D’où vient l’acte terroriste ?
Le Bénéfice du Doute #14
Enregistré le 2 décembre 2020
Invité. Jais Adam-Troian. Chercheur en psychologie sociale.
Editorial
C’est quoi un terroriste ? Un type tire à la carabine sur les gens dans la rue : c’est un forcené, un déséquilibré pour tout dire un fou. Tels sont les mots des médias.
Mais s’il a dit Allahu akbar à un moment ou un autre aussitôt l’acte est terroriste avant même que Daesh, la foirefouille de l’islamisme meurtrier, n’ait à revendiquer.
Une partie de ce qui fait l’acte terroriste est donc dans notre manière de le percevoir, de le cataloguer. Les faits ne changent pas, bien sûr, et pourtant nos réactions seront différentes. Ne faisons pas semblant de croire que tout ça est facile à comprendre. n’imaginons pas que seule la religion explique les tueries, que seule la géopolitique donne les clef de la mécanique à l’oeuvre, que tout n’est qu’affaire de psychologie individuelle.
Devant cette complexité, nous ne sommes pas démunis toutefois, et il faut prêter oreille aux modèles explicatifs, car ils peuvent nous indiquer les décisions les plus à même d’avoir un impact, de sauver des vies et de repêcher des candidats à la radicalisation avant qu’il soit trop tard. Il faut se défaire, avant toute chose, de l’illusion qu’il y aurait d’un coté des gentils citoyen innocents, et de l’autre de méchants individus destinés à commettre des crimes. Vous le savez si vous aimez la zététique, le contexte est un mot clef. Le contexte explique toujours plus de choses qu’on ne le croit d’abord, car dans le contexte se cachent les déterminants invisibles, les conditionnements subtils, les influences, les injonctions, toute la mécanique qui, en coulisse, prépare les conditions du passage à l’acte.
Si l’on veut prévenir de futurs actes, il faut prendre en compte le contexte et il faut agir dessus. Nous n’aurons pas de brigade des pre-crime capable d’établir qui dans le futur sera un méchant afin de l’arrêter et de l’extraire du monde pour protéger les autres. Non seulement c’est impossible, mais cette perspective serait carrément injuste. L’auteur des méfaits est en réalité aussi, en partie au moins, une victime de son parcours, une victime d’enjeux auxquels il croit devoir soumettre tout le reste, y compris la vie d’autrui et souvent la sienne.
Il faudrait commencer pas comprendre ce qui motive cet acte, ce qui le rend non seulement licite dans l’esprit de celui qui agit, mais nécessaire et donc inévitable. Si nous comprenons l’inévitable assez tôt et si nous agissons sur les ficelles qui le déterminent, on pourrait bien changer les choses. Mais pour changer les choses… il faut changer des choses. Et ça commence par se débarrasser des idées reçues et manichéennes sur ce qui provoque l’acte terroriste.
C’est ce à quoi nous allons nous employer avec notre invité Jais Adam-Troian, chercheur en psychologie sociale qui travaille beaucoup sur le sujet des comportements violents.
Quelques références scientifiques sur le sujet
- « “Terrorist” or “Mentally Ill”: Motivated Biases Rooted in Partisanship Shape Attributions About Violent Actors » (Noor et al. 2018)
- « A public health approach to understanding and preventing violent radicalization » (Bhui et al. 2012)
- « Terrorism, radicalization and de-radicalization » (Doosje et al 2016)
- « Interventions to change well‐anchored attitudes in the context of intergroup conflict » (Bar-Tal et Hameiri 2020)
- « Deradicalizing Detained Terrorists » (Webber et al 2017)
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