On identifie sans mal certaines idéologies pour ce qu’elles sont : des combinaisons de valeurs, d’idéaux et des stratégies déployées pour les défendre.

Ne vous laissez pas influencer par la thématique donnée dans le titre. On ne va pas faire du drama. On ne va pas faire de politique. On va faire de la zététique : l’art du doute méthodique.

 

Voilà ce qui se passe. Une frange de l’Internet, plutôt remontée contre les LGBT et les sciences humaines qui se penchent sur les questions d’oppression et de domination me tombe dessus depuis des semaines avec agressivité et moquerie en disant que je fais honte à la zététique à ne pas savoir reconnaître un garçon d’une fille. Si c’est vrai, c’est grave.

Comme d’habitude tout ça est régurgité par tout un tas d’ahuris qui glissent ce nouvel élément de langage dans leurs attaques, et ressortent des accusations d’être trop politisé. Naguère une petite bande disait « la zététique c’est de droite », donc pas bien, et aujourd’hui une grosse clique dit « la zététique c’est trop woke », donc pas bien.

Dalibor de la chaine Psyhodelik a encore sorti toute une série de vidéos pour dire à quel point il était un meilleur zététicien que moi. Et ça semble convaincre des gens puisque ce conflit a fait perdre plus de mille abonnés à la TeB, une première en huit ans et demi. Ceci étant j’ai vu qu’il était à la mode de dire « la zététique me déçois, je me désabonne » tout en ayant un compte abonné et partageant le pire de la complosphère ce qui suscite en moi… le doute.

 

Face à tout ça il y a plusieurs réactions possibles

  1. Batailler pied à pied, répondre à chaque attaque, à chaque homme de paille, à chaque commentaire. Consacrer mon temps à essayer de convaincre tout le monde. Faire un burn out. Et mourir
  2. Dire à tous ces cons d’aller se faire cuire le cul et les ignorer.
  3. Ignorer tous ces cons sans même leur dire d’aller se faire cuire le cul.
  4. Rester calme, ne pas réagir, et continuer d’essayer de faire avancer la compréhension des gens, notamment sur la question du genre comme je m’y emploie sur Twitter avec mon compte personnel en jouant les Socrate du dimanche avec plus ou moins de talent.
  5. Tout plaquer. Fermer la chaîne et vivre de l’immense fortune accumulée grâce tout mon travail, mes héritages et les chèques des grands industriels qui nous téléguident.
  6. J’ai choisi l’option 6 : Essayer de tirer quelque chose d’utile de tout ça en donnant des explications contextuelles sur l’origine des propos qu’on me reproche, en apportant des éléments qui vous permettront peut-être de mieux comprendre ce que la science dit de ces questions, et en défendant ma manière de concevoir la zététique et de la pratiquer.

 

Soyons méthodiques. Soyons zététique.

Je précise que je suis loin d’être expert de la question du genre, et que je ne suis pas militant sur cette thématique. Cette vidéo n’a pas pour but de décréter une vérité sur le sujet mais d’élaguer un peu les herbes folles qui mettent la pagaille. Si je parle de ce sujet, c’est parce que je suis très étonné du niveau de certitude de ceux qui veulent imposer leur avis. Je pense qu’on y gagnerait tous en appliquant le précepte suivant : juger moins pour comprendre mieux.

Allons-y

1. Le contexte

Le 8 juillet 2019 je réagis au tweet de la revue Psychologies qui partageait la veille l’avis d’une psychanalyste[1].

La psychanalyse, on en a un peu marre. Quasiment le monde entier s’en est débarrassé, mais en France on continue d’aimer cette pseudoscience criminelle qui s’affiche dans tous nos médias. C’est une honte, mais c’est pas le sujet.

Cette psychanalyste répond à la question de Lucie, 6 ans « Je veux devenir un garçon. Pourquoi n’est-ce pas possible ?»

La réponse est « Tu ne peux pas devenir un garçon, Lucie. »

Tout part de là. J’ai remis en question la réponse de cette psychanalyste, (et je vais l’analyser pour vous dans un instant) et je me suis coltiné des tas de gens très intelligents qui m’ont sorti leur cours de biologie du collège pour me montrer que je suis complètement crétin et téléguidé par de l’idéologie. Et depuis cet épisode, essentiellement, je me contente de demander sur Twitter à ceux qui ne veulent pas que Lucie puisse devenir un garçon de me donner la définition sur laquelle ils s’appuient pour énoncer une telle interdiction.

J’espère que ça vous parait aussi important qu’à moi que celles et ceux qui veulent interdire l’usage d’un mot à quelqu’un soient capables d’en définir précisément les contours. Dans cette situation, moi je n’impose rien à personne, je me contente de douter de la réponse de la psychanalyste et de  la certitude de tous ceux qui, apparemment, savent mieux qui est Lucie que Lucie elle-même. Ce que j’apporte c’est du doute. Vous avez le droit de ne pas aimer, mais vous aurez du mal à expliquer que ce n’est pas de la zététique.

 

Revenons à la réponse de la psychanalyste

« Tu ne peux pas devenir un garçon, Lucie, parce que tu es née, comme ta mère, dans un corps de fille. De même que ton frère est né, comme ton père, dans un corps de garçon. Et ça on ne va pas le changer. »

Ca veut dire quoi « naître dans un corps de fille ? » Je suis né avec mon corps, mais si on me disait que je suis né dans un corps de garçon, ça voudrait dire que je suis une chose, une entité, qui est placée à l’intérieur d’un corps. C’est une conception dualiste. Ce n’est pas parcimonieux. L’approche la plus raisonnable, la plus rationnelle, la plus zététique est aussi la plus matérialiste, elle consiste à dire que, jusqu’à preuve du contraire, je suis mon corps et pas une chose qui habite mon corps, et si on veut être plus précis, je suis la conscience que mon cerveau, en relation avec mes autres organes, produit à chaque instant.

Selon ce point de vue, qui peut se discuter, mais qui est le plus zététique que je connaisse, vous n’êtes pas né dans un corps de fille ou de garçon vous êtes avec votre corps, le vôtre, qu’on va ensuite ranger dans une catégorie pour plein de raisons plus ou moins bonnes.

Retour à la psychanalyse :

« Parce qu’on ne peut pas revenir en arrière et renaître dans un corps différent. Cela fait partie des limites que la vie nous impose. Elles peuvent nous mettre en colère parce que nous aimerions n’en avoir aucune et pouvoir réaliser tous nos désirs et accomplir tous nos rêves. Devenir fille si on est garçon ou garçon si on est fille. Ou même être (pourquoi pas ?) les deux à la fois. Et en plus, voler comme les oiseaux et nager comme les poissons. On aimerait bien mais ce n’est pas possible. »

Hypothèse : Et si le cerveau de Lucie produisait une conscience qui se reconnait comme plus proche des attributs associés traditionnellement aux garçons qu’à ceux associés traditionnellement aux filles ? Et si l’identité de genre était une question biologique, physiologique, biochimique… ? Je n’en sais rien. C’est une hypothèse qu’il faudrait tester avant de l’écarter.

Je vous rappelle qu’il existe des résultats indiquant que de tels facteurs biologiques sont impliqués dans l’orientation sexuelle. On n’est pas hétéro ou homo par choix ou parce qu’on a été influencé par une mère castratrice comme les charlatans de la psychanalyse l’ont soutenu et le soutiennent peut-être encore. On est hétéro ou homo parce que quelque chose dans l’histoire de la construction de notre cerveau nous amène à exprimer telle ou telle attirance, ou aucune. Et nous avons appris, lentement, à nous débarrasser des comparaisons insultantes qui rapprochaient l’homosexualité de la bestialité ou de la pédophilie. On a compris que c’était indigne de faire ces comparaisons.

Mais pas chez les psychanalystes où la question de Lucie sur son genre est reléguée au niveau du rêve de voler comme un oiseau.

____________

[Parenthèse. Je suis désolé, je sens que je suis obligé de mettre les points sur les i, pour éviter les mouvements de panique : je ne suis pas en train de dire qu’il faut faire de la chirurgie ou des traitements hormonaux à la petite Lucie, 6 ans. Je ne sais pas quelle est la bonne manière de l’écouter et de l’accompagner pour qu’elle vive sa vie au mieux. Je répète : je ne sais pas ce qu’il faut faire, je laisse ça aux gens dont c’est le métier et qui sont à jour de ce qu’en dit la science. Mais je suis très étonné par le nombre de gens qui sachent, y compris une psychanalyste qui rend un verdict définitif sans jamais avoir rencontré la personne en question.]

 

La psychanalyste poursuit :

« On a donc le choix : continuer à réclamer ce que l’on n’a pas ou accepter de vivre avec ce que l’on a et qui n’est peut-être pas si nul que ça. »

Le problème c’est qu’il me semble très maladroit et violent de dire que Lucie veut ce qu’elle n’a pas, quand en réalité Lucie exprime qu’elle est autre chose que ce qu’on lui dit qu’elle est. Notre psychanalyste fait comme si « Être autre chose que ce qu’on me dit que je suis » était équivalent à « ne pas avoir ce que je désire ». Vous vous rendez compte du niveau d’absence d’écoute de cette psychanalyste ?

« Pourquoi voudrais-tu tellement être un garçon, Lucie ?»

Ca c’est bien. Il faut en effet poser la question et ne pas supposer qu’on sait déjà qu’il s’agit d’un caprice.

Il faudrait surtout demander à Lucie ce que ça veut dire pour elle de « devenir un garçon ». Si jamais elle répond qu’elle veut des chromosomes XY ou bien qu’elle veut avoir des testicules qui produisent des spermatozoïdes, alors on pourra lui répondre que c’est impossible, en effet. Mais si jamais « devenir un garçon » ça veut dire autre chose pour elle, ce qui est probable, alors nous devrions sans doute revoir la réponse.

« La vie de ton frère te semble mieux que la tienne ? C’est possible mais il faudrait savoir pourquoi. Son corps et son sexe te semblent mieux que les tiens ? C’est ce que pensent beaucoup de filles, mais elles se trompent. Car si leur sexe n’est pas aussi apparent que celui des garçons, elles ont en revanche à l’intérieur de leur corps des organes qui leur permettront plus tard d’avoir des bébés dans leur ventre. »  Etc.

Alors, bien sûr, je pense qu’il est sage de commencer par rassurer l’enfant, de lui expliquer comment fonctionne son corps, d’écarter les idées reçues, les fausses hiérarchies et les mauvaises raisons de vouloir s’identifier à tel ou tel groupe. Mais le problème c’est que, moi, je ne connais pas Lucie. Pas plus que vous. Et madame la psychanalyste non plus. On ne sait pas comment cette jeune personne se sent. On ne sait rien des raisons de son questionnement, de sa biologie, de sa psychologie et de son environnement. Et parce qu’on ne sait rien de tout ça, il est rationnel de se retenir d’affirmer ce qu’elle doit être ou ce qu’elle ne peut pas être.

Voilà quelle est ma position sur ce sujet qui a donné lieu à beaucoup d’attaques et de moqueries quand des gens s’amusent à aller pêcher ce que j’ai dit en 2019 pour créer du drama en 2023.

 

 

2. Quelques éclaircissement sur le sexe et le genre

Pour éviter —au moins un peu— que des tas de commentaires me fassent dire ce que je n’ai pas dit, et croiser un peu moins de caricatures stupides, je suis obligé de parler du fond. Je vais essayer d’être clair, concis et prudent.

Le mot sexe, en biologie, désigne plusieurs choses.

Fondamentalement chez les animaux et les plantes au moins, le sexe désigne la fonction de reproduction dans un processus anisogamique. Les corps qui produisent de grands gamètes sont des femelles. Les corps qui produisent de petits gamètes sont les mâles. C’est binaire. C’est facile.

[En réalité c’est pas si facile que ça parce qu’on pourrait discourir sur les espèces hermaphrodites et les cas de changement de sexe au cours de la vie comme chez les poissons clown, qui montrent que la nature se moque éperdument de notre envie que tout soit rangé dans des boîtes. Donc, binaire et facile »… mollo.]

C’est binaire. C’est facile. Mais ça concerne uniquement nos cellules sexuelles. Corrigez moi si je me trompe, mais vous n’avez pas connaissance de la taille des gamètes des gens autour de vous. Certains humains n’en produisent pas. Ce n’est donc jamais ce critère que vous utilisez pour dire monsieur ou madame.

Continuons avec le mot sexe. En biologie, on peut s’intéresser au déterminisme génétique. Nous possédons normalement une paire de chromosomes sexuels : XX ou XY où se trouvent des gènes responsables de la mise en place des organes de la reproduction et des caractères sexuels secondaires : stature, musculature, répartition des tissus adipeux, largeur du bassin —autrement dit la silhouette— pilosité, voix.

Mais là il y a des exceptions avec des gens qui sont XXY ou XYY, ou juste X, ou encore avec une translocation du gène SRY[2]. Et cela aboutit à des corps qui présentent des caractères sexuels primaires et parfois secondaires qu’un regard extérieur assignera facilement à homme ou femme, mais qui sont destinés à être stérile. Il existe des humains XX que vous classeriez sans hésitation chez les hommes et des humains XY que vous classeriez sans hésitation chez les femmes.

On peut ajouter la question du rôle des hormones dans le développement du fœtus puis de l’enfant avec des personnes qui possèdent le gène SRY responsable de la masculinisation du corps, mais dont les récepteurs à la testostérone ne fonctionnent pas. Ils auront un corps que vous classerez, et moi aussi, dans la catégorie femme. Et puis il y a le taux d’hormone qui peut varier et aboutir à des caractères très sexualisés… ou très peu.

Evidemment, dans la majorité des cas on retrouvera bien les chromosomes XX chez des personnes identifiées comme femmes et des XY chez les personnes identifiées comme hommes. Mais là encore, corrigez moi si je me trompe, vous n’avez pas accès aux chromosomes des gens. Moi non plus. Ce n’est donc pas ce critère qu’utilisent tous ceux et toutes celles qui savent apparemment mieux que moi ce qu’est un garçon ou ce qu’est une fille.

 

La présence des organes sexuels est LE critère utilisé pour enregistrer les nouveaux né dans la case garçon ou la case fille. Ca fonctionne dans l’écrasante majorité des cas. Mais il y a des personnes intersexuées, et leur cas ne peut pas toujours se résoudre avec un coup de bistouri. Cela prouve que ce critère est imparfait, qu’il faut être prudent. Mais de toute façon, corrigez-moi si je me trompe : vous n’avez pas accès au contenu du caleçon ou de la culotte des gens quand vous les appelez monsieur ou madame. Ca veut donc dire que les organes sexuels ne sont pas le moyen par lequel vous les distinguez.

Dans la vie de tous les jours, dans le champ social on classe les gens chez les hommes ou chez les femmes non pas en vertu de leurs gamètes, de leurs chromosomes ou de leurs partie génitales mais en vertu de la présence des caractères sexuels secondaires : silhouette, pilosité, voix. Ces caractères sont fortement corrélés à la présence des gamètes, des chromosomes et des organes sexuels, c’est bien pour ça qu’ils marchent : ce sont des signaux  efficaces. Et quand il arrive que ces signaux soient ambigus : on ne sait pas si on est face à un monsieur ou à une madame, les gens normaux  vont poser la question, et si la personne vous dit qu’elle est un monsieur, alors vous allez l’appeler monsieur. In fine le vrai critère c’est ce que les gens déclarent sur eux-mêmes.

Je ne dis pas que c’est suffisant et que ça règle tous les problèmes, je dis que dans la vie de tous les jours, c’est ça le vrai critère que nous utilisons, et alors il faudrait peut-être se demander pourquoi ?

Dans le dictionnaire on nous dit que l’homme c’est « le mâle de l’espèce humaine ». Or, ce qui définit un mâle, ce ne sont pas ses poils ou la tessiture de sa voix, ou son prénom, mais sa fonction dans la reproduction. Ce qui définit une femelle, ce n’est pas qu’elle soit coquette, porte des jupes et un sac à main, mais qu’elle produise des ovules. Et donc il existe des mots pour aider à distinguer ce qui relève de la fonction biologique de reproduction du rôle social codé, stéréotypé, étroitement lié au sexe mais non confondu avec lui. Un rôle social par lequel les individus se placent eux-mêmes en fonction de leur ressenti dans une case ou dans un autre, ou bien, transgression suprême considèrent que les cases sont imaginaires, construites par la société, et qu’on peut les refuser. Et ça, en gros c’est ce qu’on appelle le genre.

Et c’est l’ensemble des paramètres qui constituent le genre que nous utilisons vous et moi tous les jours pour savoir si on appelle une personne madame ou monsieur. L’usage faisant loi en linguistique, il me semble que si vous voulez absolument une définition à homme et femme, c’est du côté du genre que vous devriez creuser et pas du côté de la biologie. Et c’est un biologiste qui vous le dit.

À cause de cela, je suis étonné par la confiance totale en leur propre jugement qu’expriment les gens qui affirment détenir le véritable sens des mots homme et femmes mais ne savent pas dire pourquoi, sur quel critère, ils peuvent interdire à une personne trans de s’identifier au genre qui ne correspond pas au sexe enregistré à sa naissance. Je pense que ça manque de prudence, d’humilité et que ça revient à vouloir essentialiser, biologiser l’ensemble des attributs traditionnellement associés à tel ou tel sexe.

Je parle de tout cela de manière plus approfondie dans le chapitre 23 de Quand est-ce qu’on biaise, sorti il y a 4 ans. Et je pense être dans mon rôle quand je souligne la présence agressive de ces certitudes encombrantes parce que, justement, pour moi, c’est ça la zététique.

 

 

3. « Ma » zététique

La zététique ce n’est pas la science. En science on produit des connaissances. En zététique on se demande « pourquoi est-ce que je crois ce que je crois ? » et en première analyse on s’intéresse à ce que la science peut en dire.

Le zététicien, il va rendre compte de ce que la science dit ou ne dit pas sur un sujet et met à l’épreuve de la logique et de la dialectique les théories ou les discours qui revendiquent d’énoncer une vérité. Ca peut finir en débunkage, en entretien épistémique, en analyse, peu importe, à chaque fois on se demande s’il existe de bonnes raisons de soutenir une thèse.

Y a-t-il eu un miracle à Fatima en 1913 ? L’homéopathie est-elle efficace ? Peut-on se fier à Didier Raoult ? Les Pyramides d’Egypte sont-elles des centrales électriques ? La zététique aide à trouver la réponse. Dans les cas susnommé la réponse est non.

Mais ça ce sont les sujets faciles. Ce que l’art du doute permet de faire quand on est vraiment bien entraîné (par exemple après 8 ans de pratique quotidienne) c’est se pencher sur les concepts avec lesquels on pense. L’esprit critique ça sert à décider ce qu’il faut croire et ce qu’il faut faire. Et pour ça il faut secouer un peu les fondations, pour voir si ça tient. La zététique, ça casse pas des briques, mais ça aide à casser les concepts.

Nous passons notre temps à percevoir le monde, à le décrire, à l’expliquer, à le prévoir à l’aide de concepts qui sont des créations de l’esprit et qui ne coïncident pas exactement avec le réel. C’est un peu dur à avaler, mais le plus grand service que la zététique peut rendre c’est sans doute de faire admettre cette grande vexation, ça nous rendra plus humbles.

Nous ne disposons pas d’une définition parfaite, étanche, complète et consensuelle du vivant. Et pourtant la biologie fait des prouesses. Le mot espèce est une convention de langage qui date d’avant la théorie de l’évolution et qui est inapplicable dans de très nombreuses situations. Ca j’en parle dans l’Ironie de l’évolution, lisez-le j’aime ce livre. Les concepts omniprésents sans bonne définition abondent : émotion, jeu, intelligence, infini, liberté, temps… Si vous vous penchez sur ces notions pour en délimiter sérieusement les contours, vous ne serez pas déçus du voyage.

La zététique peut servir à nous rappeler qu’il est bon de douter que les mots soient le fidèle reflet du réel, qu’il est bon de nous souvenir que les sciences évoluent, que nos connaissances se périment et que nos certitudes actuelles ne sont pas forcément de meilleure qualité que celles des humains d’il y a mille ans, et que nous serions bien ridicules de nous imaginer détenir une connexion privilégiée avec la vérité.

Quand on pratique cette zététique là, on a des scrupules à tracer des frontières et à dire aux autres qu’ils doivent les respecter parce qu’elles sont réelles, qu’elles le droit de les contraindre. Face à ça, on se met à demander des raisons de croire aux définitions utilisées pour interdire ou pour obliger les gens.

4. La politique n’est pas ce que vous croyez.

Y a-t-il une dérive politique de la zététique ? C’est bien de se poser la question. C’est bien d’être attentif à l’exploitation idéologique des outils. Mais attention, parce que l’influence politique n’est pas forcément là où vous la voyez.

Relayer presque tous les jours des paniques morales de l’extrême droite, tourner en ridicule le combat contre le sexisme, dénoncer les abus de la frange ultragauchiste des ZEM, mais taper tranquillement la discussion avec Conversano et donner de la visibilité au cercle cobalt promoteur d’une science raciste, ça n’est pas apolitique juste parce que le mec qui fait tout ça prétend que c’est apolitique.

Spoiler : c’est de la politique, même quand ça énonce des choses qui vous semblent être des évidences qui devraient s’imposer à tout le monde.

Il y a autre chose qui est politique, c’est l’injonction irritée qu’on nous adresse de ne pas traiter certains sujets, de ne pas relayer l’état des connaissances en sciences humaines sous prétexte qu’elles seraient politisées, mais en réalité parce que ce qu’elles disent contredit certaines évidences confortables.

Vous devriez le savoir, je l’ai déjà dit, la science n’a pas pour rôle de nous dire des choses agréables. Elle est primordiale justement parce qu’elle est le moyen par lequel nous corrigeons nos idées fausses. Si c’était facile de porter un jugement sur le fonctionnement du monde, nous n’aurions pas besoin des sciences. Dans la sphère sceptique on sait se moquer des platistes qui se bouchent les oreilles, mais je suis désolé de vous dire que face aux études sur le genre je vois un paquet de gens pas idiots dont l’attitude n’a rien à envier aux platistes.

Est-ce que la science c’est politique ?

Eh bien non, mais dans un certain sens… oui. Les sciences se construisent au contact du reste de la société, il y a donc une dimension politique dans le recrutement des chercheurs, dans le financement des laboratoires et des travaux, dans la reconnaissance sociale, médiatique des résultats, dans les politiques de transfert des connaissances vers le public, dans l’utilisation ou non des connaissances dans l’éducation et dans les décisions démocratiques.

La plupart du temps c’est invisible, inodore, incolore, indolore. Mais parfois les résultats de la science gratouillent là où ça dérange. On a connu ça avec l’héliocentrisme. Ca a été et ça continue un peu d’être le cas des sciences de l’évolution qui contredisent les évidences des créationnistes et mettent en porte-à-faux l’ensemble des religions. Sur la Tronche en Biais on en parle, c’est même l’origine de mon propre engagement. L’évolution, et la manière dont elle dérange notre manière de voir le monde c’est mon sujet préféré. Allez dire à ceux qui voient comment ça contrarie leur vision du monde que ça n’est pas politique. C’est avant tout scientifique, mais c’est aussi politique, ne serait-ce que parce que la connaissance scientifique réfute certains discours normatifs, dogmatiques et obscurantistes.

Et s’il y a une chose que mon travail sur les conséquences de la théorie de l’évolution m’a appris c’est que les étiquettes que nous posons sur les objets de la nature, et en particulier les êtres vivants, sont fatalement erronées. Nous créons des catégories pour ranger les êtres c’est frénétique, on ne sait pas faire autrement pour essayer de comprendre comment tout ça fonctionne. Alors évidemment la question des catégories homme-femme est dans la mire, c’est forcément un sujet qui se retrouve dans le périmètre des choses que je vais être amené à traiter. Et évidemment ça va déranger les certitudes de certaines personnes. Si ça vous dérange vous, comprenez bien que ça n’est pas mon but et retenez-vous, au moins dans un premier temps, de sauter sur l’idée que je le fais par idéologie pro-ceci ou anti-cela, que j’ai été matrixé, que j’ai perdu toutes mes facultés d’analyse. Être bousculé, irrité, agacé par la zététique vous savez bien que ça fait partie du processus.

L’inconfort que provoque l’approche zététique de la question, c’est le signe que cette approche remet en cause certaines manières de catégoriser les êtres humaines, et ça c’est politique. C’est politique, mais c’est aussi scientifique, et c’est résolument zététique.

Sur la question du genre il y a plein de gens qui disent des conneries de tous les côtés, on a du dogmatisme et de l’extrémisme, de la mauvaise foi, des gens qui ne s’écoutent pas, vous allez devoir vous faire votre avis tout seul. Et si ça vous semble compliqué, vous pouvez aussi suspendre votre avis. Vous pouvez écouter, questionner et ne pas prendre parti. Il me semble sage d’attendre d’avoir de bonnes raisons de tenir une opinion.

 

De mon côté, avec l’équipe de l’ASTEC, je vais continuer de débunker des idées reçues, de vulgariser des travaux scientifiques, de tenter de contribuer à vous aider à questionner les certitudes, les dogmatisme, les automatismes et les mauvais argumentaires qui cherchent à faire passer le camp d’en face pour un ramassis d’abruti.

Franchement, vous avez cru, vous, à cette idée que je serais incapable de distinguer une fille d’un garçon ? Vous avez vu la quantité d’énergie qu’il faut déployer pour réagir à un récit aussi bête ? J’ai l’impression que ces sujets là, désormais, il va falloir qu’on en parle parce que vraiment on entend beaucoup, beaucoup trop de conneries.

 

Des bisous

 

Acermendax

 

[1] Affaire relayée par le Cercle Cobalt

[2] http://acces.ens-lyon.fr/biotic/procreat/determin/html/chromy.htm

L’année 2022 a probablement compté 365 jours, comme la plupart des autres, mais elle a passé à toute vitesse parce que je n’ai pas cessé de faire des choses intéressantes en votre compagnie.

Si j’ai la chance de faire toutes ces choses, c’est parce que vous me faites l’honneur de suivre mon travail et, pour nombre d’entre vous, de soutenir l’ASTEC qui m’emploie et m’assure la sécurité d’avoir la liberté de choisir à quoi occuper mon temps. Alors comme tous les ans, je me sens redevable d’un petit bilan qui vous explique ce que j’ai fait avec ce temps que je vous dois.

 

L’année a commencé avec la sortie du livre « Pyramidologie » aux éditions Book-e-book dont la préface est signée par le seul et unique Jean-Pierre Adam ! Ca partait très bien.

Les Tronche en Live ont été l’occasion de recevoir des scientifiques pour parler en direct de biodynamie, de trouble dissociatif de l’identité, des bases biologiques de la morale, de la guerre de l’information, de l’inexistence du programme génétique, des problèmes de la France avec l’alcool, des sciences du sommeil. Et nous avons vu le retour des émissions Live enregistrées en public (on vous espère nombreux aux numéros de l’an prochain !). En janvier, le premier live se déroulera à la Cité des Sciences de Paris ; cela devrait faire un démarrage assez formidable pour 2023.

Cette année, j’ai essayé d’être constructif, de parler aux tenants-croyant, de rappeler qu’il n’y a pas d’un côté les zététiciens gentils et malins et en face des imbéciles irrationnels. C’est l’un des objectifs des formats « La Tronche et à VOUS » et des « Entretiens Sceptiques ». Le thème de la religion a été assez présent, avec un débat avec Olivier Bonnassies et des réflexions autour de la sortie de « Dieu la contre-enquête » dont un chapitre a donné lieu au documentaire « Les secrets du miracle de Fatima » que nous sommes allés tourner au Portugal grâce à un gentil mécène. Au-delà de l’histoire magique, de la légende plaisante construite sur beaucoup de motivation et très peu de factuel, nous avons dénoncé un cas de maltraitance aveugle alimenté par la foi.

Avec notre petite équipe, nous avons terminé de tourner la saison 2 de la Petite Boutique des Erreurs. Le dernier épisode n’est pas encore en ligne, il est retenu pour cause de méchant covid du réalisateur. En 2023, nous finirons l’adaptation en livre que nous avons promis aux contributeurs Ulule, ce sera un très beau livre, on vous en reparle bientôt, le travail est déjà très très bien avancé.

Le nouveau format « Ca Coule de source » a vu le jour. J’espère qu’il s’installera durablement dans notre programmation pour apporter des réflexion sur le travail collectif de la communauté sceptique. Si je trouve le temps de préparer ces émissions, elles existeront.

 

J’ai pu donner quelques conférences ou participer à des salons et croiser certains d’entre vous à Montpellier, Villejuif, Strasbourg, Mouguerre, Paris, Belvedère, Saint-Etienne, Colmar, Annecy ou Angers. Avec Vled, j’ai participé aux Rencontres de l’Esprit critique de Toulouse, le plus grand événement du genre, une prouesse que Willy compte réitérer en 2023. Vous seriez fou de ne pas y venir ! J’ai aussi rencontré du public lycéen, à Melun par exemple, et une fois sur deux, c’est un moment passionnant face à des jeunes qui se rendent compte que certaines questions qui ne se posent pas, en réalité se posent dès lors qu’on prend la peine de les poser.

Je garde quelques attaches avec le monde académique. J’ai été invité à participer au colloque « Comment intégrer/traiter de l’évolution dans les présentations et activités des jardins botaniques des Muséums d’histoire naturelle et des institutions culturelles » avec une conférence « Créationnisme et conspirationnisme : mécanique de la croyance ? ». J’ai également été convié aux Prospectives de l’Institut Ecologie et Environnement du CNRS qui se sont tenues en octobre à la Rochelle, où j’ai co-animé l’atelier « Diffusion et promotion de la méthode scientifique et des sciences ». Pour la Commission Nationale du Débat Publique, j’ai animé, à la Rochelle également, une table ronde sur l’énergie éolienne avec la sympathique équipe de l’Esprit Sorcier de Fred Courant.

J’ai eu la joie de voir la Nuit Zététique organisée à nouveau par mes camarades de l’ASTEC, un marathon de 10h de direct avec plus d’une vingtaine d’invités, beaucoup de travail et deux ou trois jours pour s’en remettre.

 

En 2022, j’ai critiqué France Culture qui faisait la promo de l’astrologie. J’ai critiqué France Inter qui est infestée par la psychanalyse. J’ai critique France 2 et son programme ridicule et magique nommé « les pouvoirs extraordinaires du corps humain ». J’ai critiqué le Figaro qui donne de la place à la réécriture de l’histoire (par exemple en faisant du conquistador Cortes un humaniste pacifiste). J’ai critiqué CNews et son émission religieuse maquillée en magazine d’information, véritable outil de propagande intégriste digne d’un autre temps. J’ai critiqué d’autres médias pour avoir maltraité un sujet qui m’aura semblé mériter mieux, mais la liste serait trop longue. Il faut aussi reconnaître que la presse a fait du travail de qualité en se faisant l’écho de l’enquête sceptique sur Médoucine, ou encore dans la dénonciation de destruction (avortée) de la Miviludes et pour le regain de vigueur du travail journalistique contre les pseudo-médecines. Difficile de dire quel rôle la sphère zététique a pu jouer dans cette évolution. Tachons d’y croire un peu.

Mais il ne faut pas se contenter de vilipender les médias, alors j’ai répondu présent à quelques sollicitations. J’ai discuté d’incroyance dans le programme Etiquette de France TV slash. Je suis passé à la TV coréenne pour parler de la mémoire de l’eau. Sur la radio France Maghreb2, j’ai critiqué Idriss Aberkane. À la télé suisse, j’ai parlé de l’absence des raisons de croire en la vie après la mort et au contact avec les défunts. Je n’ai pas compté les interviews dans la presse papier.

J’ai aussi critiqué le lobby des chasseurs qui semblent contents d’être représentés par un sale type. Et puis j’ai critiqué le foot le jour de la finale. Je sais que certains y voient de la pure provocation, mais je pense que la majorité comprennent qu’à chaque fois le propos est plus profond que ça.

 

En 2022, j’ai été chercheur à Stanford. Pas longtemps.

J’ai discuté avec un mathématicien de haut niveau qui nous a expliqué pourquoi la conjecture de Syracuse n’est, pour l’heure, pas résolue.

J’ai connu quelques tensions avec l’Université de Lorraine où se donnaient des cours d’homéopathie qui n’avaient rien à y faire… Ma manière de le dire a été cavalière et mal perçue. Après un sérieux moment de flottement, et de mobilisation, un rendez-vous a permis de nous mettre d’accord. La présidence était du côté de la science et je crois que cet épisode a fait avancer les choses. D’ailleurs, je donne toujours des cours à l’école doctorale. Les prochains se feront en janvier !

En 2022, j’ai insulté Didier Raoult sur Twitter. Il venait de partager la vidéo minable où Idriss Aberkane instrumentalise une affaire matrimoniale pour tisser un récit complotiste délirant destiné à faire oublier à son public qu’il est discrédité partout. Et Raoult appréciait les « révélations sensationnelles à voir ! » qui tapaient sur ses ennemis. Ce n’est pas bien d’avoir écrit que Didier Raoult était « un mange merde prêt à n’importe quelle compromission intellectuelle pour briser ceux qui contrarient sa version du réel ». Je me suis excusé le jour-même parce qu’il ne faut pas parler comme ça. Les complotistes, souvent généreux en insultes, ont gardé ce tweet en mémoire qui leur permet de me réduire à un vilain malpoli. Ça me servira de leçon.

 

Au fil des mois, je me suis coltiné divers types de harcèlements, notamment d’un penseur du muscle viril dont le neurone a choisi de s’obnubiler des excuses que je lui devrais, sans quoi je m’exposerais à l’apprentissage de ce que c’est qu’une blessure, etc. Mais j’ai reçu dans le même temps un soutien réconfortant. Désormais, hélas, on aura du mal à sortir de la confrontation avec certains groupes très énervés. Egalité et Réconciliation, Riposte Laïque et les DéQodeurs font maintenant des articles pour dire du mal de moi. J’ai des scrupules à penser que ce soit une mauvaise chose…

Le débunkage des dangereuses désinformations made in Aberkane a fait du bruit, énervé beaucoup de monde et conduit à des excès. Depuis avril, des promesses de procès sont agités par Idriss Aberkane avec des accusations graves. Nous en sommes arrivés au point, après un passage plutôt raté sur Sud Radio chez Bercoff, où le recours à la justice est pertinent pour calmer les envies de diffamation et de dénonciation calomnieuses.

Evénement marquant : vous avez été au rendez-vous quand nous avons ouvert une collecte destinée à assurer les frais de justice. Vous avez doté l’ASTEC de plus de 100k€ en quatre jours ! Et malgré mon scepticisme chevillé au corps j’y vois la preuve de quelque chose. Sachez que ce soutien a soulagé une bonne partie de la pression que représente la toxicité en ligne. Parce que désormais on peut se défendre. Vous avez été tellement généreux, présents, épatants, que les complotistes ont été complètement chamboulés et ont inventé de nouvelles « théories » pour expliquer que de sombres officines auraient alimenté la cagnotte publique avec des robots mal programmés qui font qu’on voit bien que tout ça est un coup monté. Il le faut bien, sinon ça veut dire que vous, des gens normaux qui nous soutenez, vous existez, et ça c’est pas trop possible pour les leaders complotistes. Nous en sommes arrivés au stade où le travail de débunkage des zététiciens dérange assez les complotistes pour qu’ils l’intègrent à leurs élucubrations.

Grace à vous des avocats travaillent à nous défendre contre Annie Lobé qui me poursuit en diffamation pour avoir dit que ses œuvres d’épouvante sur les méfaits des ondes électromagnétiques sur les petits enfants, c’était « de la merde », mais aussi contre les diffamations de Frédéric Delavier et demain contre les agissements d’Idriss Aberkane. Un gugusse a dit qu’il voulait m’égorger quelques jours après la collecte de fond : la justice est saisie. Ce qu’il y a de bien à ne pas être complotiste c’est qu’on ne va pas se barrer avec la caisse, on va l’utiliser pour remplir les objectifs fixés !

 

En 2022 j’ai essayé Tik-tok… Et sans être convaincu pour le moment je vais tâcher d’y retourner l’an prochain car il faut être présent là où les jeunes ont besoin de croiser dans leur vie les notions importantes de la zététique.

J’ai écrit un roman de fantasy qui sera publié en début d’année prochaine. « Le Rebord du monde » se passe dans le même univers que mes deux premiers romans de la saga Les Enigmes de l’Aube. Mais l’ambiance change un peu. J’espère qu’il vous plaira. La couverture est signée par mon ami Loïk Bihan.

En 2022, on a suivi le procès de Jacques Grimault, et je serai présent à l’audience de février prochain.

Cette année, la Tronche en Biais a publié 70 vidéos. Vous avez passé 479 ans devant la TeB, ça ne nous rajeunit pas, et en 2023 ça risque d’être pire.

Et pendant tout ce temps j’ai essayé de faire avancer autant que je le pouvais, en tâche de fond, un grand projet de livre : « L’esprit critique pour les NULS » qui a pris beaucoup de retard parce que l’actualité m’a trop souvent volé toute mon énergie, et parce que ce projet m’est précieux, alors je dois le peaufiner, le dorloter, le sourcer, le muscler, avant de le laisser voler de ses propres, ailes. Il décollera en 2023, j’ai encore bien du travail et je vous promets déjà qu’il contiendra des entretiens avec une dizaine de chercheurs et chercheuses formidables, spécialistes du sujet.

 

Je suis plutôt fier du travail accompli cette année, même si j’ai toujours l’impression qu’on aurait pu faire mieux, faire plus, et que je suis certain d’avoir oublié de répondre à une bonne trentaine d’emails important pour faire avancer d’autres dossiers, d’autres articles, d’autres vidéos. À tous ceux que j’ai oubliés malgré moi : rendez-vous en 2023 si vous le voulez bien.

 

J’espère que ce qui a été accompli vous semble bien et utile et que vous resterez à mes côtés et ceux de l’ASTEC pour que l’aventure continue en 2023. Il y aura des livres, des débats, des directs sur des sujets importants, des procès, du débunkage, de l’autocritique, de l’écoute et des dossiers dont une bonne partie auront besoin de vous, de vos idées, de vos connaissances et de vos doutes.

Puissions-nous tous passer une excellente année 2023

 

Je n’aime pas le foot.

Je ne dis pas cela pour vous agacer. Je suis désolé de la négativité que vous ressentez peut-être en entendant ces mots. Mon but n’est pas de vous faire éprouver des sentiments désagréables, ni de vous convaincre que j’ai raison et que vous devriez vous aussi ne pas aimer ce sport. Je veux juste exprimer mon ressenti, ici, dans cet espace de liberté qui est le mien, sur ce blog (et une chaine YouTube) que vous n’êtes pas obligé de consulter. Il vous est très facile d’ignorer complètement mon propos.

Maintenant que je vous ai dit cette chose tout à fait banale : « je n’aime pas le foot », la plupart d’entre vous s’en contrefiche. Aujourd’hui, c’est la finale de la coupe du monde. La France est en finale, et si ça se trouve elle est championne au moment où vous lisez ces mots. Alors franchement, l’avis d’un zététicien sur la question vous indiffère. Vous vous concentrez plutôt sur la manière dont ça vous fait vibrer, dont vous vivez l’instant, vous profitez, vous avez bien raison.

Mais.

Maintenant regardez les commentaires sous la vidéo. Vous allez y trouver des tas de gens qui estiment que j’exagère, que je pousse le bouchon trop loin, qu’on a pas besoin de m’entendre me plaindre, que je devrais garder ça pour moi et ne pas être jaloux que les autres s’amusent. Vous verrez aussi des insultes et des menaces plus ou moins vague.

Je ne suis pas devin, je peux me tromper, d’autant que certains auront très envie de me donner tort en se retenant de commenter… Mais le peuvent-ils vraiment ? Jusqu’à présent à chaque fois où j’ai exprimé ce sentiment sur Facebook dans les années passées, cela a créé du débat. Les gens viennent se disputer sur la légitimité d’émettre un avis sur la possibilité de ne pas partager l’allégresse générale.

Je voudrais vous proposer de partager mon étonnement. S’étonner que les choses soient ce qu’elles sont, c’est la première étape de la sagesse disait ce bon vieil Aristote.

Un type dit qu’il n’aime pas le foot quand tout son quartier est en train de hurler, que les klaxons carillonnent au milieu des pétards, pendant que des gens plus ou moins ivres envahissent l’espace public, joyeux, mais sans beaucoup d’égard pour votre migraine ou le sommeil de votre petit enfant. Et ce type là, qui dit ça à ce moment-là. On trouve que lui, il abuse ! Ce type là, il serait capable d’écrire sur son mur facebook personnel, au vue de tous, un truc du genre « l’équipe de foot dont les supporters sont les plus bruyants et les moins respectueux de la vie des autres, je souhaite qu’elle perde. » Il est malade ce type ou quoi ? Encore une fois, je pense que pour la plupart d’entre vous c’est un non-événement, mais en fait il se passe quelque chose qui mérite qu’on prenne le temps d’y penser.

Face à cet espèce d’Acermendax qui dit qu’il n’aime pas le foot alors qu’on est tous en train de prendre un pied d’enfer avec cette coupe du monde organisée au Qatar après une immense affaire corruption qui n’est un secret pour personne mais ne dérange pas grand monde, dans des stades géants climatisés construits par des ouvriers dont les droits fondamentaux ont été piétinés et qui sont morts par milliers sur les chantiers ; cet espèce d’enfoiré, il veut nous gâcher la fête. C’est le sentiment que suscite le fait que je m’exprime sur un ton critique à propos d’un événement qu’il ne faut pas critiquer.

 

Je vous annonce que je vais recevoir les commentaires suivants, sans doute de la part de gens qui n’ont pas regardé la vidéo en entier, voir se sont contentés d’en lire le titre.

  • On va me traiter d’élitiste binoclard au corps de lâche, de pauvre type qui était toujours le dernier à être choisi quand on faisait les équipes de sport au collège. On va me rabaisser pour dire à quel point on a toujours tort de rabaisser les autres.
  • On va affirmer que je me moque des plaisirs simples de la plèbe, que je suis un parangon de la bourgeoisie intellectuelle insensible aux vrais valeurs populaires. Je suis méprisant.
  • Pour d’autre, c’est du racisme, avec le sous entendu que les incivilités que je dénonce sont liées à l’ethnicité de ceux qui s’en rendent coupables, et que ce serait ça qui me dérange, je voudrais que les basanés restent à leur place. Parce que je suis une ordure.
  • Pour d’autre, quand on est français, on soutient l’équipe de France. Point. Parce que, ta gueule, c’est comme ça. Même si on ne les voit pas faire preuve d’autant d’esprit de corps quand il s’agit de championnats de piano, de mathématique ou de macramé.
  • Pour d’autres, je cherche le conflit partout. Je pourrais me contenter de ne pas aimer en silence, de supporter le bruit, la fumée, les hurlements et les violences dans la ville sans commenter. Je ne fais qu’aviver les tensions en ramenant ma science.
  • Certains diront que je suis incapable d’entrer en communion avec la joie rayonnante de la population autour de moi, c’est un manque de spiritualité qui me rend obtus, minuscule et triste. Ordure que je suis.
  • Et cetera.

Ce que je dis en réalité c’est que les fans de foot m’ont toujours privé, toute ma vie, d’être indifférent et ignorant des événements qui se produisent dans les stades. Ils m’imposent leur extatique point de vue sur l’importance majuscule du ballon rond poursuivi par les hordes encalçonnées sudoripares dont parlait le regretté Pierre Desproges il y a 40 ans. Pour ma part je ne hais pas le foot, mais je constate que ça pose problème de vous dire que l’emballement général autour de ce sport, ça m’emmerde. Il y a des gens qui, au lieu de profiter de la joie qu’ils éprouvent et dont l’expression s’affiche sur tous les supports imaginables, voudraient en plus que nous, les non adorateurs des fossoyeurs de gazons multi-millionnaires acquiescent, qu’on se tienne sage, qu’on ne dérange pas. C’est le début du totalitarisme. Je le répète, cette posture extrême ne concerne qu’une minorité. Mais les totalitaristes n’ont pas besoin d’être majoritaires dans leurs idées pour s’imposer, malheureusement.

Le foot est partout, il est plus important que le climat, que la probité, que l’exemplarité. On avait dit qu’on le boycotterait, mais bon, vous comprenez on est en finale, alors… Partout ! Mais ça n’est pas suffisant pour une partie des aficionados qui vont traquer ceux qui ne vibrent pas, ceux qui détonnent, les anormaux, ils vont les rabaisser pour anéantir la portée de ce qu’ils ont à dire, parce que d’une certaine manière on est sur un terrain religieux ou équivalent.

Et puis il y a les non extrémistes qui ne manqueront pas d’y aller quand même de leur reproche, au nom de la ferveur des autres. Ils vont dire qu’il faut respecter tous les avis et se mettre un peu à la place des fans qui se sentent jugés par une telle déclaration. Comme s’il y avait une symétrie entre le vacarme désordonné de primates qui veulent de sentir exister à travers le score d’une équipe de gens qu’ils ne croiseront jamais de leur vie, et la discrète désapprobation d’autres primates qui aiment bien quand on a le droit de ne pas être supporter de l’équipe qui arbore le drapeau d’un territoire juste parce qu’on est né dessus.

 

Si ce que je vous dis vous déplait, c’est peut-être parce que j’ai tort. Dans ce là, ce n’est pas très grave. Si j’ai tort, cette vidéo sera un four, la section commentaire sera vide, je me verrai réfuté, et à vrai dire un peu rassuré. Mais si ce que je vous dit vous déplait, c’est peut-être parce que cela touche à un sentiment du sacré. Il y a comme un léger parfum de blasphème. Et j’ai tendance à penser qu’il faut blasphémer de temps en temps, surtout quand un maximum de gens pensent qu’il ne faudrait pas, pas maintenant. Je pense que vous dire que je n’aime pas le foot et que je suis saoulé par vos passions apicales pour un sport balourd et disgracieux, c’est un peu mon rôle (pourvu que j’explique pourquoi, évidemment). Et j’espère que vous vous en foutez. Vous devriez n’avoir rien à cirer de mon avis sur le sport. Tant mieux si c’est le cas, ça se verra par l’absence de vos commentaire… Oui, j’ai tendance à ne pas croire les internautes qui s’attachent à écrire à quel point ils s’en foutent de la vidéo qu’ils viennent commenter.

 

Je pense que le sentiment du sacré toujours un obstacle à la pensée critique et donc au développement du genre humain. C’est une position axiologique qui s’appuie sur l’ensemble de mon travail depuis des années, vous avez bien le droit de ne pas être d’accord.

 

Je finirai en disant à ceux qui aiment le foot que je suis content pour eux s’ils partagent des moments de qualité avec leurs amis qui ont la même passion, qu’un sport populaire doit être respecté pour ce qu’il représente aux yeux des gens, que le rejeter par snobisme n’est pas une preuve d’intelligence, et que je suis absolument certain que la majorité des amateurs de foot ne se sentent pas concernés par les dérives dont j’ai parlé.

Je pense qu’on a bien sûr le droit de ne pas aimer le foot, tout le monde est d’accord. Mais qu’il existe une pression pour nous dissuader de le dire sous peine d’être jugé comme un bobo snobinard qui n’existe qu’en crachant sur ce qu’aiment les gens simples.

L’amour serein d’une chose ne voit pas comme une menace la divergence des opinions qui la concernent.

 

Acermendax

Tout le monde n’a pas la « chance » d’assister en direct à la naissance d’un récit complotiste qui lui donne un rôle dans une machination aux implications labyrinthiques. C’est ce qui se passe avec une petite communauté qui décide qu’elle en sait plus que tout le monde et tire des conclusions farfelues sur la base d’informations librement disponibles, mais terriblement révélatrices à les en croire.

Nous voici dépeints (TeB, ASTEC et consorts) comme une officine aux ordres d’un pouvoir obscur, animés d’intentions incertaines mais néfastes, engagés dans une stratégie filandreuse mais concertée en haut lieu afin de fomenter en secret une collecte de fonds largement publique. Bref, nous sommes désormais un nouvel item dans l’écheveau des narratifs débridés d’une complosphère obligée d’attribuer des pouvoirs démesurés à ces ennemis pour expliquer son incapacité chronique à démontrer quoi que soit, à aider quiconque, à faire autre chose que dégoiser des inepties.

Je vais lister ci-dessous, sans commentaire ou presque, les déclarations délurées d’internautes contribuant à générer la légende noire qui leur sert à déshumaniser notre équipe et ceux qui sont considérés comme étant nos proches alliés. Cette manière de faire est alarmante, elle est dangereuse, elle aggrave une polarisation déjà forte et produit actuellement un climat toxique où l’injure est permanente et la menace de plus en plus fréquente. C’est la raison pour laquelle nous avons réalisé une collecte destinée à permettre des actions en justice contre ces menaces et fausses accusations. Seulement voilà. Le succès impressionnant de cette collecte, qui a dépassé 100k€ en trois jours, devient un nouvel épisode, un nouvel élément que les complotistes doivent expliquer.

La superstructure narrative du complotisme contemporain a un besoin constant de nouvelles « preuves » venant raffermir la foi de la communauté qui se reconnait dans ce contre-discours. Rien n’est plus important que de valider les soupçons du passé en expliquant les échecs des prévisions d’hier par de nouvelles turpitudes des méchants. Rassembler une grosse somme de la part de notre public provoque une dissonance : comment accepter que des milliers de gens donnent spontanément de l’argent à notre association si en fait nous sommes aux ordres du pouvoir, payés pour astroturfer : faire croire qu’une grande partie du peuple est hostile à la logique des complotistes ? Il faut trouver une explication alternative, concoctée avec les ingrédients habituels : les complotistes croient en la malveillance de l’humain, sans doute pour cause d’échantillonnage biaisé : ils fréquentent les idées d’humains malveillants.

Cette mécanique ne peut que mal finir, pour quelqu’un, tôt ou tard. Elle ne s’arrêtera pas d’elle-même. Nous avons décidé d’agir avant qu’un drame évitable ne se produise. Mais nous ne ferons pas des miracles en face d’une communauté décidée à détruire les ennemis qu’elle s’est fabriqués. J’espère avoir tort, et assister bientôt à une accalmie générale.

Acermendax

 

Il fallait bien que les hurlements de certains extrémistes finissent par en exciter d’autres…

Certaines figures un peu connues de la zététique se font pourrir depuis  environ 4 ans, et sont même harcelées par une petite clique d’ultra-gauchistes de salon qui leur reprochent d’être littéralement l’antichambre du fascisme. « La zététique c’est de droite » dit-on sur Twitter. Et le REC, « un rassemblement du RN ». Dans le même temps, des journalistes nous accusent même d’être à la solde des multinationales dans des délires de type complotiste dans les pages du Monde ou de la revue Zilsel. Evidemment, je ne m’attarde pas sur les montagnes d’injures et de menaces venues de la complosphère : cet aspect-là fait en quelque sorte partie du job, malheureusement.

Bon an, mal an, les gens de la zététique gardent le cap. Nous renonçons à discuter avec ces gens fanatisés. Nous continuons de produire aussi bien que possible des contenus de vulgarisation scientifique et de promotion de l’esprit critique, et même à organiser des événements comme la Nuit Zététique et les REC de Toulouse. Travailler nous semble être la meilleure réponse aux accusations éclatées qui cherchent à nous atteindre (et regardez, au lieu d’avancer sur mes projets, je consacre du temps à écrire ce billet. Cela me désole) au prétexte que, essentiellement, nous ne serions pas (ou pas assez, ou pas bien) de gauche.

 

Hier, un article puant la rhétorique zemmourienne publié par le journal Marianne croit pouvoir constater que « le wokisme est dans la place » et que la zététique a été dévoyée hors du rationalisme. La preuve : on valorise la bienveillance. Et nous sommes contre le racisme, en plus !

Extrait de Madame Anne-Sophie Nogaret :

« Malgré le crédit dont elle bénéficie, la très populaire chaîne YouTube « La Tronche en Biais » a pu adopter une position très éloigne de la rationalité qu’il prétend défendre sur els questions de sciences humaines ? »

Cette phrase vient après une relecture déficiente du contenu de notre émission de janvier 2019 sur le racisme avec Evelyne Heyer, commissaire de l’exposition sur le racisme du Musée de l’Homme, autrice de « L’odyssée des gènes ». Dans notre émission, il n’a jamais été dit que « seuls les « racisés » (comprendre les Noirs et les Arabes) sont victimes de discrimination. » précisément parce que le racisme ne se limite pas simplement à de la discrimination (qui peut certes frapper n’importe qui, mais pas avec la même probabilité), chose qui a été expliquée lors de ces deux heures de direct. Il serait souhaitable que la journaliste veuille corriger rapidement cette présentation fausse. Je l’invite à poser des questions quand elle n’est pas sûre d’avoir compris quelque chose, la section commentaire peut servir à ça.

L’article de Mme Nogaret semble me présenter comme l’un des organisateurs des REC dans une phrase au minimum ambigüe qu’il serait appréciable de voir corriger elle aussi, au cas où la suppression pure et simple de ce tissus d’intox ne serait pas possible.

Il est préférable de citer ses sources afin d’être bien compris, alors je dépose ici les captures d’écran de l’article payant écrit par Mme Nogaret. Je les supprimerai si un droit de réponse libre d’accès est accordé à ceux à propos desquels le journal à laissé publier de fausses informations. Parce que, voyez-vous, le mouvement Zet n’a pas « perdu de vue son objet : la recherche de la vérité et non le soin a priori des sensibilités fragiles » (ce qui serait de toute façon un aux dilemme).

 

Après environ 4 ans d’ambiance pourrie par les obsessions politiques de celles et de ceux qui ne font pas de zététique mais voudraient qu’elle s’aligne avec leurs priorités personnelles, je pense que la majorité des Zets aimeraient bien que ces deux grandes familles de toxiques obnubilés par leur grille absolue de détection du mal s’occupent de se renifler le derrière entre eux sans nous mêler à leurs turpitudes.

 

Je mets ci-dessous le lien vers notre émission de janvier 2019. Bien humblement, je conseille à tout le monde de lire plus de science et de dire moins de conneries.

 

Acermendax

 

L’un des arguments les plus récurrents que l’on reçoit lorsqu’on critique les concepts de Dieu, les dogmes et divers croyances en une transcendance, consiste à se voir reprocher de s’imaginer plus malin que de grands savants du passé dont on sait bien, par les écrits qu’ils ont laissés, qu’ils croyaient en Dieu. Les athées qui parlent de leur athéisme et osent le défendre sur le terrain de la raison sont accusés de se croire plus brillants que Pascal, Descartes, Kant, Leibnitz, Gödel, ou même l’anticlérical mais déiste Voltaire ! Les croyants qui argumentent ainsi veulent montrer que les vrais savants sont comme eux, croyants, que la vraie science s’accorde avec leur religion. Mais au lieu de le démontrer, ils l’insinuent en s’appuyant sur les croyances de personnages morts depuis longtemps.

Il est parfois malaisé de répondre, notamment parce que l’argument est malhonnête, cache ses accusations implicites et ignore à la fois le contexte historique et les conditions de production des traces écrites faisant état des convictions spirituelles de ces personnages.

Je veux partager avec vous un extrait de « DIEU, la contre-enquête », Chapitre 29 « Science & Religion : compatible ou pas ? », aux pages 306-309. Dans cet extrait, je livre ma réponse à cette rengaine qui amalgame l’homme de paille, l’analogie douteuse et une décontextualisation de la croyance de nos prédécesseurs.

 

Un conflit cognitif

« Bien entendu, on peut citer de très nombreux intellectuels, de grands savants, dont il reste des témoignages de leur profonde piété. Les apologètes n’y manquent jamais ; dresser une telle liste leur procure toujours beaucoup de satisfaction, car il est plaisant de classer les humains en deux catégories et de se placer soi-même dans celle où l’on compte tant de personnes si remarquables. Ce type de mille-feuilles où l’on épingle une litanie de cas individuels en vue d’en inférer une règle générale est fallacieux par principe, et il se double d’une imposture quand les noms remontent à quelques siècles et concernent des personnes élevées dans la foi, disciplinées dans des écoles confessionnelles, conditionnées par une société qui exigeait des marques d’affiliation religieuse, bref enfoncées dans leur temps comme nous le sommes dans le nôtre, et lourdement incitées à ne surtout pas critiquer trop fort certaines choses. Tous ceux qui ont vécu au xiiie siècle des cathares de Minerve et de Lavaur, au xive siècle de Jeanne Daubenton, au xvie siècle de Giordano Bruno, Etienne Dolet et de la Saint-Barthélemy, au xviie siècle de Lucilio Vanini, Casimir Liszinski et de la chasse aux sorcières, au xixe siècle de Francisco Ferrer, et encore dans les régions des xxe et xxie siècles où tenir des propos semblables à ceux que j’écris dans ces pages met en danger leurs auteurs, ne sont peut-être croyants que de circonstances, voire de façade, contraints d’afficher la foi sans laquelle on ferait de leur vie un enfer[1]. Il est injuste et indigne d’aligner leurs noms pour tresser des guirlandes pseudo-argumentaires. Nous ne sommes pas en mesure de savoir ce que croyaient vraiment une bonne partie de nos prédécesseurs ni ce qu’ils croiraient aujourd’hui à la lumière des connaissances dont ils ne disposaient pas, ou encore ce que nous aurions cru en leur temps ou si nous étions nés dans trois siècles. Il est fallacieux de multiplier les anecdotes pour défendre l’idée que les esprits les plus brillants sont les plus croyants.

Dans leur livre, messieurs Bolloré et Bonnassies dressent sur 70 pages (chapitres 12 à 15) une longue liste de scientifiques de premier plan qui sont ou étaient de fervents croyants. Une telle liste (mélange d’appel à l’autorité et d’argument ad populum) ne permet pas de statuer sur la validité des convictions. Ce sont les arguments que ces personnes ont utilisés pour défendre leurs idées qui nous disent ce que valent ces idées. À cela, la réponse n’est bien sûr pas d’opposer une interminable liste des savants incroyants qui travaillent dans les laboratoires du monde, mais des données scientifiques.

Les scientifiques de profession sont moins croyants que la population générale[2]. C’est particulièrement vrai aux États-Unis où la population est plus pieuse que dans la plupart des démocraties modernes. En 1916, le psychologue américain James H. Leuba montre que parmi les scientifiques de carrière (mathématiciens, biologistes et physiciens/astronomes), seuls 27 % croient en un « Dieu personnel[3] ». Le même auteur évalue cette part à 15 % en 1933[4]. Soixante ans plus tard, le déclin de la croyance chez les scientifiques était confirmé par Larson et Witham qui l’estiment à seulement 7 %[5]. Un sondage publié dans la revue Nature en 1998 montrait que parmi les scientifiques les plus réputés, les membres de la National Academy of Science, 93 % se considéraient non-croyants[6]. Le taux d’athéisme dans ce pays est passé de 8 % l’année de ce sondage en 1998 à 21 % en 2021 selon un sondage Gallup[7]. Nous n’avons donc aucune raison de penser que cette proportion ait pu chuter.

Une étude récente reprend et complète d’anciennes données qui montrent la difficile compatibilité entre science et religion. Les chercheurs américains Jonathon McPhetres et Miron Zuckerman, spécialistes en psychologie et en cognition sociale, montrent que le degré de religiosité est corrélé avec une faible connaissance des sciences et une attitude plutôt hostile envers elles. Ils montrent aussi, sans surprise, que le niveau de religiosité des parents et la place de la religion dans l’éducation des enfants prédit, vingt ans plus tard, l’attitude de ces derniers envers la science[8]. Ceux éduqués religieusement sont plus téléologistes dans leur conceptualisation des animaux et plus essentialistes vis-à-vis des classes sociales et des classes d’animaux. Les croyants sont plus victimes de pareidolies, l’illusion de voir des formes structurées (souvent des visages) là où il n’y en a pas[10], ce qui les rend plus enclins à vivre des expériences paranormales. La croyance dans le surnaturel, notamment d’ordre religieux, est corrélée à une plus forte croyance dans les théories du complot[11], ce qui fait des croyants de meilleurs vecteurs de la diffusion de fake news. Autrement dit, la croyance religieuse a tendance à placer les croyants dans un monde un peu spécial où leurs perceptions de la réalité sont plus biaisées que celles de la moyenne des humains.

Ces résultats ne font que constater l’existence du conflit, qu’on le veuille ou non, entre deux modes de cognition dont chacun peut difficilement être embrassé si l’autre n’est pas, d’une manière ou d’une autre, épistémiquement disqualifié. Pour ma part, je plaide pour la science. »

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Références

[1] Voir Eyschen C. (dir.), Les martyrs de la libre pensée, Éditions de la Libre Pensée, 2018.

[2] Ecklund E. H., Johnson D. R., Scheitle C. P., Matthews K. R. W. et Lewis S. W., « Religion among Scientists in International Context: A New Study of Scientists in Eight Regions », Socius, 2016.

[3] Leuba J. H., The Belief in God and Immortality, Boston, Sherman, 1916.

[4] Leuba J. H., God or Man? A Study of the Value of God to Man, New York, Henry Holt and Company, 1933..

[5] Larson E. et Witham L., « Scientists are still keeping the faith », Nature, vol. 386, 1997, p. 435-436.

[6] Larson E. et Witham L., « Leading scientists still reject God », Nature, vol. 394,1998.

[7] https://news.gallup.com/poll/1690/religion.aspx

[8]McPhetres J. et Zuckerman M., « Religiosity predicts negative attitudes towards science and lower levels of science literacy », PLoS ONE, vol. 13, 2018, e0207125.

[9] Diesendruck G. et Haber L., « God’s categories: The effect of religiosity on children’s teleological and essentialist beliefs about categories », Cognition, vol. 110, 2009, p. 100-114.

[10] Riekki T., Lindeman M., Aleneff M., Halme A. et Nuortimo A., « Paranormal and Religious Believers Are More Prone to Illusory Face Perception than Skeptics and Non-believers », Applied Cognitive Psychology, 2013.

[11] van Prooijen J. W., Douglas K. M. et De Inocencio C., « Connecting the dots: Illusory pattern perception predicts belief in conspiracies and the supernatural », Eur J Soc Psychol, vol. 48, 2018, p. 320-335.

Pour son numéro du 25 aout 2022, le journal Marianne a choisi pour thème de son dossier : « Dieu n’existe pas » avec deux interviews et des extraits de mon livre « DIEU, la contre-enquête ».

La journaliste Margot BRUNET m’avait posé quelques questions pour ce dossier, mais cet entretien n’a pas été retenu dans les 8 petites pages qui lui sont dédiées. J’ai songé qu’il pourrait malgré tout vous intéresser. Je vous recommande bien sûr la lecture du dossier complet

 

 

Interview avec TCD.

La première version de la couverture mentionnait “Les raisons de croire existent, mais elles pourraient vous surprendre”. Quelles sont ces raisons ? 

Il y a d’abord des raisons historiques, sociales, traditionnelles, familiales, nous héritons d’un narratif sur le monde où Dieu joue souvent un rôle. A travers le monde, les croyants croient parce qu’ils sont élevés « pour ça », dans des rites différents, des religions variées, des dogmes contradictoires. Mais par chance le croyant est toujours né dans la bonne version de l’histoire, celle qui est Vraie avec une majuscule. Et puis derrière tout cela, il y a une histoire plus longue qui est celle de notre cerveau depuis des dizaines de millions d’années. Le cerveau des primates humains est conformé d’une manière qui maximise nos chances de survivre et de nous reproduire. Et cela a des conséquences sur nos intuitions, nos présupposés, notre appétit intellectuel. Nous avons tous les mêmes petits raccourcis mentaux très utiles pour traiter les informations de notre environnement de sorte à rester en vie. Il se trouve que ces raccourcis forment des « pentes de l’esprit humain » et au fond des vallées que cela produit se trouvent des concepts intuitifs, très faciles à penser, bien plus difficiles à questionner, quasiment universels, et Dieu en fait partie.

 

Est-ce qu’on voit selon vous émerger un mouvement qui veut prouver scientifiquement l’existence de Dieu, et votre ouvrage est-il une réponse à ce mouvement ? 

L’envie de prouver l’existence de Dieu par la raison date d’avant la science, c’était l’un des leitmotivs de la théologie chez Thomas D’Aquin et d’autres avant lui. Aux Etats-Unis le mouvement de l’Intelligent Design essaie depuis plus de soixante ans de faire entrer la religion dans les cours de science des enfants. On n’assiste à rien de vraiment nouveau, mais il y a actuellement une offensive en France avec le mouvement évangélique qui organise depuis 2019 des séminaires clairement créationnistes nourris de « science biblique », et par exemple le livre « Dieu, la Science les preuves » de MM. Bonnassies et Bolloré qui arbore les couleurs (mais sans l’assumer) d’un concordisme décomplexé attaché à réécrire l’histoire des sciences pour donner l’illusion que le progrès de la connaissance conforte la théologie et que, finalement, la science rapproche de Dieu.

 

La science doit-elle, selon vous, s’attarder sur la question de l’existence de Dieu ? Si oui, pourquoi, et en quoi cela nourrit la science ? Qu’est-ce que l’étude de l’existence de Dieu apporte à la science ? 

Il y a au moins deux dimensions à cette question. La plus simple est de se demander si un chercheur peut enquêter sur une hypothétique entité éternelle et toute puissante, et la réponse est oui dès lors qu’on dispose d’une définition minimale de cette entité et que l‘on peut tester des hypothèses en interrogeant les phénomènes par l’expérimentation des faits faisant intervenir la matière et l’énergie : ce que la science est en mesure de traiter. Le problème est que les croyants ne sont pas d’accord sur la définition de Dieu, sur sa nature, sur ses intentions, ses moyens d’agir et que jusqu’à aujourd’hui Dieu peut expliquer absolument tout et son contraire, ce qui, en science, revient à n’expliquer… rien. Sur cet aspect, rien est donc à peu près tout ce que Dieu peut offrir à la science : les découvertes se font justement parce qu’on ne se contente pas de « c’est Dieu qui l’a fait ».

L’autre dimension, c’est la question de l’origine et de la fonction éventuelle de la croyance en Dieu dans l’histoire humaine. Pourquoi est-ce aussi répandu ? Pourquoi cela joue-t-il si souvent un rôle structurant dans une société ? L’anthropologie, l’histoire, la sociologie, la psychologie et de nombreuses autres sciences humaines apportent des clefs de réponse et il est à mon sens très important que ces questions scientifiques se développent et que les réponses soient partagées dans le grand public.

Je m’efforce de traiter ces deux grands aspects dans mon livre.

J’ai adressé un droit de réponse au journal Libération le soir même de la parution de l’article de Elisa Thévenet « Rationalisme. Zététique : esprit critique, es-tu là ? ». L’ASTEC communiquera de son côté via son Conseil d’Administration puisque sa gestion de l’argent des donateurs est entachée par l’article en question.

J’ai quelques mises au point à faire.

« Les gens nous écoutent parce qu’on est plus compréhensibles. [Les chercheurs] sont lus par 20 personnes parce qu’ils sont chiants ! » Thomas C. Durand Fondateur de la Tronche en biais — Libération 30 aout 2021.

Damned, j’ai dit un truc qu’il ne fallait pas !

Parfois on répond aux interviews par écrit, le plus souvent c’est au téléphone. Je commence à avoir l’habitude de l’exercice, je l’aborde avec décontraction. Je constate aujourd’hui que cette décontraction est excessive, je dois y remédier. Le grand inconvénient du téléphone, c’est que l’on parle un peu trop, en tout cas plus qu’on n’aurait écrit (je plaide coupable) et qu’on ne sait jamais quelle phrase sera retenue pour le papier. Si Elisa Thévenet avait eu la délicatesse de m’envoyer les phrases qu’elle avait choisi de retenir pour cet article, ce qu’ont fait la plupart des journalistes qui m’ont interviewés jusqu’ici, j’aurais apporté une correction à cette phrase-là parce que ce n’est pas ainsi que je souhaite m’exprimer, surtout dans un article où la présentation faite de moi me donne la glaçante impression que l’on parle d’un arriviste. Je veux me garder des procès d’intention, mais tout se passe comme s’il existait un angle narratif à ce papier, indépendant de tout ce que j’aurais pu dire. Cela me rappelle un reportage de Canal+ en 2018 où le journaliste cherchait à nous faire dire que nous étions « en guerre contre » les complotistes. Vled et moi avons gentiment décliné. Plusieurs fois. Quel était le titre du sujet publié ? « Vidéos complotistes : La guerre est déclarée ». Le contenu n’était pas mauvais en soi, hein, mais vous comprenez bien qu’on ne pouvait guère lutter contre un narratif préétabli. L’article d’Elisa Thévenet tend à montrer que les zététiciens sont dogmatiques, opportunistes et incompétents. Soit c’est la vérité, soit c’est du mauvais journalisme. Dans les deux cas il s’agirait d’assumer cet angle.

Revenons d’abord sur la citation que certains agitent sur Twitter en écumant depuis sa parution.

C’est regrettable : beaucoup de scientifiques sont considérés comme un peu « chiants » par le public, jargonneux, pointilleux et parfois incompréhensibles aux néophytes, mais ce n’est franchement pas comme ça que je voudrais le dire, et ma phrase était maladroite. Si la plupart des grands chercheurs et des grandes chercheuses actuelles ne sont reconnues dans la rue que par 50 personnes dans le monde et impressionnent leurs étudiants mais pas leur coiffeur, c’est parce que leur métier est de produire de la connaissance, pas des contenus accessibles, populaires et viraux. Je suis toujours admiratif de ceux qui savent ajouter la popularisation à leur travail de découverte. Je leur donne la parole autant que je peux, avec mon équipe sur La Tronche en Biais depuis 7 ans, justement parce que je pense qu’on mérite des stars de leur niveau plutôt que… vous voyez ce que je veux dire.

Nos plus de 130 invités n’ont rien de chiant ! Ils ont compris tout l’intérêt de l’exercice de vulgariser des sujets complexes au plus grand nombre, et ils le font avec nous. Et soyons honnêtes : notre public reste essentiellement adulte et diplômé, signe qu’on a encore de la marge pour être « moins chiants » nous-mêmes afin de toucher un public plus large. Tout ça est finalement subjectif, et d’une grande banalité. Je rappelle dans « La Science des Balivernes » que les propos délirants des complotistes, des gourous et pseudo-thérapeutes ont justement pour grand avantage d’être « intéressants » alors que les vérités de science, elles, sont un peu plus exigeantes. Voilà pour ce qui se cache vraiment derrière la phrase mise en exergue.

Je le sais, pourtant, qu’il faut faire attention à sa manière de parler devant un·e journaliste, mais jusqu’à présent je n’avais pas eu à regretter une phrase. C’est désormais chose faite. J’espère que cette maladresse n’aura blessé personne et n’induira pas en erreur sur ce que je pense de la profession que j’admire le plus, et que j’ai pratiqué.

***

Mais allons un peu plus loin concernant l’article.

Je dois signaler qu’il contient des faits inexacts et gênants sur mes revenus personnels qui, cette fois, n’ont guère de chance de provenir d’une maladresse dans ma manière de présenter les choses ; les revenus évoqués sont ceux de l’Association pour la Science et la Transmission de l’Esprit Critique, qui m’emploie, pas les miens. C’est d’ailleurs moi qui ai fourni le chiffre.

Et pourtant on peut lire :

« les vidéos de la Tronche en biais rapportent 5 000 euros par mois à son cofondateur, Thomas C. Durand. Unique salarié de son association créée en 2016, il travaille aux côtés d’une vingtaine de bénévoles. »

Relisez bien et demandez-vous à quoi ressemble ce portrait. Collez-moi un cigare dans la bouche et un fouet dans la main et le tableau est complet, et le procédé rappelle le journalisme d’insinuation qui sévit contre les rationalistes depuis un an. La réalité est un peu différente, avec des frais de fonctionnement, des investissements, des projets comme la Nuit Zététique du 11 septembre, des CDD pour des équipiers sur les productions audiovisuelles, ainsi que des formations en préparation pour eux. Après ma carrière de chercheur, j’ai passé quelques années pas loin du seuil de pauvreté au moment de la création de la Tronche en Biais. Si aujourd’hui j’ai un peu plus que le salaire médian en France, cela date de l’été 2021 et reste fragile. C’est d’ailleurs formidable de pouvoir vivre de ce travail grâce à la générosité d’un public motivé. Voilà, vous savez l’essentiel. Pour Libération, cette information était capitale, je suis bien obligé de la rectifier pour eux. J’ignore combien touche madame Thévenet ; le plus petit salaire des employés de la rédaction de Libération est de 2131€ brut.

Nous sommes la proie quotidienne de complotistes qui nous hurlent leurs accusations de corruption sur tous les réseaux sociaux, et voici que Libération vient de leur livrer une fausse information qu’ils ajouteront à l’avenir dans leur arsenal ! Le journal a pourtant conscience du problème puisqu’il a publié le 17 mars dernier la tribune « La lutte contre la désinformation en ligne est en danger » dont je suis signataire. Il faudrait que la rédaction se mette d’accord avec elle-même.


Rappel

Le contexte de cet article, c’est une guerre de l’information où des mouvements conspirationnistes souvent proches de l’extrême droite inondent les réseaux sociaux de narratifs délirants et dangereux, avec pour tête de pont le blog France Soir qui a récemment commis un article anonyme se concluant par un appel au crime (dans lequel je suis nommément cité) qui a suscité une juste indignation, Cf la tribune sortie aujourd’hui dans l’Express. Cela n’empêche pas Libération de parler de « porosité avec l’extrême droite » dans un article où le lecteur est amené à faire le rapprochement entre cette affirmation douteuse dirigée contre un mouvement qui dépasse largement ma personne, et le nom du seul membre de la communauté convoqué pour se justifier (sans avoir conscience de devoir le faire) : le mien.


Sur les considérations idéologiques du mouvement zététique développées dans l’article, je trouve que c’est toujours une bonne chose qu’on s’inquiète des dérives potentielles d’un mouvement. Ces dérives ne sont pas nécessairement liées aux activités des têtes que vous connaissez sur YouTube, (je suis certain que cette nuance échappera à Twitter). L’article parle d’une scission entre des progressistes et des vulgarisateurs plus connus et bourrés « d’angles morts » et vous serez peut-être surpris d’apprendre que 3 des 4 vulgarisatrices citées pour illustrer ce propos se sont fermement désolidarisées sur Twitter, signe que, quand même quelque chose s’est mal passé entre les interviews menées par Elisa Thévenet et la publication.

« Leur credo : la méthode scientifique. Leur église : le scepticisme. »

Elisa Thévenet, de Libération, a décidément tout compris à la zététique.

Tout irait un peu mieux, peut-être, si l’on cessait de croire que la zététique prétend avoir le monopole de l’esprit critique et de la raison. Sur la Tronche en Biais, par exemple, nous sommes des vulgarisateurs militants dont l’activité principale est de réagir aux discours trompeurs qui instrumentalisent la science et abusent de rhétorique pour propager des croyances douteuses, ce serait un comble de finir par le faire nous-mêmes, nous y sommes attentifs. En 2020 nous avons beaucoup travaillé sur la désinformation envahissante autour du covid-19 car nous nous intéressons à la manière dont se forgent et se propagent des croyances antagonistes aux savoirs les mieux établis. Nous n’avons pas forcément grand chose à dire sur « l’organisation sociale du processus scientifique », non parce que ce serait inintéressant mais parce qu’il y aurait un risque important que le thème ne soit pas traité correctement. Regardons les choses en face ; je suis biologiste de formation, cela imprègne ma manière de me poser des questions, de choisir mes interlocuteurs, et mon vocabulaire ; cela ne vous surprend pas, et je ne devrais donc pas avoir à le dire, mais ces temps-ci il faut rappeler des évidences. Il va de soi que l’approche de la TeB n’épuise pas le réel, que nous sommes incapables de tout traiter, de tout analyser et que ceux qui attendant cela de nous, de moi en particulier, me font trop d’honneur et m’attirent trop d’emmerdes.

Vivement que des sociologues, des anthropologues, des historiens, des économistes vulgarisateurs et vulgarisatrices encore plus nombreux nous apportent leurs analyses pour enrichir l’art du doute ! Je souhaite que nous continuions d’en inviter beaucoup sur la TeB, parce qu’à la vérité j’apprends à peu près au rythme des émissions ; j’invite des experts pour apprendre ce qu’ils ont à dire car il se trouve que souvent j’étais ignorant avant de leur parler.

Nous nous tenons loin des dogmatismes, nous sommes ouverts à toutes les expertises scientifiques, et nous rappelons régulièrement que nous ne sommes pas spécialistes des sujets que nous traitons, qu’il faut être prudent avec notre présentation des choses. Comme il se doit.


Laissez-moi revenir sur la vidéo postée dans la nuit du 3 au 4 juillet. Du point de vue des chiffres, c’est une franche réussite, aucune de nos vidéos n’a jamais été à ce point partagée chez les conspis où un mot d’ordre de pouce rouge a circulé. Beaucoup d’entre eux ont appris notre existence et risquent de découvrir le petit monde de la zététique, voire d’y trouver des choses intéressantes.

La vidéo en question

Sur Twitter on s’est beaucoup indigné de mon usage répété du mot con. Je remets le contexte : il s’agit d’un vlog de réaction à chaud après avoir assisté à une manifestation choquante à deux cents mètres de chez moi. Mon état d’esprit n’était pas de me lancer dans une énième  tentative de pédagogie pour expliquer aux gens qu’ils ont mal compris le monde — ceux que cela intéresse trouveront beaucoup de contenus de ce type sur la Tronche en Biais, peut-être plus que sur n’importe quelle autre chaîne YouTube francophone. Abonnez-vous.

Ce vlog était donc un coup de gueule. Si vous ne voulez pas écouter un coup de gueule, c’est bien votre droit. Mais si vous les confondez avec des analyses sourcées et circonstanciées, ça va vous jouer des tours.

Quelques faits : Il n’existe pas de lien robuste entre QI et croyance aux Théories du complot, tel est l’état de la littérature scientifique. Certains papiers montrent une corrélation négative, mais trop faible pour en faire un critère pertinent pour caractériser ces populations. En somme, on peut avoir un QI normal, voire élevé, et croire des histoires bien débiles (au sens propre). Je le sais. Nul ne peut me l’apprendre pour la simple raison que je le dis depuis des années sur cette chaine.

Seulement voilà, pour m’interdire de penser que les complotistes qui applaudissent Wonner-Boutry-Trotta-Foucher-Perrone sont cons, il faudrait affirmer que le con a forcément un QI faible, que la définition de l’intelligence par le QI est suffisante. Et ce serait être bien peu regardant avec ces concepts, et finalement bien ignorant des SHS sur ces questions. Je pense qu’il faudrait avoir un peu plus de respect pour ces disciplines, je vous invite donc à vous méfier de ceux qui vous disent qu’ils détiennent une définition de l’intelligence les autorisant à disqualifier votre usage du mot (ou incidemment du mot « con »).

Par exemple, Henri Broch, qui n’est pas la personne la moins versée en zététique que vous croiserez, estime que l’intelligence des gens qui croient des inepties est questionnable. Nous en avons parlé il y a quelques temps ; de mémoire il disait « il faudrait voir un peu ce qu’on entend par intelligence », et je crois que c’est présent dans son interview de 2016 sur la TeB.

J’utilise le mot « con » dans mes écrits depuis pas mal de temps. J’ai ma propre définition du terme, elle peut vous aider à mieux cerner mon propos, mais vous n’êtes pas obligé de la connaitre pour comprendre l’idée quand, dans une vidéo, je montre l’inanité de l’attitude des conspis qui hurlent à la dictature, à la suppression de la liberté d’expression tout en se pavanant (généralement en bravant les mesures d’hygiène obligatoires) sur une place d’où, à l’occasion, ils ont expulsé l’UNICEF, sans être inquiétés par la police dans un pays où les gilets jaunes par centaines ont été éborgnés, maltraités, brutalisés…

  • S’ils croient à ce qu’ils racontent, leurs actes sont incohérents : ils se comportent comme des cons.
  • S’ils ne croient pas à ce que racontent ceux qu’ils applaudissent (et qui parlent de crime contre l’humanité et du Diable à l’œuvre) alors ils légitiment une parole avariée au lieu de se mobiliser auprès de forces politiques cohérentes: ils se comportent comme des cons.

Ce décalage irréductible entre les idées défendues et les actes posés signale, pour moi, un manque d’intelligence, un manque de questionnement, une absence de traitement des données disponibles, un aveuglement, insérez-ici la description qui vous agrée.

La bienveillance est un principe de la pensée critique, car elle est la partenaire de l’ouverture d’esprit, elle permet la charité épistémique, l’écoute authentique, la prise en compte des subjectivités, des vécus, des cadres de lecture et concoure à une meilleure communication qui permet de faciliter la manifestation de la vérité (ou ce ce qui s’en rapproche). Tout ça, on le sait, on le dit depuis longtemps, et notre ouverture au dialogue nous est d’ailleurs reprochée par certains. Si vous voulez poser la bienveillance comme un absolu, de manière dogmatique, vous avez bien le droit, si ça se trouve vous avez raison, mais vous avez quitté le monde du scepticisme. D’accord ? Voilà pour la remise en contexte.

Faut-il dire aux cons qu’ils sont cons ?

Dans ce vlog, en choisissant d’énoncer ce constat crument là où généralement depuis 6 ans je m’efforce de ne pas provoquer de réactance, j’ai opté pour la stratégie frontale : personne n’aime être traité de con, et je cherche à susciter une réaction. Deux choix principaux s’offrent à eux : rejeter en bloc tout ce que dit celui qui emploie ce mot (ce que feront tous ceux qui de toute façon rejettent en bloc notre travail pédagogique et sourcé depuis un an et demi d’épidémie : keskonsanfou ?) ou bien se dire « merde, alors, j’aimerais bien qu’on me traite mieux. Qu’est-ce que je peux faire ? ».

Dire à des gens dans une situation bien précise qu’ils se comportent comme des cons, leur rappeler qu’ils n’ont aucune envie d’agir conformément à leurs croyances, qu’ils ne désirent pas en assumer les conséquences directes ou indirectes, ce n’est pas les pousser à se radicaliser, c’est leur rappeler qu’ils ne sont pas encore radicalisés, qu’ils ne veulent pas l’être et qu’ils sont bienvenus dans le groupe de ceux qui voudraient ne pas se comporter comme des cons.

La stratégie frontale n’est pas la meilleure. Elle est même parfois totalement à proscrire. Mais ceux qui veulent l’interdire à tout le monde en toutes circonstances devraient prouver qu’elle n’est jamais utile. J’ai de bonnes raisons de penser qu’ils n’y arriveront pas, moi aussi je connais un peu la littérature.

Bref, c’est une stratégie discutable, mais notez bien que les meilleures stratégies n’ont pas un taux de réussite très impressionnant, aussi il est intelligent de diversifier les approches.

  • Mon vlog « coup de gueule » vous a plu, tant mieux.
  • Il vous a déplu, tant pis.
  • Vous trouvez que c’est une bonne occasion pour prendre vos distances avec une partie de la communauté Zététique qui bafoue, selon vous, ses principes : eh bien d‘accord ça nous aide à mieux comprendre le paysage, c’est gentil.
  • Vous pensez que tout ça est un débat stérile et qu’il faudrait prendre au sérieux les dangers de la pensée conspirationniste, et notamment assumer que nous sommes des militants de la pensée critique, et donc que nous nous opposons idéologiquement à des visions du monde ancrées sur le ressenti, la révélation, la vérité intérieure, l’ésotérisme et la réification de concepts censés dicter aux individus ce qu’ils sont… Alors je vous dirai que moi aussi.

J’ajouterai que je vais continuer, avec mes coéquipiers de la TeB et de l’ASTEC à œuvrer en ce sens, avec les maladresses intrinsèques à mon tempérament, et en comptant sur vous pour proposer des améliorations quand vous avez de bonnes idées.

J’ai pour position qu’on peut discuter avec tout le monde, mais pas n’importe comment et dans n’importe quel contexte. Jusqu’à présent une certaine frange m’a reproché de n’être pas assez frontal / excluant, de ne pas dénoncer les méchants qui concentrent leurs attentions. Je suis surpris que cette même frange s’étrangle quand je pose un acte qui ressemble à celui qu’ils réclamaient. Je suis surpris de leur manque de bienveillance dans la manière de s’en offusquer au nom de la bienveillance. Je suis surpris de leur sens des priorités. Je suis surpris par la forme insistante de leur intolérance, par la pureté militante qu’ils réclament alors même que leur militance pour la pensée critique n’a pas produit à ma connaissance beaucoup d’effets dont ils puissent se réclamer pour donner des leçons. Je suis très surpris par tout ce qui se passe. Cela m’arrive souvent. Il faut dire que je suis un peu con, très ignorant, plein d’a priori, et toujours à l’écoute des critiques. A tel point que je vous écris ceci depuis mon lieu de vacances où l’on me fait les gros yeux à cause du temps que je vous consacre.

Si j’ai le temps et l’énergie, j’enregistrerai une vidéo à partir de ce texte. Mais, pour vous dire le fond de ma pensée, je crois et j’espère avoir mieux à faire, on devrait tous avoir mieux à faire que se tirer dans les pattes pour se donner le sentiment d’exister (Tiens, vous voyez, là, ma prose se teinte d’une attribution interne, d’une hypothèse sur les intentions ou ressentis d’autrui. C’est risqué. Mais ça fait partie de la manière dont les humains lisent leur environnement, et il faudrait éviter de se prétendre immunisé ; je ne le suis pas !)

Ce n’est pas sur la TeB ou ce blog que vous avez pu voir, en six ans, des revendications sur la vraie zététique, sur la seule voie acceptable, sur la supériorité de notre approche sur celle des autres. On sait bien que ce qu’on fait est émaillé de bourdes. Ça va d’ailleurs continuer. On a fait notre chemin sans l’aide et les encouragements des rageux, on pourra continuer sans eux. Mais s’ils changent d’attitude, ils sont les bienvenus, ce serait trop con de les considérer indignes de la tâche commune et immense qui nous attend.

Acermendax

Le titre du billet est bien sûr inspiré de la réplique d’Audiard : « Je ne parle pas aux cons, ça les instruit », et vous donc aurez compris que les « cons », chez nous, ne sont pas des ennemis.

J’observe depuis quelques temps l’émergence de critiques adressées aux créateurs de contenus « sceptiques » qui leur reprochent de se prétendre apolitiques ou neutres. La critique vient de personnes qui semblent avoir de réelles compétences, notamment en sciences sociales. Ce sont des militants en premier lieu motivés par leurs idées politiques, notamment anticapitalistes.

Pour rappel : les fachos du net nous considèrent comme des gauchistes invétérés, certains militants gauchistes nous voient comme hyper compatibles avec le fascisme, mais une bonne majorité des gens ne cherchent simplement pas à identifier notre opinion politique quand nous produisons une vidéo sur la chloroquine, les pyramides, les dérives sectaires ou la philo des sciences. Ils évaluent nos contenus selon d’autres critères ; ils ont bien raison.

NB : quand je dis qu’ils ont raison d’évaluer nos contenus selon d’autres critères, c’est parce que je pense qu’ils ont raison d’évaluer nos contenus selon d’autres critères, pas parce qu’ils sont plus nombreux. La coïncidence me semble néanmoins assez heureuse.

La grille de lecture de ces nouveaux sceptiques-envers-les-sceptiques est d’abord politique. C’est leur droit. Vous ne me verrez pas dire qu’ils ont tort de militer, que leurs idées sont forcément mauvaises, qu’ils abordent mal la question. Mais ils ont un problème : ils ne respectent pas la position de ceux qui estiment que la grille de lecture d’un vulgarisateur n’est pas nécessairement politique, ou très marginalement. Le respect que j’ai pour leur démarche, ils ne l’ont pas pour la mienne.

Mon travail sur la TeB, sur mon blog, dans mes livres est d’abord porté par une grille épistémique, je mets en avant la valeur que j’accorde au fait de ne pas croire (et diffuser) des choses fausses, et de désirer obtenir la plus grande fidélité possible entre mes représentations mentales et le monde réel.

Ceux qui assènent tout le temps : « tout est politique » sont autorisés à y voir ma position politique. Ils pourront constater que je ne prétends pas être neutre : je préfère le vrai au faux, je m’oppose à ceux qui confondent fiction et réalité, et j’assume le choix des sujets traités qui est évidemment le reflet -reconnu comme tel- de mes propres intérêts et questionnements. Je ne me sens pas concerné par les critiques lancées contre les « apolitiques ».

Sur la Tronche en Biais, à mon initiative, nous avons parlé de racisme avec Evelyne Heyer, commissaire scientifique de l’exposition « Nous et les autres, du préjugé au racisme » au Musée de l’Homme. Nous avons parlé de la chasse avec Pierre Rigaux, militant de l’Association pour la Protection des Animaux Sauvages, nous avons parlé des déterminants du terrorisme avec le chercheur en psychologie sociale Jais Adam-Troian, et ces choix, qui nous sont reprochés sur un registre politique, nous les assumons sur le même registre. Toutefois, tous nos contenus n’ont pas cette dimension, notre travail principal est ailleurs, et certains semblent ne pas nous en accorder le droit. Nous nous passerons de leur bénédiction.

De l’autre côté, ceux qui veulent se dire « apolitiques » (quel que soit le sens que l’on puisse donner à ce terme que je n’emploie jamais) ne me dérangent pas, en tant que tels, dans mon travail de promotion des outils de la pensée critique, des vertus épistémiques, du doute méthodique. Si ça se trouve ils sont de droite. Ou d’extrême gauche et antisystèmes. Ça colore leur vocabulaire, mais ça ne change rien à ma manière de leur expliquer ce qu’est un biais cognitif, une méta-analyse ou un raisonnement circulaire. S’ils veulent débattre de questions politiques, ils trouveront certainement des militants pour venir s’opposer à leurs idées. Mais il y a une quantité de sujet que l’on peut aborder, traiter, dont on peut même débattre sans adopter la grille de lecture du « tout est politique », et il serait souhaitable d’en tenir compte et de respecter la manière dont ces questions peuvent être traitées de manière apaisée.

Il y a dans la posture critique des sceptiques-envers-les-sceptiques une injonction dérangeante et agonistique qui exige que les individus acceptent d’être rattachés à une étiquette politique pour avoir le droit de s’exprimer. J’estime qu’un zététicien doit au contraire mettre de côté ces étiquettes pour s’intéresser à d’autres dimensions du discours, moins polarisantes, plus facilement objectives. Cela ne revient pas à nier la complexité des dimensions que ces étiquettes sont censées refléter, mais ça permet de rester focalisé sur les sujets en question.


Mon scepticisme n’est pas apolitique puisqu’il est public, militant, habité par le désir de contribuer à améliorer la société. Ma position n’est pas neutre puisque je défends l’idée que la méthode scientifique vaut mieux que les autres pour évaluer si une hypothèse est juste, ou fausse, ou indécidable. Je ne prétends pas être objectif puisque tout mon travail consiste précisément à expliquer pourquoi nos subjectivités s’invitent dans tous nos jugements et nous obligent à adopter une méthode quand nous voulons en limiter les biais. Je me permets donc d’être étonné quand certains semblent ignorer tout cela et fondent leur critique sur l’idée personnelle (subjective !) qu’ils se font de la démarche qui est la mienne et celles de pas mal de collègues. Et j’écris ce billet pour que tout cela soit dit, dans l’espoir de n’avoir pas à m’en justifier à l’avenir.


Mon parcours, mes compétences, ma sensibilités sont ce qu’ils sont, même modulés par l’équipe qui m’entoure dans ce travail. Peut-être suis-je coupable de ne pas comprendre les sceptiques-envers-les-sceptiques. En fait, je dois l’admettre, quelque chose m’échappe. Ces personnes qui ont de réelles compétences, dont le discours consiste à se dire plus savants que nous, plus experts de l’esprit critique, connaissent forcément le danger de la réactance, les phénomènes de tribalisme, et ils devraient mettre en conformité leurs buts et leurs moyens : ils devraient nous donner envie d’être comme eux. Et face à un échec manifeste, ils devraient changer de méthode. Mais, je le répète, peut-être suis-je incapable de saisir leur véritable objectif.

Ceux qui veulent apporter les lumières d’un angle de vue politique sur les dynamiques d’adhésion à des récits pseudo-scientifiques (ou scientifiques, d’ailleurs) sont les bienvenus, on a besoin d’eux, ils sont utiles. Mais ceux qui nous toisent du haut de leurs convictions en estimant qu’on ne fait rien de bon quand on a une approche différente de la leur ne peuvent pas espérer sérieusement qu’on leur accorde du temps et de l’énergie. Désormais, sur les réseaux sociaux, les notifications sont tellement envahissantes que le bouton bloquer est devenu un outil nécessaire. Je ne rechigne plus à en faire usage.

Acermendax

Un peu de contexte…

Avec quelques réactions au présent billet.