La diététique c’est du sérieux ? [TenL138]
Emission enregistrée le 19 juin 2024
Invitées : Anne-Hélène BOUCHOUX, Sarah LAUDOUAR, Willy MANGIN.
Editorial
Panique dans nos assiettes. Désormais la mort rode sur la nappe cirée ; nous mangeons mal, nous creusons notre tombe avec les dents ; c’est décidé la bouffe aura notre peau.
Tout —absolument tout— est mauvais pour la santé si consommé dans de mauvaises proportions. Le kiwi, c’est très bon le kiwi, c’est plein de vitamines, mais si vous n’avalez que ça pendant deux semaines, ça ne va pas bien se passer. Et à la longue vous allez mourir. D’ailleurs, c’est un résultat robuste bien que décevant : sachez qu’à ce jour 100% des gens qui mangent des trucs finissent par mourir.
Sans sucre, sans gluten, sans féculents, sans céréales, sans viande rouge : les humains meurent quand même.
Les journaux fainéants nous sortent six fois par jour des billets disant que tel aliment donne le cancer ou que tel autre protège contre le cancer, mais ça ne veut rien dire à part « je n’y connais rien mais je dois vendre du papier pour nourrir ma famille, la nourriture c’est important, s’il te plait, achète mon journal ou clic sur la pub. Mes enfants te remercient. »
Nous pataugeons dans un brouhaha d’inquiétudes horrifiées où il faut susciter le plus d’angoisse pour essayer de refourguer sa solution maison. Et au cœur de cela se niche un constat facile : tout le monde a son mot à dire sur l’alimentation, tout le monde peut aisément se sentir un peu expert du sujet ; on s’autorise à dire ce qui nous passe par la bouche, et on imagine qu’il suffit d’avoir une bonne tête sympathique ou un peu de style dans la plume pour avoir le droit de déverser des conseils.
Le problème, c’est qu’on méprise la diététique : cette espèce de sous-science des régimes amaigrissants, à peine différentiable de la naturopathie gnagnan qui nous fait des leçons de morale sur le fait qu’on mange mal et que 5 fruits et légume par jour / et que des fibres / et que, attention au gras, au sucré, au salé / nananère…
Le problème c’est que la Junk Food est partout, et qu’on le sait très bien. En réaction à l’invasion industrielle des aliments ultratransformés qui s’invitent dans mes placards autant que dans les vôtres, s’installe une sorte de nouvelle religion du bien manger, une tendance à l’orthorexie qui érige en modèle des influenceurs télégéniques dénués de compétence, de cohérence et d’éthique.
Quand tout le monde se mêle de nous faire la morale sur ce qu’on ne doit pas manger, sur ce qu’on ne doit pas faire manger à ses enfants, sur la bonne silhouette qu’on doit arborer, sur les bonnes, les mauvaises marques, sur l’écoresponsabilité, le végétarisme, le gaspillage, le fait maison… Qui pourrait avoir envie d’accorder du crédit à un diététicien formé à l’université, diplômé et dont l’activité est régie par les règles de professionnels de santé ? Qui a vraiment envie de prendre la diététique au sérieux ? Ce biais, je le souligne parce que je crois le retrouver en moi-même ; j’ai déjà ici critiqué les élucubrations de la naturopathie mais en plus de 150 émissions en live on n’avait jamais donné la parle à un diététiciens.
Ce soir nous en avons 3.
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