Nous vivons tous dans un monde de concepts construit par notre cerveau à partir de nos perceptions de notre environnement. Nous le faisons assez efficacement, car la sélection naturelle s’est assuré d’éliminer continuellement ceux qui n’en étaient pas capables.

Agitateur d’idées, amuseur éclairé, aventurier des concepts, le vulgarisateur (qui peut être une vulgarisatrice, et le plus sera le mieux) est par définition un personnage public. Il s’adresse aux curieux, aux néophytes, pour partager avec eux une information de nature scientifique.

Avec du travail et de la chance, il rassemblera autour de lui des gens nombreux et attentifs à ses publications. Le développement du web offre d’ailleurs de plus en plus d’opportunités. Les contenus internet en lien avec la science se multiplient, et, fatalement, se pose la question de ce qu’est une bonne vulgarisation. Dans tous les métiers, toutes les activités, on trouve des gens honnêtes, talentueux, et des moins bons, voire de véritables imposteurs. Il est donc souhaitable de savoir quelles caractéristiques signalent la vulgarisation de bonne qualité.

A qui se fier ?

« Alors le mauvais vulgarisateur, il voit un concept là, qu’à rien demandé, et hop il le vulgarise. Alors que le bon vulgarisateur…»

Comment distinguer le bon vulgarisateur du mauvais ? Aucune réponse honnête ne sera simple, parce que le monde est compliqué, et parce que rendre compte de ce que la science démontre n’est pas une mince affaire. Aucune recette ne marchera à tous les coups, et aucun point de vue dogmatique ne peut espérer être valide. C’est à celui qui visite les pages qu’incombe la tâche de se poser quelques questions avant d’accepter ou de rejeter les informations qui lui sont présentées.

Nous vous proposons ici une liste indicative de ce que devraient être les principales préoccupations du vulgarisateur scientifique, et donc les critères à l’aune desquels il semble juste de juger son niveau de crédibilité.

Les 5 critères de la bonne vulgarisation

Le public a tout intérêt à s’assurer que le vulgarisateur prend soin :

  1. De présenter un contenu accessible et scientifiquement correct
  2. D’être attentif à la manière dont son travail est compris
  3. De créditer ses sources
  4. D’expliquer la méthode mise en œuvre pour obtenir les connaissances
  5. D’être exemplaire dans son rapport aux faits et aux théories scientifiques

Développons un peu

Les listes, c’est bien joli, mais ça manque toujours de nuances et de contextualisation. Alors évidemment : ça dépend. Ca dépend de la discipline, ça dépend du sujet, ça dépend du format, ça dépend de mille choses… Mais toutes choses étant égales par ailleurs, on serait bien inspirés de ne point trop se fier à ceux qui n’émargent pas aux critères proposés.

1 — Présenter un contenu accessible et scientifiquement correct

C’est le critère le plus évident. Il faut fournir des explications au plus proche de ce que dit la science, sous une forme débarrassée du jargon technique, éventuellement ludique ; en tout cas qui encourage la curiosité et le partage. Quand le propos n’est pas clair, c’est qu’il est peut-être mal compris ; pire peut-être n’est-il pas scientifique. Et pour reconnaître si ce premier critère est respecté, on a besoin des 4 qui suivent…

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2 — Être attentif à la manière dont son travail est compris

Cela veut dire lire les commentaires et les critiques faits sur son travail. Il faut corriger et expliquer les éventuelles erreurs. Si l’information est mal comprise, il faut probablement changer sa manière de l’expliquer. Bref, le passeur de science doit savoir se remettre en question. Les articles et les vidéos qui ne sont pas ouverts aux commentaires, et ceux où les commentaires pointent des problèmes sans recevoir de réponse doivent susciter la prudence.

Accessoirement le vulgarisateur n’est pas seul dans l’univers, et s’il est dans l’impossibilité de lire tous les commentaires (ça arrive), il peut néanmoins souvent compter sur une communauté de scientifiques prêts à relire ses brouillons et à lui suggérer reformulations et corrections (cf critère n°3).


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3 — Créditer ses sources

Si la publication est l’explication d’un ou plusieurs articles de recherche, l’auteur doit citer ces articles. Si des ouvrages l’ont aidé à rédiger son contenu, il est préférable de les citer également, non seulement par respect de leur travail, mais aussi de manière à retracer toute erreur potentielle. Il faut également créditer les experts qu’il aura sollicités pour compléter / corriger son travail. Créditer les sources est aussi le meilleur moyen de rendre compte du fonctionnement collectif de la science, et d’écarter les clichés sur les découvertes providentielles et les génies incompris.

Je suis très sceptique.

Je suis très sceptique.

4 — Expliquer la méthode mise en œuvre pour obtenir les connaissances vulgarisées

C’est-à-dire ne pas se limiter à des collections de fun facts (pour distrayantes ou passionnantes qu’elles puissent être) mais partager aussi avec le public une partie du cheminement des chercheurs, les raisons pour lesquelles on peut avoir confiance dans la connaissance ainsi produite. Cet aspect est important, car c’est la méthode de validation des connaissances qui rend la science différente des autres activités humaines.

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5 — Être exemplaire dans son rapport aux faits et aux théories scientifiques

La science produit des connaissances imparfaites et provisoires sur le monde. Les théories scientifiques n’ont rien de dogmatique, et certaines sont solidement étayées quand d’autres sont fragiles. L’évolution des connaissances passe nécessairement par la remise en question des « vérités de science » admises par le passé. La confiance que l’on peut accorder à la démarche scientifique dépend de la compréhension que l’on a de ses mécanismes d’autocorrection.

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Pourquoi une telle liste de critères ?

On pourrait considérer qu’il suffit d’être passionné et honnête pour faire de la bonne vulgarisation, sans s’encombrer d’autant de principes rébarbatifs dont les lecteurs-spectateurs n’ont que faire. L’article ou la vidéo de vulgarisation n’est pas un mémoire universitaire, on pourrait arguer que des sources n’apportent rien de plus. Pire, on pourrait considérer que le consommateur a la responsabilité de bien choisir ce qu’il consomme ; charge à lui de ne pas confondre une publicité ou un message à caractère sectaire avec une véritable publication de vulgarisation scientifique.

Mais il n’est pas raisonnable d’argumenter de la sorte, puisque c’est réclamer de la part de l’audience un comportement qui est précisément celui que la vulgarisation a pour but de susciter. Quel pourrait être l’intérêt d’exiger du public qu’il possède une compétence qui est celle qu’on se propose de l’aider à acquérir ?

Le vulgarisateur, surtout s’il a une large audience, est un influenceur. Sa parole acquiert une autorité qui n’est pas corrélée à sa qualité mais à la familiarité du public envers lui, à sa popularité. Un lien affectif s’établit entre le vulgarisateur et son public. On appelle effet de halo le phénomène par lequel une qualité que possède un individu modifie la perception que l’on a de ses autres qualités. Le public peut s’habituer à croire le vulgarisateur simplement parce que c’est lui. Sa responsabilité est alors de dissoudre cet effet de halo et de rappeler aux gens les vraies raisons pour lesquelles ils peuvent croire ce qu’il leur dit.

C’est en donnant les sources des informations / découvertes / théories qu’il partage qu’il peut le mieux assumer la responsabilité de la confiance qu’il inspire aux gens. Naturellement, rien ne le contraint légalement à assumer cette responsabilité, et seule l’éthique personnelle de l’influenceur lui dictera sa conduite ; mais alors revient au public la responsabilité d’être exigeant envers ceux à qui il veut pouvoir faire confiance.

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De l’utilité d’une telle précaution pour le vulgarisateur.

Tôt ou tard, le vulgarisateur commettra une erreur, car nul ne peut prétendre à l’infaillibilité. Que cette erreur soit une simple mésaventure, un impondérable événement, ou au contraire une retentissante catastrophe dépend en partie de la manière dont son public aura appris à recevoir sa parole, à en douter raisonnablement, et à garder en mémoire que les erreurs arrivent, qu’elles font partie intégrante du processus scientifique, et qu’elles ne sont pas graves en soi dès lors qu’on peut les identifier, retracer leur origine et leur apporter une juste correction.

Le vulgarisateur n’est pas un perroquet ou un traducteur, il communique avec les gens, il passe avec eux un contrat tacite de confiance, et il doit en donner les gages, sinon comment serait-il différent des gourous, des vendeurs de billevesées, des médiums, des charlatans, des télévangélistes qui prétendent savoir des choses qu’ils ne savent pas, et vendent très cher ce faux savoir ?

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La médiation des savoirs implique une responsabilité partagée. En dernier recours, c’est toujours le public qui est juge. Charge à lui, par conséquent, de se donner les moyens de ne pas croire n’importe qui n’importe comment.

***
Pour leurs commentaires ayant aidé à améliorer ce texte, je tiens à remercier les membres de l’ASTEC, de Vidéosciences et de la Vidéothèque d’Alexandrie. (Cela n’implique en rien qu’ils soient complètement d’accord avec le contenu de cet article).

Nous croyons mille et mille choses tous les jours. Nous croyons à la constance du monde, que les mêmes causes produisent les mêmes effets, et que le jour se lèvera demain. Nous croyons que nos choix nous appartiennent, que nous sommes rationnels. Nous croyons à nos valeurs morales. Nous croyons certaines histoires qu’on nous raconte. Nous croyons aux compétences de nos plombiers, de nos infirmières, comptables, garagistes et pilotes de ligne. Nous croyons que nos superstitions ont des effets sur le monde réel. Nous croyons à notre destin (ou pas), nous croyons en Dieu (ou pas)*. Nous croyons que nous connaissons des choses qu’en fait nous ignorons plus ou moins… Nous sommes des êtres de croyance.

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Le dogme scientifique !

On accuse volontiers les défenseurs de la méthode scientifique de croire immodérément « la science » comme d’autres croient aux Écritures. On entend des gens dire que les scientifiques croient dans les théories. On entend même des scientifiques dire eux-mêmes qu’ils « croient »en la parole d’experts qui exercent hors de leur domaine de compétence. Ils seraient donc dans la croyance.

La science est-elle une croyance comme une autre ?

En réalité, les scientifiques et les experts de différents domaines ne se contentent pas de « croire ».

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Une ancienne manière de voir ce qu’est une connaissance.

La délégation du savoir.

Aucun d’entre nous n’a accès à 100% des informations, personne ne maîtrise toutes les disciplines qui interviennent dans notre représentation du monde. Combien comprennent réellement les théories des sciences physiques, de la chimie, de la médecine, de la sociologie, de l’économie, de la psychologie ? Plus que cela encore, combien d’experts connaissent la totalité de leur discipline, ont lu tous les auteurs, tous les ouvrages, compulsé toutes les données, vérifié tous les résultats ?

Fichtre ! Cela veut-il dire qu’en réalité nous ne savons rien, que toute connaissance n’est qu’illusion ?

Chacun d’entre nous est bien forcé de se fier à ce que d’autres que lui savent mieux. On ne va pas passer notre temps à inventer l’eau chaude, alors nous utilisons les connaissances produites par d’autres, avant nous. Nous pouvons le faire, car par bonheur l’humanité a mis au point une manière de valider les connaissance indépendante des individus, c’est la méthode scientifique.

Et là est la nuance. Il n’est pas nécessaire de croire que e=mc² quand on n’est pas physicien et que la formule est en réalité opaque à notre compréhension. Pour l’accepter, il suffit d’avoir confiance dans la méthode qui a permis de produire et de valider cette équation.

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Croire ou ne pas croire ?

En l’absence d’une vérité absolue et accessible, nous sommes réduits à ne posséder que des connaissances imparfaites sur le monde. On peut alors vouloir considérer que tout n’est que croyance, une position qu’autorise l‘étonnante polysémie du verbe croire illustrée au tout début de cet article.

Aucune réelle frontière ne sépare d’un côté les connaissances indéniables et de l’autre les croyances douteuses. Il y a au contraire un continuum, et donc une infinité de nuances, entre d’un coté « je sais » et de l’autre « j’en sais rien du tout, mais je vais supposer X de manière totalement arbitraire ». Mais cette infinité de nuances est bel et bien une nuance, et la différence existe ! Ce qui sépare le choix arbitraire de croire X de la connaissance raisonnable en Y, c’est la confiance qui existe dans la méthode mise en oeuvre pour conclure.

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C’est pourquoi il n’y a pas de dogmatisme scientifique chez ceux qui comprennent la science. Mais cela implique non seulement de faire confiance à la méthode scientifique pour produire des savoirs, mais encore de savoir pourquoi on lui accorde cette confiance. Et pour cela, il faut savoir comment elle marche. C’est plus exigeant que de se contenter de « croire » mais c’est aussi le seul moyen de ne pas sombrer dans l’anti-science imbécile ou le scientisme absurde.

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* Et ne pas croire en Dieu n’est pas obligatoirement une croyance.

Dans le documentaire « La Révélation des Pyramides », nous assistons à une fantastique démonstration de numérologie : la narratrice nous dévoile la présence de nombreuses coïncidences numériques. Par exemple, on retrouverait dans les dimensions de la pyramide des approximations de pi, du nombre d’or, ou de la longueur en mètres de la coudée égyptienne (plus de détails ici).

 Le documentaire défend l’idée qu’il s’agit d’une volonté des constructeurs de la pyramide – qui essaieraient ainsi de délivrer un message caché. Beau joueur, le réalisateur donne tout de même la parole à un scientifique, qui explique que ces coïncidences n’ont rien de surprenant : « Si vous prenez un tabouret de cuisine, s’il est bien proportionné, vous trouverez sans doute aussi des valeurs intéressantes ». Ce que la narratrice résume par « Autrement dit, (encore) le hasard ».

Et là, je dis « non ». Mais pour comprendre pourquoi, il faut revenir un peu en arrière.

Hasard, mot mirage.

Il arrive que l’être humain soit confronté à des phénomènes intrigants, trop complexes pour être dus au hasard, mais dont les causes nous dépassent. Dans ce cas, la réaction naïve est de penser que ces phénomènes ne peuvent qu’être dus à une volonté consciente : une main qui guide les éclairs, une colère qui provoque les tempêtes, un architecte qui prévoit volontairement les coïncidences numériques.

 Le travail scientifique consiste à chercher les causes de ces phénomènes – et leurs explications, souvent, mettent fin à ces croyances en l’anthropomorphisme de l’univers : si les choses sont comme elles sont, ce n’est pas forcément parce que quelqu’un l’a voulu, c’est peut-être tout simplement la conséquence logique d’un enchaînement de causalités. C’est ainsi que la météorologie a tué l’idée d’une volonté divine cachée derrière le beau ou le mauvais temps.

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Quelle déception.

Cette lourde tâche d’explication du monde est souvent contrariée par la déception qu’elle engendre chez l’homme, ruinant le mythe d’un monde conçu pour lui par des êtres qui lui sont similaires. Il est infiniment plus gratifiant de penser, par exemple, que les saisons ont été faites pour permettre à l’humain de faire des récoltes une fois par an, plutôt  que de se rendre compte qu’il s’agit de simples conséquences de l’inclinaison de l’axe de rotation de la Terre. Alors, au début, l’ego humain s’insurge : « Quoi ? Ce n’est pas quelqu’un qui a mis en place les saisons ? Ce n’est donc que du hasard ? », commettant ainsi un contresens en confondant l’absence de volonté consciente et le hasard. Car la régularité des saisons n’est pas, nous le savons tous, due au hasard.

Mais, au final, après avoir cramé un Galilée ou deux, la raison finit par l’emporter. Cependant, les saisons expliquées, la vision anthropomorphique s’en trouve souvent, non pas anéantie, mais simplement déplacée : si c’est l’inclinaison de la Terre qui crée les saisons, alors c’est que quelqu’un l’a incliné exprès pour nous – pour pouvoir faire des saisons. Parce que bon, « les saisons, c’est quand même pas du hasard ». Et ça, chers amis, ça s’appelle du créationnisme (version « Intelligent Design »).

Le désir d’une causalité simple.

Mais revenons à nos pyramides. Le problème de la numérologie, c’est que l’explication scientifique n’est pas décevante seulement pour l’ego : elle est aussi décevante pour l’esprit humain rationnel. Car l’explication n’est pas « il y a une cause, et la voici » mais « il n’y a pas vraiment besoin de cause, car ça arrive tout le temps ». En effet, ce que montre Acermendax ici, c’est que si  ces coïncidences se produisent, c’est qu’il est quasi certain que, purement par déterminisme statistique, elles finissent par se produire. Si l’on prend une pyramide au hasard, ce qui serait très surprenant serait de ne pas trouver plein de valeurs pouvant évoquer pi. Si les théories des numérologues prospèrent, c’est que les numérologues croient, ou font semblant de croire, que l’explication des mathématiciens fait appel au hasard, et que l’homme de la rue ne fait pas la différence entre déterminisme statistique et hasard. C’est l’absence d’explication scientifique bien comprise qui permet à l’idée d’une volonté extérieure de subsister.

Ainsi donc, l’argument « pas-du-hasard » est un élément récurrent dans les argumentaires contre l’explication scientifique du monde, parfois accompagné d’une revendication de « vraie scientificité » : c’est les scientifiques qui ne font pas de la bonne science, à insister pour dire que les révélations des numérologues sont dues au hasard (ce que, si vous avez suivi, ils ne disent pas)…

 De la même manière, dans La Révélation des Pyramides, cet argument du hasard revient souvent, par exemple, pour parler des points communs entre les civilisations maya et égyptienne. « Est-ce vraiment un hasard ? » – non, vous répond la communauté scientifique, c’est du déterminisme anthropologique, et il existe toute une discipline (l’ethnologie) qui étudie ces déterminismes.

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Pour terminer, une mise en application : vous avez remarqué que tous les dessins d’enfant se ressemblent ? Même des groupes d’enfants qui n’ont jamais communiqué entre eux, même indirectement, font des dessins similaires. Comment est-ce possible ?

1 –  C’est du pur hasard.

2 –  C’est orchestré par des gens mystérieux avec une technologie avancée, appelés « les gribouilleurs ».

3 –  C’est un déterminisme cognitif : leur cerveau se construit plus ou moins de la même manière.

A vous de voir ce qui vous semble le plus rationnel et le plus crédible. En tout cas, maintenant, vous savez : non, ce n’est tout de même pas du hasard.

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Cher commentateur…

Vous lisez probablement cet article parce que quelqu’un vous a suggéré ce lien suite à l’un de vos commentaires.

Les chaînes et les blogs sceptiques comme celui-ci reçoivent des commentaires de toutes sortes, certains positifs, enthousiastes, voire flatteurs, d’autres outrés ou accusateurs, parfois pertinents, mais hélas qui donnent trop souvent dans l’ad hominem, l’affect, l’injure et le soupçon d’appartenir à une conspiration ou à une autre.

Devant de tels messages, le blogueur est amené à faire des choix. Certains ferment les commentaires pour éviter tout débordement, mais cela tue le dialogue et aseptise un milieu qui devait être propice aux échanges d’idées. C’est donc généralement concéder une défaite que de recourir à ce procédé ; il faut trouver une autre solution.

Ma solution privilégiée est de répondre sur le terrain des faits tout en soulignant les artifices rhétoriques dont nos chers commentateurs les plus remontés abusent trop souvent. Mais une fois que l’on a démontré la fausseté d’un argument ou bien le biais à l’oeuvre dans un discours, que l’on a clairement posé les questions qui permettraient à la discussion de devenir constructive, si notre interlocuteur s’entête à répéter les mêmes erreurs en variant le ton, il n’est plus temps de s’acharner, et c’est ici que je vous propose, cher commentateur, de vous poser ces questions.

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Vous apportez un avis différent ? Votre commentaire est le bienvenu. Ca ne veut pas dire que c’est vous qui avez raison.

§ 1. Pensez-vous que certaines personnes se font de fausses idées sur le monde ?

  • Oui. Allez au §2.
  • Non. vous ne pouvez pas répondre « non » puis me reprocher d’avoir tort sur quoi que ce soit. En conséquence, renoncez à débattre ou rendez-vous au §2.

 

§ 2. Pensez-vous qu’il existe des méthodes meilleures que d’autres pour évaluer la valeur d’une proposition sur le monde ?

  • Oui. Allez au §3
  • Non. Si vous répondez non, mais que vous confiez votre voiture à un garagiste ou bien votre chien à un vétérinaire, vous n’appliquez pas ce principe dans la vie de tous les jours, car vous admettez que le garagiste et le vétérinaire ont une méthode plus efficace que la votre pour détecter un problème et le résoudre. Il serait plus sage d’aller au §3.

§ 3. Comment proposez-vous de distinguer les bonnes méthodes des moins bonnes ?

  • La démarche scientifique fondée sur le test empirique des hypothèses : la recherche systématique de l’erreur.
  • Le tirage au sort.
  • Le choix selon l’humeur.
  • La tête du client.
  • Avec un pendule.
  • Avec le test de Rorschach.
  • etc.

La question centrale aux sujets abordés par les blogs sceptiques-zététiques est celle du choix de la méthode pour établir si une proposition est vraie ou fausse. Sur ce blog, et de manière générale dans notre civilisation, on fait le choix de se fier à la méthode scientifique, non parce qu’elle serait parfaite, mais parce qu’elle est celle qui présente le moins de défauts, et surtout parce qu’elle est auto-correctrice par nature.

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Avoir tort peut rendre un peu colérique. Mais être colérique n’aide pas à avoir raison.

Le choix de la démarche scientifique.

La démarche scientifique est la seule qui garantisse de parvenir au résultat le plus sûr possible compte tenu de nos connaissances. Certains voudront voir du scientisme dans cette affirmation, une sorte de « religion de la science ». Et cette accusation est souvent le refuge du contradicteur qui refuse de considérer la science comme ce qu’est elle, à savoir : une pensée méthodique.

Cette méthode permet d’écarter les hypothèses fausses. Souvenons-nous que toutes les pseudo-sciences et les pseudo-médecines, même les plus bizarres, ont leurs défenseurs (par définition ! celles qui n’en ont pas, ben on ne les connait même pas). Idem pour toutes les théories du complot les plus absurdes. Votre croyance vous semble correspondre au réel, mais c’est également le cas de tous ceux qui défendent une croyance qui vous semble ridicule à vous. À moins d’accepter d’employer l’esprit critique et la démarche rationnelle du test d’hypothèse, vous devez accepter toutes les croyances : l’astrologie, l’acupuncture, l’origine extraterrestre des agroglyphes, les dangers du gluten, la théorie de la Terre Creuse, l’hypothèse exotique de Roswel, l’existence des reptiliens, le créationnisme, les complots sur le Sida, les vaccins, le 11 septembre et Lady Di, etc.

Dans les cas particulièrement répandus et dangereux des pseudomédecines, libre à chacun de se soigner avec des saignées, des ventouses, de l’homéopathie, de l’urine, de la corne de rhinocéros, de la lithothérapie, du shamanisme, du prâna, etc. Mais celui qui doute d’une seule de ces pratiques : 1) Il a raison 2) Ca veut bien dire qu’on doit faire le tri, et 3) Il est utile de se rappeler que les malades ne sont pas forcément les mieux placés pour savoir ce qui les soigne ; il y a des gens dont le métier est de tester des hypothèses sur les causes des maladies et le meilleur moyen de s’en débarrasser. Chacun son expertise.

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À la seconde où vous vous énervez, vous inhibez les zones de votre cerveau qui vous aident à prendre conscience que vous pouvez avoir tort. Mauvaise stratégie.

 

Merci pour votre commentaire.

À présent que vous avez accepté de lire ces quelques lignes, cher commentateur, vous comprenez peut-être mieux ce qui vous dérangeait dans l’article où vous avez posté un commentaire. Pour un échange de qualité, intéressez-vous au fonctionnement de la science en vous gardant bien de vous battre contre une image d’Épinal de la Science avec une majuscule. N’oubliez pas que vous discutez avec un être humain qui a peut-être des choses à vous apprendre, surtout s’il est partisan d’une méthode qui a priori lui permet d’accepter de changer d’avis dès qu’il s’aperçoit qu’il peut avoir tort, et qui par conséquent doit avoir de bonnes raisons de penser ce qu’il pense. Inversement, n’oubliez pas qu’il est lui même ouvert au dialogue et donc demandeur de bonnes raisons de changer d’avis.

Les blogueurs sceptiques, y compris celui qui écrit ces mots peuvent se planter royalement sur tout un tas de choses, et si c’est le cas ils se montreront très reconnaissants envers celui ou celle qui les corrigera (même s’ils passent par une phase désagréable d’inconfort à un moment donné).

Ne cherchez pas à gagner le débat, mais à gagner au débat. Or celui qui gagne le plus, c’est celui qui a acquis de nouvelles cognitions.

Que vos futurs échanges soient fructueux.

 

« Pour juger quelqu’un, jugez les intentions qu’il vous prête. »
Paul Valéry, Mélange (1934)

Conférence du 16 mai 2015 à la convention Néocast.

Pour notre première conférence en tant que Vled & Mendax de la Tronche en Biais,  nous vous proposons une présentation de la zététique qui ne sera pas sans vous rappeler notre première vidéo.

De la méthode

Pour bien mettre en évidence l’efficacité unique de la méthode hypothético-déductive, nous montrons de quelle manière elle est utilisée par Gandalf en personne pour déterminer si oui ou non l’anneau de Bilbon et l’Unique ne font qu’un. Si même un magicien de ce calibre emploie la méthode scientifique fondée sur la production d’hypothèses réfutables et leur vérification, alors on peut défendre l’idée que c’est une démarche profitable à tout le monde.

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Quelques biais…

Ensuite nous procédons à un tour d’horizon des biais cognitifs, tout ce qui ressemble à des défauts dans notre rationalité, des bugs ou des bizarreries qui rendent nos comportements difficiles à prévoir et impossibles à justifier. Pour illustrer le biais nommé cécité d’inattention, nous utilisons la vidéo créée par les psychologues Simon et Chabris (pour les références, voir leur site). Désormais célèbre, cette vidéo demande au spectateur de compter le nombre de fois que le ballon passe de main en main entre les joueurs de l’équipe blanche…

C’est l’occasion pour le public de faire l’expérience du point aveugle : cette tendance que nous avons tous à nous penser moins biaisés que les autres.

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Les hémisphères cérébraux

A l’aide des expériences de split brain (cerveau dissocié) de Gazzaniga*, on peut se rendre compte que le cerveau n’a pas un fonctionnement aussi unifié que l’on pourrait le croire. Nous avons tous l’impression que notre personnalité est une entité indivisible qui d’un côté ressent son environnement de manière continue, et de l’autre produit des réactions qui mettent en jeu l’entièreté de qui nous sommes. La vérité est sensiblement différente. Les multiples parties du cerveau assurent différentes fonctions, et on sait notamment que les hémisphères traitent différemment les informations. Notre hémisphère gauche gère le langage et il est donc capable de verbaliser les objets qu’il reconnait. L’hémisphère droit n’a pas cette capacité et il doit passer par des moyens détournés pour exprimer ce dont il a conscience. La conférence présente les expériences passionnantes qui le démontrent et qui mettent en évidence des cas particulièrement frappant de rationalisation.

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Paréidolies.

La faculté de reconnaissance des formes de notre cerveau, extraordinairement développée, nous rend apte à voir des choses invisibles. J’ai évoqué ces phénomènes  dans un article sur les apophénies publié sur le blog de Xavier Ristat. La conférence est l’occasion de faire en grandeur nature ces expériences de biais de perception et d’horizon d’attente. C’est la mise en pratique, sensorielle, de concepts un peu abstraits concernant la manière dont le cerveau reconstruit le monde qu’il perçoit imparfaitement.

 

Qu’en dit l’évolution ?

On peut se demander si l’existence de toutes ces imperfections cognitives n’est pas contradictoire avec la théorie de l’évolution qui prédit un châtiment sévère pour tous les organismes un tant soi peu inefficaces… Et il s’avère que la question est intéressante car elle montre que nos biais cognitifs sont loin de constituer des désavantages dans un environnement naturel ; ce sont au contraire des caractères activement sélectionnés, et nous verrons pourquoi.

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Le problème qui se pose à nous, c’est que nous avons hérité d’un organe cérébral raffiné par des millions d’années de sélection naturelle, un organe qui a maximisé les chances de survie de nos ancêtres, a boosté notre capacité à produire de la culture et à faire des powerpoint… sauf que ce qui occupe notre crâne aujourd’hui est quasiment identique à ce qui se trouvait dans celui de Cro-Magnon. Nous avons le même cerveau que l’Homme des cavernes, mais plus vraiment les mêmes problèmes à résoudre. Les cerveaux d’aujourd’hui ont donc plutôt intérêt à s’armer de méthode et de rigueur pour faire face aux pièges de la vie contemporaine.

C’est pourquoi nous avons besoin de science !

 

 

Merci aux organisateurs de la Néocast pour leur invitation.

— Pour aller plus loin au sujet des split brain experiments (en anglais) : http://www.nature.com/news/the-split-brain-a-tale-of-two-halves-1.10213

 

Une nouvelle couche ?

 

Les personnes ne possédant qu’une faible connaissance sur un domaine sont sujets à une double peine. Non seulement elles souffrent des effets de leur ignorance dans le domaine, mais en plus il leur manque précisément les connaissances nécessaires pour savoir à quel point elles sont ignorantes (Cf article portrait robot de l’ignorance). C’est l’effet Dunning-Kruger. Eh bien, il se pourrait qu’il y ait une troisième couche à la malédiction de l’ignorance… et elle serait due à une forme de politesse.

 « Nous avons tendance à penser que chacun mérite un droit à la parole équivalent dans un débat. »[1]

Ainsi commence un article tout juste paru dans PNAS qui met en évidence un biais apparenté à l’effet Dunning-Kruger et qu’on pourrait appeler le biais d’égalitarisme. L’article est le fruit d’expériences réalisées en Iran, au Danemark et en Chine.

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Ce que dit l’étude.

Dans ces travaux, les sujets ont travaillé en binômes sur une tâche de reconnaissance visuelle : deux images successives leur étaient présentées durant une fraction de seconde. Ils devaient déterminer sur laquelle des deux apparaissait une cible. Chaque binôme assortissait sa réponse de son degré de certitude. Si les deux binômes ne donnaient pas la même réponse, l’un des deux était tiré au hasard pour choisir au nom du groupe. Ensuite on leur donnait la bonne réponse. Là où c’est intéressant c’est que l’opération était répétée 256 fois pour chaque binôme.

binomeQuand il existait une réelle différence de compétence entre les deux individus, la logique voudrait qu’au bout d’un certain nombre d’itérations, ils s’en aperçoivent, et surtout qu’ils jugent en conséquence. On s’attend à ce que l’individu le moins compétent accorde plus de poids à l’avis de son binôme qu’au sien, et inversement le plus compétent devrait réduire le poids du jugement de l’autre. Or ce n’est pas ce qu’il se passe. Les deux membres d’un binôme avaient toujours tendance à faire comme s’ils étaient aussi bons ou aussi mauvais que leur partenaire.

Les chercheurs ont fait varier les conditions, notamment en affichant le score des partenaires, en rendant la tache objectivement plus difficile pour l’un des sujets ou en assortissant l’expérience d’une gratification pécuniaire, sans jamais faire disparaitre le biais qui semble donc être bien installé.

L’explication d’un tel résultat semble résider dans la dimension sociale de notre espèce. Nous cherchons tous une intégration idéale parmi nos pairs. Les expériences sur la preuve sociale (travaux de Esch notamment) ont montré notre besoin de trouver dans le comportement d’autrui une confirmation que nous avons raison de penser ce que nous pensons.

Dans le cadre de ce paradigme, les nouveaux résultats peuvent être interprétés comme suit : les sujets moins doués, qui ont surestimé leur compétence, ont essayé de demeurer socialement pro-actifs ; les plus doués, qui ont sous-estimé les leurs, ont cherché à ne pas ignorer leurs partenaires.

Où est le mal ?

Ces comportements ne sont pas fallacieux en soi, ils ont même des vertus pro-sociales qui représentent des avantages dans la plupart des contextes. Mais dans les super-groupes qui composent nos sociétés (communautés, nations, réseaux sociaux affranchis des frontières) cette tendance naturelle à accorder du crédit à toutes les paroles indépendamment de leur connexion avec la réalité nous met souvent dans l’embarras.

Excellence

Tous les avis se valent-ils ?

Quand une personne -ou un groupe de personnes- apparait comme objectivement plus qualifiée que le super-groupe auquel elle appartient sur une question précise (plus d’expérience, plus d’aptitude ou plus de connaissance), le super-groupe tend malgré tout à évaluer les points de vue sous forme de compromis, c’est-à-dire en accordant une importance (illégitime) à l’avis des personnes clairement identifiables comme moins expertes du domaine.

 Les conséquences de ce genre de politesse sont multiples. Les gens bien élevés de nos sociétés modernes répugnent à humilier ou à rabaisser qui que ce soit. C’est une bonne chose, sauf quand cette volonté charitable de vivre en bonne intelligence nous retient de dire à l’ignorant qu’il est ignorant, car c’est un geste qui n’est charitable qu’en apparence.

humility

On ne gagne rien à humilier quiconque.

Le citoyen poli et cultivé y trouvera son compte en se donnant à lui-même l’image d’un d’esprit ouvert et tolérant envers l’ignorance d’autrui. Mais l’ignorant n’y aura rien gagné. En voulant éviter ce qui est considéré comme un moment gênant : la mise en évidence d’une fausse croyance, d’un raisonnement erroné ou d’une vision caduque d’un sujet en particulier, on prive la personne en situation d’ignorance de se corriger.

Le corollaire automatique de cette politesse bien installée veut que celui qui la transgresse en mettant en évidence les erreurs et les errements des autres est perçu négativement, ce qui complique le travail du zététicien et doit le forcer à prendre en considération les réactions que suscite le questionnement socratique qu’il pratique envers les croyances de notre temps.

 

Einstein and ego

La connaissance inspire l’humilité. Trop, peut-être…

Vers le relativisme…

 L’effet Dunning-Kruger et le biais d’égalitarisme sont des phénomènes naturels qui contribuent à affaiblir la parole des experts dans un monde où la méfiance envers les élites est exacerbée par quantité de facteurs politiques. Pourtant nous avons besoin que ceux qui savent soient entendus par ceux qui décident, lesquels exécutent trop souvent les désidérata de ceux qui croient.

Le danger devant lequel nous nous trouvons est celui de la banalisation du relativisme : l’idée que toutes les opinions se valent, que l’ignorance des uns vaut largement la connaissance des autres au nom de la démocratie et de notre amour de l’égalité.

 

Quote raymond aron

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Référence de l’étude : Mahmoodi et al. Equality bias impairs collective decision-making across cultures PNAS 2015 ; published ahead of print March 9, 2015. http://www.pnas.org/content/early/2015/03/05/1421692112.abstract

[1] « We tend to think that everyone deserves an equal say in a debate »

De quoi Bureaucratie est-il le nom ? KRAUZE-UE-bureaucracy

 

 

 

Dans un livre de 1970, le Principe de Peter, les pédagogues Laurence Peter et Raymond Hull proposent une loi empirique de « hiérarchologie » (la science de la structuration des organisations hiérarchiques). Le principe est rédigé sur un ton satirique et parodique, mais des études universitaires ont ensuite montré qu’il était partiellement valide.

 

Les auteurs ont posé deux principes de base :

  • Un employé compétent est promu à un niveau hiérarchique supérieur.
  • Un employé incompétent donné n’est pas promu à un niveau supérieur, ni rétrogradé à son ancien poste.

(Les principes considèrent également que le niveau n+1 requière plus de compétences que le niveau n, ce qui n’est pas nécessairement vrai mais constitue une approximation suffisante)

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La conclusion est immédiate, imparable, implacable : « Dans une hiérarchie, tout employé a tendance à s’élever à son niveau d’incompétence »

 

Le principe est aussi appelé « syndrome de la promotion Focus » et il a pour corolaire que : « Avec le temps, tout poste sera occupé par un employé incapable d’en assumer la responsabilité. » En conséquence, bien sûr, l’essentiel du travail est réalisé par des employés n’ayant pas atteint leur seuil d’incompétence.

Le principe de Dilbert va un peu plus loin en précisant que l’on promeut les employés incompétents à leur tâche pour mettre à leur place quelqu’un qui sera capable de faire le travail.

 

Bureaucracy

 

Dans une société qui a de nombreux niveaux hiérarchiques, les employés ont de fortes chances d’atteindre leur niveau de stagnation. Dès lors, et surtout si leur niveau est élevé dans la hiérarchie, les éléments pleinement incompétents vont passer leur temps en réunions, en colloques, séminaires et symposiums. Ils entrent en « lévitation » : ils sont indéboulonnables parce que seul un hiérarque plus gradé peut les renvoyer/rétrograder, et qu’il ne peut pas le faire sans avouer qu’il a fait une erreur de management.

 

 

 

Le principe de Peter est impitoyable envers les hauts gradés, car plus un poste est élevé dans la hiérarchie:

 

  • Plus il y a de chances qu’il soit occupé par quelqu’un ayant atteint son niveau d’incompétence.
  • Plus son impact est grand sur l’organisation de la société.

 

Si on osait, on en conclurait bien vite que les postes hauts gradés sont nocifs pour la société, mais quelle personne en possession d’un peu de pouvoir a envie d’entendre vanter les mérites de l’anarchie ?

 

Ce triste constat est valable dans le privé, mais il l’est surtout dans le public où l’absence de compétition soustrait l’administration aux phénomènes de sélection darwinienne, seuls capables de sanctionner une organisation vraiment désastreuse. Il va de soi que la Loi de Murphy s’arrange pour que le niveau d’incompétence des instances dirigeantes les empêche de détecter la totale incompétence des personnes promues dans les niveaux inférieurs.

 

bureaucracy 11

 

En 2010, Pluchino et al. reçoivent le prix Ig Nobel pour leur démonstration qu’une promotion fondée totalement sur le hasard est le meilleur moyen de déjouer le principe de Peter, (dont la validité scientifique, nous le rappelons n’est pas attestée puisqu’il s’agit d’un exemple de raisonnement quasi absurde)[1].

 

 

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[1] Alessandro Pluchino; Andrea Rapisarda; Cesare Garofalo (2009). « The Peter Principle Revisited: A Computational Study ». Physica A 389 (3): 467–472. arXiv:0907.0455.

Think out of the box…

WeatherGlassBarometer

Il y a quelques temps, un collègue m’appelait pour me demander d’arbitrer un désaccord au sujet de la note d’un étudiant. Il estimait devoir donner un zéro à la réponse de l’étudiant sur une question de physique, tandis que celui-ci prétendait qu’il devrait obtenir un 20 si le système n’était pas conçu au désavantage des candidats. Tous les deux s’étaient mis d’accord sur le choix d’un arbitre impartial. Ce fut moi.

 

Le problème du baromètre.

Dans le bureau de mon collègue, je pris connaissance du sujet : « Montrez comment il est possible de déterminer la hauteur d’un grand immeuble en utilisant un baromètre. »

La réponse de l’étudiant était : « Emmenez le baromètre en haut de l’immeuble, attachez-le au bout d’une corde et descendez-le jusque sur le sol. Remontez ensuite la corde et mesurez sa longueur. La longueur de la corde vous donne la hauteur de l’immeuble. »

Voici qui était une réponse très intéressante, mais l’étudiant devait-il en être récompensé ? D’un côté il avait parfaitement répondu à la question qui lui était posée, mais d’un autre côté lui donner un 20 pouvait contribuer à ce qu’il obtienne un excellent score à son année de Physique. Or, un excellent score est supposé certifier que l’étudiant a de réelles connaissances de cette matière. J’ai donc proposé que l’étudiant ait droit à un nouvel essai. Sans surprise, mon collègue fut d’accord ; l’étudiant le fut tout autant, ce qui me sembla plus étonnant.

Je donnai 6 minutes à l’étudiant pour répondre à la même question en précisant bien que cette fois il devait utiliser ses connaissances en physique. Au bout de 5 minutes, il n’avait rien écrit. Je lui demandai s’il désirait abandonner, parce que j’avais d’autres choses à faire de mon temps, mais il m’assura qu’il avait de nombreuses réponses à ce problème ; il lui fallait juste choisir la meilleure. En m’excusant de l’avoir interrompu, je le laissai continuer, et dans la minute suivante il rédigea à toute vitesse la réponse que voici :

« Emmenez le baromètre en haut de l’immeuble et allongez-vous sur le bord du toit. Laissez tomber le baromètre en mesurant sa chute avec un chronomètre. La formule x=1/2 at² donne la hauteur de l’immeuble. »

Mon collègue lâcha l’affaire et je donnai une excellente note à l’étudiant. En quittant le bureau, toutefois, il me revint à l’esprit que l’étudiant prétendait avoir d’autres réponses au problème. Je lui demandai ce qu’il avait en tête.

« Oh oui, il y a beaucoup de façons de trouver la hauteur d’un immeuble en utilisant un baromètre. Par exemple, s’il fait grand soleil, vous mesurez le baromètre puis l’ombre qu’il projette. Vous mesurez ensuite l’ombre de l’immeuble, et avec un simple calcul de proportion, vous obtenez la hauteur de l’immeuble.

— Très bien, dis-je. Et les autres ?

— Il y a une méthode très simple qui va vous plaire. Dans cette méthode, vous prenez le baromètre et vous montez les escaliers. Au fur et à mesure de votre progression, vous placez le baromètre sur le mur et faites des marques qui correspondent à sa longueur. A la fin, vous comptez les marques et cela vous donne la hauteur de l’immeuble en unité barométrique. Une méthode très directe. Bien sûr, si vous préférez une méthode plus sophistiquée, vous pouvez attacher le baromètre au bout d’un fil et le faire se balancer comme un pendule. Ainsi vous déterminez la valeur de ‘g’ au niveau de la rue puis au sommet de l’immeuble. A partir de la différence de ces deux valeurs de ‘g’, vous pouvez en principe obtenir la hauteur de l’immeuble. On peut aussi se placer sur le toit et faire balancer le baromètre au bout d’un fil au raz du sol. La période des oscillations permet de calculer la longueur de la corde et donc la hauteur de l’immeuble. »

 

Enfin, il conclut : « Si vous me permettez de ne pas me limiter à la physique, il y a bien d’autres réponses possibles. Vous prenez le baromètre et vous allez au sous-sol. Vous cognez à la porte du concierge, et vous lui dites : Monsieur le concierge, j’ai ici un très beau baromètre. Si vous me donnez la hauteur de l’immeuble, il est à vous. »

pantheon_pendule_foucault

Le pendule de Foucault

 

Je finis par demander à l’étudiant s’il ignorait réellement la réponse attendue. Il admit qu’il la connaissait mais qu’il en avait assez des professeurs qui essayaient de lui inculquer comment penser plutôt que de lui enseigner la structure de la matière.

 

***

 

Traduction à partir de l’article de Alexander Calandra (Current Science, Teacher’s Edition, 1964)[1]

 

Ce récit illustre certains défauts de l’enseignement à l’université, comme l’enfermement de certains enseignants dans les méthodes et les exemples qu’ils utilisent en cours à l’exclusion des autres solutions que les étudiants peuvent trouver par eux-mêmes. De manière plus générale, il est question ici d’un biais cognitif que les anglophones appellent ‘functionnal fixedness‘ : la difficulté de considérer un objet autrement que par le biais de la fonction qui lui est attribuée. Sortir de ce dilemme revient en quelque sorte à penser hors de la boite (‘think out of the box‘ car les anglophones ont décidément beaucoup réfléchi à ces questions).

 

Cet essai qui date des années 1950 et s’est retrouvé dans plusieurs écrits du Professeur Calanda s’est transformé en légende urbaine. Ainsi l’étudiant est devenu Niels Bohr (Prix Nobel Physique en 1922) et l’arbitre Ernest Rutherford (Prix Nobel Chimie en 1908), alors que le premier n’était plus étudiant quand il fit la connaissance du second.

 

 

out_of_the_box—-

[1] http://www.mrao.cam.ac.uk/~steve/astrophysics/webpages/barometer_story.htm

http://en.wikipedia.org/wiki/Barometer_question

Argument d'autorité
On appelle argument d’autorité un sophisme qui consiste à se référer à un personnage illustre, à ce qu’il a pu dire ou écrire, comme s’il s’agissait d’une preuve que cette opinion est vraie. Bien sûr l’autorité, en leur temps, de Niels Borh sur la physique quantique ou de Louis Pasteur sur les microorganismes est réelle, comme l’est l’autorité de tout spécialiste dans le cadre de sa spécialité. Nous avons de bonnes raisons de faire confiance à la parole d’un individu après qu’il a fait la preuve de sa compétence dans un domaine. Mais cette compétence ne le qualifie jamais pour faire autorité dans un autre domaine. On ne se réfère pas à l’avis de Stephen Hawking sur l’importance et l’efficacité des vaccins ni à celui d’un neurobiologiste sur la datation au carbone 14 de tel ou tel artefact ni à un cosmologiste pour juger le meilleur ouvrier charpentier de France. À chacun son domaine.
Dire qu’on pensait pouvoir faire confiance.. aux publicités.

L’argument d’autorité : la tentation rhétorique.

Pourtant la tentation est grande de convoquer les grands esprits, les grands personnages, ceux qui se sont illustrés dans divers domaines de la connaissance par le passé pour tenter d’utiliser ce prestige afin de défendre une thèse dont aucun d’eux ne pouvait ou bien prétendre être spécialiste ou encore avoir produit des preuves à l’appui de leur opinion.
À notre époque, l’exemple le plus frappant est celui d’Albert Einstein. Son nom surgit, telle une constante, dans tous les débats où sont discutées la valeur de la croyance et sa relation avec la science. Chaque fois, philosophes ou historiens croyants cherchent à enrôler Einstein dans le camp des déistes, voire parfois des théistes. Ils pensent anoblir leur pensée en l’adoubant à l’effet de halo suscité par la réputation du physicien. Examinons cela d’un peu plus près.

Reconnaissons tout de suite qu’Einstein a beaucoup utilisé les mots dieu et religion. Il se dit « profondément religieux », mais il ne faut surtout pas s’arrêter à ces mots, car Einstein a souvent expliqué qu’il s’agit pour lui d’un rapport qu’il entretient avec l’univers et les causes de son existence, une religion cosmique en quelque sorte. Le « dieu » d’Einstein, celui qui « ne joue pas aux dés » est spinozien, c’est simplement l’harmonie, la beauté et le mystère de l’univers. Car Einstein doutait que l’Univers puisse être réellement compris par l’Homme.

« Ce qu’il y a de plus incompréhensible avec l’univers, c’est qu’il soit compréhensible. »

« Savoir que ce qui nous est impénétrable existe vraiment et se manifeste comme la plus haute sagesse, la plus rayonnante beauté dont les formes les plus grossières sont les seules intelligibles à nos pauvres facultés, cette connaissance, ce sentiment, voilà ce qui est au centre du véritable sentiment religieux. En ce sens, et seulement en ce sens, je me range parmi les hommes les plus profondément religieux. »[1]

 Les écrits d’Einstein montrent clairement un homme à mille lieu d’être un « religieux » au sens le plus commun du terme, celui de dévot, et même au sens de croyant tel qu’on l’entend dans les Églises. Malgré l’usage abusif du mot religieux par Einstein, le panthéisme qu’il professe de temps à autre n’est pas une religion.
« Je crois au Dieu de Spinoza, qui se manifeste dans l’harmonie des lois de la réalité, et non en un dieu qui s’occupe du destin et des actes de l’homme. Il est certain qu’à la base de tout travail scientifique un peu délicat se trouve une conviction analogue au sentiment religieux que le monde est fondé sur la raison et peut être compris. Cette conviction, liée à un sentiment  profond d’une raison supérieure, qui se manifeste dans le monde de l’expérience, constitue pour moi l’idée de Dieu. En langage ordinaire, on peut l’appeler panthéiste. »
L’avis des grands hommes est-il intéressant sur tous les sujets ?

En dépit de son utilisation répétée du mot dieu dans le sens très particulier que nous avons présenté, Einstein n’a cessé de dire qu’il était totalement non-croyant, et sa position métaphysique n’a rien que pourrait renier un athée pourtant affiché comme Richard Dawkins.

« La seule excuse de Dieu, c’est qu’il n’existe pas » (lettre à Edgar Meyer, 2 janvier 1915)

« Je cessai subitement d’être religieux à l’âge de 12 ans. Par la lecture de livres pour la diffusion de la science dans le peuple, j’acquis bien vite la conviction que maintes histoires que raconte la Bible ne pouvaient pas être vraies. La conséquence fut que je devins défenseur enflammé de la libre pensée, en associant à ma foi nouvelle l’impression que les jeunes étaient consciemment trompés par l’État qui leur donnait un enseignement menteur ; et cette impression fut pour moi bouleversante.»

« À la vérité la croyance en un dieu personnel qui interfère avec les évènements naturels ne pourrait jamais être réfutée, au sens propre du terme, par la science, car une telle doctrine peut toujours se réfugier en des domaines ou la connaissance scientifique n’est pas encore parvenue à mettre le pied. Je ne doute pas toutefois qu’une telle attitude de la part des représentants de la religion serait non seulement indigne mais aussi fatale. En effet une doctrine qui parvient à survivre non pas dans la lumière mais seulement dans l’obscurité perdra forcément l’influence qu’elle avait sur l’humanité, entraînant un dommage incalculable pour le progrès humain. » 

Pour retranscrire le plus fidèlement possible la pensée d’Einstein, voici d’autres citations par ordre chronologique :

« Qu’un individu puisse survivre à sa mort physique est au-delà de ma compréhension ; … de telles idées sont pour les peurs ou l’égoïsme absurde des âmes faibles. » (Comment je vois le monde, 1934)

« Je n’ai jamais parlé de ma vie à un jésuite et je suis abasourdi de l’audace des mensonges qu’on raconte à mon sujet. Du point de vue d’un jésuite, je suis évidemment, et j’ai toujours été, un athée. » (Lettre à G. Raner, 2 juillet 1945)

« J’ai souvent répété qu’à mon avis, l’idée d’un dieu personnel est puérile. Vous pouvez me qualifier d’agnostique, mais je ne partage pas l’esprit de croisade de l’athée professionnel dont la ferveur est due principalement à un acte douloureux de libération des chaines de l’endoctrinement religieux subi dans la jeunesse.»
(Lettre à G. Raner, 28 septembre 1949)

« Ma position concernant Dieu est celle d’un agnostique. » (Lettre à M. Berkowitz, 25 octobre 1950).

« Ce que vous avez lu au sujet de mes convictions religieuses est évidemment un mensonge qu’on répète systémati­quement. Je ne crois pas en un dieu personnel, je l’ai affirmé très clairement et de j’ai jamais dit le contraire » (lettre du 24 mars 1954).

Celui qui fait appel à une autorité la cite-t-il bien ?
Albert Einstein était donc tout sauf croyant : athée ou agnostique selon les définitions que chacun donne à ces termes. Et il avait un avis très réfléchi sur les relations entre la science et la religion.

« D’après la considération historique, on est enclin à tenir la science et la religion pour des antagonistes irréconciliables et, certes, pour une raison facile à comprendre. Celui qui est pénétré de la vérité que la loi causale régit tous les événements ne peut pas du tout admettre l’idée d’un être intervenant dans la marche du processus de la causalité. La religion-crainte ne trouve pas de place chez lui, et pas davantage la religion sociale et morale. Un dieu qui récompense et qui punit est déjà pour lui inconcevable pour la raison que l’homme agit d’après les lois rigoureuses extérieures et intérieures et ne saurait, par conséquent, être responsable à l’égard de dieu, pas plus qu’un objet inanimé n’est responsable de ses mouvements. On a à cause de cela reproché à la science de saper la morale, mais certainement à tort. Le comportement moral de l’homme doit être basé efficacement sur la compassion, l’éducation et les liens sociaux, et n’a nullement besoin d’un fondement religieux. La condition des hommes serait triste s’ils devaient être retenus par la crainte du châtiment et l’espoir de la récompense après la mort. »

Un zététicien plein d’autorité.

Que peut-on tirer de l’avis d’Einstein sur la question ?

Assurément son athéisme / agnosticisme n’est pas une preuve de l’inexistence de Dieu. Il n’est pas question de commettre à notre tour le sophisme de l’argument d’autorité. En terme d’autorité intellectuelle citons Newton, sans doute l’un des hommes les plus intelligents ayant jamais vécu, et obsédé par l’alchimie à laquelle il consacra un temps considérable au détriment de ses travaux scientifiques déjà prolifiques.
Devrait-on considérer que l’exemple de Newton est un argument en faveur de la rationalité de l’alchimie ? Non.
Mais de l’exemple d’Einstein, on peut sans doute retenir la tendance d’un très grand nombre d’apologètes à abuser de l’argument d’autorité, un sophisme assez inhérent, en fait, à la pensée dogmatique qui est nécessairement la leur.
Einstein et l'argument d'autorité

 Pour aller plus loin.

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[1] La plupart des citations utilisées peuvent être trouvées dans : Dictionnaire des athées, agnostiques, sceptiques et autres mécréants,  Georges Minois.

Le phénomène de rationalisation

 

Nous passons notre temps à nous raconter des histoires à nous-mêmes, à faire le récit intérieur de ce que nous pensons, de ce que nous faisons, de ce que nous désirons. Notre nature profondément narrative est en perpétuelle recherche de sens, de continuité et de cohérence. En soi, c’est très bien, mais cela vient avec un gros défaut : en cas de pénurie de sens, de continuité, de cohérence, eh bien nous en fabriquons une sans même nous en rendre compte, nous rationalisons.

À cause de ce besoin irrépressible de rationalisation, et parce qu’au cœur de notre psyché se trouve un noyau d’estime de soi constitué de pensées positives sur nous-mêmes, nous cherchons des excuses à nos mauvais comportements. Chacun de nous tient à se regarder comme quelqu’un de cohérent et de logique, alors nous rationalisons sur tout : nos opinions politiques, notre conduite sur la route, nos retards, nos impolitesses, nos petites incivilités, nos mensonges… nos croyances. Et s’il est besoin d’un exemple pour voir à quel point la rationalisation nous affecte, songeons à ce petit problème mathématique que le lecteur aura peut-être eu à résoudre à l’école.

Logique et rationalisationLe problème a été rédigé pour la première fois par un certain Gustave Flaubert, en 1841 :

« Un navire est en mer, il est parti de Boston chargé de coton, il jauge 200 tonneaux. Il fait voile vers le Havre, le grand mât est cassé, il y a un mousse sur le gaillard d’avant, les passagers sont au nombre de douze, le vent souffle N.-E.-E., l’horloge marque 3 heures un quart d’après-midi, on est au mois de mai… On demande l’âge du capitaine ? »

A l’école, on le rencontre souvent sous une forme simplifiée :

« Sur un bateau, il y a 23 chèvres et 18 moutons. Quel est l’âge du capitaine ? »

Les élèves de cours élémentaire à qui cette question est posée sont plus de 75% à utiliser les chiffres fournis pour formuler une réponse. Dans ces cas là, bien sûr le capitaine a 41 ans.Chez les élèves de cours moyen, ils sont encore un tiers à trouver l’âge du capitaine

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Une image de souche… Qu’est-ce que ça a à voir avec l’âge du capitaine ?

 

Comment peut-on expliquer un tel résultat ? Ce qui pousse un si grand nombre d’enfants à obtenir une réponse absolument hors sujet et à la considérer comme juste est de la même nature que ce qui pousse nombre d’adultes à se construire ou à se référer à un récit qui soit en accord avec leur vision du monde.

C’est ainsi par exemple que la spiritualité, la proximité avec la nature, le rejet d’une science perçue comme cynique sont autant de données injectée dans l’équation qui donne non pas l’âge du capitaine, mais un sens à la vie. Peu importe que les intrants n’aient entre eux aucun lien réel du moment qu’ils permettent d’établir un récit personnel ou communautaire.

AgesProprietairesBateaux

En fonction du contexte, la question de l’âge du capitaine peut avoir du sens.

 Cela est aussi valable avec le nationalisme, avec certaines formes d’écologisme, et en définitive avec toutes les idéologies auxquelles les personnes adhèrent pour des motifs qui ne sont pas rationnels. Nous sommes tous concernés par l’âge du capitaine.

capitaine