Enregistré au GEC, cours Léopold, à Nancy.
Invités: Pierre Rigaux, (naturaliste, membre de l’ASPAS).
Editorial
Un billet de réponse aux nombreuses réactions négatives suscitées par l’émission sera très bientôt mis en ligne.
Des hommes et des femmes qui tuent des animaux pour le sport, c’est évidemment discutable, et nous viennent d’abord à l’esprit des réflexions éthiques sur la souffrance animale et sur la justification de tuer quand on pourrait très bien s’en passer.
Aborder cette question, c’est s’assurer l’explosion des injures gratuites dans les commentaires. (Allez vérifier !) Parce que presque tout le monde a un avis sur la chasse et estime que les avis différents sont la marque d’une déficience mentale.
Faut-il accorder au moindre mulot des droits équivalents à ceux d’un humain ? Peut-on farcir de plomb la tête d’une biche comme on cueille une cerise ? D’un extrême à l’autre, en passant par le milieu, les débats d’ordre moral sont très importants, très compliqués, et parfaitement impossibles si l’on n’est pas capable AVANT de se mettre d’accord sur les faits à partir desquels on peut émettre un jugement, construire un argumentaire, et accepter de faire évoluer son opinion.
Nous voulons ici apporter des éclaircissements, décrypter un contexte, décortiquer la complexité d’une question qui a de multiples couches et de nombreux angles d’approche. Par conséquent cette émission ne sera pas un débat pour ou contre la chasse. Nous ne sommes pas là pour dresser le procès des chasseurs ou des écolos. Un écologiste peut très bien être pragmatique et rigoureux — être radical ne signifie pas être extrémiste ; en parallèle un chasseur peut très bien être altruiste, respectueux de l’environnement, attaché à la défense des espèces sauvages, amoureux de la nature. Ceux qui sont absolument convaincu du contraire ont peu de chance d’être utile à une conversation intelligente. Mais nous ne sommes pas en mesure de sonder les cœurs et d’établir qui sont les mieux intentionnés entre les pro- et les anti-chasse. Il serait vain de jouer au concours de gentillesse.
Pour savoir si la chasse doit se poursuivre ou pas, il faut répondre à un certain nombre de questions, mais il faut aussi abandonner les postures reposant sur des sophismes.
Dénoncer la chasse au nom de la souffrance animale n’est valable que si l’on en fait autant avec toutes les activités humaines (et elles ne sont pas rares) qui ont des conséquences aussi graves.
Du côté des défenseurs, on dit que la chasse est une pratique culturelle et millénaire, qu’à ce titre elle mériterait le respect. On retrouve le même argument chez les pro-corridas. C’est un mauvais argument, parce que l’histoire humaine est remplie de traditions, de pratiques culturelles qui nous semblent aujourd’hui odieuses pour d’excellentes raisons. L’appel à la tradition est même en soi une catégorie de sophisme. Ce pseudo-argument n’a de valeur que pour ceux qui sont déjà convaincus, cessons de l’utiliser.
Pour tenter d’aller au-delà des sophismes et des antagonismes stériles, nous avons choisi ce soir de nous limiter au terrain de la mesure scientifique des effets de la chasse sur les écosystèmes. Avant de délivrer des diplômes de supériorité morale aux uns ou aux autres, il faut commencer par être factuel et établir un état des lieux, et pour ce faire, rien n’est plus logique que de se tourner vers un spécialiste des écosystèmes. Cela s’appelle un écologue, et notre invité de ce soir est aussi membre de l’ASPAS, Association de Protection des Animaux Sauvages (et nous questionnerons cette affiliation et ses éventuels biais). Pour mieux comprendre les enjeux écologiques de la chasse, merci d’accueillir Pierre Rigaux.