Enregistré à l’amphithéâtre Déléage le 12 décembre 2022.
Invité : Thomas Andrillon, chercheur à l’Inserm
Editorial
C’est bizarre cette histoire de sommeil. Il faudrait que tous les êtres humains passent entre six et neuf heures par jour allongés, silencieux, inertes, comme inconscients. Un tiers de notre vie se passe sans que nous soyons là, notre corps à la merci de son environnement. C’est obligatoire : si l’on vous prive de sommeil, vous mourez. Et c’est un peu absurde à première vue, parce cette omniprésence du sommeil, cet état de conscience diminuée, éteinte, absente, on la retrouve partout dans le monde animal. Il existe une forme de sommeil chez tous les animaux, de la marmotte à la mouche en passant par le dauphin qui est capable de faire dormir la moitié de son cerveau, puis l’autre moitié, parce que sinon il se noierait…
Certains animaux dorment par toutes petites périodes, mais ils dorment, ils se retrouvent dans un état particulier qui correspond au sommeil. Je suis comme vous, je trouve ça étonnant, je l’ai appris en préparant l’émission.
Autrement dit, le sommeil est universel. Et on devrait s’en étonner.
Le fait que nous ayons un besoin vital d’interrompre le fil de notre conscience, de notre rapport au monde ne va pas de soi. On pourrait imaginer le grand avantage que représenterait la capacité à être toujours en alerte, toujours capable de repérer une proie ou de détecter un danger ; un avantage qui devrait, en quelques dizaines de générations, favoriser grandement les lignées qui ne dorment pas, par rapport à celles qui sont obligées de le faire. Pour rendre compte des faits observés, il semble logique que le sommeil ait une fonction, qu’il représente en lui même un avantage plus grand que l’inconvénient d’interrompre sa vigilance sur le monde autour de nous.
Pourquoi les animaux, et notamment les humains dorment-ils ? En voilà une bonne question, et j’espère que nous aurons des pistes ce soir.
Mais au delà de cette question un brin philosophique qui interroge l’origine du sommeil et des rêves, nous nous attarderons sur les questions plus concrètes des troubles du sommeil. Des gens qui dorment mal, pas assez ou bien en restant fatigués quand même, nous en connaissons tous, cela affecte leur qualité de vie. Il sera intéressant de regarder quels progrès ont été faits dernièrement sur ce front.
Et puis enfin, nous discuterons des rêves, parce qu’il s’il y a quelque chose de mystérieux dans le sommeil c’est quand même bien cette production de l’esprit, ces images, ces scènes parfois très vivides, très marquantes, que notre cerveau produit sans qu’on lui demande et sans stimulation, un état qui a très longtemps inspiré beaucoup de croyance et qui continue à exciter l’imagination.
On ne va pas vous laisser comme ça, avec toutes ces questions brûlantes, nous allons avoir avec nous un chercheur du Paris Brain Institute, de l’Inserm, un biologiste spécialisé dans l’étude du sommeil qui a écrit sur les ondes cérébrales, l’imagerie, les marqueurs neuronaux, la mémoire acoustiques, la vigilance durant le sommeil et cetera.
Nous accueillons Thomas Andrillon.
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