Les Frontières de la mort [TenL#141]
Emission enregistrée le 29 octobre 2024
Invité : Pr Stéphane CHARPIER
EDITORIAL
La médecine ne nous rendra pas immortels, mais de temps en temps elle fait des avancées majeures et ramène parmi les vivants des personnes naguère condamnées. Untel qui ne respire plus peut être réanimer – la mort cardiaque n’est plus vraiment la mort, car pendant quelques minutes on peut intervenir – lle coma, le coma profond, le coma dépassé… les terminologies changent, les soins progressent, et on en voit se réveiller, tel des Lazare qui semblaient bel et bien partis pour de bon.
La médecine en est aujourd’hui à la mort cérébrale, à la question des dommages irrémédiables sur les structures du cerveau qui produisent notre expérience consciente, et il arrive de déclarer mort un corps dont tout fonctionne en dehors du cerveau. Une femme enceinte qui tomberait dans cet état pourrait même porter à terme son enfant, et lui donner la vie, tout en étant, quoi… morte ? L’immense majorité des humains passera un jour l’arme à gauche d’une manière qui répondra clairement aux critères de la science ; d’un étant clairement vivant, ils passeront à un état de mort indubitable, et aucun ne se réveillera dans son cercueil par erreur, terreur ultime de la taphophobie qui frappe celles et ceux craignant d’être enterrés vivants.
Mais il restera quelques cas exceptionnels qui mettent à l’épreuve nos définitions, notre compréhension de ce que signifie être un humain en vie, et aussi nos lois, nos règlementations, nos textes éthiques, notre manière d’attribuer des responsabilités à celles et ceux qui veillent sur les malades et dont le rôle n’est pas de devenir les juges des morts.
Peut-être êtes-vous comme moi : je n’ai pas vraiment envie de penser à la mort, aux décisions ultimes, à l’encadrement règlementaire qui protège les droits du mourant et de ceux qui l’accompagnent. La vie est un moment intéressant qui réclame toute mon attention. Et pourtant nous devons beaucoup à ceux qui ont regardé les morts de près, les ont disséqués, examinés, manipulés… Il a fallu des Thomas Willis, des Jan Swammerdam, des Luigi Galvani, des Giovani Aldini, des Dominique Larrey, des Humbolt, Richerand, Nysten, Dupuytren, des François-Xavier Bichat auxquels le livre de Stéphane CHARPIER rend hommage en nous rappelant tout le chemin parcouru depuis une ignorance quasi-totale jusqu’aux services modernes de réanimation, aux laboratoires de neurosciences et aux travaux qui aujourd’hui traquent les ultimes signes de vie dans la symphonie cérébrale : l’onde de la mort dont on a déterminé qu’elle était le point final de l’existence consciente… Jusqu’à ce que le bon professeur Charpier et son équipe ne détectent une onde de la résurrection… « La science de la résurrection » est le titre de son livre. À croire que la mort cherche à s’échapper des doigts de la science.
À tout le moins on peut constater les progrès fantastiques des connaissances depuis le temps où Mary Shelley inventait la science-fiction avec son Frankenstein et des questionnement à la pointe de la science de son temps.
Mon invité ce soir est Stéphane CHARPIER, professeur de neurosciences à l’Université de la Sorbonne, directeur de l’équipe de recherche Excitabilité cellulaire et dynamiques des réseaux neuronaux à l’Institut du cerveau et de la Moelle épinière (ICM) de l’Hôpital de la Pitié-Salpêtrière.
Lien vers le livre du Pr Charpier.
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