette d’alarme avant qu’il ne soit trop tard ?

L’histoire nous montre qu’il est toujours plus facile de laisser la boîte de Pandore s’ouvrir que de refermer le couvercle. Et dans le cas de l’IA, il y a une différence essentielle : la vitesse. Les IA génératives, qui apprennent à apprendre, évoluent beaucoup plus rapidement que nos lois ou notre compréhension collective.

Et puis, n’oublions pas notre responsabilité à nous, vulgarisateurs et créateurs de contenu. Parler de l’IA sous l’angle sensationnaliste – vous savez, « l’IA qui va détruire le monde » – sans analyser les nuances du sujet, contribue à alimenter une peur stérile. D’ailleurs, petite confession : cet éditorial a été rédigé avec l’aide d’une intelligence artificielle. Paradoxal, non ? Utiliser une IA pour alerter sur les dangers qu’elle pourrait représenter.

Mais c’est là toute l’ambiguïté de notre époque. L’IA est déjà partout : dans vos smartphones, vos réseaux sociaux, vos recherches sur Internet, vos outils de travail. Elle simplifie nos vies, certes, mais à quel prix ? Et surtout, avec quelles garanties pour demain ?

Alors, qu’allons-nous faire ? Attendre que des algorithmes dictent nos choix ? Ou réfléchir, collectivement, à ce que signifie garder le contrôle ? Ce soir, nous explorons ces questions complexes avec nos invités, chercheur et spécialiste en sécurité de l’IA. Ensemble, nous tenterons de comprendre comment concilier progrès technologique et respect des valeurs humaines.

 

Quelques ressources

 

 

Emission enregistrée le 29 octobre 2024

Invité : Pr Stéphane CHARPIER

 

EDITORIAL

 

La médecine ne nous rendra pas immortels, mais de temps en temps elle fait des avancées majeures et ramène parmi les vivants des personnes naguère condamnées. Untel qui ne respire plus peut être réanimer – la mort cardiaque n’est plus vraiment la mort, car pendant quelques minutes on peut intervenir – lle coma, le coma profond, le coma dépassé… les terminologies changent, les soins progressent, et on en voit se réveiller, tel des Lazare qui semblaient bel et bien partis pour de bon.

La médecine en est aujourd’hui à la mort cérébrale, à la question des dommages irrémédiables sur les structures du cerveau qui produisent notre expérience consciente, et il arrive de déclarer mort un corps dont tout fonctionne en dehors du cerveau. Une femme enceinte qui tomberait dans cet état pourrait même porter à terme son enfant, et lui donner la vie, tout en étant, quoi…  morte ? L’immense majorité des humains passera un jour l’arme à gauche d’une manière qui répondra clairement aux critères de la science ; d’un étant clairement vivant, ils passeront à un état de mort indubitable, et aucun ne se réveillera dans son cercueil par erreur, terreur ultime de la taphophobie qui frappe celles et ceux craignant d’être enterrés vivants.

Mais il restera quelques cas exceptionnels qui mettent à l’épreuve nos définitions, notre compréhension de ce que signifie être un humain en vie, et aussi nos lois, nos règlementations, nos textes éthiques, notre manière d’attribuer des responsabilités à celles et ceux qui veillent sur les malades et dont le rôle n’est pas de devenir les juges des morts.

Peut-être êtes-vous comme moi : je n’ai pas vraiment envie de penser à la mort, aux décisions ultimes, à l’encadrement règlementaire qui protège les droits du mourant et de ceux qui l’accompagnent. La vie est un moment intéressant qui réclame toute mon attention. Et pourtant nous devons beaucoup à ceux qui ont regardé les morts de près, les ont disséqués, examinés, manipulés… Il a fallu des Thomas Willis, des Jan Swammerdam, des Luigi Galvani, des Giovani Aldini, des Dominique Larrey, des Humbolt, Richerand, Nysten, Dupuytren, des François-Xavier Bichat auxquels le livre de Stéphane CHARPIER rend hommage en nous rappelant tout le chemin parcouru depuis une ignorance quasi-totale jusqu’aux services modernes de réanimation, aux laboratoires de neurosciences et aux travaux qui aujourd’hui traquent les ultimes signes de vie dans la symphonie cérébrale : l’onde de la mort dont on a déterminé qu’elle était le point final de l’existence consciente… Jusqu’à ce que le bon professeur Charpier et son équipe ne détectent une onde de la résurrection… « La science de la résurrection » est le titre de son livre. À croire que la mort cherche à s’échapper des doigts de la science.

À tout le moins on peut constater les progrès fantastiques des connaissances depuis le temps où Mary Shelley inventait la science-fiction avec son Frankenstein et des questionnement à la pointe de la science de son temps.

Mon invité ce soir est Stéphane CHARPIER, professeur de neurosciences à l’Université de la Sorbonne, directeur de l’équipe de recherche Excitabilité cellulaire et dynamiques des réseaux neuronaux à l’Institut du cerveau et de la Moelle épinière (ICM) de l’Hôpital de la Pitié-Salpêtrière.

 

Lien vers le livre du Pr Charpier.

 

L’idée principale du livre « Homo chaoticus » de Didier Raoult consiste à prétendre révolutionner la compréhension du vivant grâce à ses travaux et réflexions sur les Transferts Horizontaux de matériel Génétique (THG). Nous aurions besoin de lui et de son livre pour dépasser Darwin et comprendre que l’image populaire de l’arbre du vivant est fausse, que l’évolution ne se limite pas à la transmission filiale de caractères plus ou moins mutés puis sélectionnés, mais que des transferts de séquences à partir de microorganismes jouent un rôle très important dans l’évolution. C’est une révolution !

Le problème est que dans cette histoire le travail de Didier Raoult occupe une place secondaire, marginale, liée à l’activité intense de séquençage de ses équipes qui leur a permis d’identifier de nombreuses instances de ce genre de transfert. Guère plus.

Faisons un petit historique des vraies découvertes en la matière, et nous verrons si nous avons besoin que le professeur marseillais révolutionne tout ça.

Le concept de transfert horizontal de matériel génétique (THG) a radicalement modifié notre compréhension de l’évolution biologique, en complétant la vision traditionnelle de l’évolution par descendance verticale, c’est-à-dire par transmission génétique des parents à la progéniture. Les contributions majeures à l’étude du THG sont les suivantes :

  1. Frederick Griffith (années 1920) – Les premières preuves expérimentales de transferts horizontaux de gènes viennent des travaux de Frederick Griffith en 1928. Il observe que des bactéries non pathogènes peuvent acquérir des gènes de virulence à partir de bactéries mortes, un phénomène qu’il décrit comme la « transformation bactérienne ». Il ne savait pas encore que ce processus impliquaient le transfert de gènes. Ces notions sont enseignées au lycée[1].
  2. Barbara McClintock (Années 1940) – Barbara McClintock découvre les éléments transposables, ou « gènes sauteurs », dans le génome du maïs. Elle a démontré que certains segments d’ADN peuvent se déplacer d’un endroit à un autre, modifiant l’expression des gènes adjacents. Ce mécanisme de réorganisation génétique active a révolutionné la compréhension des génomes, montrant que ceux-ci ne sont pas statiques mais dynamiques. Bien que sous-estimés à l’époque, ses travaux ont été largement reconnus avec l’obtention du prix Nobel en 1983.
  3. Susumu Ohno (années 1970)[2] – Susumu Ohno est surtout connu pour avoir introduit le concept « d’ADN poubelle » (junk DNA), et pour ses travaux sur la duplication génétique. Dans son livre Evolution by Gene Duplication, il a expliqué comment la duplication des gènes permettait l’évolution de nouvelles fonctions. Son travail a influencé les recherches ultérieures sur l’évolution des génomes et les mécanismes par lesquels de nouveaux gènes apparaissent, ouvrant la voie à la compréhension de l’importance des transferts horizontaux.
  4. Lynn Margulis [3] (années 1970) – Margulis propose en 1970 que des événements de transfert de gènes horizontaux entre des organismes ancestraux aient conduit à l’incorporation de certaines bactéries en tant qu’organites des cellules eucaryotes (comme les mitochondries et les chloroplastes). Cette hypothèse est révolutionnaire à son époque. En proposant une origine symbiotique à toute la lignée qui va donner les organismes pluricellulaires, elle montre que le transfert de matériel génétique peut avoir un rôle tout à fait considérable sur l’histoire du vivant.
  5. Carl Woese[4] (1977) – À la fin des années 1970, Carl Woese révolutionne la biologie en étudiant les séquences d’ARN ribosomique pour classifier les formes de vie.[Les ribosomes sont des particules cytoplasmiques généralement formées de trois types d’acides ribonucléiques, associés à des protéines et déchiffrant le code inscrit dans l’ARN messager pour synthétiser des protéines]Il découvre trois domaines distincts de la vie (bactéries, archées et eucaryotes). Ses recherches révèlent que les transferts de gènes horizontaux brouillent la classification stricte des organismes, en particulier chez les bactéries et les archées. Il conclut que les transferts génétiques fréquents ont créé un réseau évolutif plus complexe que le simple arbre linéaire communément représenté au public.
  6. Jörg Hacker et James B. Kaper (années 1980-1990)[5] – Jörg Hacker et James B. Kaper ont étudié le rôle des îlots de pathogénicité dans les bactéries, qui sont des segments d’ADN acquis par des transferts horizontaux. Ces îlots confèrent des avantages spécifiques, comme la virulence. Leur travail a montré comment les bactéries pouvaient échanger des gènes pour s’adapter rapidement à de nouveaux environnements, comme l’acquisition de résistance aux antibiotiques.
  7. Jeffrey Lawrence et John Roth (1996) [6]– Jeffrey Lawrence et John Roth ont montré que les transferts horizontaux étaient essentiels à l’évolution bactérienne. Ils ont proposé que l’évolution adaptative rapide des bactéries ne pouvait pas être expliquée uniquement par des mutations aléatoires et la sélection naturelle. Leur modèle met en évidence le rôle des transferts horizontaux de gènes comme mécanisme central de la diversification des bactéries.
  8. William Ford Doolittle (années 1990)[7] – Doolittle contribue à renforcer l’idée que le THG est un phénomène fondamental dans l’évolution, en particulier chez les micro-organismes. En 1999, il publie plusieurs articles expliquant comment le THG, notamment par des plasmides, des virus et d’autres vecteurs, façonne l’évolution bactérienne, mais aussi, plus largement, l’histoire de l’évolution des organismes.
  9. Eugene Koonin (années 2000)[8] – Il est l’un des principaux chercheurs à étudier l’impact du THG dans l’ère des génomes séquencés. Il observe des transferts horizontaux non seulement chez les procaryotes, mais aussi chez les eucaryotes. Koonin montre que les transferts horizontaux de gènes contribuent à la plasticité génétique et accélèrent les innovations évolutives.
  10. Nancy Moran (années 2000) [9]– Nancy Moran a réalisé des études sur les symbioses bactériennes chez les insectes, comme les pucerons, démontrant que ces symbiotes bactériens avaient acquis des gènes par transfert horizontal. Ses recherches montrent que les transferts horizontaux entre bactéries et hôtes multicellulaires jouent un rôle crucial dans l’évolution des symbioses. Cette découverte est importante car elle élargit le rôle du THG au-delà des microbes, touchant également des relations symbiotiques dans des organismes plus complexe
  11. Tal Dagan et William Martin (2000s-2010s)[10] – Dagan et Martin ont proposé le concept de réseaux phylogénétiques, qui intègre les THG pour représenter l’évolution non plus comme un arbre strictement hiérarchique, mais comme un réseau d’interactions complexes. Cela a été particulièrement important pour comprendre l’évolution des organismes unicellulaires, mais a aussi des implications pour les eucaryotes.
  12. Julie Dunning Hotopp et al. (2007)[11] – L’équipe de Julie Dunning Hotopp a publié une étude importante en 2007, montrant des preuves de transfert horizontal de gènes des bactéries vers les animaux, en particulier les insectes. Ils ont trouvé des segments d’ADN bactérien intégrés dans le génome de la mouche drosophile, un exemple frappant de transfert horizontal qui a ouvert de nouvelles perspectives sur l’impact du THG sur l’évolution des eucaryotes.
  13. Patrick Keeling et Jeffrey Palmer (années 2000)[12] – Keeling et Palmer ont étudié les génomes des plastes et des mitochondries, montrant que ces organites (résultant d’endosymbioses) avaient acquis des gènes par transferts horizontaux au cours de leur évolution. Ils ont contribué à notre compréhension du rôle des THG dans l’évolution des organismes eucaryotes et la transmission des gènes entre les génomes nucléaires et ceux des organites.

 

Et alors ?

Les apports de ces différents chercheurs et chercheuses ont démontré que le transfert horizontal de matériel génétique joue un rôle majeur dans l’évolution, en permettant à des organismes d’acquérir des traits nouveaux de manière rapide et indépendante de la descendance directe.

Les concepts centraux de variation, d’héritabilité et de reproduction différentielle dont la conjonction produit la sélection naturelle, restent fondamentaux, mais ils ont été élargis pour inclure des mécanismes supplémentaires qui permettent une évolution plus rapide et une adaptation plus flexible, notamment chez les micro-organismes. En raison de ces travaux on sait que représenter le vivant comme un arbre est simpliste et qu’il faudrait le voir comme un réseau, il ressemble davantage à un buisson tout emmêlé de toiles d’araignées.

Certaines affirmations contemporaines, souvent relayées par des figures polémiques comme Didier Raoult, suggèrent que ces idées seraient « ignorées » du grand public ou des scientifiques, mais cela ne reflète pas la réalité des débats scientifiques actuels puisque la majorité des biologistes reconnaissent le rôle des transferts horizontaux, à tel point qu’on parle sans problème d’évolution réticulée.

Cette reconnaissance de la complexité de l’évolution s’est faite sans abandonner pour autant les fondements darwiniens.

Dans son livre destiné au grand public, Didier Raoult ne cite, pour autant que je m’en souvienne, qu’un seul des chercheurs dont je vous ai présenté le travail, ignorant tous les autres au profit de citations d’Héraclite, Platon, Nietzsche ou Einstein.

Nous avions pourtant droit à une promesse dès les premières lignes : « Avec ce livre, je souhaite mettre en place une nouvelle théorie de l’évolution basée sur les données les plus récentes. » Et la couverture annonçait « révolution dans l’évolution ». C’est dommage parce que cela n’a aucune chance de se faire à travers un livre bâclé ; il faudrait toiut au contraire que l’auteur prenne le temps de soumettre aux spécialistes une démonstration en règle des principes nouveaux qu’il estime apporter. Mais soit dit entre nous cela n’arrivera pas car Didier Raoult n’apporte rien de nouveau.

 

Je le sais parce que j’ai lu son livre « Homo chaoticus ». Merci aux éditions Michel Lafon de m’avoir envoyé cet exemplaire du livre. Je vous parlerai de son contenu… Bientôt.

 

 

Remerciements : Hervé SEIST – Samuel ALEXANDER – Stéphane DEBOVE

[1] https://www.profsvt71.fr/pages/terminale-spe-svt/genetique-et-evolution/transferts-horizontaux-et-complexification-des-genomes-1.html

[2] https://link.springer.com/book/10.1007/978-3-642-86659-3

[3] https://fr.wikipedia.org/wiki/Th%C3%A9orie_endosymbiotique

[4] https://acces.ens-lyon.fr/acces/thematiques/biodiversite/dossiers-thematiques/les-trois-domaines-du-vivant/historique-de-la-classification-du-vivant-1/demarche-historique#:~:text=La%20comparaison%20des%20ARN%20ribosomiques%20a%20conduit%20historiquement%20%C3%A0%20la,l’arn%20messager%20en%20polypeptide.

[5] James B. Kaper Jorg Hacker (1999) The molecular basis of infectious diseases: pathogenicity islands and other mobile genetic elements. Amer Society for Microbiology

[6] Lawrence, Jeffrey & Roth, John. (2014). Genomic Flux: Genome Evolution by Gene Loss and Acquisition. 10.1128/9781555818180.ch15. – https://rothlab.ucdavis.edu/publications/Genomic%20Flux.pdf

[7] Doolittle, W. F. (1999). Phylogenetic classification and the universal tree. Science, 284(5423), 2124-2128.

[8] Koonin EV. Darwinian evolution in the light of genomics. Nucleic Acids Res. 2009 Mar;37(4):1011-34. doi: 10.1093/nar/gkp089. Epub 2009 Feb 12. PMID: 19213802; PMCID: PMC2651812.

[9] Moran NA, McCutcheon JP, Nakabachi A. Genomics and evolution of heritable bacterial symbionts. Annu Rev Genet. 2008;42:165-90.

Un article de Marc-André Selosse https://www.pourlascience.fr/sd/biologie/l-evolution-par-fusion-6304.php

[10] Dagan, T., Martin, W. The tree of one percent. Genome Biol 7, 118 (2006). https://doi.org/10.1186/gb-2006-7-10-118

Dagan, T., Artzy-Randrup, Y., & Martin, W. (2008). Modular networks and cumulative impact of lateral transfer in prokaryote genome evolution. Proceedings of the National Academy of Sciences, 105(29), 10039-10044.

[11] Dunning Hotopp JC, Clark ME, Oliveira DC, Foster JM, Fischer P, Muñoz Torres MC, Giebel JD, Kumar N, Ishmael N, Wang S, Ingram J, Nene RV, Shepard J, Tomkins J, Richards S, Spiro DJ, Ghedin E, Slatko BE, Tettelin H, Werren JH. Widespread lateral gene transfer from intracellular bacteria to multicellular eukaryotes. Science. 2007 Sep 21;317(5845):1753-6.

[12] Keeling, P., Palmer, J. Horizontal gene transfer in eukaryotic evolution. Nat Rev Genet 9, 605–618 (2008). https://doi.org/10.1038/nrg2386

Emission enregistrée le 16 juillet 2024
Invité : Bernard LAHIRE, Directeur de recherche CNRS au Centre Max-Weber  et à l’École normale supérieure de Lyon.

 

Editorial

Je vais énoncer un ensemble de faits qui devraient vous sembler d’abord d’une grande banalité, voire même inintéressants et sans lien aucun avec le thème des sciences sociales. Et pourtant nous verrons ce soir combien il est fructueux de s’interroger sur les conséquences en cascades de ces simples observations.

Allons-y. Les humains sont des animaux, des organismes hétérotrophes (c’est-à-dire qui doivent consommer d’autres organismes pour se maintenir en vie). Leur système digestif autorise une certaine gamme d’alimentation à base de fruits, de graines et de chaire animale.

Les humains sont homéothermes, diurnes, mobiles, dioïques (ce terme vient de la botanique : il décrit une espèce où l’ont peut distinguer deux types d’individus en fonction de leur sexe). Ils présentent un léger dimorphisme sexuel, la fécondation se produit à l’intérieur du corps des femelles, la copulation est possible à n’importe quel moment de l’année sans période d’œstrus contrairement à leurs cousins les plus proches. Les humains ont une longue période de développement, de croissance, d’enfance, donc de dépendance, et une durée de vie longue comparée aux autres animaux de même taille.

Tout cela a des conséquences inévitables sur leur mode de vie, sur les relations qu’ils peuvent entretenir et sur les comportements adaptés qu’ils peuvent acquérir dans leur environnement. Ces contraintes, installées au fil de millions d’années, tout au long de la lignée qui conduit jusqu’à nous, sont physiques, biologiques, historiques ; leurs conséquences sont sociales et culturelles. Et, à leur tour, les dimensions sociales et culturelles ont des effets sur de nombreux aspects de la physiologie, de l’éthologie, de l’anatomie, bref de la biologie de l’espèce.

La sociologie humaine serait très, très, différente s’ils avaient une forme de crabe, une fécondation externe ou des portées de 8 bébés. Cette évidence peut sembler tellement criante qu’on se demande ce qu’on pourrait bien en faire. Mais c’est une évidence qui a été soigneusement mise de côté par les sociologues tandis qu’ils construisaient leur discipline, la sociologie. Et il est peut-être temps de passer à une nouvelle étape de l’histoire de cette science si elle veut être pleinement scientifique. C’est en tout cas ce que propose notre invité de ce soir, Bernard LAHIRE dans son livre « Les structures fondamentales des sociétés humaines ».

Monsieur LAHIRE est un éminent sociologue, que l’on peut difficilement suspecter de vouloir du mal à ce champ disciplinaire ; et il ose ici un mouvement audacieux : tendre la main aux sciences de la nature, et notamment à la biologie, sur la base d’un principe solide : les sciences qui décrivent et expliquent le monde ne peuvent pas dire des choses contraires.

Où en est la scientificité des sciences sociales ? À quoi ressemblent ces structures fondamentales des société humaines ? Le monde académique est-il prêt à répondre aux exigences de scientificité pour des disciplines ? Nous essaierons d’avoir des réponse à ces trois grandes questions et à bien d’autres dans les deux prochaines heures en compagnie du Professeur Bernard LAHIRE, Directeur de recherche CNRS au Centre Max-Weber  et à l’École normale supérieure de Lyon.

Emission enregistrée le 19 juin 2024

Invitées : Anne-Hélène BOUCHOUX, Sarah LAUDOUAR, Willy MANGIN.

Editorial

Panique dans nos assiettes. Désormais la mort rode sur la nappe cirée ; nous mangeons mal, nous creusons notre tombe avec les dents ; c’est décidé la bouffe aura notre peau.

Tout —absolument tout— est mauvais pour la santé si consommé dans de mauvaises proportions. Le kiwi, c’est très bon le kiwi, c’est plein de vitamines, mais si vous n’avalez que ça pendant deux semaines, ça ne va pas bien se passer. Et à la longue vous allez mourir. D’ailleurs, c’est un résultat robuste bien que décevant : sachez qu’à ce jour 100% des gens qui mangent des trucs finissent par mourir.

Sans sucre, sans gluten, sans féculents, sans céréales, sans viande rouge : les humains meurent quand même.

Les journaux fainéants nous sortent six fois par jour des billets disant que tel aliment donne le cancer ou que tel autre protège contre le cancer, mais ça ne veut rien dire à part « je n’y connais rien mais je dois vendre du papier pour nourrir ma famille, la nourriture c’est important, s’il te plait, achète mon journal ou clic sur la pub. Mes enfants te remercient. »

Nous pataugeons dans un brouhaha d’inquiétudes horrifiées où il faut susciter le plus d’angoisse pour essayer de refourguer sa solution maison. Et au cœur de cela se niche un constat facile : tout le monde a son mot à dire sur l’alimentation, tout le monde peut aisément se sentir un peu expert du sujet ; on s’autorise à dire ce qui nous passe par la bouche, et on imagine qu’il suffit d’avoir une bonne tête sympathique ou un peu de style dans la plume pour avoir le droit de déverser des conseils.

Le problème, c’est qu’on méprise la diététique : cette espèce de sous-science des régimes amaigrissants, à peine différentiable de la naturopathie gnagnan qui nous fait des leçons de morale sur le fait qu’on mange mal et que 5 fruits et légume par jour / et que des fibres / et que, attention au gras, au sucré, au salé / nananère…

Le problème c’est que la Junk Food est partout, et qu’on le sait très bien. En réaction à l’invasion industrielle des aliments ultratransformés qui s’invitent dans mes placards autant que dans les vôtres, s’installe une sorte de nouvelle religion du bien manger, une tendance à l’orthorexie qui érige en modèle des influenceurs télégéniques dénués de compétence, de cohérence et d’éthique.

Quand tout le monde se mêle de nous faire la morale sur ce qu’on ne doit pas manger, sur ce qu’on ne doit pas faire manger à ses enfants, sur la bonne silhouette qu’on doit arborer, sur les bonnes, les mauvaises marques, sur l’écoresponsabilité, le végétarisme, le gaspillage, le fait maison… Qui pourrait avoir envie d’accorder du crédit à un diététicien formé à l’université, diplômé et dont l’activité est régie par les règles de professionnels de santé ? Qui a vraiment envie de prendre la diététique au sérieux ? Ce biais, je le souligne parce que je crois le retrouver en moi-même ; j’ai déjà ici critiqué les élucubrations de la naturopathie mais en plus de 150 émissions en live on n’avait jamais donné la parle à un diététiciens.

Ce soir nous en avons 3.

L’hydroxychloroquine, un médicament antipaludique et anti-inflammatoire, a été proposé dans le traitement du Covid-19. Au début de la pandémie, certaines études observationnelles, menées principalement en Chine, suggéraient un effet bénéfique potentiel de l’hydroxychloroquine, notamment en association avec l’azithromycine, un antibiotique.

Plus de 4 années se sont écoulées depuis l’arrivée du covid-19 et des variants du SARS-Cov2. Le temps permet de faire le tri entre les hypothèses. Dès les premières méta analyses de 2020, nous disposions d’informations solides sur les mérites de diverses traitements, mais il était sage d’attendre qu’un consensus solide s’installe. C’est chose faite.

Des études randomisées contrôlées, considérées comme la référence scientifique la plus solide, n’ont pas confirmé les premiers résultats prometteurs du traitement par hydroxychloroquine. Ces études ont montré que l’hydroxychloroquine n’était ni efficace pour réduire la mortalité chez les patients hospitalisés avec le Covid-19, ni pour prévenir l’infection chez les personnes exposées au virus. En outre, l’hydroxychloroquine a été associée à un risque accru d’effets secondaires graves, notamment des problèmes cardiaques.

Suite à ces résultats, les principales agences de santé internationales, telles que l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et l’Agence européenne des médicaments (EMA), ont déconseillé l’utilisation de l’hydroxychloroquine pour le traitement ou la prévention du Covid-19.

 

Vous pouvez consulter les travaux scientifiques les plus fiables sur la question, il s’agit de méta-analyses reprenant les résultats de multiples études pour les comparer, les combiner et obtenir des conclusions plus puissantes que chaque étude prise indépendamment.

Méta-analyses :

  1. Méta-analyse de Annals of Internal Medicine (2020)
    • Résumé : Une méta-analyse publiée dans l’Annals of Internal Medicine a également conclu que l’hydroxychloroquine n’a pas d’effet significatif sur la réduction de la mortalité ou la progression de la maladie chez les patients atteints de COVID-19.
    • Détails : Les auteurs ont insisté sur le fait que les essais cliniques randomisés n’ont montré aucune preuve robuste de bénéfice, mais ont mis en évidence des risques potentiels pour la santé.
    • Référence : Hernandez, A. V., Roman, Y. M., Pasupuleti, V., Barboza, J. J., & White, C. M. (2020). Hydroxychloroquine or chloroquine for treatment or prophylaxis of COVID-19: a living systematic review. Annals of Internal Medicine, 173(4), 287-296. https://doi.org/10.7326/M20-2496

 

  1. Méta-analyse de la Cochrane (2021)
    • Résumé : La revue Cochrane, une source respectée pour ses analyses rigoureuses, a conclu que l’hydroxychloroquine n’a pas d’effet bénéfique en termes de réduction de la mortalité, de progression vers des formes graves de la maladie ou de la durée des symptômes de la COVID-19.
    • Référence : Singh, B., Ryan, H., Kredo, T., Chaplin, M., & Fletcher, T. (2021). Chloroquine or hydroxychloroquine for prevention and treatment of COVID-19. Cochrane Database of Systematic Reviews. https://www.cochranelibrary.com/cdsr/doi/10.1002/14651858.CD013587.pub2/full

 

  1. Méta-analyse publiée dans « Nature Communications » (2021)
    • Résumé : Une méta-analyse publiée dans « Nature Communications » a analysé les résultats de plusieurs ECR et a conclu que l’hydroxychloroquine n’est pas efficace pour réduire la mortalité ou prévenir les hospitalisations liées à la COVID-19.
    • Détails : Cette étude a également souligné les risques potentiels associés à l’utilisation de l’hydroxychloroquine, notamment des effets secondaires cardiaques graves
    • Référence : Axfors, C., Schmitt, A. M., Janiaud, P., Van’t Hooft, J., Abd-Elsalam, S., Abdo, E. F., … & Ioannidis, J. P. A. (2021). Mortality outcomes with hydroxychloroquine and chloroquine in COVID-19 from an international collaborative meta-analysis of randomized trials. Nature Communications, 12, 2349. https://doi.org/10.1038/s41467-021-22446-z

D’autres méta-analyses de 2023 arrivent aux mêmes conclusions :

  • Hong, H., Friedland, A., Hu, M., & Anstrom, K. J. (2023). Safety and efficacy of hydroxychloroquine as prophylactic against COVID-19 in healthcare workers: a meta-analysis of randomized clinical trials. BMJ Open. https://doi.org/10.1136/bmjopen-2022-063744
  • Mitjà, O., Reis, G., Boulware, D. R., et al. (2023). Hydroxychloroquine for treatment of non-hospitalized adults with COVID-19: A meta-analysis of individual participant data of randomized trials. Clinical and Translational Science. https://doi.org/10.1111/cts.13468

 

D’autres encore viendront peut-être s’y ajouter. À ce jour toutes vont dans le même sens et permettent d’écarter les doutes raisonnables sur le consensus en place.

 

 

Voici un petit vadémécum pour vous aider à vous y retrouver dans les nombreux contenus de La Tronche en Biais

 

 

Les émissions en direct sont la partie la plus importante du travail de la chaîne :

Le cœur éditorial.

Pour y voir plus clair dans le paysage, la playlist « Les yeux dans la Tronche » vous permet de retrouver les contenus qui traitent les sujets de fond de zététique / esprit critique : comment interroger nos représentations, réévaluer nos croyances, et comment répondre aux énoncés alléchants qui ne demandent qu’à être crus :

Pour des réflexions supplémentaires par petites touches, la playlist « Vite Fait » offre des contenus de moins de 5 minutes.

S’ajoutent d’autres playlists thématiques.

 

 

Bonnes découvertes à vous !

Cet article est le script de la vidéo du même nom publiée sur La Tronche en Biais.

 

Si vous regardez cette vidéo c’est probablement que vous êtes un humain, et que vous avez un accès à Internet. Vous êtes donc un animal social et culturel qui pratique quotidiennement la critique d’autrui, que ce soit face à face, via le commérage, l’analyse, le débunkage, le quolibet, l’insulte ou la discussion décontractée mais argumentée autour d’un point de contention.

Un humain fonctionnel qui ne critique pas, c’est-à-dire qui ne porte pas un jugement sur ce que disent et font d’autres humains, ça n’existe pas.

Ceux d’entre nous qui essaient de s’éduquer aux arcanes de l’esprit critique n’ignorent pas que la critique c’est important. La présence de ce mot dans 50% de l’expression « Esprit critique » est un indice de taille.

En zététique, nous apprenons à nous poser des questions pertinentes quand il s’agit d’évaluer s’il faut croire ou ne pas croire un énoncé. Et nous essayons de partager avec tout le monde les meilleurs outils méthodiques pour ce faire : la rhétorique, les vertus épistémiques, l’empathie cognitive, et une forme d’humilité dans chaque échange où nous risquons d’avoir tort, c’est-à-dire : souvent.

 

L’un des problèmes de la zététique, c’est que son volet principal, tourné vers une auto-éducation, une forme d’apprivoisement de son cerveau afin de questionner d’’abord nos propres croyances, nos propres perceptions et conceptions afin de les corriger… n’est pas visible ! Tandis que l’autre volet, l’autodéfense intellectuelle qui consiste à mettre à l’épreuve les énoncés émis par autrui, est souvent l’occasion de clash, de disputes, de ragequit et de tout un éventail de scènes émotionnelles qui nous donnent le sentiment que la conflictualité est partout, qu’elle sature l’air et que, finalement soit tout le monde harcèle tout le monde, soit personne ne harcèle personne. Point.

Monumentale erreur. On peut faire la distinction entre la critique et le harcèlement. Alors ça n’est pas toujours facile, parce qu’on ne dispose pas souvent de l’ensemble des informations permettant de se faire un avis, raison pour laquelle on serait bien sage de ne pas énoncer de jugement définitif sans avoir fourni des efforts conséquents pour s’informer. Ca n’est pas facile, mais on peut. Et là où cette distinction est le plus utile, c’est dans notre propre comportement. Parce que là nous disposons des infos nécessaires pour juger.  Voici donc un petit tutoriel sur l’art de donner la critique afin de pouvoir émettre des critiques importantes sans tomber dans le harcèlement.

Il parait que l’art est difficile et que la critique est facile. Je trouve la formule critiquable… Elle a du vrai pour les pratiques sportives ou artistique, mais en ce qui concerne l’arène des idées, la critique fait partie du job de base : l’art de la critique n’est en réalité pas si simple que ça. Souvent nous rencontrons des critiques de très mauvaise qualité parce que les gens ont l’air de s’imaginer qu’il suffit d’exprimer son ressenti, de donner son opinion, d’asséner des perceptions comme si elles étaient des faits établis, et d’engueuler tous ceux qui ne sont pas immédiatement convaincu parce qu’ils seraient fermés à la critique. Pardon, mais ça manque de métacognition.

 

 

Tutoriel étape1 : Se demander ce qu’on espère réaliser.

 

  1. On peut critiquer pour aider qqn à reformuler sa pensée, à se corriger, à s’améliorer. C’est ce que font les amis et les alliés autour d’une cause commune : votre cause mérite que vous ayez le courage de critiquer ceux qui la défendent mal, et que vous écoutiez les alliés qui sont en désaccord. MAIS l’écueil de cette démarche, c’est la « pureté militante », la police de la pensée qu’exercent certaines personnes qui tiennent à la leur posture plus qu’aux idées qu’ils sont censés défendre (Cf la série de Penseur Sauvage sur les narcissiques).

La critique utile de l’allié peut se transformer en harcèlement si elle s’acharne pour interdire certaines paroles par l’intimidation, la brutalité, la menace. Une personne normale est capable d’admettre qu’on n’est pas d’accord avec lui sans pour autant devenir un ennemi. La critique utile, elle accepte de ne pas être reçue et acceptée comme un ordre.

  1. On peut critiquer par opposition à un propos récurrent qui nous semble faux et qu’on voudrait éradiquer, comme les fake news. Et alors il faut savoir cibler le propos et pas celles et ceux qui s’en font les vecteurs. Ça implique de savoir viser et de savoir doser. C’est très important de le faire et de pouvoir continuer à le faire sans se faire accuser de harcèlement. C’est le bébé dans l’eau du bain.
  2. On peut critiquer car on estime qu’il faut détruire la crédibilité, le capital symbolique, la légende personnelle de quelqu’un qui ment, qui désinforme, qui manipule. Les escrocs, les voleurs, les autocrates, les gourous de sectes, tous ces personnages qui détruisent des vies, méritent qu’on leur barre le chemin. Votre critique fait alors de vous un ennemi.

Je n’attends pas de ceux qui me prennent pour leur ennemi qu’ils me traitent gentiment avec seulement des propos argumentés. Je m’attends hélas à ce que pour eux tous les coups soient permis pour me détruire. Rappelez-vous fact and Furious et la violence extrême des attaques lancés contre Antoine Daoust ; des exemples un tout petit peu moins extrême, il y en a des dizaines.

Je trouve particulièrement triste d’être traité comme un ennemi par des alliés qui prétendent ou croient émettre une critique constructive. Au fil des années, cette situation m’a souvent blessé. Si je suis capable de continuer mon travail aujourd’hui, c’est parce que j’ai fini par ne plus être aussi charitable qu’avant avec la confusion dans le registre de l’attaque en lieu et place de la critique. Ne vous étonnez pas si vous finissez bloqué en One Shot si votre mode d’expression est de rabaisser le YouTubeur que vous voudriez sincèrement aider à progresser ; il ne vous doit aucun égard particulier.

  1. On peut critiquer pour faire mal, pour se venger, pour apporter la justice, pour rechercher un moyen d’exister, de se réparer peut-être en détruisant l’autre, en anéantissant son existence publique. Ça malheureusement, c’est trop fréquent et en réalité ce n’est pas de la critique, c’est de l’agression. On peut juger qu’on agit en état de légitime défense —ça se plaide—, mais il demeure que ce n’est pas de la critique et que cette motivation est étrangère à la démarche zététique qui se place d’abord (même si elle ne se résume pas à ça) sur un plan épistémique : évaluer la véracité des propos, la solidité des arguments, la cohérence d’une posture.

Ces 4 contextes de la critique, je les distingue clairement et j’essaie de les rendre explicites dans mon travail. Je ne traite pas mes alliés comme des ennemis. Je ne confonds pas les idées avec les personnes qui s’en font l’échos, et je ne mets pas dans le même sac les croyants, même prosélytes, et ceux qui tirent profit de la croyance des autres.

BONUS. J’ajoute une 5eme motivation très en vogue dans les espaces militants : critiquer pour se construire une identité, pour sortir du lot, pour émettre un signal de vertu. La cible n’a alors plus guère d’importance en elle-même, elle ne représente qu’un moyen d’attirer l’attention sur les grandes qualités que l’on se prête à soi-même. Si la cible ne répond pas, on pourra continuer ou s’en trouver d’autres, mais si elle réagit, c’est parfait, on pourra toujours trouver un moyen de tirer avantage de la situation (Cf ma vidéo « le harceleur a toujours raison »). Attitude hypocrite, abusive, voire sociopathique, cette motivation du buzz est difficile à prouver bien entendu, puisqu’on ne peut pas prétendre lire dans les esprits. Mais une fois que les 4 premières motivations ont été passées en revu et ne permettent pas d’expliquer un comportement, cette cinquième lecture ne peut plus être écartée. Et alors, comme trop souvent, la cible d’une telle attaque n’a plus guère que de mauvaises alternatives devant elle (Cf ma vidéo «Psyhodelik a gagné»)

 

Etape 2 : oubliez l’octogone.

Une fois que je sais dans quel registre je me trouve, j’ai encore du travail car je dois me souvenir que la critique n’est pas réellement un sport de combat, mais un travail d’équipe, une course d’endurance en relai où je fais ma part du travail en comptant sur l’implication des autres à faire de même, et cela exige de moi que j’essaie d’être exemplaire (pas tout le temps, pas à chaque occasion, mais à chaque fois que je m’engage dans une activité importante). L’exemplarité est le signal honnête, couteux et donc fiable qui nous distingue les militants toxiques, des paladins clavicoles, des complotistes et des gourous. C’est ingrat, parce que chaque faux pas nous est reproché bien plus fort que les immondices commises par ceux que nous avons en face. C’est injuste, mais au bout de 10 ans je n’ai pas mieux à proposer : nous rappelons les règles et nous les suivons, nous misons sur l’intelligence collective, et régulièrement nous perdons… Mais en moyenne nous progressons. Et nous faisons ça ensemble, en accueillant parmi nous des gens qui naguère adhéraient à des croyances que la zététique les a aidés à mettre à distance.

Il en ressort que le débat face à face n’est que rarement la bonne manière de procéder, car il s’agit d’un rituel qui se joue au bénéfice du plus fort, du plus incisif, du plus volubile et adroit manieur de mots que du meilleur penseur, du locuteur le mieux apte à faire progresser tout le monde sur un sujet en discussion. Je vous renvoie à ce que j’ai dit au sujet de débattre ou de ne pas débattre avec tout le monde.

 

Parenthèse. La Tronche en Biais fait-elle du harcèlement ?

Sur cette chaîne, je livre des analyses de discours que j’estime contraire aux connaissances scientifiques, dangereuses, trompeuses… et j’apporte la contradiction à beaucoup de gens qui cherchent à avoir une influence que je juge néfaste sur la société.

À ce titre, j’énonce des critiques fortes, sourcées, argumentées, parfois moqueuses quand j’estime devoir porter atteinte à la crédibilité de ceux qui font profession de désinformer. Evidement en face de moi se trouvent des personnes qui reçoivent cela comme des attaques et disent alors, parfois, qu’elles sont victimes de harcèlement. La justice peut les aider à établir la réalité de ces reproches, il leur suffit de porter plainte. À ce jour quand on m’attaque au tribunal c’est pour concurrence déloyale. De mon côté j’ai déposé des plaintes pour cyberharcèlement. J’ai été extrêmement clair : vous m’avez aidé en contribuant à une cagnotte qui permet de saisir la justice, et avec cela je travaille avec un avocat, maître Mathieu Lanteri, et j’espère que les tribunaux sauront traiter cela d’une manière qui aidera les internautes francophones à se débarrasser de certains comportements.

Vous ne me verrez pas négocier avec les harceleurs qui sen prennent à moi depuis des années ; je vais subir, subir, enregistrer, archiver, et puis un jour j’estimerai que les pièces sont suffisantes pour attaquer et alors ils seront embarqués pour une aventure judiciaire qui durera un an ou trois ans et peut-être qu’ils n’en tireront aucune leçon mais j’ai bon espoir que ça envoie un message général.

Je vous invite à passer en revue les 600 vidéos de la chaine et mes comptes sur les réseaux sociaux pour vérifier si je me livre à des insultes répétées, à des attaques personnelles, à des menaces ou à un acharnement qui serait différent du travail journalistique de Médiapart par exemple qui traite régulièrement une affaire en plusieurs épisodes en laissant à chaque foi les incriminés réagir ou ne pas réagir aux éléments qu’ils apportent, un travail que notre démocratie ne qualifie pas de harcèlement.

Retour au Tutoriel.

Etape 3. Les 3 questions cruciales

Je vais vous rappeler les trois questions que ne se posent pas les cons tels que je les définis depuis longtemps : ceux qui affirment ce qu’ils ne peuvent affirmer, prétendent savoir ce qu’ils ne peuvent savoir et projettent sur autrui leurs propres défauts. La 3e, nous l’avons déjà développée en début d’article.

  1. Suis-je mieux informé ou plus compétent que la personne à qui je m’adresse ?
  2. Ai-je raison de supposer telles intentions de la part de mon interlocuteur ?
  3. Ai-je identifié le but de mon commentaire dans le cadre d’une conversation ?

Sans questionnement, je suis le jouet de mes émotions, des algorithmes et des effets de manche des manipulateurs qui créent du scandale pour engranger des vues, de la popularité, du pouvoir pour en faire un mauvais usage amenant à plus de scandale, de vues et de pouvoir.

 

Etape 4. L’art de Recevoir la critique

Attention : il ne faut pas faire porter tous les efforts sur le seul émetteur d’un propos critique. Parfois la violence se trouve du côté de celui qui reçoit la critique et décide de contre-attaquer en pourrissant ce qu’il identifie comme une source de nuisance. En zététique, nous parlons souvent de la manière d’émettre une critique, mais presque jamais de la manière dont il faut la recevoir.

D’abord, et c’est très difficile, il faut éviter de prêter une intention agressive à celui qui nous critique. Il faudrait se concentrer sur ce que son propos pourrait avoir de vrai, l’entendre comme une parole amicale et bienveillante qui pourrait nous aider à mieux penser, mieux parler, à mieux défendre certaines idées. Parfois des remarques abruptes et désagréables s’avèrent de précieux conseils pour éviter des écueils que nous n’avions pas su voir. Tous les conflits d’opinion ne doivent pas susciter en nous le besoin de nous défendre. Tous les conflits ne sont pas mauvais, certains nous aident à garder le cap, d’autres nous rappellent les priorités que nous désirons cultiver ou les défauts que nous devons atténuer.

Celui qui reçoit une critique ferait bien d’avoir lui aussi les 3 questions à l’esprit. Parfois c’est quelqu’un qui en sait plus que moi qui vient m’apporter son aide, même si c’est sous une forme piquante.

 

Etape 5. Quelques réflexions en vrac

  • Vous n’êtes pas obligé de critiquer publiquement tout ce qui vous énerve. Vous pouvez choisir vos combats avec un peu plus d’intelligence et même inciter certaines personnes qui vous agacent à défendre une cause commune, à peser là où vous pensez que cela peut être utile. Vous avez le droit de vous allier à des gens qui ne partagent pas 100% de vos convictions.
  • Tout le monde n’a pas le même humour. Si votre blague peut être interprétée comme une agression, demandez-vous si ça vaut le coup de la garder absolument.
  • Vous n’avez pas besoin de vous répéter 100 fois. La répétition est l’un des critères du harcèlement. On n’aide pas autrui à s’améliorer en pratiquant le supplice de la goutte chinoise.
  • Si le reproche que vous avez à formuler à déjà été publié 250 fois par ailleurs, vous pouvez liker ces autres reproches, mais pourquoi voudriez-vous redire une fois de plus ce qui a déjà été dit ? Le but de votre critique est-il bien clair dans votre esprit ?
  • Vous n’avez pas besoin de GAGNER. Forcer l’autre à prononcer une phrase qui atteste de votre supériorité est l’une des marques les plus évidente que vous êtes un gros toxique.
  • Une critique peut être entendue et avoir un effet réel sur quelqu’un sans que ça se voit de prime abord, sans qu’il se produise une crise visible depuis la Lune. Si vous faites évoluer le vocabulaire ou le ton d’un vidéaste, d’une journaliste, d’un influenceur, c’est déjà beaucoup !
  • Vos propos publics sont publics : ils pourront vous être publiquement reprochés. Ne prenez pas Twitter pour un salon privé où vous pouvez ressasser toute votre rancune sur Edouardine ou Placibas : ce sont des propos tenus dans l’agora commune où ils peuvent atteindre les gens en question. On peut vous demander des comptes.
  • 15 ou 20 réponses désagréables sous votre dernière publication, ce n’est pas une shitstorm ni un cyberharcèlement de masse. Pour en avoir reçu des dizaines de milliers depuis 2014, dont quelques dizaines ou centaines de menaces de mort plus ou moins vagues, je vous serai reconnaissant de garder le sens des proportions.
  • Si vous voulez convaincre votre interlocuteur ou les lecteurs de votre échange que vous avez raison, il est préférable de leur donner envie d’être dans votre camp. Si vous préférez la grandiloquence de votre position morale, vous avez plus de chance de jouer le rôle de repoussoir en offrant une caricature de votre camp (Cf La polarisation illusoire). Bref, vous desservez votre cause, et c’est votre droit. Mais c’est un peu dommage.

 

Que dit la loi ?

Je finirai en lisant tout bêtement ce que la loi dit sur le harcèlement. Vous verrez que, en fait, ce n’est pas un texte abscons et compliqué.

Article 222-33-2-2 du Code Pénal

Le fait de harceler une personne par des propos ou comportements répétés ayant pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de vie se traduisant par une altération de sa santé physique ou mentale est puni d’un an d’emprisonnement et de 15 000 € d’amende lorsque ces faits ont causé une incapacité totale de travail inférieure ou égale à huit jours ou n’ont entraîné aucune incapacité de travail.

L’infraction est également constituée :

  1. a) Lorsque ces propos ou comportements sont imposés à une même victime par plusieurs personnes, de manière concertée ou à l’instigation de l’une d’elles, alors même que chacune de ces personnes n’a pas agi de façon répétée ;
  2. b) Lorsque ces propos ou comportements sont imposés à une même victime, successivement, par plusieurs personnes qui, même en l’absence de concertation, savent que ces propos ou comportements caractérisent une répétition.

Les faits mentionnés aux premier à quatrième alinéas sont punis de deux ans d’emprisonnement et de 30 000 € d’amende :

1° Lorsqu’ils ont causé une incapacité totale de travail supérieure à huit jours ;

2° Lorsqu’ils ont été commis sur un mineur ;

3° Lorsqu’ils ont été commis sur une personne dont la particulière vulnérabilité, due à son âge, à une maladie, à une infirmité, à une déficience physique ou psychique ou à un état de grossesse, est apparente ou connue de leur auteur ;

4° Lorsqu’ils ont été commis par l’utilisation d’un service de communication au public en ligne ou par le biais d’un support numérique ou électronique ;

4° bis Lorsqu’ils ont été commis sur le titulaire d’un mandat électif ;

5° Lorsqu’un mineur était présent et y a assisté.

Les faits mentionnés aux premier à quatrième alinéas sont punis de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 € d’amende lorsqu’ils sont commis dans deux des circonstances mentionnées aux 1° à 5°.

 

CONCLUSION

Nul n’est censé ignorer la loi. Le doxing est punissable ; le harcèlement aussi. Je souhaite que nous passions tous à l’étape suivante de l’histoire d’Internet, celle où l’on n’a pas besoin de tout régler par le conflit comme des singes énervés ou des automobilistes du XXe siècles pour lesquels les accidents mortels étaient une fatalité qu’il fallait accepter parce que c’est comme ça, que voulez-vous, on n’y peut rien.

On a su éliminer les pires comportements de la route et apporter de la sécurité à tous les usagers.  Je pense qu’il est temps d’appliquer cette recette aux espaces numériques qui ressemblent encore un peu trop au far West.

 

Ressources à consulter sur ce sujet sur la TeB

— « Le harceleur a toujours raison » https://www.youtube.com/watch?v=MXWgNfIeYVA

— « Les ravages de la pureté » https://www.youtube.com/watch?v=dyzpxWWusVI

— Playlist « EMPRISE » de Penseur Sauvage. https://www.youtube.com/watch?v=c7fDEuTGgEY&list=PLoxcu07al0isu-CJ_A8PrqiXdFOOE1uai

— « Faut-il bloquer les gens sur Internet ? » https://www.youtube.com/watch?v=tqIip7cbXaM

— « Vous voulez du sang ? » (la zététique est-elle un art de combat ?) (aout 2020)  https://www.youtube.com/watch?v=B-Us-raVVtA

— « Rien ne vaut le débat ? » https://www.youtube.com/watch?v=VW_pcZa5vz8

— « Le gros préjudice moral de Frédéric Delavier » https://www.youtube.com/watch?v=7wxaNJ_f-9k

— « Trois actions en justice pour La tronche en Biais » https://www.youtube.com/watch?v=hxYYVMqhk28

— « Brulez vos idoles »  https://www.youtube.com/watch?v=KfBuvZAsG98

— « Le truc qui pourrit les débats » https://www.youtube.com/watch?v=-6uGz7PojHU

— « Arrêtez avec vos soupçons » https://www.youtube.com/watch?v=YFhVQAYZ2T8 (aout 2019)

— « La polarisation illusoire » https://www.youtube.com/watch?v=u06jMln7044

—  Votre colère ne vous donne pas raison. https://www.youtube.com/watch?v=zWK-H-clP9o